Maladie pulmonaire interstitielle éosinophilique chez un poulain âgé de deux ansPulmonary eosinophilic interstitial disease in a two-year old horse - Pratique Vétérinaire Equine n° 134 du 01/04/2002
Pratique Vétérinaire Equine n° 134 du 01/04/2002

Auteur(s) : X. D’ABLON*, G. FORTIER**

Fonctions :
*Clinique vétérinaire, 34, avenue Hocquart-de-Turtot, 14800 DEAUVILLE
**Laboratoire départemental Franck Duncombe, 14053 Caen Cedex 4

Un poulain pur-sang âgé de deux ans, à l’entraînement, est examiné pour une toux sévère et rebelle.

Cas clinique

Anamnèse

Quatre mois auparavant, le poulain a présenté une affection respiratoire infectieuse qui a rétrocédé à une antibiothérapie. Depuis, le cheval présente occasionnellement une toux légère en début de travail qui n’entrave cependant pas l’entraînement. Un mois plus tôt, une première récidive de la toux a conduit à suspecter une maladie inflammatoire des voies aériennes (Miva) et à prescrire de la prednisolone (1 mg/kg/jour par voie orale pendant dix jours).

À la fin du traitement, les symptômes sont identiques et un premier examen endoscopique des voies respiratoires est effectué. Une pharyngite folliculaire de grade 3 et un léger suintement des poches gutturales sont mis en évidence, mais aucune sécrétion anormale n’est présente dans la trachée. Les poches gutturales sont irriguées trois fois à quarante-huit heures d’intervalle  le dernier lavage n’est plus productif. Une antibiothérapie est instaurée pendant huit jours (ceftiofur : Excenel® à la dose de 2 mg/kg, administrée par voie intramusculaire, une fois par jour).

Malgré les traitements administrés, les symptômes persistent. Un traitement à basedethéophylline (Theostat®(1) 300 mg : 10 mg/kg matin et soir par voie orale) et de fluméthasone (Cortexilar® : 0,5 mg/100 kg par voie intramusculaire, deux fois à quatre jours d’intervalle) est mis en place.

Examen clinique

Le jour de l’examen, le dernier traitement instauré s’est révélé inefficace. Le cheval présente une toux fréquente au box et à chaque sortie, ce qui rend impossible son entraînement normal.

L’état général est satisfaisant et la température rectale est normale, ainsi que la fréquence respiratoire. Une pression sur le pharynx déclenche facilement une toux sévère. Aucun jetage anormal n’est observé. L’auscultation au sac provoque rapidement des quintes de toux, mais ne met en évidence aucune anomalie majeure, si ce n’est une augmentation modérée des bruits respiratoires et quelques rares crépitations.

Examens complémentaires

Une prise de sang est effectuée pour évaluer la numération et la formule sanguines et pour doser le fibrinogène. L’hématologie est normale, hormis un taux d’éosinophiles se situant à la limite supérieure (8 %, soit 930/mm3). Le taux de fibrinogène est normal (1,68 g/l).

L’endoscopie respiratoire montre la persistance de la pharyngite folliculaire, l’absence de toute sécrétion anormale dans la trachée et à la sortie des grosses bronches, et une hyperhémie bronchique (photo ). Le passage de l’endoscope dans la trachée provoque une toux sévère.

Un lavage broncho-alvéolaire (LBA) est pratiqué sous tranquillisation à l’aide d’une sonde adaptée. Les conditions de réalisation du lavage sont difficiles en raison des quintes de toux sévères et incoercibles. L’instillation d’un anesthésique local est nécessaire au bon déroulement du prélèvement. L’examen cytologique du lavage révèle une éosinophilie très marquée (54 %) et un taux de neutrophiles normal, à 5 % (tableau et photo ).

Une coprologie parasitaire ne met en évidence que quelques rares œufs de trichonèmes.

Les radiographies pulmonaires montrent une augmentation de densité diffuse de type interstitielle, et plus discrètement de type bronchique (œdème des bronches) (photo ).

Les biopsies pulmonaires percutanées et transbronchiques effectuées selon deux techniques différentes [2], mettent en évidence la présence d’une infiltration éosinophilique comprenant toutes les structures respiratoires : chorion, épithélium, septa alvéolaires. Le diagnostic anatomopathologique de bronchio-alvéolite éosinophilique diffuse est alors établi (photo ).

