Diagnostic d’un uretère ectopique par urographie intraveineuse chez une ponette - Pratique Vétérinaire Equine n° 144 du 01/10/2004
Pratique Vétérinaire Equine n° 144 du 01/10/2004

Auteur(s) : A.-S. Léglise*, A. Couroucé-Malblanc**, E. Maurin***, I. Barrier-Battut****, S. Madec*****, D. Holopherne******

Fonctions :
*Clinique équine
École nationale vétérinaire de
Nantes,
Atlanpôle-La Chantrerie,
44307 Nantes Cedex

L’urographie intraveineuse est un examen diagnostique de choix lors de suspicion d’uretère ectopique. Cette technique ne peut toutefois être utilisée que chez les animaux de petite taille (poulains et poneys).

Chez les équidés, l’incontinence urinaire est un trouble rare et dû le plus souvent à une affection neurologique ; la myélite à herpès virus (rhinopneumonie EHV1), le syndrome de la queue de cheval et l’intoxication au sorgho sont les causes les plus fréquentes. Cependant, l’encéphalomyélite équine à protozoaires (EPM), les traumatismes médullaires ou sacro-coccygiens et les tumeurs, entre autres, peuvent aussi être incriminés. Les causes d’incontinence urinaire non neurologiques regroupent notamment les malformations congénitales – dont l’ectopie urétérale –, les cystites et urétrites, les urolithiases, les traumatismes de l’urètre occasionnés par le poulain lors du part ou par le spéculum lors d’un examen gynécologique, les néoplasies du bas appareil urinaire, l’incontinence urinaire œstrogéno-répondante, etc. [22, 24].

Cet article présente le cas d’une ponette atteinte d’incontinence urinaire et les différents examens complémentaires qui ont été nécessaires pour établir le diagnostic étiologique.

Cas clinique

Une ponette shetland naine âgée de neuf ans, pesant 110 kg, est amenée à l’École nationale vétérinaire de Nantes pour incontinence urinaire. Le propriétaire l’a achetée trois mois auparavant à un marchand de chevaux. Lors de l’acquisition, la ponette présentait déjà une incontinence urinaire.

Aucun commémoratif, ni aucune anamnèse concernant cette incontinence urinaire avant cette date n’est disponible.

Examen clinique

L’état général de la ponette est bon. Elle présente toutefois une dermatite en région ventrale et en face médiale des membres postérieurs (photo ). La peau est dépigmentée, dépilée, et érythémateuse en régions périvulvaire et ventrale. Sur la face médiale des membres postérieurs, cette dermatite devient croûteuse et purulente. Les sabots des membres postérieurs sont cerclés, la corne est ramollie, de mauvaise qualité, et pousse de manière excessive médialement.

Aucune miction normale n’est observée et l’incontinence urinaire se manifeste de plusieurs façons.

Lorsque les lèvres vulvaires sont écartées, et parfois même spontanément, quelques gouttes d’urine s’écoulent à la commissure inférieure de la vulve.

Lors d’augmentation de la pression abdominale, et notamment lorsque la ponette défèque, de l’urine est expulsée. Elle est émise juste avant la défécation avec peu de pression, de sorte qu’elle coule sur les membres postérieurs. La quantité d’urine émise est réduite par rapport à une miction normale. De plus, la ponette défèque souvent et en petite quantité, et se met alors en position de miction.

L’analyse d’urine et les paramètres rénaux sanguins (urée, créatinine) sont normaux. Aucun déficit neurologique n’est relevé.

Examens complémentaires : première série

Dans un premier temps, une échographie transrectale, une vaginoscopie et une vaginographie sont effectuées.

• L’échographie transrectale est réalisée à l’aide d’une sonde prostatique pour homme (photo ). L’examen révèle la présence, au-dessus de l’utérus, d’une structure longiligne qui contient un liquide de même échogénicité que l’urine. Ce liquide s’évacue, puisqu’il n’est pas retrouvé à chaque échographie. Aucune structure ressemblant à la vessie n’est identifiée sous l’appareil génital.

• La vaginoscopie ne révèle aucune anomalie, mais il est impossible de cathétériser l’urètre : la sonde reste bloquée au niveau du méat urinaire.

