Tout savoir sur la rédaction d’une ordonnance - Pratique Vétérinaire Equine n° 0214 du 30/06/2022
Pratique Vétérinaire Equine n° 0214 du 30/06/2022

FICHE JURIDIQUE

CAHIER PRATIQUE

Fiche juridique

Auteur(s) : Christophe HUGNET 

Fonctions :
*Clinique vétérinaire des Lavandes 
**26160 La Bégude-de-Mazenc

Cet acte fondamental a récemment fait l’objet de modifications. Une fois le statut de l’équidé connu du vétérinaire, le choix des substances utilisables est défini et l’ordonnance rédigée en toute sécurité.

La rédaction d’une ordonnance vétérinaire est d’une complexité très importante, car elle peut engager la responsabilité du prescripteur, tant sur le plan pénal que civil ou déontologique. Il convient donc de s’imprégner de cette réglementation multiple qui a pour premier objectif de protéger la santé publique, mais vise aussi d’autres enjeux (sportifs et financiers) concernant les chevaux.

Exclusion des chevaux de la consommation

Avant toute prescription et administration médicamenteuse, le vétérinaire doit impérativement s’enquérir du statut de l’équidé (exclusion ou non de la consommation humaine) par la consultation du carnet d’identification, car la base Sire peut ne pas être actualisée. Depuis juillet 2021, l’exclusion définitive de la chaîne alimentaire d’un équidé sur la seule demande du propriétaire n’est plus possible. Elle n’est autorisée que pour un motif administratif ou pour une exclusion vétérinaire due à l’administration d’une substance le rendant impropre à la consommation humaine [8]. Le prescripteur doit donc obtenir l’accord du propriétaire, via éventuellement le détenteur délégataire, avant d’utiliser une substance rendant le cheval définitivement impropre à la consommation. Il remplira alors immédiatement le carnet d’identification en ce sens et enregistrera cette mention dans la base Sire. Les substances concernées par cette démarche sont celles interdites au titre du règlement LMR(1) (limites maximales de résidus), parmi lesquelles figurent notamment le métronidazole et le chloramphénicol, et les substances sans LMR définies comme la phénylbutazone. Pour les chevaux non exclus, le vétérinaire doit alors prescrire soit une substance avec des LMR autorisées(2), soit une substance essentielle au traitement des équidés(3) [6].

Substances essentielles

Lors de la prescription d’un médicament contenant des substances essentielles à des chevaux non exclus de la filière bouchère, en plus de la mention du délai d’attente forfaitaire de 6 mois pour la viande et les abats à faire figurer sur l’ordonnance, il est impératif de mentionner cette prescription dans le carnet d’identification et dans la base Sire hébergée sur le site web de l’Institut français du cheval et de l’équitation. Le texte réglementaire établit que « la première administration des médicaments contenant des substances essentielles pour le traitement des équidés non exclus de la consommation humaine [...] ne peut être réalisée que par le vétérinaire prescripteur, qui consigne ce traitement dans le document d’identification obligatoire » [9]. Les chevaux définitivement exclus ne seraient donc pas concernés par cette disposition de première administration par le vétérinaire prescripteur.

En pratique

La rédaction d’une ordonnance est obligatoire pour la prescription de la majorité des médicaments vétérinaires, et pour ceux administrés par le praticien. « Tout certificat ou autre document analogue est authentifié par la signature et le timbre personnel du vétérinaire qui le délivre ou par sa signature électronique sécurisée. Le timbre comporte les nom et prénom du vétérinaire, l’adresse du domicile professionnel d’exercice et le numéro national d’inscription à l’Ordre » [3, 5]. Avec l’entrée en vigueur le 28 janvier 2022 du règlement (UE) 2019/6 concernant le médicament vétérinaire, de nouvelles mentions obligatoires ont été ajoutées : nom des substances actives, mises en garde concernant la bonne utilisation des médicaments et un usage prudent des antimicrobiens, mention d’une prescription dans le cadre de la cascade, mention d’une prescription d’antimicrobiens [7]. Une copie stricte de l’ordonnance délivrée (de type scanner) est à conserver pendant 5 ans lors de la délivrance des médicaments prescrits.