Autres examens

• Le résultat de la recherche directe de parasites dans le liquide de lavage est négatif.

• Des examens bactériologique et virologique ont été entrepris à partir de ces liquides respiratoires (tableau ). La bactériologie ne révèle pas d’anomalie, puisque les résultats, tant sur le plan qualitatif que quantitatif, sont proches de ceux qui sont obtenus chez des chevaux sans signes cliniques [5]. Le virus herpès de type 1 (EHV-1) est mis en évidence par amplification génique sur le troisième prélèvement, effectué un mois après le début des symptômes, (soit à J28). Cette méthode permet de détecter la présence du génome viral en très faible quantité dans le prélèvement, mais elle ne permet pas de savoir si les particules virales mises en évidence sont infectieuses ou issues de cellules infectées de façon latente par le virus (lymphocytes T notamment) et présentes dans le liquide (le prélèvement contenait 25 % de lymphocytes). Le cheval est cependant correctement vacciné contre la rhinopneumonie.

Hypothèses diagnostiques

L’éosinophilie est évoquée lorsque plus de 3 % d’éosinophiles sont présents dans le liquide de LBA [14].

Les hypothèses diagnostiques sont les suivantes [1, 4, 6, 9, 10] :

- la bronchite vermineuse à Dictyocaulus arnfieldi 

- lesmigrationsparasitaires (Ascaris ou Strongylus) ;

- l’éosinophilie pulmonaire interstitielle idiopathique ;

- l’éosinophilie pulmonaire associée à une habronémose cutanée ;

- la pneumonie fongique.

Traitement

Bien que le cheval ait été vermifugé à l’aide d’ivermectine trois mois auparavant, il reçoit de nouveau de l'ivermectine (200 μg/kg, deux fois à quinze jours d’intervalle).

Un traitement par aérosol (en nébulisation) est prescrit (80 mg de cromoglycate de sodium et 2 mg de dexaméthasone), à raison de deux séances par jour pendant dix jours.

Le cheval est mis au repos (sorties au pas).

Après ce premier traitement, le cheval est mis au pré et reçoit une corticothérapie par jours alternés à la dexaméthasone (0,1 mg/kg/j par voie intraveineuse pendant cinq jours, puis un jour sur deux pendant les cinq jours suivants, puis à demi-dose un jour sur deux pendant les cinq derniers jours). Un contrôle de LBA est pratiqué à la fin de ce traitement (tableau  : LBA à J28).

Évolution

Une réponse favorable au traitement est constatée, avec une disparition de la toux spontanée au repos. L’examen de contrôle montre une nette diminution de la toux provoquée et le passage de la sonde pour le premier LBA de contrôle est beaucoup plus aisé. Une baisse du taux d’éosinophiles à 14 % à J15, puis à 4 % à J28, associée à une augmentation du taux de neutrophiles et à l’apparition de mastocytes, est observée (tableau ) : une évolution vers un profil de cytologie plus “classique”, rappelant la MIVA, est amorcée.

De retour à l’entraînement après deux mois de mise au pré, le cheval ne manifeste aucun symptôme pendant plusieurs semaines. La cytologie du lavage pratiqué à son retour est proche de la normale (tableau  : J58). Par la suite, il manifeste de nouveau des signes cliniques d’une MIVA modérée qui altéreront ses performances pendant le reste de sa carrière.

Discussion

Prévalence

Peu de cas de maladie pulmonaire interstitielle éosinophilique (MPIE) non parasitaire sont décrits. Sur trois cents lavages broncho-alvéolaires [9, 10], dix cas d’éosinophilie respiratoire ont été diagnostiqués, parmi lesquels sept cas de bronchites à dictyocaule et trois cas de MPIE idiopathiques (deux cas chroniques, un cas aigu), dont un avec 59 % d’éosinophiles, ont été mis en évidence.

Dans une autre étude, le liquide de LBA de onze chevaux atteints d’une affection chronique et modérée des voies aériennes a été analysé [15] : deux chevaux âgés de quatre et neuf ans ont présenté une éosinophilie (47 % et 61 %). Aucun parasite n’a été trouvé dans le LBA, ni dans les fèces de ces deux chevaux.

