Fiche juridique
CAHIER PRATIQUE
Fiche juridique
Auteur(s) : Vincent BOUREAU
Fonctions :
*17 Le Moulin Roty
**44390 Saffré
Seule une obligation de résultat en matière d’information s’applique au vétérinaire délivreur qui en atteste sur le certificat.
Le certificat d’engagement et de connaissance (CEC) est obligatoire depuis le 1er janvier 2023 pour tous les détenteurs d’équidés. Mais quelles sont les conséquences de sa mise en place pour les vétérinaires ?
Tout a commencé par la loi de lutte contre la maltraitance animale de novembre 2021, portée par Loïc Dombreval, qui concerne aussi bien les animaux de compagnie que l’ensemble des équidés [6]. L’esprit de cette loi est la prévention de la maltraitance animale et des achats irraisonnés ou compulsifs d’animaux par des personnes insuffisamment compétentes pour en assumer correctement la charge. Le législateur a clairement cherché à responsabiliser les détenteurs. En ce qui concerne les équidés, cette loi introduit dans le Code rural et de la pêche maritime un article qui précise l’obligation qui s’impose à tout détenteur, même non-propriétaire, dès le premier équidé détenu et quel que soit son statut, professionnel ou non : « Tout détenteur d’un équidé atteste de sa connaissance des besoins spécifiques de l’espèce » [4]. Elle ne s’applique donc pas simplement aux “acquéreurs”. Le détenteur n’est pas le propriétaire, mais la personne responsable qui, quotidiennement, a en charge l’entretien et les soins d’un ou de plusieurs équidés. Par conséquent, un propriétaire ou même un consortium de propriétaires ne sont pas soumis à l’obligation d’attestation de connaissance dès lors qu’ils ne sont pas détenteurs.
La loi précise que « lorsque la détention ne relève pas d’une activité professionnelle, l’attestation prend la forme d’un "certificat d’engagement et de connaissance des besoins spécifiques de l’espèce", signé par le détenteur » et que, « avant tout changement de détenteur d’un équidé, le propriétaire de l’animal s’assure que le nouveau détenteur a attesté de ses connaissances en application du premier alinéa ». Dès le départ, la distinction est donc faite entre un détenteur professionnel, qui doit ès qualités attester lui-même de sa capacité, et un détenteur amateur (non professionnel par exclusion), soumis à l’obtention d’un CEC dans lequel il s’engage formellement (figure). Il est également précisé qu’il est de la responsabilité du propriétaire de s’assurer que la personne à laquelle il confie son équidé est bien en mesure d’attester de ses connaissances, ou à défaut, s’il est lui-même détenteur, qu’il est en mesure d’en attester lui-même.
Un décret d’application paru en juillet 2022 modifie le Code rural et de la pêche maritime en précisant que, pour attester de ses connaissances, un professionnel peut se prévaloir de sa formation initiale, sans qu’il ait d’ailleurs besoin de justifier d’une formation continue ou complémentaire pour la mise à jour de ses connaissances [5]. En l’absence d’une formation initiale, une expérience de 18 mois au minimum au contact d’équidés (sans présumer de l’aspect qualitatif de cette expérience) est suffisante pour un professionnel. A contrario, l’obligation imposée aux particuliers est plus contraignante : ils doivent être récipiendaires d’un CEC délivré par une tierce personne, soit une personne morale issue d’une liste restreinte d’organismes professionnels, soit une personne physique qualifiée, donc un vétérinaire. Dans ce CEC, le détenteur particulier doit formaliser son engagement sur l’honneur, en recopiant de façon manuscrite, avant de signer, la phrase suivante : « Ayant pris connaissance de l’ensemble de ces informations et m’étant renseigné sur tous les éléments me permettant de respecter les besoins d’un équidé, je m’engage expressément à les respecter. »
Les modalités de délivrance du CEC et la liste des organismes professionnels habilités à le délivrer aux non-professionnels, en complément des vétérinaires, ont été récemment établies (encadré) [1]. Les formations initiales permettant aux détenteurs professionnels de la filière équine d’attester par eux-mêmes de leur connaissance des besoins de l’espèce sont également recensées, la liste étant susceptible d’évoluer [2].
Le contenu du CEC, c’est-à-dire les connaissances sur lesquelles s’engage le détenteur, est également défini par le décret d’application, en attente d’instructions techniques plus précises. L’information fournie par le délivreur doit impérativement être conforme aux textes. Les trois grands axes sont la santé (« les besoins physiologiques, comportementaux et médicaux en tenant compte de l’état des connaissances scientifiques »), l’identification (« les obligations relatives à la traçabilité et à l’identification de l’animal ainsi qu’aux conditions de transport »), et la responsabilité (« les implications financières et logistiques liées à la satisfaction des besoins physiologiques, comportementaux et médicaux tout au long de la vie de l’équidé ») [3, 5]. L’information peut être dispensée via une formation en présentiel ou à distance, à l’aide d’un support numérique ou pas.
