MALADIES INFECTIEUSES
Cahier scientifique
Vu, lu, entendu…
Auteur(s) : Margherita Manfrin
Une journée de pathologie comparée à Maisons-Alfort a apporté un nouvel éclairage sur ces affections dont le diagnostic peut constituer un défi.
Afin de faire un point sur ces deux affections complexes et émergentes à l’échelle mondiale, qui peuvent atteindre l’homme comme les animaux, les différents aspects (de l’épidémiologie à la clinique, du diagnostic au traitement) de la leptospirose et de la maladie de Lyme ont été présentés par des spécialistes, lors d’une journée de pathologie comparée organisée en janvier par l’Académie vétérinaire de France à l’école d’Alfort. En médecine équine, ce sont nos confrères Jean-Luc Cadoré, Thomas Launois, Marianne Depecker et Marie-Capucine Dupuis Tricaud qui ont communiqué.
Alors que la leptospirose semble négligée et sous-diagnostiquée, la maladie de Lyme subit l’effet d’une médiatisation qui la rend souvent responsable de troubles en l’absence d’un vrai diagnostic.
Dans les deux cas, l’infection est causée par des spirochètes, soit des bactéries disposant d’endoflagelles qui les rendent très mobiles et leur permettent de diffuser rapidement dans tous les organes.
Dans la liste des 17 maladies tropicales négligées et prioritaires établie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la leptospirose n’est toujours pas citée, bien qu’elle soit endémique dans ces zones et qu’une augmentation des cas en France et dans le monde soit observée. En effet, les conditions météorologiques (inondations provoquées par ouragans et cyclones de plus en plus fréquents, et hivers plus doux), le manque d’hygiène, surtout dans certains pays, ainsi que le développement d’activités de loisir aquatiques en favorisent l’émergence.
Chez le cheval, l’expression clinique est peu fréquente, bien que cet animal soit particulièrement exposé à l’infection.
L’interprétation des tests diagnostiques est difficile et la réalisation d’une cinétique est indispensable pour distinguer une infection antérieure d’une forme clinique, d’autant plus que les anticorps persistent assez longtemps. Rares sont les indications d’une antibiothérapie.
Si des signes pathognomoniques (érythèmes migrants) existent chez l’homme, le tableau clinique est aspécifique chez les animaux.
Chez le cheval, la symptomatologie généralement attribuée à la maladie (raideur, boiterie, léthargie) n’a jamais été obtenue expérimentalement. En revanche, trois formes localisées ont été correctement documentées (oculaire, nerveuse et cutanée), mais sont probablement sous-diagnostiquées. Le plus souvent, le cheval présente des formes subcliniques et le diagnostic est difficile et souvent tardif. Une polymerase chain reaction (PCR) positive indique seulement la détection de l’ADN de la bactérie, qui n’est pas forcément vivante. Ce n’est qu’en présence de signes cliniques évocateurs et après exclusion d’autres causes qu’un résultat positif est significatif d’une infection, mais cela est rare en pratique. De même, concernant les tests sérologiques, des résultats faux négatifs et positifs sont possibles, un animal pouvant être exposé sans développer la maladie ou alors lors d’infection récente, par exemple. Ainsi, l’interprétation est toujours délicate et le contexte épidémiologique et clinique doit être pris en compte avant tout traitement antibiotique de longue durée.
La prévention reste le meilleur moyen pour lutter contre ces deux affections, grâce à des mesures hygiéniques pour la leptospirose et au contrôle des tiques pour la maladie de Lyme. Une sensibilisation de la communauté médicale apparaît nécessaire, ainsi que le développement de tests diagnostiques plus performants.