Cette affection est également décrite dans les espèces canine [4], féline [12] et bovine.

Tableau clinique

Du point de vue clinique, notre cas se caractérise par une “hyperirritabilité” très marquée de l’appareil respiratoire, même au repos. Une hyperréactivité non spécifique des voies aériennes étroitement corrélée au degré d’éosinophilie a été évoquée [12]. Cette notion d’hyperréactivité non spécifique peut être objectivée par un test de provocation à l’histamine associé à la mesure de la compliance respiratoire (ce test n’est pas réalisé en pratique quotidienne).

L’évolution du cas présenté semble caractéristique de l’éosinophilie pulmonaire décrite par les mêmes auteurs chez les jeunes chevaux de course, affection qui surviendrait secondairement à une Miva “classique”.

L’incidence clinique de l’éosinophilie du liquide de LBA chez les jeunes chevaux de course a été étudiée en comparant cinq chevaux présentant une intolérance à l’effort et un LBA avec plus de 5 % d’éosinophiles à six chevaux normaux [12]. Ces chevaux révélaient des examens parasitaires (coprologie et LBA) négatifs et avaient été traités récemment à l’ivermectine. Tous les chevaux ont montré un “score respiratoire” (note globale de l’atteinte de l’appareil respiratoire) supérieur aux chevaux normaux et une forte corrélation a été établie entre le “score respiratoire” et le degré d’éosinophilie.

Le cas d’un foal âgé de quatre mois, atteint d’une pneumonie éosinophilique, mais ne présentant pas d’œufs d’ascaris à la coprologie, a été décrit [3]. Une toux et un jetage intenses, une auscultation anormale et une éosinophilie sanguine accompagnée d’une augmentation de la densité pulmonaire de type interstitielle à l’examen radiographique ont été rapportés. Ce cas aurait rétrocédé au traitement antiparasitaire associé à une antibiothérapie.

Un cas de MPIE aiguë chez un poney vivant à l’extérieur a été observé [8] : une détresse respiratoire sévère (dyspnée, cyanose, sifflements inspiratoires) avec une augmentation diffuse de densité de type interstitielle à la radiographie pulmonaire et la présence de sécrétions des muqueuses dans la trachée avaient été constatées. Ce cas a répondu favorablement à la corticothérapie.

Le cas clinique présenté ici semble original par rapport aux cas précédents en raison de l’absence de mise en évidence d’hypersécrétion bronchique, pourtant caractéristique de l’inflammation éosinophilique [6, 16], d’anomalie majeure de l’auscultation et de dyspnée. En revanche, les symptômes d’irritation bronchique (toux intense déclenchée par le passage de l’endoscope, toux au box, etc.) et d’hyperhémie de la muqueuse, correspondent bien aux signes décrits [12].

Il semble possible de distinguer dans le syndrome d’éosinophilie pulmonaire, une forme aiguë (pneumonie éosinophilique) et une forme chronique, dont les symptômes sont assez comparables à la MIVA.

Diagnostic différentiel

Le jeune âge du cheval (deux ans) a permis de retracer facilement son passé : régulièrement vermifugé, notamment à l’aide d’ivermectine trois mois auparavant, il n’a jamais été en contact avec des ânes et n’a pas été au pré depuis plus de huit mois.

Ceci exclut d’emblée la possibilité de migrations ascaridiennes ou strongyliennes, affections fréquentes chez le jeune poulain au pré et non vermifugé régulièrement (les migrations respiratoires se produisent en outre sept à quatorze jours après l’infestation) [1, 3, 6].

La dictyocaulose, première hypothèse diagnostique en cas d’éosinophilie pulmonaire chez l’adulte, est plus difficile à exclure. La bronchite à Dictyocaulus se caractérise, chez un cheval le plus souvent en contact avec des ânes (réservoirs du parasite) et non vermifugé régulièrement, par une toux marquée, des anomalies à l’auscultation, la présence d’un jetage et de sécrétions mucopurulentes dans la trachée. Parfois, des vers adultes sont observés à l’endoscopie, ainsi que des larves ou des vers adultes dans les liquides de prélèvement. Des œufs sont éventuellement présents à l’examen coprologique [1, 9, 14]. Si les signes cliniques ne sont pas toujours pathognomoniques, les larves de dictyocaules sont faciles à mettre en évidence dans les liquides de prélèvements respiratoires, après cytocentrifugation. Le parasite est enfin sensible à l’ivermectine à tous les stades biologiques.

