Chirurgie
Fiche
Auteur(s) : Charlène Sénéchal
Fonctions : Clinique Amalthea
LD Marfisola
20243 Prunelli-di-Fiumorbo
Au cours des heures qui suivent une envenimation par des chenilles processionnaires, une obstruction des voies respiratoires supérieures peut avoir lieu en raison de phénomènes inflammatoires au niveau des régions oropharyngée et laryngée. Une trachéotomie par sonde, ou trachéostomie temporaire, peut alors se révéler nécessaire, bien que ce cas se présente rarement [2].
Afin de ne pas pratiquer cette procédure en situation d’urgence, il convient d’intuber l’animal avec une sonde orotrachéale si cela est encore possible, ou de mettre en place un cathéter transtrachéal. La sonde de trachéotomie est choisie d’un diamètre extérieur occupant 50 à 75 % de la lumière trachéale, de façon à ce que la ventilation puisse se faire dans et autour du tube, et d’une longueur de six à sept anneaux trachéaux, soit environ 2 à 4 cm selon la taille de l’animal [2]. Les sondes en silicone sont moins traumatisantes pour la muqueuse trachéale. Les canules à double lumière et munies d’un ballonnet sont les plus adaptées en raison de leur facilité d’insertion, de retrait et de nettoyage, mais les sondes orotrachéales peuvent aussi être utilisées après quelques modifications [1].
La procédure est réalisée sous anesthésie locale si l’animal est inconscient, ou sous anesthésie générale. Après la préparation chirurgicale du site, la trachée est abordée ventralement par une incision médiane en regard des cinq premiers anneaux trachéaux. Les muscles sternohyoïdiens sont réclinés latéralement et le tissu conjonctif péritrachéal est disséqué en veillant à ne pas léser les structures anatomiques adjacentes telles que les nerfs laryngés récurrents, les artères carotides, les veines jugulaires, les glandes thyroïdes ou l’œsophage [1]. Plusieurs types d’incision de la trachée sont décrits, impliquant ou non les anneaux cartilagineux, ce qui influe sur la facilité de mise en place de la sonde. La technique choisie consiste à inciser transversalement le ligament annulaire, entre deux anneaux, sur un tiers de la circonférence au maximum [2].
La pose de la sonde est favorisée par l’écartement des anneaux distaux à l’aide d’un fil de traction. La portion intratrachéale du tube doit être parallèle à la paroi afin d’éviter les frottements. Pour limiter le risque de nécrose, le ballonnet n’est que modérément gonflé, et uniquement si l’animal nécessite d’être ventilé. Il doit être dégonflé et repositionné toutes les quatre heures pendant l’hospitalisation. Les muscles sont rapprochés et la peau suturée de façon lâche autour du tube afin de faciliter son retrait en cas d’obstruction (photo). Un bandage est utilisé pour sécuriser la sonde autour du cou de l’animal.
La trachéostomie temporaire est une procédure incluant de nombreux soins postopératoires, ce qui nécessite de placer l’animal en soins intensifs [2]. Il est recommandé de nettoyer la plaie opératoire ainsi que la sonde au minimum trois à quatre fois par jour et de les désinfecter à la chlorhexidine. La présence d’une canule interne amovible facilite cette manipulation. Il convient également d’humidifier l’air inspiré à l’aide d’un filtre humidificateur, en utilisant régulièrement un nébuliseur ou par des instillations de sérum physiologique dans la sonde toutes les deux heures [1]. L’irritation de la muqueuse trachéale par le tube ou l’air sec stimule la production de mucus qui doit être aspiré fréquemment pour éviter l’obstruction de la sonde et prévenir le risque d’asphyxie. La sonde est retirée le plus tôt possible, dès que la perméabilité des voies respiratoires hautes est rétablie, ce qui peut être vérifié en obstruant le tube avant son retrait. Les soins de la plaie sont poursuivis quotidiennement jusqu’à sa cicatrisation par seconde intention.
Les complications associées à cette procédure sont relativement fréquentes (jusqu’à 86 %) et potentiellement mortelles [3]. Il s’agit le plus souvent d’accidents lors de l’abord chirurgical entraînant une atteinte nerveuse ou vasculaire à l’origine d’une paralysie laryngée ou d’une hémorragie. L’obstruction de la canule (18 à 26 %) et son déplacement ou le retrait par l’animal (13 à 35 %) sont également rencontrés. L’aspiration des mucosités peut provoquer une hypoxie, des vomissements, un réflexe vagal ou des traumatismes de la muqueuse trachéale. Les autres complications possibles comprennent un emphysème sous-cutané, un pneumothorax, un pneumomédiastin, une nécrose trachéale, une infection trachéale ou une pneumonie. À long terme, la plus importante complication est la sténose trachéale avec une réduction de la lumière allant jusqu’à 25 % [3].
Conflit d’intérêts : Aucun