Quelques cas particuliers

Les médicaments à prescription restreinte doivent être commandés directement auprès du laboratoire distributeur [1]. Leur administration ne peut être réalisée que par le vétérinaire prescripteur, durant toute la durée du traitement : l’ordonnance ne peut donc pas faire mention d’une délivrance. Parmi les médicaments à prescription restreinte figurent des substances sans LMR (ropivacaïne, salbutamol), interdites (métronidazole), essentielles (dobutamine par exemple) et une substance avec LMR (pénicilline G sodique). Ces différentes situations seront à prendre en compte selon le statut (exclu ou non) de l’équidé concerné. De plus, en France, plusieurs substances ne peuvent pas être délivrées au public(4), telles que le butorphanol, la kétamine et la détomidine injectable. L’ordonnance doit aussi en tenir compte. Concernant les stupéfiants, le support de l’ordonnance doit être sécurisé [2].

L’ordonnance est également le support de toute information pertinente à transmettre au détenteur de l’animal traité afin non seulement de valoriser l’acte de prescription (y compris pour les substances pour lesquelles l’ordonnance n’est pas une obligation réglementaire), mais également pour faciliter l’observance et constituer un moyen de justification en cas de litige. Il est ainsi recommandé de mentionner les précautions concernant les substances visées par les mesures de lutte contre le dopage.

L’ordonnance : que doit-elle contenir ?

- L’identification de l’animal ou des groupes d’animaux à traiter.

- Le nom complet et les coordonnées du propriétaire ou du détenteur de l’animal.

- La date de délivrance.

- Le nom et les coordonnées du vétérinaire, y compris son numéro professionnel.

- La signature et le cachet du vétérinaire, ou toute forme électronique équivalente d’identification du vétérinaire.

- Le nom du médicament prescrit, y compris ses substances actives.

- La forme pharmaceutique et le dosage.

- La quantité prescrite, ou le nombre d’emballages, y compris leur taille.

- Le schéma posologique.

- La notion de renouvellement n’existe plus. Seule la quantité prescrite et la durée du traitement conditionnent la possibilité d’une délivrance fractionnée.

- Pour les chevaux non exclus de la consommation humaine, le temps d’attente, même s’il est nul.

- Toutes les mises en garde nécessaires pour assurer la bonne utilisation des médicaments, y compris celles relatives à l’usage prudent des antimicrobiens, le cas échéant.

- La déclaration de prescription d’un antimicrobien, ou de toute substance dans le cadre de la cascade, le cas échéant.

Dopage

Dans son ordonnance, le vétérinaire peut mentionner un “délai dopage” qui cependant ne constitue pas une garantie ni une protection du prescripteur et du détenteur concernant les temps de détection des substances prescrites. La mention de ces délais informatifs devrait être adjointe d’une précision concernant la nécessité d’une analyse de dépistage auprès du laboratoire de la Fédération nationale des courses hippiques (analyse de courtoisie). De même, il peut être judicieux de préciser sur l’ordonnance que le détenteur doit se conformer aux codes régissant la ou les disciplines sportives concernant l’équidé traité. Ainsi, selon le Code des courses au galop, il est interdit de pratiquer une infiltration de glucocorticoïdes au cours des 14 jours qui précèdent une course, voire 8 jours pour des substances biologiques par exemple [4].

Références

1. Arrêté du 8 août 2012 modifiant l’arrêté du 29 octobre 2009 relatif aux médicaments à usage humain classés dans l’une des catégories de prescription restreinte.

2. Code de la santé publique, article R.5132-5.

3. Code de la santé publique, article R.5141-111.

4. Code des courses au galop, annexe 15.

5. Code rural et de la pêche maritime. Code de déontologie vétérinaire, article R.242-38.

6. Règlement (UE) n° 122/2013 de la Commission du 12 février 2013.

7. Règlement (UE) 2019/6 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 relatif aux médicaments vétérinaires, article 105.

8. Règlement d’exécution (UE) 2021/963 de la Commission du 10 juin 2021.

9. Ordonnance n° 2022-414 du 23 mars 2022, article 5.

  • Cette rubrique est réalisée en partenariat avec la commission Juridique et RCP de l'Association vétérinaire équine française.
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