• Une vaginographie est effectuée en injectant du produit de contraste (Iopamiron 300®) à l’entrée du méat urinaire. Des clichés radiographiques du profil de l’abdomen caudal de la ponette debout sont réalisés. Les radiographies ne montrent aucune opacification correspondant à l’urètre ou à la vessie. Cependant, le produit de contraste marque légèrement le col utérin (photo ).

Essai d’un diagnostic thérapeutique

À ce stade, les examens complémentaires sont interrompus. L’hypothèse majeure est alors une incompétence sphinctérienne. À ce stade, un essai de diagnostic thérapeutique est effectué avec deux molécules qui sont prescrites chez la chienne atteinte d’incompétence sphinctérienne : la pseudo-éphédrine(1) (Sudafed®) et l’oxybutynine(1) (Ditropan®) [9]. La ponette reçoit un comprimé de Sudafed® matin, midi et soir et deux comprimés de Ditropan® matin, midi et soir.

Chez la chienne atteinte d’incompétence sphinctérienne, une amélioration est notée en une semaine [23]. Après ce délai, la ponette présente toujours une incontinence et un arrêt du traitement est décidé.

Examens complémentaires : seconde série

De nouveaux examens complémentaires sont entrepris : une endoscopie, une urographie intraveineuse et une échographie transabdominale.

• Une endoscopie des voies urogénitales est réalisée. Il est à nouveau impossible de progresser dans l’urètre. Durant cet examen, l’urine semble sortir d’un orifice non visible, situé en arrière du méat urinaire dans le vagin. Ce signe évoque fortement la présence d’un uretère ectopique.

• Pour vérifier cette hypothèse, une urographie intraveineuse est réalisée.

La ponette est anesthésiée. Un cathéter est placé dans la veine jugulaire droite. La prémédication est effectuée à l’aide d’acépromazine (0,02 mg/kg par voie intraveineuse). Vingt minutes plus tard, la sédation est obtenue avec de la romifidine (0,05 mg/kg par voie intraveineuse). L’induction de l’anesthésie a lieu cinq minutes après l’injection de romifidine, à l’aide de kétamine (2,2 mg/kg par voie intraveineuse) et de diazépam (0,1 mg/kg par voie intraveineuse). La ponette est alors couchée sur la table de radiographie, intubée et la sonde trachéale est branchée sur un appareil d’anesthésie gazeuse. L’anesthésie est maintenue avec de l’halothane.

L’appareil de radiographie utilisé est une table télécommandée Picker Universix 120. Les constantes sont de 90 kV et les mAs sont calculés grâce à un exposeur automatique.

Des radiographies de face et de profil sont réalisées sans préparation, puis 150 ml de Iopamiron 370® sont injectés rapidement dans le cathéter intraveineux. Des radiographies de face et de profil sont réalisées à la fin de l’injection (T0), dix minutes après l’injection (T10), puis à T15, T30, T40, T45 et T50.

À T0, stade du néphrogramme, le rein droit n’apparaît pas. Seul le rein gauche est visible. Il paraît hypertrophié, puisque sa longueur correspond presque à celle de cinq vertèbres (photo ), alors que la taille habituelle d’un rein est d’environ trois vertèbres.

À T10, stade du pyélogramme, les observations suivantes sont faites (photo ) :

- le rein gauche est hypertrophié. Généralement placé sous la dernière côte et les deux premières apophyses transverses lombaires [1, 18], il déborde ici crânialement de la 18e côte et caudalement de la 2e apophyse transverse lombaire ;

- le bassinet a une apparence normale ;

- l’uretère gauche est dilaté, mais conserve un péristaltisme (observé en radioscopie). Chez un cheval de taille moyenne, le calibre de chaque uretère est de 6 à 8 millimètres [1]. Ici, le diamètre de l’uretère gauche de la ponette a presque doublé ;

- le rein droit n’apparaît toujours pas.

À T45 et à T50, le produit de contraste transite dans l’uretère gauche (photos et ), mais progresse lentement, signe de la présence d’un méga-uretère. En revanche, la partie crâniale de l’uretère semble bien se contracter. L’uretère se termine très caudalement, de sorte qu’il court-circuite complètement la vessie. Il est envisageable qu’il vienne s’aboucher dans le vagin, mais il est difficile de déterminer le lieu de terminaison. Ni la vessie, ni l’urètre n’ont été observés pendant l’urographie.