Le contexte épidémiologique et le tableau clinique ne sont ainsi pas favorables à un diagnostic de dictyocaulose dans le cas décrit. En outre, aucun des prélèvements pratiqués, y compris la coprologie et les biopsies pulmonaires, ne met en évidence le moindre parasite respiratoire, ce qui rend improbable un trouble d’origine parasitaire, même s’il est impossible de l’éliminer avec certitude.

La pneumonie fongique, rare, ne s’accompagne pas systématiquement d’une éosinophilie pulmonaire. Son diagnostic s’établit grâce au lavage broncho-alvéolaire.

L’habronémiase cutanée est confirmée par une biopsie cutanée.

Le diagnostic de MPIE est ainsi établi par l’exclusion des différentes causes d’éosinophilie pulmonaire [6]. Chez des jeunes chevaux de course qui présentent une éosinophilie pulmonaire, récemment vermifugés à l’ivermectine et offrant des examens parasitologiques négatifs, ce syndrome se définit comme une forme particulière de MIVA à composante allergique [12].

Examens complémentaires

Le lavage broncho-alvéolaire est un examen de base en médecine respiratoire équine. Il s’agit d’un examen simple, sans risque et peu onéreux. Il peut être pratiqué à l’aide d’une sonde spéciale à ballonnet (à l’aveugle) ou d’un long endoscope dont l’extrémité est coincée à l’entrée d’une petite bronche. Cette dernière technique permet de choisir le site de prélèvement. Toutefois, dans notre cas, l’affection étant diffuse, la méthode de prélèvement importe peu. L’intérêt de ce type de prélèvement réside avant tout dans les études cytologiques.

Les analyses bactériologiques doivent être interprétées avec prudence car il ne s’agit pas d’une technique de prélèvement stérile, et il existe une contamination lors du passage dans les voies aériennes supérieures.

La cytologie normale est largement présentée dans la littérature [7, 9, 13, 14, 15]. Elle peut varier sensiblement selon la technique de prélèvement et du laboratoire. Il convient de toujours utiliser la même technique et de faire appel au même cytologiste.

Chez un cheval normal, le LBA ne contient aucun éosinophile et moins de 5 % de neutrophiles.

La maladie inflammatoire des voies aériennes est un syndrome inflammatoire non septique de l’ensemble des voies aériennes, qui atteint surtout les jeunes chevaux. Typiquement, elle se caractérise par une élévation du nombre total de cellules, une hausse modérée du taux de neutrophiles (elle est massive en cas de “pousse” ou de pneumonie), par une augmentation variable du taux de mastocytes et d’éosinophiles et généralement, par une lymphocytose.

La cellularité totale du prélèvement, très élevée à J0, diminue régulièrement jusqu’à J58, où elle retrouve un taux normal. En effet, les éosinophiles produisent des cytokines et des substances chimiotactiques qui attirent et activent un ensemble de cellules inflammatoires [6, 12]. Il est en outre connu que le lavage des voies aériennes de plus gros diamètre entraîne une présence plus élevée de cellules que lors de prélèvements dans les voies plus petites et plus distales.

La présence de nombreuses cellules épithéliales dans les différentes analyses cytologiques semble ainsi s’expliquer par ce phénomène, mais surtout, par la toux sévère au moment des prélèvements, qui gêne la progression de la sonde et provoque des microtraumatismes.

Le taux relativement bas de lymphocytes peut également s’expliquer par un prélèvement anormalement proximal. L’hyperréactivité bronchique, liée à l’éosinophilie, provoque sans doute une bronchoconstriction au moment du prélèvement, ce qui entraîne l’obtention d’un lavage plus proximal que chez un cheval normal.

Dans les voies aériennes hyperhémiées, la toux est en outre responsable de l’hémorragie pulmonaire au moment du prélèvement à J0 (30 000 hématies/mm3).

