OPHTALMOLOGIE
Cahier scientifique
Article de synthèse
Auteur(s) : Émilie Quéré*, Coline Jondeau**, Sabine Chahory***
Fonctions :
*Dipl. ECVO
Clinique équine,
ENV d’Alfort,
**Unité d’ophtalmologie,
Chuva,
7, avenue du Général de Gaulle,
94700 Maisons-Alfort
***Unité d’ophtalmologie,
Chuva,
7, avenue du Général de Gaulle,
94700 Maisons-Alfort
Mise au contact de la cornée du côté “basale”, la membrane amniotique joue un rôle de pansement. L’intervention chirurgicale est rapide et peu invasive, et permet d’obtenir une bonne transparence de la surface oculaire.
Les lacérations cornéennes sont fréquentes chez les chevaux, en raison de la position proéminente des yeux et des conditions de vie en extérieur, avec des congénères [3]. Une lacération cornéenne consiste en la formation d’un volet épithélio-stromal encore attaché aux tissus d’origine et à l’épaisseur variable [5]. Les lésions peuvent être plus ou moins profondes et étendues, et le diagnostic repose sur un examen ophtalmologique approfondi. Cet article présente la prise en charge de ce type d’atteinte, et notamment l’intérêt d’employer une membrane amniotique pour son traitement, en l’illustrant par un cas clinique (encadré).
Des signes de douleur oculaire (énophtalmie, blépharospasme, larmoiement, procidence de la membrane nictitante) sont généralement marqués en cas de lacération cornéenne et associés à une hyperhémie conjonctivale et à un œdème cornéen. Des signes d’uvéite antérieure (myosis, turbidité de l’humeur aqueuse, hypopion) peuvent également être présents. Le test à la fluorescéine permet de déterminer l’étendue de la lésion, ainsi que d’objectiver une éventuelle fuite d’humeur aqueuse via la dilution de la fluorescéine en cas de perforation (test de Seidel) [3]. L’examen approfondi de la cornée passe également par l’évaluation attentive des structures adjacentes à la lésion. Pour cela, après la réalisation d’une anesthésie topique de la cornée, un coton-tige stérile humidifié peut être appliqué pour permettre la détection d’éventuels corps étrangers, ou encore la présence d’un volet cornéen rabattu sur la zone de lacération [20].
Les complications d’une lacération cornéenne sont multiples et comprennent, entre autres, un œdème cornéen par dégénérescence des cellules endothéliales de la cornée, des synéchies antérieures (adhérences entre l’iris et le site de perforation) ou postérieures (adhérences entre l’iris et la capsule antérieure du cristallin à la suite d’une uvéite sévère), une iridocèle (prolapsus de l’iris par le site de perforation cornéenne) et une cataracte d’origine traumatique ou inflammatoire [3].
Le pronostic dépend de la gravité de la lacération cornéenne : il est plutôt favorable si elle mesure moins de 15 mm de long, est non perforante, et si la lésion évolue depuis moins de 15 jours [3].
Lorsque l’épithélium de la cornée a perdu son intégrité, des bactéries et des champignons opportunistes peuvent envahir et adhérer au stroma cornéen, favorisant le développement d’une kératomalacie par la production excessive de collagénases [15]. Les principaux agents pathogènes identifiés en cas d’ulcères cornéens traumatiques chez le cheval sont Streptococcus, Staphylococcus (Gram positif) et Pseudomonas (Gram négatif) pour les bactéries et Fusarium et Aspergillus pour les champignons [9, 15]. Ainsi, en présence d’une lacération associée à une kératomalacie, des prélèvements doivent être effectués de manière systématique chez le cheval, en vue des analyses cytologique, bactériologique et fongique, pour mieux cibler le traitement médical [15]. L’analyse cytologique permet une lecture rapide, afin d’identifier d’éventuels éléments pathogènes (coques, hyphes) grâce à une coloration de Gram ou rapide de type Diff quick. Les prélèvements doivent être réalisés de préférence avant le test à la fluorescéine, notamment pour la culture bactériologique, car ce colorant possède une activité antibactérienne contre les bactéries Gram positif [8]. Cependant, une étude récente semble indiquer que cet effet antibactérien aurait peu d’impact en pratique clinique compte tenu de la faible quantité administrée et du rinçage du colorant [13]. De même, l’utilisation d’un anesthésique topique est controversée. Deux études récentes montrent que la proparacaïne par voie topique ne modifie pas significativement les résultats de la culture bactériologique et fongique chez le chien, le chat et le cheval [6, 13]. À partir des résultats de leur étude, les auteurs recommandent donc l’instillation d’un anesthésique local pour faciliter la réalisation du prélèvement dans un contexte de douleur oculaire et de cornée fragile.