• Une échographie transabdominale est alors réalisée. L’absence de rein droit est confirmée. La vessie n’est pas visible non plus. Le rein gauche mesure 16 centimètres de longueur, ce qui confirme l’hypertrophie constatée à l’examen radiographique. En effet, un rein gauche normal chez un cheval de taille moyenne (donc presque trois fois plus grand que cette ponette) mesure environ 18 centimètres [1]. En outre, l’absence d’hydronéphrose est confirmée.

Le diagnostic d’uretère ectopique gauche et d’agénésie du rein droit est établi.

Traitement

• Les possibilités de traitement de cette ponette sont limitées. Le traitement de l’ectopie urétérale est chirurgical et consiste à réaboucher correctement l’uretère dans la vessie. Cette opération nécessite donc, en premier lieu, la présence d’une vessie fonctionnelle.

Des complications, dont l’hydronéphrose, sont en outre fréquentes et peuvent entraîner une insuffisance rénale du côté opéré. Il est donc hasardeux d’opérer un animal qui ne possède qu’un rein.

La présence d’un uretère dilaté exclut généralement cette option thérapeutique.

Ces trois éléments (absence d’une vessie fonctionnelle, présence d’un seul rein et dilatation de l’uretère) rendent l’intervention chirurgicale inenvisageable et seuls des soins locaux (tonte et lavage de la zone périnéale et application régulière de vaseline en couche épaisse) sont mis en place et conseillés pour la suite. Un suivi de la créatininémie et de l’urémie est également préconisé afin de contrôler l’apparition d’une hydronéphrose (conséquence possible du méga-uretère), ainsi qu’une analyse d’urine pour détecter la présence d’une éventuelle infection de l’appareil urinaire.

Discussion

Malformations congénitales de l’appareil urinaire

L’ectopie urétérale

• L’ectopie urétérale est une anomalie congénitale, due à une mauvaise différenciation du métanéphros et/ou du mésonéphros pendant le développement embryonnaire du tractus urogénital [10]. Lorsque le canal métanéphrique ne migre pas crânialement au trigone vésical, les uretères ectopiques se terminent dans le col de la vessie ou dans l’urètre. De même, une anomalie dans la séparation des canaux métanéphrique et mésonéphrique provoque un abouchement des uretères dans l’utérus ou le vagin [4]. Ce serait le cas de cette ponette.

Il n’existerait pas de prédisposition liée au sexe ou à la race. Cette malformation congénitale peut être uni- ou bilatérale [10].

• En général, l’ectopie urétérale se manifeste depuis la naissance par une incontinence urinaire permanente, sous la forme d’une perte de gouttes d’urine, associée à la présence de mictions normales.

Dans le cas présenté, la ponette perd en effet des gouttes en permanence, mais elle n’urine jamais normalement. En effet, la vessie est court-circuitée par le seul uretère présent et ne se remplit donc jamais. L’émission d’urine lors d’augmentation de la pression abdominale est probablement associée à la présence du méga-uretère. Cet uretère, dilaté, peut contenir une certaine quantité d’urine qui est expulsée lorsque les organes abdominaux exercent une pression sur celui-ci.

• Chez les juments, il n’est pas toujours facile de repérer les pertes de gouttes d’urine. L’écoulement provoque toutefois une dermatite en régions péri- et sous-vulvaire, ventrale et au niveau des membres postérieurs. Le trouble peut ainsi être détecté lors des premières semaines ou des premiers mois de vie de la jument. Des diagnostics tardifs sont décrits (trois ans) [26], mais la découverte d’un uretère ectopique chez un animal âgé de neuf ans reste exceptionnelle. Cet aspect atypique et le manque d’anamnèse expliquent que cette hypothèse n’a pas été explorée en première intention.