La baisse régulière de l’éosinophilie pulmonaire au fil des semaines est enfin remarquable.

Il existe une bonne corrélation entre les examens cytologiques de LBA et les examens anatomopathologiques pulmonaires. Ceci est d’autant plus vrai que l’atteinte est diffuse. Ce cas clinique en est une bonne illustration, puisque la biopsie pulmonaire confirme parfaitement le diagnostic de la cytologie. Chez le cheval, la biopsie pulmonaire est un examen complémentaire moins abordable et plus risqué (encadré 1). Elle n’est peut-être pas obligatoire pour établir le diagnostic dans notre cas clinique et possède plutôt un intérêt didactique face à une cytologie peu habituelle. Les résultats des biopsies pratiquées par les deux techniques différentes sont en outre identiques.

Les clichés radiographiques pulmonaires obtenus sont conformes aux descriptions de la littérature, mais sont peu spécifiques.

L’éosinophilie sanguine n’est pas un phénomène constant dans ce type de syndrome. Cependant, une différence significative entre l’éosinophilie périphérique chez les chevaux normaux et chez ceux qui sont atteints de MPIE a été mise en évidence [12].

La signification réelle de l’examen virologique dans ce cas laisse quelques interrogations en suspens. La technique actuelle ne permet pas de mettre en évidence avec certitude des particules virales latentes dans le génome de lymphocytes infectés et présents en grande proportion lors de l’examen cytologique. La mise au point de techniques de quantification de particules infectieuses en biologie vétérinaire est nécessaire pour différentier les phénomènes de latence, de réactivation/réexcrétion ou d’infection virale (typiques de la physiopathologie herpétique). En outre, dans de nombreux travaux de médecine comparée, les virus sont souvent considérés comme de bons “recruteurs” de polynucléaires éosinophiles, notamment selon les profils cytokiniques qu’ils déclenchent sur le site d’infection (cytomégalovirus, virus respiratoire syncitial, adénovirus, etc.) [11]. Cet axe de recherche mériterait sans doute d’être approfondi chez le cheval.

Traitement

La mise au repos est essentielle, car elle contribue sensiblement à diminuer les facteurs d’agression des voies aériennes, de même que la maîtrise de l’environnement (suppression de la paille, foin mouillé, etc.). Cependant, le phénomène d’“asthme d’effort”, bien décrit chez l’homme, n’a pu être mis en évidence chez les chevaux atteints de MPIE [12].

Le cromoglycate de sodium, traitement d’action locale, est reconnu comme un inhibiteur de la dégranulation des mastocytes, mais son mode d’action exact n’est pas élucidé. Il est couramment utilisé dans le traitement de fond et la prévention de l’asthme chronique chez l’homme. Dans ce dernier syndrome, les éosinophiles sont les cellules inflammatoires prédominantes, ce qui a justifié le choix du cromoglycate pour ce cas clinique. La physiopathologie des éosinophiles et des mastocytes est indissociable : la mobilisation tissulaire des éosinophiles est stimulée par les substances relarguées par les mastocytes, en particulier par l’histamine, de même que certains constituants des granules des éosinophiles régulent l’activité des mastocytes.

En l’absence de cause précise identifiée, le traitement de base reste non spécifique. La corticothérapie à dose immunosuppressive est le traitement de choix de tout syndrome éosinophilique, chez le cheval comme chez l’homme. Chez ce dernier, les corticoïdes par voie systémique ne sont presque plus utilisés. Le développement des corticostéroïdes d’action locale a révolutionné le traitement de l’asthme. Ils permettent en effet de s’affranchir des effets secondaires des corticoïdes administrés par voie générale. Chez le cheval, la voie d’administration locale permet, en particulier, d’éviter le risque de fourbure. Nous avons choisi de nébuliser la dexaméthasone pour des raisons de facilité et de coût, mais il existe dans la pharmacopée humaine de nombreux corticoïdes efficaces, adaptés à l’aérosolthérapie, qui ne sont quasiment pas absorbés par voie générale et dont l’utilisation est documentée chez le cheval (comme le budésonide en nébulisation : Pulmicort®(1)  ou la fluticasone en inhalation : Flixotid®(1)).

Il est à noter que la MPIE s’est développée dans ce cas clinique malgré la prescription de corticoïdes dans les semaines précédentes. Le cheval n’avait cependant pas reçu de corticoïdes par voie locale et les traitements prescrits ne correspondaient pas à des protocoles de thérapeutique immunosuppressive.

Une cause parasitaire ne pouvant être totalement éliminée, et par principe de précaution, le cheval a reçu un double traitement à l’ivermectine. Cette vermifugation ayant été effectuée en même temps que l’aérosolthérapie, la question de sa participation à l’efficacité du traitement reste posée.

Conclusion

La maladie pulmonaire interstitielle éosinophilique, bien décrite chez le jeune cheval de course, est un syndrome rare dont l’étiopathogénie n’est pas encore parfaitement élucidée. Associée à une clinique expressive, elle est certainement à rapprocher de l’asthme chez l’homme, en tout cas par le type de cellules inflammatoires en cause, par les symptômes et pour le traitement. Définir le syndrome de MPIE comme un trouble à médiation purement éosinophilique est vraisemblablement erroné, au même titre que considérer la MIVA comme un syndrome uniquement neutrophilique [12]. S’agit-il d’une forme particulière de MIVA, ou d’une progression naturelle de ce syndrome, voire d’une phase d’évolution vers la “pousse” ? La question reste entière puisque l’étiologie même de la Miva, dont l’incidence est élevée chez les jeunes chevaux de course, n’est pas non plus définie avec précision.

Note :

  • (1) Médicament à usage humain.

La biopsie pulmonaire chez le cheval

◊ Indications

Diagnostic des atteintes diffuses et analyse microbiologique.

Biopsie percutanée

- technique facile ;

 site ; 8e espace intercostal droit, à la hauteur de la pointe de l’épaule.

- préparation aseptique, anesthésie locale sous-cutanée et musculaire, incision cutanée ;

- biopsie avec aiguille type Trucut® (G14, 114 mm) ;

- complications rares mais sérieuses, potentiellement fatales (hémorragie, pneumothorax, choc neurogénique, dissémination d’un foyer infectieux) ;

- le contrôle échographique permet de diminuer les risques.

• Biopsie transbronchique

- technique simple également, mais qui nécessite un endoscope long de 1,80 m minimum ;

- l’extrémité de l’endoscope est coincée dans une petite bronche ;

- la pince à biopsie est enfoncée aussi loin que possible pendant l’inspiration, maintenue ouverte, puis refermée lors de l’expiration ;

- intérêt : rapide et sans risque, possibilité de sélectionner le site de prélèvement ;

- attention : souvent, seule la muqueuse bronchique est prélevée.

• Astuce

Le prélèvement est convenable lorsque celui-ci flotte dans le liquide de fixation.

Encadré 1. D’après [1, 2, 3].

Références

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  • 2. BEECH J. Use of percutaneous lung or pleural biopsy in clinical medicine. 4th Geneva congress of equine medicine and surgery. 1995 : 37.
  • 3. CARRICK JB. Eosinophilic pneumonia in a four-month-old quarter horse foal. Compend. Contin. Educ. Pract. Vet. 1994 : 1207-1210.
  • 4. CLERCX C, PEETERS D, SNAPS F et coll. Eosinophilicbronchopneumopathyindogs [Review]. J. V. Internal Med. 2000  14(3) : 282-291.
  • 5. COLLOBERT C, FORTIER G, PERRIN R et coll. Principales espèces bactériennes et fongiques retrouvées dans les prélèvements trachéaux et trachéo-bronchiques de chevaux. Prat. Vét. Equine. 1995  27(2) : 91-96.
  • 6. DARIEN BJ. Eosinophilic pneumonities in foals and horses. Compend. Educ. Pract. Vet. 1994 : 1210-1212.
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  • 8. DIXON PM, Mc GORUM BC, LONG KJ et coll. Acute eosinophilic interstitial pulmonary disease in a pony. Vet. Record. 1992  130 : 367-372.
  • 9. DIXON PM, RAILTON DI, Mc GORUM BC. Equine pulmonary disease : a case control study of 300 refered cases. Part 1 : Examination techniques, diagnostic criteria and diagnosis. EquineVet. J. 1995  27(6): 416-421.
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