CARDIOLOGIE
Thérapeutique
Auteur(s) : Yassine Mallem
Fonctions : Unité de pharmacologie
et de toxicologie
Oniris
101 route de Gachet
44300 Nantes
L’association spironolactone-chlorhydrate de bénazépril offre un avantage clinique par rapport au chlorhydrate de bénazépril seul pour le traitement de l’insuffisance cardiaque congestive du chien.
Cardalis® est la seule spécialité pharmaceutique vétérinaire qui combine la spironolactone et le chlorhydrate de bénazépril (avec un ratio fixe de 8:1). Elle est indiquée (en association avec un diurétique, le cas échéant) pour le traitement de l’insuffisance cardiaque congestive consécutive à une maladie valvulaire dégénérative mitrale chronique chez le chien. Le mélange spironolactone et chlorhydrate de bénazépril possède un effet antagoniste additif sur le système rénine-angiotensine-aldostérone qui affiche, lors d’une administration à long terme, un bénéfice clinique supérieur à celui conféré par le chlorhydrate de bénazépril seul chez les chiens atteints d’une forme légère, modérée ou sévère d’insuffisance cardiaque congestive (tableau) [7].
La (sur) stimulation du système rénine-angiotensine-aldostérone fait partie des mécanismes neuro-hormonaux induits par la diminution du débit cardiaque due à la maladie valvulaire dégénérative mitrale chez le chien [3]. Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IECA) réduisent les effets délétères du système rénine-angiotensine, mais ne semblent pas apporter davantage de bénéfices en ce qui concerne la morbi-mortalité sur le long terme, en raison de l’induction de mécanismes d’échappement (fuite de l’aldostérone) [1, 2, 5, 11]. L’augmentation de la production d’aldostérone qui en résulte peut aggraver le pronostic clinique (effets inflammatoire et fibrotique) et justifie la stratégie d’associer un anti-aldostérone au traitement avec un IECA [4, 12].
Peu d’études ont montré de manière évidente, sur le long terme, la supériorité du traitement qui bloque de façon combinée le système rénine-angiotensine-aldostérone (incluant IECA et spironolactone) sur celui sans spironolactone, chez des chiens atteints d’insuffisancecardiaque congestive causée par une maladie valvulaire dégénérative mitrale [4, 13]. Dans leurs recommandations publiées en 2019, les experts de l’American College of Veterinary Internal Medicine (Acvim) conseillent d’associer un anti-aldostérone à un IECA pour la prise en charge de chiens souffrant d’insuffisance cardiaque congestive (stades C et D) due à une maladie valvulaire dégénérative mitrale [10].
Cette recommandation a récemment été confortée par une étude multicentrique randomisée menée sur une durée de 360 jours, la benazepril spironolactone study [8]. Elle a montré que Cardalis® (spironolactone à 2 mg/kg, chlorhydrate de bénazépril à 0,25 mg/kg) apporte un bénéfice additionnel par rapport au chlorhydrate de bénazépril utilisé seul (à la dose de 0,25 mg/kg) chez des chiens atteints d’insuffisance cardiaque congestive consécutive à une insuffisance valvulaire mitrale, et traités simultanément avec du furosémide (moins de 8 mg/kg par jour per os).
Dans cette étude, le traitement à base de Cardalis® réduit le risque de mortalité, améliore la qualité de vie et prolonge le temps de survie des chiens atteints d’insuffisance cardiaque congestive légère, modérée ou sévère. En revanche, l’intérêt clinique de la combinaison spironolactone-chlorhydrate de bénazépril n’a pas été confirmé chez des chiens atteints d’une maladie valvulaire dégénérative mitrale dans sa phase asymptomatique, malgré des effets positifs avérés sur le remodelage myocardique [6].
L’intérêt clinique de l’association spironolactone-chlorhydrate de bénazépril réside dans la complémentarité et l’additivité de leurs actions pharmacologiques. Ces deux molécules sont supposées limiter l’hypertrophie myocardique et exercer une action antifibrotique, deux effets qui résulteraient de la diminution de la sécrétion d’aldostérone (effet attribué au bénazéprilate) et de l’antagonisme compétitif de ses récepteurs minéralocorticoïdes aux niveaux cardiaque, vasculaire et rénal [7, 4, 6, 9]. La réduction de la fibrose limiterait le remodelage myocardique et valvulaire et contribuerait ainsi à l’amélioration des fonctions systolo-diastolique et endothéliale. L’effet cardioprotecteur apporté par l’association de spironolactone et de chlorhydrate de bénazépril est également relié à une diminution de la pression artérielle grâce à l’augmentation de la natriurèse et à une vasodilatation périphérique (réduction de la précharge et de la postcharge).
Cardalis® est disponible sous la forme de comprimés aromatisés à croquer. Il doit être administré par voie orale avec la nourriture à une dose quotidienne de 0,25 mg/kg de chlorhydrate de bénazépril et de 2 mg/kg de spironolactone. L’association de ces deux molécules possède un bon profil de sécurité, presque identique à celui du chlorhydrate de bénazépril seul. Des épisodes de diarrhées et de vomissements peuvent toutefois survenir, mais ils sont le plus souvent transitoires. Cardalis® n’augmente pas davantage le risque d’hyperkaliémie que le chlorhydrate de bénazépril seul, mais la fonction rénale et le taux sérique du potassium doivent être systématiquement contrôlés avant et pendant le traitement chez les chiens souffrant d’une insuffisance rénale [7].
Conflit d’intérêts : Aucun
L’efficacité clinique de l’association spironolactone-chlorhydrate de bénazépril est démontrée pour le traitement de l’insuffisance cardiaque congestive canine. Elle résulte de leur mode d’action complémentaire qui permet d’obtenir un blocage plus complet du système rénine-angiotensine-aldostérone. La bonne sécurité d’emploi de ces deux molécules et leur présentation en un seul comprimé permettent une meilleure observance du traitement.