L’agénésie rénale

• L’agénésie rénale est également une malformation congénitale, caractérisée par l’absence totale d’un ou des deux reins. Elle résulte d’une absence de fusion entre le canal métanéphrique et le tissu métanéphrogénique chez le fœtus. Lorsque cette malformation est bilatérale, l’animal est non viable. En revanche, une agénésie rénale unilatérale n’entraîne pas de signe clinique, le rein fonctionnel, souvent hypertrophié, compensant l’absence de l’autre. La malformation est alors souvent découverte fortuitement, comme ici, lors d’examens du tractus urinaire. L’agénésie rénale est souvent associée à des anomalies congénitales de l’appareil génital [10].

• Dans le cas décrit, il est impossible de dire si le rein droit n’existe pas ou si sa taille réduite ne permet pas de le repérer à l’échographie. Il peut donc s’agir aussi bien d’une agénésie que d’une hypoplasie ou d’une dysplasie avec atrophie. Seule une laparotomie exploratrice et un examen histologique permettraient de faire la différence. Cependant, l’urographie a montré que le rein droit, s’il existe, n’est pas fonctionnel.

L’agénésie et l’hypoplasie vésicales

L’agénésie et l’hypoplasie de la vessie sont des anomalies congénitales décrites chez la jument [10]. Dans le cas de cette ponette, la vessie peut être absente, ou tout aussi bien présente et non fonctionnelle. En effet, elle est complètement court-circuitée par le seul uretère présent et ne reçoit pas d’urine. Elle serait donc fibrosée, de taille réduite et non fonctionnelle, conséquences acquises des malformations congénitales précédemment citées.

L’impossibilité de cathétériser l’urètre peut donc s’expliquer de deux façons :

- soit une malformation congénitale (absence d’urètre) ;

- soit une atrophie et une fibrose de l’urètre, qui ne permet pas le passage de la sonde.

L’urographie intraveineuse

• L’urographie intraveineuse n’est pas l’examen de choix pour visualiser la vessie et l’urètre, mais permet, en revanche, de bien étudier les reins et les uretères. Elle est ainsi indiquée pour confirmer la présence d’un uretère ectopique et pour déterminer si d’autres anomalies des reins ou des uretères existent. Cependant, elle ne permet pas toujours de voir l’abouchement terminal des uretères [5, 26]. C’est pourquoi d’autres techniques radiographiques, comme la pneumocystographie ou l’urétro-vaginographie, sont parfois associées à l’urographie intraveineuse [5, 14]. La vaginocystographie rétrograde ne permet toutefois pas toujours de visualiser les uretères ectopiques [5, 8, 13].

Dans le cas présenté, ces techniques (pneumocystographie ou urétro-vaginographie) ne peuvent être mises en œuvre car le cathétérisme de l’urètre est impossible et la vaginographie n’apporterait pas d’informations. Ce qui a été noté lors de l’endoscopie de cette ponette permet de penser que l’uretère ectopique s’abouche dans le vagin.

Les faux négatifs sont rares avec l’urographie intraveineuse, qui reste la méthode la plus sûre de diagnostic des uretères ectopiques. Cette technique ne peut toutefois être utilisée que chez les foals et chez les poneys, et à l’aide d’un appareil radiographique puissant [4, 18]. Squire et coll. [25] réalisent tout de même des radiographies abdominales chez un cheval de 450 kilos après marquage des uretères.

• Hormis chez les foals et chez les poneys, la technique la plus fiable semble être l’endoscopie ; l’injection d’un produit qui colore l’urine permet de souligner les orifices par lesquels sort l’urine [16, 26]. Selon les publications, des produits, des doses et des voies d’administration variées sont proposés : le sodium de fluorescéine(1) (fluorescéine sodique Faure® 10 % ou 20 %, à la dose de 11 mg/kg, par voie intraveineuse), ou l’azosulfamide (à la dose de 1,9 mg/kg, par voie intramusculaire), le néoprontosil (par voie intraveineuse) [16, 26], la phénolsulfonphthaléine (à la dose de 0,01 mg/kg, par voie intraveineuse) et l’indigo carmine (à la dose de 0,25 mg/kg, par voie intraveineuse) [19]. En pratique, seul le sodium de fluorescéine(1) est disponible en France sous la forme d’une spécialité pharmaceutique.

L’architecture du rein et la dilatation des uretères peuvent être observées par échographie [5].

