LES AFFECTIONS TENDINEUSES ET LIGAMENTAIRES DE L’ÉPAULE - Le Point Vétérinaire n° 423 du 01/11/2021
Le Point Vétérinaire n° 423 du 01/11/2021

ORTHOPÉDIE

Dossier

Auteur(s) : Chloé Martin*, Mathieu Manassero**, Alexandre Fournet***

Fonctions :
*Clinique vétérinaire des Ducs de
Bourgogne
Service de chirurgie
11 ter rue Paul Langevin
21300 Chenôve
**(DIU de coeliochirurgie, dipl. ECVS)
ENV d’Alfort
Service de chirurgie, Chuva
7, avenue du Général de Gaulle
94700 Maisons-Alfort
***(dipl. ECVS)
Centre hospitalier vétérinaire Massilia
Service de chirurgie
121, avenue de Saint-Julien
13012 Marseille

Un examen orthopédique et le recours à l’imagerie médicale sont nécessaires pour diagnostiquer les affections tendineuses et ligamentaires de l’épaule et proposer un traitement médical ou, plus rarement, chirurgical.

L’origine d’une boiterie du membre antérieur diffère selon l’âge du chien. L’ostéochondrite disséquante de l’épaule, la dysplasie du coude et les affections traumatiques dominent chez le jeune en croissance, tandis que les affections tendineuses et ligamentaires concernent plutôt le chien adulte. L’objet de cet article est de présenter les affections tendineuses et ligamentaires de l’articulation scapulohumérale, en décrivant les éléments épidémiocliniques, la physiopathologie, la démarche diagnostique, et enfin le traitement des affections les plus fréquentes.

1. AFFECTIONS DU TENDON DU BICEPS BRACHIAL

Tendinopathie du biceps brachial

Physiopathologie et épidémiologie

La tendinopathie du biceps brachial correspond à une inflammation du tendon et de sa gaine d’origine primaire ou secondaire. Elle est considérée comme l’affection la plus fréquente de l’épaule [4]. Les formes primaires, qui résulteraient de microtraumatismes répétés notamment lors de l’exercice, vont jusqu’à la formation de calcifications dans un contexte inflammatoire chronique [14]. Les formes secondaires sont consécutives à un traumatisme direct ou indirect, une inflammation articulaire, une irritation par une souris articulaire (comme un lambeau cartilagineux dans le cadre d’une ostéochondrite disséquante) ou à des minéralisations péritendineuses, notamment celle du tendon du muscle supra-épineux, ce dernier s’apposant le long du tendon du biceps [4, 29, 30, 31]. Cette affection touche principalement les chiens de de taille moyenne à grande adultes (âge moyen de 4 à 7 ans) [31]. Les chiens de travail ou sportifs et les chiens sédentaires en surpoids seraient principalement affectés.

Diagnostic clinique

À l’examen orthopédique, une boiterie avec appui unilatérale (ou plus rarement bilatérale) est observée, d’évolution chronique avec une apparition insidieuse, s’aggravant à l’effort. Un épaississement dans la région de la coulisse bicipitale peut être palpé, et la flexion/extension de l’épaule est dou loureuse [33]. Une amyotrophie des muscles infra-épineux et supra-épineux est fréquente [4]. Le chien peut présenter un test du tendon du biceps, un test du tiroir et un test de rétraction du biceps positifs(1) [6]. Des examens d’imagerie sont recommandés en raison de la faible spécificité de ces tests.

Examens d’imagerie

À la radiographie, des minéralisations peuvent habituellement être observées en regard de la coulisse bicipitale, sur des clichés de profil ou en vue “skyline” (épaule en flexion, tir parallèle à la tête humérale), bien qu’elles ne soient pas spécifiques. Il est fréquent qu’aucune anomalie radiographique ne soit décelable sur des clichés sans préparation [4, 15].

Sur des clichés d’arthrographie, des irrégularités de contour, un défaut de remplissage de l’espace intra-articulaire ou la présence de souris articulaires (images par soustraction) peuvent être visualisés [31].