En pratique, l’instillation de tétracaïne collyre à 1 % sur la surface oculaire est recommandée, afin d’inhiber temporairement la sensibilité cornéoconjonctivale et de réaliser les prélèvements dans de bonnes conditions [14]. Pour ceux destinés à une culture bactériologique et fongique, deux écouvillons sont imbibés au préalable de quelques gouttes de NaCl à 0,9 % stérile avant d’être délicatement appliqués sur la cornée en regard de la lésion [7]. Le contact de l’écouvillon sur la zone à prélever doit être suffisamment long pour un prélèvement de bonne qualité. L’écouvillon doit être tourné a minima deux ou trois fois sur lui-même aussi délicatement que possible sur une cornée fragile. Si le geste semble risqué, une option intéressante consiste à effectuer le prélèvement dans le cul-de-sac conjonctival [2]. Chaque écouvillon est ensuite conservé dans un milieu de transport adéquat (gélosé Amiès) pour une mise en culture par le laboratoire. Pour l’analyse cytologique, la même opération est réalisée à l’aide d’une cytobrosse qui est ensuite étalée sur une lame en verre [15].
Si la lacération est superficielle, une prise en charge médicale peut suffire pour permettre la stabilisation et la cicatrisation de la lésion. Si la lacération est profonde, très étendue ou irrégulière, voire perforante, un traitement chirurgical peut être indiqué en complément. Celui-ci diffère selon l’ancienneté de la plaie.
En cas de volet cornéen, lorsque la lésion est récente, il est particulièrement recommandé de le suturer à la cornée à l’aide de points simples et de fils résorbables de décimale 7/0 à 9/0 (0,5 à 0,3 métrique). La suture cornéenne est parfois renforcée par une greffe de conjonctive bulbaire pédiculée permettant une protection supplémentaire, notamment en cas de lacération profonde ou irrégulière [3].
En cas d’impossibilité de suturer le volet cornéen, celui-ci doit être réséqué et la lésion cornéenne prise en charge comme un ulcère cornéen profond. Les techniques chirurgicales existantes en ophtalmologie équine consistent à réaliser une greffe, qu’elle soit conjonctivale, cornéenne autologue ou hétérologue, ou de biomatériaux [3, 11, 15].
La greffe conjonctivale est le traitement de choix lors d’ulcère cornéen profond ou de descemétocèle [18]. Elle offre un support à la cornée endommagée, un apport en fibroblastes conjonctivaux, ainsi qu’en facteurs de croissance et anticollagénases via la vascularisation du greffon. Plusieurs techniques sont décrites pour la réalisation de ces greffes. La plus appropriée, en cas de lacération cornéenne chez le cheval, est la greffe conjonctivale pédiculée. Elle présente peu de risques de complications, essentiellement une déhiscence des sutures lors de tension excessive ou de kératomalacie en regard des points de suture [3]. Toutefois, cette technique comporte l’inconvénient majeur d’une perte de la transparence cornéenne.
La greffe de biomatériaux est une autre solution. Divers biomatériaux se sont développés en ophtalmologie vétérinaire, offrant une récupération de la transparence cornéenne bien supérieure à celle obtenue avec une greffe conjonctivale. Parmi ceux-ci, la membrane amniotique présente un intérêt majeur pour la cicatrisation des plaies cornéennes.
Ces dernières années, la membrane amniotique est devenue le tissu le plus largement utilisé pour la reconstruction de la surface oculaire en ophtalmologie humaine. Son utilisation en médecine générale remonte au début du XXe siècle avec la réalisation de greffes cutanées sur les patients grands brûlés, et en ophtalmologie à 1940 pour la reconstruction conjonctivale [17].