Qu’il s’agisse d’une auto-attestation pour un professionnel ou d’un CEC délivré à un particulier, rien n’est prévu à ce stade pour la traçabilité et l’enregistrement dans une base de données quelle qu’elle soit. C’est donc au récipiendaire non professionnel qu’il incombe de conserver lui-même son CEC et d’être en mesure de le présenter à toute autorité, le cas échéant. Ce certificat d’engagement et de connaissance est délivré une fois pour toutes, le détenteur n’ayant pas à l’obtenir de nouveau lors de l’acquisition d’un autre équidé. À ce jour, aucun contrôle ni sanction ne sont prévus en cas de manquement par absence de CEC ou par non-respect de l’engagement initial. Cependant, il est probable qu'en cas de situation de maltraitance, ce manquement à l’engagement serait retenu comme un facteur aggravant par un tribunal.
La loi ne prévoit pas d’habilitation spéciale, donc tout vétérinaire est susceptible de délivrer le CEC. Il doit être identifié via son identité, sa qualité de docteur vétérinaire et son numéro ordinal, et sa signature sur le CEC atteste de la réalité et de l’efficience de l’information délivrée. Néanmoins, c’est le détenteur récipiendaire qui s’engage seul en apposant sa signature. Chaque vétérinaire est libre d’accepter ou non de délivrer un CEC à un détenteur particulier. Un modèle du certificat est mis à disposition par l’Association vétérinaire équine française (Avef)(1). Un vétérinaire qui ne souhaite pas le délivrer peut orienter le détenteur non professionnel vers l’un des organismes habilités, qui portera alors la responsabilité de l’information donnée et délivrera lui-même le CEC.
Pour un vétérinaire qui souhaite délivrer le CEC, profitant ainsi de l’opportunité du message de prévention pour développer sa relation client (par exemple), son obligation est celle inhérente à toute certification professionnelle. Cependant, sa responsabilité est limitée à une obligation d’information. Le vétérinaire délivreur du CEC ne pourra être tenu pour responsable de la mauvaise mise en application des connaissances acquises ou du non-respect des recommandations par le détenteur. Quel que soit le support d’information choisi, cela signifie que le vétérinaire doit s’assurer que l’information a bel et bien été reçue et comprise par le récipiendaire du CEC. C’est donc une obligation de résultat (et non pas de moyens) en matière d’information qui s’applique au vétérinaire délivreur.
Si la loi parle bien d’un « certificat délivré par un vétérinaire », il ne s’agit pas d’un certificat vétérinaire stricto sensu puisque, de facto, ce n’est pas le délivreur qui s’engage, mais le récipiendaire. Cependant, la responsabilité du délivreur pourrait être engagée si l’information délivrée n’était pas conforme aux données acquises de la science et effectivement comprise par le récipiendaire(2). En l’occurrence, aucune jurisprudence ne permet à ce stade d’orienter la réponse dans un sens ou dans l’autre, mais en tout état de cause, l’attention du vétérinaire délivrant le CEC doit être portée sur la validité scientifique de l’information fournie, et sur la confirmation via le consentement et la signature du détenteur que celui-ci a bien reçu et compris l’information dispensée. Ces deux points semblent essentiels pour préserver la responsabilité du vétérinaire délivreur.
- Fédération française d’équitation (FFE)
- Société d’encouragement à l’élevage du cheval français (LeTrot)
- France Galop
- Groupement hippique national (GHN)
- Société hippique française (SHF)
- Société française des équidés de travail (SFET)
- Fédération nationale des conseils des chevaux (FCC)
- Fédération nationale du cheval (FNC)
1. Arrêté du 29 décembre 2022 listant les organismes professionnels de la filière équine pouvant délivrer le certificat d’engagement et de connaissance pour la détention d’un équidé.
2. Arrêté du 29 décembre 2022 listant les diplômes, titres et certificats permettant aux détenteurs professionnels d’équidés d’attester de leur connaissance des besoins de l’espèce.
3. Code rural et de la pêche maritime. Article D214-37-1. Détention des équidés.
4. Code rural et de la pêche maritime. Art. L211-10-1. Les animaux de rente.
5. Décret n° 2022-1012 du 18 juillet 2022 relatif à la protection des animaux de compagnie et des équidés contre la maltraitance animale.
6. Loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes.