Les tiques des équidés : situation actuelle en France métropolitaine et méthodes de lutte - Pratique Vétérinaire Equine n° 0214 du 30/06/2022
Pratique Vétérinaire Equine n° 0214 du 30/06/2022

Article original - Parasitologie

CAHIER SCIENTIFIQUE

Article original

Auteur(s) : Laurence MALANDRIN, *, Lucie OLLIVIER, **, Margaux HACHE, ***, Roxanne BAROSI, ****, Suzanne BASTIAN, *****, Albert AGOULON******

Fonctions :
*Bioepar, Inrae, Oniris
**101, route de Gachet
***44300 Nantes
****Conflit d’intérêt
*****Aucun

L'abondance des tiques dans certaines zones géographiques est parfois inquiétante. Les mesures de lutte contre ces parasites, potentiels vecteurs de la piroplasmose et d’autres maladies, s’inscrivent dans une approche intégrée.

Le pré constitue l’environnement naturel des équidés et nombre d’entre eux y passent de longues heures, été comme hiver. Néanmoins, dans ces pâtures souvent délaissées par les agriculteurs car difficiles à entretenir ou de qualité médiocre pour des cultures, aux accès peu praticables, en zones inondables ou périurbaines, dans des régions semi-montagneuses, au bord de cours d’eau ou de forêts, les tiques ont trouvé des refuges et prolifèrent localement. Elles représentent pour certains propriétaires d’équidés une préoccupation quasi quotidienne avec peu de répit, en raison de leur abondance, mais surtout parce que ces arthropodes hématophages sont les vecteurs de diverses maladies d’origine parasitaire, bactérienne ou virale. Pour les éleveurs et les marchands de chevaux,prévenir ces affections constitue un enjeu de taille, la piroplasmose impliquant notamment des contraintes à l’exportation [8, 12].

Cet article dresse un tableau de la situation actuelle des tiques présentes chez les équidés en France métropolitaine. Il s’appuie sur des données publiées, mais surtout sur des résultats en cours d’acquisition dans le cadre du projet de science participative PiroGoTick(1) (encadré 1).

Rappels sur le cycle biologique des tiques dures

Les tiques alternent entre des phases de vie parasitaire sur leur hôte et de vie libre dans la nature. L’éclosion des œufs, pondus en amas au sol sous des feuilles ou dans des crevasses, débute un cycle de vie qui comprend trois stades de développement successifs : la larve, la nymphe et l’adulte, mâle ou femelle (figure 1). Chaque stade effectue un repas de sang sur un hôte, tombe au sol une fois repu pour muer (larve et nymphe) ou pondre quelques milliers d’œufs (femelle). Le repas sanguin dure entre 3 et 12 jours selon les stades et les espèces. Les femelles, qui ne peuvent se nourrir à réplétion qu’une fois fécondées, restent fixées sur l’hôte en attendant que l’accouplement ait lieu. La réalisation de ce cycle prend entre 1 et 5 ans selon les espèces de tiques et les conditions environnementales [10].

La plupart des tiques chassent à l’affût, attendant perchées sur des herbes ou des broussailles qu’un hôte passe à leur portée (photos 1a et 1b). Lorsqu’un hôte frôle la plante qui les porte, les tiques s’accrochent aux poils à l’aide de leurs griffes (photo 1c). Selon leur stade de développement, leur quête de l’hôte s’effectue à des niveaux plus ou moins élevés de la végétation. Les larves, peu mobiles et fragiles, restent dans les couches inférieures (mousses, herbe, litière de feuilles), certaines sont même endophiles (terriers). Elles sont généralement présentes en quantité importante, concentrées non loin du lieu de la ponte dont elles sont issues, et constituent des “nids” de larves. Les tiques adultes, au contraire, se retrouvent dans les étages supérieurs de la végétation, en haut des brins d’herbe, sur les ronces ou les broussailles. Elles sont toutefois contraintes de retourner régulièrement au sol, plus frais et humide, afin de se réhydrater. Les tiques peuvent rester à jeun au même stade de développement pendant de longs mois, se réhydratant par l’absorption de l’humidité atmosphérique. Selon les espèces et leur adaptation, elles peuvent survivre à des inondations, des sécheresses et des périodes de gel prolongées [10].

Espèces de tiques hébergées par les équidés en France métropolitaine

En France, une trentaine d’espèces de tiques dites dures se répartissent dans différentes zones climatiques et biotopes, parasitant des hôtes variés. L’espèce la plus connue et étudiée est Ixodes ricinus : largement répandue sur le territoire métropolitain, elle est la plus fréquemment rencontrée chez l’homme, auquel elle peut transmettre les agents responsables de la maladie de Lyme, de l’anaplasmose granulocytaire, de l’encéphalite à tiques et de la babésiose [10].

Les tiques hébergées par les équidés ne sont pas spécifiques de ces animaux. Elles sont opportunistes et parasitent les hôtes dont elles partagent le biotope : les pâtures. En Europe, il s’agit essentiellement de quatre espèces (Ixodes ricinus, Dermacentor reticulatus, D. marginatus et Rhipicephalus bursa), mais en France métropolitaine, leur importance relative n’était jusqu’à présent pas connue (tableau) [12].

Les premiers résultats du projet PiroGoTick, issus de collectes hebdomadaires chez des équidés au pré sur plus de 400 sites dans toute la France, permettent de dégager une première information : Dermacentor reticulatus est la tique quantitativement la plus abondante chez les équidés français, puisqu’elle représente environ 60 % des tiques adultes collectées (sur 65 000 tiques identifiées) et elle est observée sur les trois quarts des sites étudiés jusqu’à présent. Chez les équidés, seuls les adultes de D. reticulatus sont présents, avec des quantités de femelles collectées légèrement supérieures à celles des mâles. La maturité sexuelle des mâles n’est pas atteinte après la mue de la nymphe gorgée, un repas sanguin étant nécessaire à l’achèvement de la spermatogenèse, ce qui explique le nombre élevé de mâles sur les hôtes. Cette caractéristique propre au groupe des Metastriata (à savoir toutes les tiques dures hormis le genre Ixodes) implique que les mâles qui prennent eux aussi un repas de sang sont potentiellement des sources infectieuses pour les équidés, et que la fécondation des tiques se produit une fois sur l’hôte. Les stades immatures de cette espèce de tiques, larves et nymphes, sont endophiles (ils vivent dans les terriers) et vont donc se nourrir préférentiellement sur les micromammifères cavernicoles (campagnols, mulots, musaraignes).

En prenant en compte uniquement les tiques adultes collectées chez les équidés, les populations de Dermacentor marginatus et de Hyalomma marginatum sont chacune quantitativement plus nombreuses (10 à 15 % des adultes collectés) que celles d’Ixodes ricinus (moins de 8 %). Dermacentor marginatus possède les mêmes caractéristiques que D. reticulatus, avec des stades immatures endophiles et la présence aussi abondante des adultes mâles et femelles sur l’hôte (photo 2). Si les deux espèces affectionnent les milieux ouverts (prairies, landes, bordures de forêts et clairières), D. marginatus est plus thermophile et xérophile que D. reticulatus et son aire de répartition est moins étendue, bien qu’elle soit présente dans près de la moitié des sites échantillonnés en France. Hyalomma marginatum, la tique à pattes rayées, n’est présente que sur moins de 10 % des sites échantillonnés, mais elle est particulièrement abondante localement dans le sud de la France (encadré 2). Seuls les stades adultes infestent les équidés, les deux sexes étant aussi abondants l’un que l’autre.

Ixodes ricinus n’est pas l’espèce la plus répandue chez les équidés, mais contrairement aux autres, les stades immatures sont présents sur les chevaux, et notamment le stade nymphal, qui représente environ les trois quarts des spécimens collectés de cette espèce. Communément appelées “plombs” par les éleveurs, les nymphes sont localisées préférentiellement sur les naseaux, le chanfrein et les membres (canons), prenant l’aspect de têtes d’épingle sphériques et noires une fois gorgées de sang (photo 3a). Les mâles sont rares sur les équidés : comme ils n’ont pas besoin d’un repas sanguin pour atteindre leur maturité sexuelle, l’accouplement peut avoir lieu sur la végétation et ce sont des femelles déjà fécondées qui se fixent le plus souvent sur les animaux. La majorité des mâles collectés sur les équidés sont en phase d’accouplement, collés sur la face ventrale des femelles fixées sur l’hôte (photo 3b). Numériquement moins abondante que D. reticulatus, I. ricinus est en revanche largement distribuée sur le territoire métropolitain et collectée sur environ 90 % des sites étudiés. Contrairement au genre Dermacentor qui recherche les milieux ouverts et le soleil, l’écosystème de prédilection d’I. ricinus est constitué par les sous-bois ou les prairies humides, caractérisés par une hygrométrie plus élevée. Elle colonise les bordures de forêt ou les haies adjacentes aux pâtures, alors qu’elle est absente des zones plus sèches du sud-est de la France (région méditerranéenne) [2].

Haemaphysalis punctata, Haemaphysalis concinna et Rhipicephalus bursa ne représentent qu’une faible proportion des tiques retrouvées chez les équidés. Néanmoins, dans certains biotopes, l’une de ces espèces peut être dominante localement. Comme pour I. ricinus, chez ces espèces, tous les stades, adultes et immatures, peuvent être observés sur les équidés. Faisant toutes les trois partie du groupe des Metastriata, mâles et femelles font leur repas sanguin sur ces hôtes.

Complications liées aux tiques

Lésions cutanées

Les collectes hebdomadaires de tiques chez les équidés, réalisées pendant 2 ans dans le cadre du projet PiroGoTick, permettent de connaître la charge annuelle en tiques à laquelle un cheval au pré peut être soumis. Même si ce ne sont pas les situations les plus fréquentes, un équidé en France métropolitaine peut être infesté par plus de 500 tiques par semaine, et nombreux sont les chevaux qui en hébergent plus de 100 par mois. Les plus invasives du point de vue numérique sont H. marginatum, les nymphes d’I. ricinus et D. reticulatus.

Si H. marginatum et I. ricinus ne provoquent pas de fortes réactions cutanées, les tiques du genre Dermacentor sont en revanche souvent fixées en groupe au même endroit et provoquent des démangeaisons et des lésions cutanées importantes, qui prédisposent à d’éventuelles surinfections (photo 4). En effet, quand la tique femelle plus particulièrement est retirée, elle entraîne avec elle des éléments cutanés laissant une plaie atteignant le derme. Ces attaques peuvent passer inaperçues lorsqu’elles se produisent au cours de la saison hivernale, le poil des équidés au pré étant alors long et épais.

Piroplasmose équine

La piroplasmose équine est due à la multiplication dans le sang des équidés de l’un ou des deux parasites, Babesia caballi et Theileria equi. Elle ne se transmet pas directement d’un animal à l’autre, mais par l’intermédiaire de vecteurs, les tiques [12]. Une contamination iatrogène, via des aiguilles par exemple, est également possible. Endémique en France, sa prévalence dans le Sud avoisine 70 % chez les équidés, porteurs notamment de T. equi [15]. La piroplasmose représente un réel problème de santé chez le cheval, au cours de sa phase aiguë, notamment par la fièvre qu’elle provoque, mais aussi lors de sa phase chronique ou en raison de son portage, entraînant une baisse de forme et un amaigrissement sur le long terme dont T. equi est à l’origine. Elle représente également un réel enjeu financier pour les marchands de chevaux et les éleveurs qui souhaitent exporter leurs animaux vers les pays indemnes de piroplasmose (impact sur la filière viande pour l’exportation vers le Japon ou sur la filière sport/course pour l’exportation vers les États-Unis, par exemple) [5].

Les tiques les plus abondantes chez les équidés sont pratiquement toutes les vecteurs potentiels des agents responsables de la piroplasmose équine. Ces vecteurs, à savoir les deux Dermacentor, H. marginatum et R. bursa, représentent environ 75 % des tiques collectées sur les équidés en France depuis le début de notre projet (nous avons maintenant plus d'un an de recul), toutes saisons et zones géographiques confondues. Et comme ces tiques ont des répartitions géographiques différentes, couvrant globalement l’ensemble du territoire, il reste peu de secteurs épargnés. La prévalence de la piroplasmose étant plus élevée dans le sud que dans le nord de la France, il reste à savoir si certaines espèces de tiques sont des vecteurs plus efficaces que d’autres, ou si l’abondance des tiques vectrices est plus élevée dans le Sud que dans le Nord [11]. 

Transmission d’agents pathogènes pour l’homme

Vivant dans le même environnement que les chevaux, les détenteurs ou les soigneurs d’équidés sont susceptibles d’être mordus par une tique, notamment dans les zones géographiques de forte abondance. Bien que certaines espèces comme H. marginatum aient un tropisme en faveur des chevaux, les tiques ne sont pas spécifiques des équidés. L’homme peut représenter un hôte accidentel, et il est en outre sensible à certains agents pathogènes qu’elles transmettent et qui sont présents chez les équidés. C’est notamment le cas pour I. ricinus, l’espèce la plus communément rapportée lors de morsure chez l’homme, qui transmet Borrelia burgdorferi sensu lato, l’agent de la maladie de Lyme, ainsi qu’Anaplasma phagocytophilum, l’agent de l’anaplasmose granulocytaire [10]. Il existe de nombreux variants génétiques d’A. phagocytophilum, dont un plus spécifiquement impliqué dans les cas d’anaplasmose humaine et présent également chez les équidés [16]. Babesia caballi et T. equi ne sont en revanche pas pathogènes pour l’homme.

L’abondance des populations de D. reticulatus et de D. marginatus dans l’environnement des équidés augmente significativement les risques de contact avec l’homme. Ces tiques peuvent être porteuses de bactéries de la famille des Rickettsies (Rickettsia slovaca et Rickettsia raoultii) qui sont responsables de l’adénopathie cervicale humaine (syndrome escarre-ganglions ou Tibola). Ce syndrome, plus fréquemment observé en hiver, est lié au site préférentiel de morsure de ces tiques chez l’homme, au niveau de la tête [17]. Il convient donc de ne pas négliger les conséquences d’une morsure, de surveiller la zone de fixation de la tique après son extraction (avec un tire-tique exclusivement, vendu en pharmacie) et de consulter un médecin rapidement en cas de doute sur l’évolution. En règle générale toutefois, la rougeur initiale au point de morsure s’estompe rapidement après le retrait de la tique et aucune complication n’est observée.

Que faire en cas d’infestation par les tiques ?

Les tiques représentant un risque majeur en termes de transmission de maladies aux équidés, la lutte contre ces vecteurs est essentielle à mettre en place. Bien qu’une élimination des tiques du biotope soit impossible à atteindre, plusieurs types de mesures peuvent être combinés.

Acaricides

L’utilisation d’acaricides ou de répulsifs est le mode de contrôle le plus utilisé. Aujourd’hui, seul Sebacil® 50 % Solution possède une autorisation de mise sur le marché (AMM) pour les équidés. Butox®, un médicament antiparasitaire externe pour les animaux d’élevage (bovins et ovins) à base de deltaméthrine, un pyréthrinoïde, est souvent employé chez les chevaux hors AMM [1, 4]. Néanmoins, toutes ces molécules présentent des inconvénients majeurs : un risque de contamination de l’environnement, du fait d’un possible lessivage par la pluie, et un risque d’apparition de résistances chez les tiques, du fait de leur fréquence élevée d’application [3].

Méthodes “écologiques”

Des méthodes plus écologiques via la modification de l’environnement des équidés visent globalement à abaisser la population des tiques localement. La gestion de la végétation, en débroussaillant dans les pâtures, en taillant les haies et en limitant l’accès aux bois et sous-bois, permet de limiter la prolifération des tiques et leurs contacts avec les chevaux [10]. Toutefois, ces mesures ont un impact certain sur I. ricinus, tique de milieu fermé, mais pas toujours sur Dermacentor, tique de milieu ouvert (prairie), ou sur Hyalomma qui se déplace sur plusieurs mètres pour chasser ses proies (cette tique ne pratiquant pas l’affût classiquement décrit). Parmi les prédateurs des tiques connus (oiseaux, araignées, fourmis, hyménoptères parasitoïdes, bactéries et nématodes pathogènes des tiques), les poules sont désormais utilisées dans ce cadre, et l’effet obtenu mériterait d’être évalué. Quant au retrait manuel des tiques, réalisé très régulièrement durant les périodes à risque par de nombreux propriétaires de chevaux, il reste la meilleure méthode complémentaire pour prévenir la transmission des maladies. Cela limite également la prolifération des parasites en éliminant les femelles gorgées à l’origine d’une descendance très nombreuse.

Pistes vaccinales

Des pistes de vaccin antitiques sont évaluées. Le principe est de vacciner l’hôte avec des protéines de tique afin qu’il développe des anticorps qui, une fois ingérés par la tique se nourrissant sur cet hôte, seront délétères. Plusieurs vaccins antitiques sont commercialisés contre Rhipicephalus microplus, une tique présente dans les régions tropicales et subtropicales [13]. Son cycle se prête bien à cette approche vaccinale, car elle est monotrope (tous les stades se gorgent sur le même animal), augmentant ainsi les effets de la vaccination sur chaque stade. Cela n’est pas le cas des tiques hébergées par les équidés en France métropolitaine. De plus, l’efficacité est variable, et une approche intégrée incluant des acaricides reste nécessaire. Une autre approche vaccinale, encore au stade des premières phases de recherche, viserait à vacciner l’hôte avec une bactérie faisant partie du microbiote intestinal de la tique, lui faisant produire des anticorps qui seraient néfastes à l'équilibre et aux défenses des tiques [9].

Conclusion

Les tiques de plusieurs espèces infestent fréquemment les équidés au pré, dans des proportions qui peuvent être localement préoccupantes. De plus, ces tiques sont majoritairement des vecteurs soit de la piroplasmose équine, soit de la borréliose ou encore de l’anaplasmose. La lutte chimique ayant une efficacité modérée et présentant un risque de toxicité pour l’environnement ainsi qu’un risque d’apparition de résistances chez les tiques, les méthodes prophylactiques demeurent les plus appropriées. Néanmoins, la question de la faisabilité de leur mise en œuvre en élevage reste posée.

Encadré 1

Le projet PiroGoTick

PiroGoTick est un projet de science participative lancé en 2020 et qui va durer jusqu’en 2025, couplé à un projet de recherche fondamentale et appliquée. Son objectif est d’apporter :
- des connaissances sur les tiques qui affectent les équidés en France (diversité, abondance, dynamique spatio-temporelle) et leur rôle dans la transmission des agents de la piroplasmose (compétence et capacité vectorielles, taux et délai de transmission) ;
- des connaissances sur les deux parasites responsables de la piroplasmose équine, Theileria equi et Babesia caballi, concernant la prévalence des porteurs asymptomatiques en France, la transmission transplacentaire, la diversité génétique, les difficultés diagnostiques et les candidats vaccins.

Financé par l’Institut français du cheval et de l’équitation (IFCE), le Fonds Éperon et le réseau France Futur Élevage, PiroGoTick rassemble des partenaires des quatre écoles vétérinaires nationales françaises, du Réseau d’épidémiosurveillance en pathologie équine (Respe), de la Fédération nationale du cheval (FNC) et de nombreuses associations et participants dans toute la France.

Encadré 2

, la tique à pattes rayées

Hyalomma marginatum est une tique de grande taille, reconnaissable notamment à ses pattes bicolores qui présentent des anneaux blanchâtres aux articulations (photo). Sa présence est avérée en France continentale depuis 2015, mais elle est installée en Corse depuis beaucoup plus longtemps [14, 18, 19]. L’introduction en France continentale de cette tique méditerranéenne est probablement liée aux couloirs migratoires des oiseaux, qui sont des hôtes qui peuvent héberger et transporter les larves et les nymphes de cette espèce. Les modifications climatiques récentes lui permettent peu à peu de s’installer dans le sud de la France, où elle trouve désormais des conditions favorables à sa survie.