L’échographie apporte une grande aide à la caractérisation d’une tendinopathie du biceps brachial en première intention (photos 1a et 1b) [7].

L’arthrographie scanner ou l’examen d’imagerie par résonance magnétique (IRM), à envisager en seconde intention, permettent de réaliser un bilan lésionnel lorsque plusieurs structures musculosquelettiques sont suspectées d’être impliquées [23].

L’arthroscopie, plus invasive, permet une visualisation directe du tendon entouré de sa gaine, et la recherche de tout autre facteur intra-articulaire susceptible d’être à l’origine d’une tendinopathie secondaire. En revanche, les remaniements intratendineux ne sont pas visibles ; l’arthroscopie est donc moins sensible que l’échographie à un stade précoce [29, 31].

Traitements

Lors de tendinopathie du biceps brachial secondaire, il convient de traiter en priorité la cause sousjacente : retrait du lambeau cartilagineux en cas d’ostéochondrite disséquante, ténectomie partielle du tendon du muscle supra-épineux lors de lésion, stabilisation de l’épaule face à une entorse grave [29]. Ces mesures seules doivent permettre une amélioration. Lorsqu’elles ne permettent pas de résoudre la boiterie, il convient de suivre les recommandations pour le traitement de la tendinopathie primaire.

Traitement médical

Le traitement médical consiste en une période de repos d’au moins trois mois, couplée à la prescription d’un anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS)

Spar voie orale pendant deux à trois semaines, en association avec un programme de rééducation(2) [21, 31]. Chez environ 75 % des chiens atteints de tendinopathie du biceps brachial primaire, le traitement médical permet une résolution de la boiterie [4, 33]. Il est possible d’effectuer une infiltration intra-articulaire ou intratendineuse échoguidée de corticoïde (20 à 40 mg d’acétate de méthylprednisolone à la même dose pour tous les chiens). Toutefois, celle-ci n’a pas montré d’efficacité supérieure par rapport aux AINS per os [4, 12]. Des injections intratendineuses échoguidées de plasma riche en plaquettes ou de cellules souches mésenchymateuses sont décrites, mais aucune étude ne documente leur intérêt par rapport aux autres approches [29].

Traitement chirurgical

En cas d’échec au traitement médical, une ténotomie du tendon du biceps (par arthrotomie ou arthroscopie) est recommandée et permet une amélioration de la boiterie avec un retour d’activité en douze semaines, sous réserve de l’absence d’arthrose lors de la prise en charge [29, 31]. En revanche, le tendon du biceps ayant un rôle important de stabilisateur passif de l’épaule, il n’est pas exclu qu’une instabilité soit créée avec cette technique, pouvant induire des lésions sur les autres structures ligamentaires et tendineuses [29, 31, 32].

Déplacement médial du tendon du biceps brachial

Physiopathologie et épidémiologie

Le déplacement médial du tendon du biceps est une malposition intermittente de ce tendon, qui sort de sa coulisse lorsque le membre est en extension. Il résulte d’une rupture du ligament huméral transverse, probablement traumatique [1, 29, 31]. Cette affection semble plus fréquemment signalée chez les races de sport telles que le greyhound et le border collie, mais également chez le berger allemand et le lévrier afghan. Elle concerne les chiens adultes [29].

Diagnostic clinique et examens d’imagerie

Le déplacement médial du tendon du biceps brachial est à l’origine d’une boiterie peu caractéristique unilatérale, d’une sévérité et d’une durée variables. À l’examen orthopédique, cette affection se caractérise par une luxation médiale du tendon lorsque l’épaule est en extension et en supination, avec un ressaut perceptible pathognomonique. Elle peut s’accompagner d’une atrophie des muscles infra-épineux, supra-épineux et deltoïde. Les examens d’imagerie disponibles ne sont généralement pas diagnostiques, car le plus souvent ils ne montrent aucune anomalie [29].

Traitement

Le traitement est chirurgical, via une réparation primaire du ligament huméral transverse par des sutures en huit autour de vis aux insertions du ligament ou par fixation d’une grille de polypropylène avec des agrafes [1, 3]. En période postopératoire, le membre doit être immobilisé dans un pansement en soustraction d’appui pendant une semaine, puis une reprise d’activité progressive est entreprise pendant un mois (photo 2). Le pronostic de récupération est excellent [3].

Rupture du tendon du biceps brachial et de sa gaine

Physiopathologie et épidémiologie

La rupture du tendon du biceps et/ou de sa gaine est une affection rare, d’origine traumatique, sans prédisposition de race. Elle résulte d’une lacération, d’une déchirure du tendon, ou de son avulsion du tubercule supraglénoïdal [29, 34, 17].

Diagnostic clinique et examens d’imagerie

À l’examen orthopédique, le chien présente une boiterie unilatérale d’apparition aiguë à la suite d’un traumatisme, avec une tendance à l’aggravation après l’exercice. Les tests du tendon du biceps et de rétraction du biceps peuvent être positifs [6, 31]. Dans un contexte aigu, aucune anomalie n’est visible à la radiographie. Une rupture de la gaine peut être mise en évidence sur des clichés d’arthrographie via une fuite du produit de contraste dans sa portion distale [17]. L’échographie d’une rupture du tendon en phase aiguë montre des foyers de matériel hétérogène hypoéchogènes en son sein, plus ou moins associés à une distension synoviale [34]. La rupture du tendon peut également être évaluée sous arthroscopie [34]. En revanche, une déchirure de la gaine peut passer inaperçue du fait de sa localisation distale [17].

Traitement

Seul le traitement chirurgical est décrit comme fructueux. Il consiste à effectuer une ténodèse du biceps, qui permet une amélioration de la boiterie [17, 29, 34]. Cette affection étant rare, peu de cas sont décrits dans la littérature.

2. TENDINOPATHIE DU MUSCLE SUPRA-ÉPINEUX

Physiopathologie et épidémiologie

La tendinopathie du muscle supra-épineux est une inflammation du tendon de ce muscle. Elle serait liée à une hypoxie chronique du tendon, qui contribuerait à la formation de minéralisations. Une forme sans minéralisation existe néanmoins [18, 19, 29]. Les manifestations et signes cliniques de la tendinopathie du muscle supra-épineux sont très similaires à ceux de la tendinopathie du biceps brachial. L’affection concerne les chiens adultes de races de moyen à grand format, avec une prédisposition pour le rottweiler et le labrador [18, 19, 29].

Diagnostic clinique et examens d’imagerie

Les chiens manifestent une boiterie unilatérale chronique avec une tendance à l’aggravation au cours de la journée et après l’effort. Le test du tendon bicipital peut être positif.

L’enjeu des examens complémentaires lors de tendinopathie du muscle supra-épineux est de réaliser un bilan complet, afin d’exclure toute autre cause de boiterie. En effet, cette affection présente une similarité de tableau clinique avec la tendinopathie bicipitale, et des minéralisations tendineuses peuvent être présentes de façon inconstante. L’IRM est donc l’examen de choix. Une première évaluation peut cependant être effectuée par des radiographies de l’épaule avec une vue “skyline”, ou par une échographie, afin de différencier les minéralisations dans le tendon du biceps de celles éventuellement présentes dans le supra-épineux (photo 3) [18, 19, 23].

La localisation des minéralisations a une importance clinique : un foyer en profondeur dans le tendon, médialement, à proximité du tendon du biceps, est davantage susceptible d’être à l’origine d’une boiterie. L’élargissement du tendon, souvent secondaire à cette calcification, peut conduire à une impaction du tendon du biceps, provoquant une inflammation de ce dernier [18, 29].