• Pour réaliser l’urographie intraveineuse de la ponette, du Iopamiron 370® lui a été administré. Ce produit de contraste contient du iopamidol, produit tri-iodé non ionique à élimination rénale.

Dans toutes les publications qui concernent l’urographie intraveineuse chez le cheval, les auteurs ont utilisé un autre produit iodé, le ditriazoate, dont il existe plusieurs noms déposés, comme Urografin® ou Renografin® [5, 6, 8, 15, 25, 26]. Ce produit de contraste est un produit ionique d’osmolarité élevée. Il est donc plus toxique et susceptible d’engendrer davantage d’effets secondaires que le iopamidol, produit non ionique et de faible osmolarité (616 mOsmol/kg) [3, 27]. Ainsi, Houlton et coll. [13] notent une augmentation transitoire de la fréquence et de l’amplitude respiratoires lors de l’injection intraveineuse de métrizoate, qui est un produit de la même famille que le ditriazoate.

Lors d’injection de produits de contraste iodés par voie intraveineuse chez l’homme, les accidents qui mettent la vie du patient en danger sont observés à la fréquence de 0,031 % avec les spécialités à osmolarité réduite (comme le iopamidol) contre 0,157 % avec les produits iodés hyperosmolaires conventionnels (comme le ditriazoate). Trois types de réactions immédiates sont observées chez l’homme :

- une réaction mineure (nausées, vomissements, frissons, urticaire, agitation, picotement dans le nez et éternuements) ;

- une réaction cardiovasculaire (hypotension associée à une tachycardie, choc vagal) ;

- une réaction anaphylactoïde (irritation nasale, œdème de la face et de la glotte et bronchospasme conduisant à l’asphyxie) [2].

Aucun effet secondaire pendant ou après l’injection de Iopamiron® n’a été noté chez la ponette.

En général, des produits tri-iodés ou hexa-iodés ioniques sont utilisés lors d’urographie intraveineuse chez le chien et chez le chat ; les produits tri-iodés non ioniques sont réservés aux myélographies. Toutefois, la faible osmolarité de ces derniers diminue considérablement les effets secondaires désagréables lors d’injection dans les vaisseaux. L’utilisation de ces produits lors d’examen urographique est donc médicalement intéressante. La seule barrière est le prix élevé de ces produits [2, 3]. Actuellement, il n’y a pas de recul sur les effets secondaires chez le cheval, mais ce produit semblerait médicalement plus indiqué que le ditriazoate.

La dose recommandée en iode lors d’urographie intraveineuse chez le poulain est de 880 mg/kg d’iode, soit 9,7 g pour cette ponette [15]. Cent cinquante millilitres de Iopamiron 370®, qui contient 370 mg/ml, ont été injectés, soit 5,55 g d’iode. Le produit est donc sous-dosé par rapport aux recommandations. Cela n’a toutefois pas affecté la qualité des images radiographiques et il semble donc possible de diminuer ce dosage.

L’incompétence sphinctérienne

• L’incompétence sphinctérienne, due à un tonus du sphincter urétral trop faible, est un trouble bien connu chez les chiennes [12].

Chez la jument, elle reste un diagnostic d’exclusion. En effet, seuls quelques cas sont décrits. Ces derniers semblent parfois répondre à l’administration d’œstrogènes [17, 28], qui influent sur les propriétés contractiles de l’urètre en augmentant la densité et la sensibilité des récepteurs a1 et en agissant directement sur les fibres musculaires lisses. Les œstrogènes ont en outre un rôle trophique pour la muqueuse et la vascularisation péri-urétrale chez l’animal incontinent [20]. Ils améliorent donc la fermeture urétrale et la fonction de stockage vésical. De plus, ils réduiraient le nombre de récepteurs cholinergiques de la vessie et diminueraient donc le tonus du détrusor [11]. Certaines incompétences sphinctériennes sont ainsi améliorées grâce à l’administration d’œstrogènes. Toutefois, dans les espèces autres que l’espèce équine, ce traitement entraîne des effets secondaires non négligeables à long terme : nymphomanie, coagulopathies, prolapsus du rectum et du vagin, toxicité pour la moelle osseuse, etc. Ainsi, Madison et Watson et coll. [17, 28] proposent de traiter les juments par cures. Si l’incontinence disparaît environ trois jours après le début du traitement, elle réapparaît rapidement (environ dix jours) après son arrêt.