La membrane amniotique est composée d’un épithélium unistratifié, d’une épaisse membrane basale et d’un stroma avasculaire. L’épithélium est en général détruit lors de la préparation de la membrane et notamment par sa conservation à - 80 °C, et n’est donc pas considéré comme intéressant d’un point de vue thérapeutique [11, 15]. La membrane basale peut être assimilée à du tissu conjonctif et possède une grande résistance à la traction, ce qui la rend particulièrement adaptée à la reconstruction du globe oculaire. Elle est également transparente et élastique. Elle favorise la migration des cellules épithéliales, ainsi que leur adhésion et leur différenciation, et prévient leur apoptose [17, 21]. Ces propriétés permettent à la membrane basale de jouer le rôle de pansement lorsque celle-ci est directement appliquée au contact de la cornée [16, 17]. Le stroma est composé de fibroblastes, de protéoglycanes, de glycoprotéines et de fibres de collagène et il est riche en acide hyaluronique et en facteurs de croissance [10, 17]. Il possède de nombreuses propriétés (antiangiogénique, anti-inflammatoire, antifibrotique et antiprotéinase) particulièrement intéressantes en cas d’ulcères à collagénases [17, 21]. L’activité antiprotéinase est liée à la présence de nombreux inhibiteurs de protéinases dans le stroma et à l’apport de collagène exogène, qui sert de substrat aux protéases du film lacrymal [15]. En comparaison d’une greffe conjonctivale, une greffe de membrane amniotique minimise la fibrose cicatricielle et permet une meilleure transparence de la cornée, qui est notamment recherchée dans les cas où la vision peut être préservée [16].
Plusieurs types de membranes amniotiques sont décrits en médecine vétérinaire : des membranes amniotiques humaines déshydratées qui ne sont plus disponibles sur le marché vétérinaire, des membranes amniotiques bovines déshydratées (sous la forme de patchs), ovines ou équines, cryoconservées.
La membrane amniotique équine, comme celle utilisée dans le cas rapporté, est obtenue lors de césariennes électives, transportée en carboglace puis maintenue à - 80 °C, permettant une conservation plus longue que dans un congélateur standard à - 20 °C. Des études montrent que lors des deux processus, cryoconservation ou déshydratation, la structure histologique des membranes amniotiques, ainsi que les facteurs de croissance et l’ensemble des protéines sont préservés, à des degrés variables selon le procédé de conservation utilisé [1, 4, 19]. Les qualités des membranes amniotiques cryoconservées versus déshydratées varient suivant les études, mais comme les processus de fabrication diffèrent, il est difficile de conclure.
La membrane amniotique bovine déshydratée présente la particularité d’être disponible en patchs, mais aussi sous une forme pulvérisée dans un collyre aux propriétés cicatrisante, hydratante et anti-inflammatoire, particulièrement intéressante lorsque la greffe chirurgicale n’est pas réalisable. Néanmoins, le manque de publications ne permet pas de cibler avec précision les indications de cette formulation et une étude récente, dans un contexte expérimental, montre que le taux de cicatrisation des ulcères cornéens superficiels n’est pas accéléré par l’ajout de ce traitement [12].
Les membranes amniotiques ont un coût non négligeable, mais elles représentent une avancée considérable en médecine vétérinaire et leurs applications sont multiples, notamment en ophtalmologie. Leur utilisation a d’abord été décrite pour combler des pertes de substance stromales superficielles, mais également profondes, allant jusqu’à des greffes de pleine épaisseur. Les indications se sont ensuite étendues pour offrir un support à la cicatrisation cornéenne et un substrat facilitant la réépithélialisation lors de greffe cornéenne [22].
En ophtalmologie équine, la membrane amniotique est principalement utilisée pour le traitement d’ulcères à collagénases d’origine bactérienne [3, 11, 16, 17]. Son emploi n’est en revanche pas recommandé lors d’infection fongique [18]. D’autres indications sont rapportées, plus anecdotiques, comme une reconstruction de la surface oculaire après l’exérèse d’un carcinome épidermoïde cornéoconjonctival ou le support d’une kératopathie bulleuse en association avec une greffe conjonctivale [16, 17].
La surface oculaire peut être reconstruite à l’aide d’une membrane amniotique via plusieurs techniques chirurgicales, selon l’objectif et l’évolution escomptés. Plusieurs couches de membrane amniotique peuvent être empilées pour combler une perte de substance cornéenne, ou au contraire une seule épaisseur peut être suturée à la cornée [11, 15]. Si la “face stromale” de la membrane est mise au contact de la cornée, la greffe stricto sensu va adhérer à la cornée et la membrane amniotique est incorporée au stroma cornéen. À l’inverse, si la membrane basale amniotique est mise au contact de la cornée, les cellules épithéliales cornéennes vont migrer sous la membrane amniotique qui joue alors un rôle de pansement [11, 15-18]. Cette technique permet de bénéficier des nombreuses propriétés de la membrane amniotique avec une intervention chirurgicale plus rapide et moins invasive, mais ne permet pas l’intégration de la membrane à la cornée.
