NUTRITION
Cahier pratique
Fiche pratique
Auteur(s) : Thibault Frippiat
Fonctions : Equine Sports Medicine
Laren (Pays-Bas)
Cette fiche pratique fait partie d’une série qui propose une revue de la littérature des nutriments régulièrement utilisés dans les compléments alimentaires. La fiche précédente s’est intéressée aux compléments dédiés au soutien articulaire, celle-ci aborde ceux destinés au soutien osseux.
Cette fiche pratique se veut un relevé des connaissances pertinentes actuelles. Face à la rareté des études portant sur un nombre important d’individus, il est néanmoins difficile de conclure sur des effets cliniques irréfutables. De plus, les ingrédients sont discutés individuellement, alors qu’ils sont souvent associés dans les compléments alimentaires.
Les phénomènes qui affectent la masse osseuse dépendent de facteurs génétiques et environnementaux. Par conséquent, le développement pendant la croissance et le maintien du capital osseux à l’âge adulte sont déterminés par trois facteurs principaux : les contraintes mécaniques appliquées aux os, l’équilibre hormonal remodelant le tissu osseux et l’apport alimentaire en certains nutriments. En effet, des micronutriments font partie intégrante de la structure osseuse (organique ou minérale), certains stimulent les mécanismes de formation osseuse (ostéoblastogenèse), tandis que d’autres inhibent les phénomènes de résorption osseuse (ostéoclastogenèse).
Certains minéraux participent à la régulation du métabolisme osseux, le calcium et le cuivre étant parmi les plus étudiés.
L’augmentation des besoins en calcium des chevaux à l’entraînement est liée, entre autres, à l’augmentation de la minéralisation osseuse. Une complémentation importante en calcium induit une minéralisation accrue du métacarpe, ainsi qu’une augmentation des marqueurs de formation osseuse [1]. Néanmoins, outre l’apport en calcium, le rapport phosphore-calcium doit être respecté : obligatoirement supérieur à 1, il est idéalement maintenu à 1,5 pour l’entretien et à 1,8 pendant la croissance et l’entraînement.
Une synthèse des besoins journaliers en calcium est donnée en tableau 1.
La complémentation en cuivre n’a pas montré d’effet sur le métabolisme osseux chez des poulains, son administration ne diminuant pas les risques d’ostéochondrose [2]. En revanche, la complémentation des juments induirait une diminution de l’indice radiographique d’inflammation des disques de croissance, ainsi que de la prévalence des lésions cartilagineuses chez leur poulain [3].
Le silicium joue un rôle essentiel dans le métabolisme du tissu conjonctif, et plus particulièrement dans celui des tissus osseux et cartilagineux. Il participe à l’élaboration de la matrice organique, notamment le collagène de type I et les glycosaminoglycanes.
La complémentation en silicium est étudiée chez l’homme et les rongeurs, pour compenser les effets d’ostéoporose chez la femme ménopausée, mais son utilisation chez le sportif sujet à des fractures est également suggérée [5]. Cependant, il s’agirait surtout d’une interaction du silicium avec l’estradiol plutôt que de l’incorporation du silicium directement au niveau osseux [6].
La complémentation chez le cheval engendre une augmentation du silicium au niveau du plasma et du lait [7]. Son effet clinique sur la densité osseuse n’est pas démontré à ce jour chez le cheval.
La “protéine basique du lait” est composée de peptides dérivés de la fraction protéique du lait. Des effets inhibitoires sur l’activité des ostéoclastes sont décrits in vitro pour la lactoferrine, la lactoperoxydase, la cyastine C et l’angiogénine, tandis que d’autres peptides comme le kininogène stimuleraient l’activité ostéoblastique.
Chez l’homme, la complémentation en protéine basique du lait est suggérée chez les femmes saines afin de prévenir la perte osseuse lors de la ménopause. Selon les résultats de différentes études, une augmentation de la densité minérale osseuse est observée lors d’une complémentation sur une période de six mois [8].
Une étude ne montre cependant pas de différence sur la densité osseuse entre une complémentation en protéine basique du lait ou en lait entier [9].
L’augmentation de la densité osseuse est également rapportée chez la souris en période de croissance [10]. Dans cette espèce, l’administration de protéine basique du lait augmenterait l’expression des gènes associés à la réparation osseuse lors de fracture [11].
Chez le cheval, une hausse significative de l’ostéocalcine (marqueur de formation osseuse) est mise en évidence après une supplémentation de 90 jours en protéine basique du lait, sans effet cependant sur les marqueurs sanguins du métabolisme osseux comme le calcium ou le collagène de type I [12].
Deux vitamines sont principalement considérées pour le métabolisme osseux : la vitamine K et la vitamine D3.
La vitamine K est un cofacteur de la fonction de l’enzyme γ-glutamyl carboxylase, nécessaire à l’activation de multiples protéines, qui jouent notamment un rôle important au niveau du métabolisme osseux.
Elle existe sous trois formes : phylloquinone (K1), ménaquinone (K2) et ménadione (K3). Elles stimuleraient la formation osseuse et inhiberait la résorption osseuse chez l’homme, en particulier la ménaquinone [13]. Chez le cheval, une augmentation de la vitamine K plasmatique est principalement observée après une complémentation en ménadione [14].
La vitamine D3, produite par les tissus cutanés sous l’effet des rayons ultraviolets, est un cofacteur dont le rôle physiologique principal est de maintenir les niveaux plasmatiques de calcium et de phosphate en augmentant l’absorption intestinale de calcium et en réduisant l’excrétion rénale de calcium et de phosphate. La carence en vitamine D3 est connue chez l’homme et associée à différents troubles, en particulier osseux.
Cette situation n’est pas décrite chez le cheval, mais son effet sur les os de poneys non soumis aux ultraviolets est cependant démontré [15, 16].
La complémentation en prunes séchées (Prunus domestica) stimulerait la formation osseuse tout en supprimant la résorption osseuse chez la femme ménopausée [17]. De même, l’administration de prunes séchées augmenterait la masse osseuse chez le rat mâle [18]. En outre, les griottes (Prunus cerasus) préviendrait la perte osseuse, donc le risque de fracture, lors d’inflammations chroniques dans l’espèce murine [19]. À l’heure actuelle, aucune étude ne montre l’intérêt de ces extraits de fruits chez le cheval.
CONFLIT D’INTÉRÊTS : AUCUN