Les chevaux représentent une cible de prédilection pour cette tique, dont la particularité est d’être chasseresse [7]. À la différence des autres tiques de la France continentale, H. marginatum, dotée de grandes pattes, part à la recherche de son hôte, qu’elle peut poursuivre sur plusieurs mètres. Chez les équidés, les tiques adultes vont se fixer préférentiellement au niveau de l’anus, de la vulve, du fourreau et des mamelles, et la tique femelle va se gorger de sang pour passer d’une taille de 0,5 à 2 cm de longueur environ. La tique à pattes rayées constitue aussi une source de préoccupation en médecine humaine, car elle est susceptible de transmettre le virus de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo, à l’origine de signes cliniques graves. Toutefois, aucune circulation de ce virus n’a encore été signalée en France métropolitaine. Pour les équidés, cette tique constitue un vecteur avéré supplémentaire de la piroplasmose équine sur le territoire français.

Bien que sa répartition reste limitée au bassin méditerranéen, la tique à pattes rayées fait maintenant intégralement partie des tiques de la France continentale infestant les équidés. Une fois installée, H. marginatum devient rapidement envahissante, au point de rendre la situation préoccupante (figure 2).

Remerciements

Les membres du projet PiroGoTick tiennent à remercier en premier lieu les trois financeurs du projet (IFCE, Fonds Éperon et France Futur Élevage) pour leur soutien. Ces données n’auraient pas pu être obtenues sans l’implication de l’ensemble des participants à ce projet, propriétaires et éleveurs d’équidés, de façon ponctuelle ou avec une persévérance quotidienne. Qu’ils en soient tous ici vivement remerciés. Nos remerciements vont également aux vétérinaires de toute la France qui ont accepté de nous aider. Un grand merci également au Laboratoire de thermique et énergie de Nantes (LTeN) de Polytech Nantes, pour l’utilisation du microscope Keyence permettant la réalisation de photographies de tiques de grande qualité.

Références

1. Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses). Résumé des caractéristiques du produit Butox 7,5 Pour-on. http://www.ircp.anmv.anses.fr/rcp.aspx?NomMedicament=BUTOX+7%2C5+POUR+ON

2. Agoulon A, Malandrin L, Lepigeon F et coll. A vegetation index qualifying pasture edges is related to Ixodes ricinus density and to Babesia divergens seroprevalence in dairy cattle herds. Vet. Parasitol. 2012;185(2-4):101-109.

3. Bourdoiseau G. La résistance aux antiparasitaires : risques, prévention. Bull. Acad. Vét. France. 2015;4:297-302.

4. Cumenge I. Vademecum de thérapeutique en dermatologie chez les équidés. Thèse de doctorat vétérinaire, Lyon 1 université Claude-Bernard. 2010:172p.

5. Ferry B. Une cellule de crise particulière : problématique des piroplasmoses en vue d’exportation au Japon. Bull. Respe. 2016;(38). https://respe.net/une-cellule-de-crise-particuliere-problematique-des-piroplasmoses-en-vue-dexportation-au-japon-bulletin-n38/

6. Földvári G, Široký P, Szekeres S et coll. Dermacentor reticulatus: a vector on the rise. Parasit. Vectors. 2016;9(1):314.

7. Grech-Angelini S, Stachurski F, Lancelot R et coll. Ticks (Acari: Ixodidae) infesting cattle and some other domestic and wild hosts on the French Mediterranean island of Corsica. Parasit. Vectors. 2016;9(1):582.

8. Leblond A. Equine piroplasmosis - the view of a practitioner from an endemic region. Vet. Rec. 2019;184(3):92-94.

9. Maitre A, Wu-Chuang A, Aželytė J et coll. Vector microbiota manipulation by host antibodies: the forgotten strategy to develop transmission-blocking vaccines. Parasit. Vectors. 2022;15(1):4.

10. McCoy K, Boulanger N. Tiques et maladies à tiques : biologie, écologie évolutive, épidémiologie. IRD éditions. 2016:336p.

11. Muzard A. Prévalence et facteurs de risque de la piroplasmose équine : étude prospective. Thèse de doctorat vétérinaire, Oniris. 2021:208p.

12. Onyiche TE, Suganuma K, Igarashi I et coll. A review on equine piroplasmosis: epidemiology, vector ecology, risk factors, host immunity, diagnosis and control. Int. J. Environ. Res. Public Health. 2019;16(10):1736.

13. Peireira DFS, Ribeiro HS, Gonçalves AAM et coll. Rhipicephalus microplus: an overview of vaccine antigens against the cattle tick. Ticks Tick Borne Dis. 2022;13:101828.

14. Pérez-Eid C. Les tiques : identification, biologie, importance médicale et vétérinaire. Tec & Doc. 2007:314p.

15. Rocafort-Ferrer G, Leblond A, Joulié A et coll. Molecular assessment of Theileria equi and Babesia caballi prevalence in horses and ticks on horses in southeastern France. Parasitol. Res. 2022;121(3):999-1008.

16. Scharf W, Schauer S, Freyburger F et coll. Distinct host species correlate with Anaplasma phagocytophilum ankA gene clusters. J. Clin. Microbiol. 2011;49(3):790-796.

17. Silva-Pinto A, Santos Mde L, Sarmento A. Tick-borne lymphadenopathy, an emerging disease. Ticks Tick Borne Dis. 2014;5(6):656-659.

18. Stachurski F, Vial L. Installation de la tique Hyalomma marginatum, vectrice du virus de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo, en France continentale. Bull. Épidémiol. 2018;84(9):37-41.

19. Vial L, Stachurski F, Leblond A et coll. Strong evidence for the presence of the tick Hyalomma marginatum Koch, 1844 in southern continental France. Ticks Tick Borne Dis. 2016;7:1162-1167.

Résumé

Les équidés au pré sont fréquemment confrontés aux tiques, donc aux agents infectieux qu’elles transmettent. Connaître les espèces de tiques présentes sur le territoire, c’est identifier les risques qu’elles induisent. Un des objectifs du projet de recherche PiroGoTick est d’inventorier et de cartographier ces vecteurs en France. Une première analyse indique quatre espèces majeures, Dermacentor reticulatus, Dermacentor marginatus et Hyalomma marginatum, localement très abondantes et toutes potentiellement vectrices des agents responsables de la piroplasmose chez le cheval, et Ixodes ricinus, géographiquement largement distribuée mais en moindre abondance.

Mots clés

Équidés, tiques, Dermacentor, Hyalomma, piroplasmose, Ixodes

Summary

Current situation and management of ticks affecting equids on mainland France

Horses in pasture are frequently infested by ticks and the infectious agents they transmit. Knowing the species of ticks present on the territory means identifying the risks they entail. One of the objectives of the PiroGoTick research project is to inventory and map these parasites in France. An initial analysis indicates that there are four major species. Dermacentor reticulatus, Dermacentor marginatus and Hyalomma marginatum are very abundant species in localized areas and are all potential vectors of the protozoan parasites responsible for piroplasmosis in horses. Ixodes ricinus is widely distributed geographically but less abundant.

Keywords

Equids, ticks, Dermacentor, Hyalomma, piroplasmosis, Ixodes.

Eléments à retenir

  • L’espèce de tique la plus abondante chez les équidés est Dermacentor reticutalus.

  • Hyalomma marginatum, la tique à pattes rayées, devient envahissante chez les équidés dans le sud-est de la France.

  • Les trois espèces de tiques majoritairement retrouvées au stade adulte chez les équidés (D. reticulatus, D. marginatus et H. marginatum) sont des vecteurs de Theileria equi et Babesia caballi, les deux agents responsables de la piroplasmose équine.

  • Une approche de lutte intégrée est indispensable pour faire face aux infestations de tiques.