L’intervention est réalisée chez le cheval debout dans un travail. Après l’administration d’une sédation (par exemple, bolus de détomidine à la dose de 10 µg/kg et de morphine à 0,1 mg/kg), la sedanalgésie est poursuivie tout au long de la procédure chirurgicale (par exemple, perfusion continue de détomidine à raison de 5 à 10 µg/kg/h par voie intraveineuse).
La cornée et les conjonctives sont anesthésiées par des blocs frontaux, trochléaires, lacrymaux et zygomatiques (2 ml de lidocaïne à 0,2 % par point sous-cutané), ainsi que par des instillations de tétracaïne en collyre.
Les procédures d’asepsie de l’œil et du pourtour cutané sont réalisées à l’aide de povidone iodée savon et d’une solution dermatologique pour la zone cutanée, et à l’aide de povidone iodée solution oculaire diluée à 0,5 % pour les surfaces oculaires.
Un support de tête est mis en place. Un champ collant large couvre le site chirurgical, alors qu’un champ plastique plus étendu couvre l’ensemble de la tête et une partie de l’encolure. Les champs sont suturés autour du site chirurgical par des points simples à l’aide de fil de soie 4/0. Un ou deux fils de traction (soie 6/0) sont positionnés dans la conjonctive bulbaire afin de manipuler le globe sans utiliser de pince.
Le scalp cornéen est réséqué aux ciseaux de Castroviejo et la membrane amniotique équine, préalablement décongelée et rincée dans du liquide de solution oculaire (solution saline équilibrée), est suturée par plusieurs points simples avec un fil résorbable (Vicryl® 7/0 et 8/0) sur la cornée et sur le limbe. Une blépharorraphie médiale est ensuite réalisée par un point en U avec un fil non résorbable (Ethilon® 2/0). Une injection sous-conjonctivale de 0,8 ml de tobramycine en collyre est réalisée à la fin de la procédure chirurgicale.
Généralement, la membrane se détache de la cornée après 7 à 10 jours [16, 17]. Une déhiscence de suture est possible, comme dans le cas présenté.
La plupart des publications décrivent la technique de greffe avec la membrane amniotique, qui implique un temps de suture assez long et requiert par conséquent une anesthésie générale [11, 16]. La particularité de la technique chirurgicale de recouvrement est sa réalisation sur cheval debout sous sédanalgésie, rendue possible par le nombre limité de points de suture cornéens, et présentant l’avantage d’éviter le risque et le coût d’une anesthésie générale. La limite réside dans un moindre confort du chirurgien. La réalisation des différentes anesthésies tronculaires et topiques ainsi que le caractère coopératif du cheval sont autant de conditions nécessaires au bon déroulé de cette intervention.
La conservation de la vision via une fibrose cicatricielle minimisée est en général un avantage non négligeable pour le cheval et ses propriétaires. Cela s’est révélé d’autant plus important pour la jument du cas présenté puisqu’elle a dû être énucléée 6 mois plus tard de l’œil droit (controlatéral) à la suite d’un traumatisme cornéen perforant.
Les lacérations cornéennes sont des plaies qui impliquent la cornée et dont le pronostic est réservé. Leur prise en charge dépend de la gravité de la lésion. Si l’atteinte est superficielle, un traitement médical peut suffire, en prêtant néanmoins attention à la présence éventuelle d’une uvéite antérieure associée. En cas d’atteinte stromale profonde, une prise en charge chirurgicale est souvent nécessaire. Plusieurs techniques de greffe existent pour combler une perte de substance stromale et favoriser l’épithélialisation. Le recouvrement par une membrane amniotique chez le cheval debout peut donner de bons résultats, avec une conservation de la vision.
CONFLIT D’INTÉRÊTS : AUCUN
→ En cas de traumatisme oculaire, il est important de vérifier une éventuelle atteinte des structures intraoculaires et d’évaluer le pronostic de conservation de la vision.
