Bactéries, toxines et gènes : les “petites choses” au cœur de l’EEHNC 2019 - Pratique Vétérinaire Equine n° 201 du 01/03/2019
Pratique Vétérinaire Equine n° 201 du 01/03/2019

NUTRITION ET PERFORMANCE

Cahier scientifique

Vu, lu, entendu…

Auteur(s) : Irene Tosi

Fonctions : Université de Liège, BelgiqueMembre du comité scientifique
de la 9e édition de
l’European Equine Health and Nutrition Congress

La 9e édition de l’European Equine Health and Nutrition Congress a eu lieu du 15 au 17 février à Utrecht (Pays-Bas). Au programme cette année, des thèmes d’actualité scientifique tels que le microbiome intestinal et l’épigénétique.

« Small things, big picture » (de petites choses pour un grand dessin), soit les petites choses comme les bactéries, les champignons, les toxines et les gènes, ces éléments qui interagissent et influencent le bien-être et la performance du cheval : c’est le fil rouge qui a guidé les diverses présentations à l’European Equine Health and Nutrition Congress (EEHNC) cette année. Des thématiques d’un intérêt scientifique récent dans le milieu vétérinaire équin ont fait l’objet des exposés de chercheurs de renommée internationale.

Microbiome intestinal

« Pas de microbes, pas de cheval » : cette phrase était la devise des exposés de la journée du samedi, axés sur le microbiome gastro-intestinal chez le cheval, dont le premier a été réalisé par Véronique Julliand (AgroSup Dijon, France). Une présentation très claire malgré la complexité du monde des micro-organismes qui habitent le système digestif équin, monde connu de manière encore très limitée. En effet, la composition du microbiome est très variable non seulement entre individus, selon la diète, la santé et le style de vie, mais également au sein d’un même individu car elle est strictement liée au compartiment qui l’héberge (estomac, intestin grêle ou gros intestin), donc à son pH, à sa température et à ses nutriments. Dans l’estomac, par exemple, le microbiote est surtout représenté par des bactéries qui digèrent l’amidon, alors que dans le gros intestin, ce sont les bactéries cellulolytiques, d’importance vitale pour le cheval.

Joan Edwards (université de Wageningen, Pays-Bas) a ensuite mis en lumière l’intérêt des champignons anaérobies qui, grâce à leur puissante activité enzymatique, facilitent le travail des bactéries, augmentant de manière significative la digestibilité des fibres alimentaires. Le type de régime alimentaire, le transport, le stress et les médicaments sont les principaux facteurs qui peuvent amener à une dysbiose, soit une altération du microbiote, et, dans certains cas, participer au déclenchement de conditions pathologiques telles que des coliques, une diarrhée, une colite ou une fourbure. Des perspectives en matière de développement de probiotiques sur la base de ces découvertes ont été présentées.

Épigénétique

Pascale Chavatte-Palmer et Morgane Robles (Institut national de la recherche agronomique [Inra], France) ont pris la parole dans la journée du dimanche pour présenter les résultats de leurs recherches épigénétiques, c’est-à-dire concernant les modifications qui peuvent réguler l’expression de certains gènes. Dans l’équation globale de la performance, non seulement la génétique, mais aussi l’environnement, y compris l’environnement “précoce”, in utero, déterminent le phénotype final. Ces études se focalisent surtout sur l’influence que l’alimentation de la jument gestante peut avoir sur la santé et le développement du poulain. Sur un plan plus spécifique, une malnutrition de celle-ci, si modérée soit-elle, ne semble pas avoir de répercussions significatives sur la croissance du fœtus et sur son poids à la naissance, contrairement à une malnutrition sévère qui peut entraîner des effets néfastes sur ces deux paramètres. De même, une surnutrition de la jument semble provoquer peu d’effets, voire aucun, sur la croissance du fœtus, tandis que l’obésité est responsable d’un statut inflammatoire généralisé pouvant affecter négativement le nouveau-né (diminution de la sensibilité à l’insuline, lésions ostéochondrales, etc.). Une diète riche en amidon prédisposerait au développement d’ostéochondrose chez le poulain. Les lipides pourraient alors représenter une bonne alternative pour élaborer l’apport énergétique dans la ration des juments gestantes, en gardant à l’esprit que la qualité de leur source est cruciale. Enfin, bien que peu d’études existent sur les effets d’un excès ou d’un déficit de protéines sur la croissance du poulain, le rôle de la L-arginine, particulièrement abondante dans le lait de la jument, a été mis en avant et décrit comme essentiel dans l’angiogenèse, la prolifération cellulaire et la tolérance au glucose.

Remise de prix

Le prix pour la meilleure présentation a été attribué à Caroline Loos (University of Kentucky, États-Unis) pour son étude portant sur la réponse insulinémique des chevaux atteints d’une dysfonction du métabolisme de l’insuline face à une ration riche en protéines. Son étude suggère que l’apport quotidien de protéines, et pas seulement d’amidon et de sucre, devrait être pris en compte dans la prévention et le traitement de ces animaux.

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