Les protéines dans la nutrition du cheval de sport - Pratique Vétérinaire Equine n° 225 du 01/04/2025
Pratique Vétérinaire Equine n° 225 du 01/04/2025

Cahier pratique

Fiche nutrition

Auteur(s) : Thibault FRIPPIAT

Fonctions : (DipECVSMR) Sporthorse Medical Diagnostic Centre
Heesch (Pays-Bas)

Les besoins en protéines du cheval de sport doivent être évalués avec précision, en tenant compte de l’activité physique, de l’âge et des états physiologiques particuliers. Une ration équilibrée en protéines est indispensable pour optimiser sa santé et ses performances.

Les protéines, constituées d’acides aminés reliés par des liaisons peptidiques, sont des macro­nutriments essentiels en nutrition. Elles remplissent de nombreuses fonctions biologiques indispensables, notamment en tant que constituants majeurs des muscles, des enzymes, des hormones et du système immunitaire [2]. Elles interviennent également dans la réparation des tissus et le transport des nutriments à travers les membranes cellulaires et dans le sang. Les chevaux de sport à l’entraînement nécessitent généralement un apport protéique légèrement supérieur à celui requis pour l’entretien. Cette augmentation compense les besoins liés au développement des muscles, à la réparation des tissus musculaires après l’exercice et à la perte d’azote dans la sueur (environ 20 g/kg de sueur) [3]. Cependant, cette augmentation reste modérée, car les besoins énergétiques augmentent généralement plus rapidement que les besoins protéiques lors de l’effort. Ainsi, l’adaptation de la ration pour couvrir les besoins énergétiques permet le plus souvent ­d’assurer un apport en protéines suffisant.

MÉTABOLISME DES PROTÉINES

Chez le cheval, la digestion et l’absorption des protéines se font principalement sous la forme d’acides aminés dans l’intestin grêle [4]. Cependant, une grande partie des protéines contenues dans le fourrage est liée aux composants structurels des plantes et nécessite une fermentation microbienne dans le cæcum et le côlon pour être libérée. Par conséquent, une partie de ces protéines n’est plus absorbée. La qualité des protéines contenues dans l’alimentation des chevaux est donc cruciale. Les protéines digérées dans l’intestin grêle sont hydrolysées en acides aminés, lesquels sont absorbés et utilisés pour la synthèse des protéines dans les tissus ou comme substrat énergétique en cas de carence en glucides et en lipides. Ce processus implique l’élimination du composant azoté, laissant un squelette carboné qui entre dans le cycle de l’acide tricarboxylique et est converti en glucose, en acides gras ou directement en adénosine triphosphate (ATP). Cependant, l’utilisation des protéines comme source d’énergie est peu efficace, car le processus de décomposition des acides aminés et d’élimination de l’azote est énergivore. En outre, les chevaux ne peuvent pas stocker les acides aminés en excès. Lorsque l’apport en acides aminés dépasse les besoins, ou que la ration est déficiente en acides aminés limitants, les acides aminés excédentaires sont catabolisés, puis excrétés.

BESOINS EN PROTÉINES DES CHEVAUX DE SPORT ADULTES

Dans l’alimentation équine, la teneur en protéines est le plus souvent exprimée en protéines brutes. En général, les protéines digestibles représentent entre 40 et 80 % des protéines brutes. Les besoins en protéines des chevaux varient selon leur niveau d’activité (tableau 1). Le National Research­Council estime qu’un cheval à l’entretien nécessite environ 1,26 g de protéines brutes par kilo de poids vif et par jour, tandis qu’un cheval au travail modéré peut nécessiter jusqu’à 1,79 g de protéines brutes par kilo de poids vif et par jour [3]. Les chevaux en croissance ont des besoins plus élevés en protéines (généralement 14 à 16 % de la ration totale) que les chevaux adultes à l’entretien ou au travail léger (8 à 10 %). Les chevaux âgés (plus de 20 ans) peuvent nécessiter des apports équivalents à ceux des jeunes chevaux en croissance pour maintenir leur condition corporelle. Cependant, il est conseillé d’évaluer les fonctions hépatique et rénale avant d’augmenter leur apport protéique. L’efficacité de l’utilisation des pro­téines dépend de leur digestibilité dans l’intestin grêle et de leur profil en acides aminés essentiels. Les légumineuses comme la luzerne ou le tourteau de soja présentent un équilibre en acides aminés souvent meilleur que celui des céréales (en particulier le maïs) ou des foins de graminées (tableau 2). Si les sources alimentaires ne couvrent pas les besoins, des compléments alimentaires peuvent être nécessaires [1]. La lysine et la thréonine sont des acides aminés limitants, notamment dans les rations à base de foin de graminées et de céréales.

CONSÉQUENCES DES DÉSÉQUILIBRES PROTÉIQUES

Une carence en protéines est rare, mais elle survient généralement chez les chevaux qui consomment des herbes mûres ou des protéines peu digestibles ou endommagées par la chaleur. Une carence protéique peut se manifester par une perte de masse musculaire, une baisse de la performance, un pelage terne et une réduction de la réponse immunitaire. Si un cheval de sport adulte est nourri entre autres avec du foin de luzerne ou de trèfle, il n’a généralement pas besoin de complément en protéines. Si l’apport en protéines d’un cheval de sport dépasse ses besoins, l’excès peut être utilisé comme source d’énergie. Les acides aminés issus de cet excès sont dégradés par le foie, et l’azote des protéines est excrété sous la forme d’ammoniac. Cependant, un excès de protéines dans la ration doit être évité pour plusieurs raisons. Premièrement, les besoins en eau sont majorés avec un apport accru en protéines. Deuxièmement, les niveaux d’urée dans le sang augmentent, entraînant une excrétion plus importante d’urée dans l’intestin, ce qui peut accroître le risque de troubles intestinaux comme l’entérotoxémie. Troisièmement, une hausse de l’ammoniac sanguin peut être à l’origine de troubles divers, notamment une irritabilité nerveuse et des perturbations du métabolisme des glucides. Une excrétion accrue dans les urines peut également provoquer des troubles respiratoires en raison de l’accumulation d’ammoniac dans les écuries mal ventilées [5].

Références

  • 1. Frippiat T. Les compléments alimentaires dédiés à la croissance musculaire. Prat. Vét. Équine. 2020;52 (208):60-62.
  • 2. Harris P. Energy sources and requirements of the exercising horse. Annu. Rev. Nutr. 1997;17:185-210.
  • 3. National Research Council. Nutrient Requirements of Horses, 6th revised ed. Washington, DC. National Academies Press. 2007:360p.
  • 4. Reitnour CM, Treece JM. Relationship of nitrogen source to certain blood components and nitrogen balance in the equine. J. Anim. Sci. 1971;32 (3):487-490.
  • 5. Weir J, Li H, Warren LK et coll. Characterizing ammonia emissions from horses fed different crude protein concentrations. J. Anim. Sci. 2017;95 (8):3598-3608.

Conflit d’intérêts

Aucun

Cette rubrique est réalisée en partenariat avec la commission Alimentation de l’Association vétérinaire équine française.