→ Une prise en charge chirurgicale précoce est souvent nécessaire en cas de scalp cornéen, afin de permettre la conservation du globe oculaire.
→ La mise en place d’un cathéter sous-palpébral est fréquemment indispensable à la réalisation d’un traitement oculaire médical intensif.
Commémoratifs et anamnèse
Une jument d’origine non constatée, âgée de 20 ans, est référée à l’École nationale vétérinaire d’Alfort pour un scalp cornéen de l’œil gauche diagnostiqué 1 semaine auparavant par son vétérinaire traitant et dont l’évolution, sous traitement médical, n’est pas jugée satisfaisante.
Examen clinique
À l’admission, la jument présente un blépharospasme marqué et un œdème des paupières à gauche, avec des écoulements mucopurulents abondants. L’examen rapproché révèle une hyperhémie conjonctivale sévère, une lacération cornéenne para-axiale médiale verticale de 3 cm de long avec un volet cornéen et un œdème cornéen diffus. Les marges de la lacération ont un aspect gélatineux évoquant un processus de kératomalacie. Un hypopion sédimenté ventralement est mis en évidence dans la chambre antérieure (photo 1). La vision de l’œil gauche semble conservée.
Examens complémentaires
Des prélèvements cornéens sont réalisés en vue des analyses cytologique, bactériologique et fongique. Le test à la fluorescéine se révèle positif sous le volet cornéen, avec un test de Seidel négatif. L’analyse cytologique ne met pas en évidence d’éléments figurés.
Prise en charge médicale
Un cathéter sous-palpébral est mis en place dans le cul-de-sac conjonctival inférieur et une thérapie médicale topique intensive est instaurée, à base :
– d’atropine collyre à 1 % toutes les 8 heures (effet cycloplégique) ;
– de tobramycine toutes les 4 heures et de chloramphénicol toutes les 12 heures (antibiothérapie probabiliste) ;
– de sérum autologue toutes les 4 heures (action anticollagénase) ;
– de povidone iodée diluée à 0,2 % toutes les 12 heures (action antimycosique).
Après 24 heures, la jument présente une amélioration clinique significative (photo 2). Afin d’enrayer le processus de kératomalacie et de limiter le risque de perforation cornéenne, il est décidé de parer le volet cornéen et de réaliser un recouvrement de la lésion par une membrane amniotique équine sous sédation.
Prise en charge chirurgicale
Après la réalisation d’anesthésies locales, le scalp cornéen est réséqué et la membrane amniotique équine (Amnio®-Eye(1)) est suturée à l’aide de plusieurs points simples sur la cornée et le limbe (photos 3 et 4). Une blépharorraphie médiale est réalisée par un point en U.
Évolution
Un suivi postopératoire est effectué quotidiennement après l’intervention.
À J3, une déhiscence partielle de la suture est observée.
À J8, la partie de la membrane amniotique non adhérente à la cornée est réséquée et le cathéter sous-palpébral est retiré (photo 5). Les résultats de l’analyse bactériologique révèlent de nombreuses colonies de Streptococus equi ssp. zooepidemicus multirésistantes, avec une sensibilité intermédiaire pour le chloramphénicol, alors appliqué quatre fois par jour. La culture fongique est négative.
À J11, la jument sort d’hospitalisation avec un traitement de chloramphénicol en topique et de phénylbutazone par voie systémique pendant 3 semaines (photo 6).
À 10 semaines postopératoires, une fibrose cicatricielle est notée et un traitement topique de corticostéroïdes est mis en place pendant 1 mois (photo 7).
Quatre mois et demi plus tard, il subsiste une discrète fibrose stromale cicatricielle, qui ne gêne ni le confort ni la vision de la jument (photo 8).
(1) Vetbiobank SAS, Marcy-l’Étoile, France.
Les auteurs remercient leur consœur Clara Gruffy pour sa collaboration et son suivi du cas sur le terrain, le laboratoire Vetodiag et le service de parasitologie-mycologie du Biopôle (ENVA) pour la réalisation des analyses en période de crise sanitaire, et Stéphane Maddens du laboratoire Vetbiobank pour son éclairage sur les propriétés des membranes amniotiques. Ils remercient également les internes de la clinique équine de l’ENVA pour leur implication dans les soins et le suivi de l’hospitalisation, ainsi que les laboratoires TVM et Dômes Pharma pour leur soutien.