Pour réduire encore les risques de survenue des effets secondaires, Madison et Watson et coll. [17, 28] ont recherché la dose minimale efficace. Celle-ci semble varier fortement selon les individus. Ce traitement n’est donc pas facile à mettre en place et n’est pas sans danger.

• Chez la chienne atteinte d’incompétence sphinctérienne, le traitement hormonal à base d’œstrogènes est souvent associé à un traitement à base d’α-adrénergiques, car ces deux types de molécules ont un mode d’action complémentaire et synergique : les œstrogènes augmentent la densité et la sensibilité a1-récepteurs et, donc, l’efficacité des agonistes α-adrénergiques [20]. Deux types de molécules, qui agissent à des niveaux différents (détrusor et sphincter), peuvent être utilisées. Il est d’ailleurs recommandé, lors d’administration d’un traitement diminuant la contractilité vésicale (oxybutynine(1)), d’associer un produit visant à augmenter le tonus urétral (pseudo-éphédrine(1)) [20].

Dans le cas décrit, ces deux médicaments humains (oxybutynine(1) et pseudo-éphédrine(1)), utilisés hors autorisation de mise sur le marché en extrapolant les données acquises chez le chien et chez le chat, ont été préférés aux œstrogènes. Il n’est pas possible de tirer de conclusions sur l’efficacité de ce traitement chez la jument, car la ponette n’était pas atteinte d’incompétence sphinctérienne. En revanche, aucun effet secondaire n’a été constaté chez cette ponette pendant une semaine de traitement.

Chez la chienne, la pseudo-éphédrine(1) peut provoquer une anxiété, une hyperactivité, une anorexie, une tachycardie, une hypertension et des désordres gastro-intestinaux. L’oxybutynine(1) peut entraîner un iléus paralytique, des vomissements, une constipation, une rétention urinaire, une sédation et une augmentation de la pression oculaire [7].

Ce type de traitement a été utilisé par Squire et coll [25] qui ont administré, pendant quatre-vingt-quatorze jours, de la phenylpropanolamine(1) (même mode d’action que la pseudo-éphédrine(1)) associée à de l’œstradiol chez une pouliche, incontinente à cause d’une faiblesse du sphincter urétral. L’incontinence a été légèrement améliorée.

L’incompétence sphinctérienne reste une affection marginale chez la jument. Cependant, il serait intéressant d’étudier l’efficacité de ce traitement, ses effets secondaires et leur prévalence dans cette espèce. S’il s’avérait qu’il est aussi bien toléré chez la jument que chez la chienne, il pourrait constituer une solution alternative aux œstrogènes et permettrait de traiter l’incompétence sphinctérienne sans interruption.

L’incontinence urinaire est un trouble peu fréquent chez les équidés. La dermatite induite par l’urine conduit à rechercher la cause et le traitement approprié. Lorsque l’incontinence urinaire est due à un uretère ectopique unilatéral, une néphrectomie du côté atteint est le plus souvent pratiquée. Lorsque les deux uretères sont ectopiques, une réimplantation correcte de ces uretères dans la vessie peut être tentée en pratiquant une urétérocystotomie. Ces techniques chirurgicales sont cependant très délicates. Lorsque l’opération chirurgicale ne peut être envisagée, comme c’est le cas ici, seuls des soins locaux quotidiens de la dermatite sont préconisés.

  • (1) Médicament à usage humain.

Éléments à retenir

• Un uretère ectopique peut s’aboucher dans le col de la vessie ou dans l’urètre, mais aussi dans l’utérus ou le vagin.

• L’émission de gouttes d’urine peut passer inaperçue. Ce sont alors les lésions cutanées associées aux écoulements qui permettent de détecter le trouble.

• Une agénésie rénale unilatérale n’a généralement pas de conséquences cliniques, car le rein présent, souvent hypertrophié, suffit à assurer les fonctions rénales.

• Les cas d’incompétence sphinctérienne décrits chez la jument sont rares. Le diagnostic est fondé sur une suspicion d’exclusion, qui peut être confirmée ou infirmée par un diagnostic thérapeutique.

Références

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