Traitements

Traitement médical

Un traitement médical doit être proposé en première intention, avec une mise au repos d’au moins trois mois et la prescription d’AINS par voie orale, associé à une rééducation. Une récidive de la boiterie est cependant décrite chez 33 % des chiens [5]. L’efficacité des injections échoguidées intratendineuses de plasma riche en plaquettes seules n’a pas été prouvée [16]. En revanche, l’injection de plasma riche en plaquettes associé à des cellules souches mésenchymateuses permet une amélioration chez près de 90 % des chiens en trois mois (encadré) [5]. Par ailleurs, deux études récentes faisant état de l’utilisation des ondes de choc mentionnent respectivement 64 % et 85 % de résultats bons à excellents, à moyen et long termes. Cependant, le faible nombre de cas rapportés ou l’absence de standardisation des protocoles utilisés ne permettent pas de conclure définitivement quant au bénéfice de cette technique [2, 20, 21].

Traitement chirurgical

Face à un échec du traitement médical, une approche chirurgicale peut être proposée, avec des incisions tendineuses et l’exérèse des calcifications grâce à une ténectomie partielle [18]. Une persistance ou une récidive de la boiterie est néanmoins constatée chez 55 % des chiens traités chirurgicalement [5]. Dans le cas d’une impaction du tendon du biceps, l’exérèse des calcifications du tendon du muscle supra-épineux permettrait de diminuer l’inflammation, par la suppression de la gêne mécanique. Une ténotomie du biceps n’est pas à envisager en première intention [29].

3. LUXATIONS SCAPULOHUMÉRALES

Dans une étude portant sur 130 chiens souffrant d’une instabilité de l’épaule, toutes causes confondues, 77 % présentaient une instabilité médiale, 18 % une instabilité multidirectionnelle et 5 % une instabilité latérale [13].

Luxations traumatiques

Physiopathologie et épidémiologie

Lorsque l’origine de la luxation scapulohumérale est traumatique, elle peut être associée à des fractures scapulaires ou humérales. Cette affection est rare, et résulte le plus souvent en une instabilité médiale, bien qu’elle soit décrite comme plutôt latérale chez les chiens de races de grande taille [29].

Diagnostic clinique et examens d’imagerie

La luxation traumatique de l’épaule se manifeste par une boiterie unilatérale d’apparition aiguë dans un contexte de traumatisme, associée à une instabilité pouvant être médiale, latérale, craniale ou caudale. Le port du membre est altéré, son extrémité est en adduction en cas de luxation latérale, et en abduction en cas de luxation médiale. Une malposition de l’acromion vis-à-vis du tubercule majeur peut être palpée, sauf en cas de gonflement articulaire important en lien avec le traumatisme. Le test du tiroir est positif lors de luxation craniale ou caudale [21]. Des radiographies de l’épaule, de face et de profil, permettent de confirmer le diagnostic [29].

Traitements

Immédiatement après le traumatisme, un traitement conservateur à l’aide d’un bandage contentif seul, après une réduction de la luxation, affiche de bons résultats. Il reste en place pendant deux semaines et est suivi de deux à six semaines de restriction stricte de l’activité (promenades hygiéniques en laisse courte), puis d’une rééducation.

En cas de luxation médiale, un bandage Velpeau est indiqué, cette contention induisant une adduction de l’épaule. En cas de luxation latérale, craniale et/ ou caudale, une adduction n’est pas souhaitable. Un bandage contentif renforcé d’attelles (spica splint) est donc privilégié (photos 4a et 4b) [21, 29]. Des attelles et bandages spécifiques sont conçus et commercialisés à cet effet.

Si la réduction est impossible ou qu’une instabilité persiste après un traitement conservateur, une approche chirurgicale est nécessaire : les ligaments gléno-huméraux et la capsule articulaire sont reconstruits par suture, et la stabilité est renforcée par la mise en place d’une prothèse, d’une plaque temporaire ou d’un fixateur externe [24, 27]. En cas d’instabilité majeure ou de dégâts ligamentaires étendus, une immobilisation définitive par arthrodèse peut être envisagée en dernier recours. Excepté lors d’arthrodèse en raison d’une boiterie persistante, le pronostic de récupération de cette affection est bon [29].

Instabilité médiale de l’épaule

Physiopathologie et épidémiologie

L’instabilité médiale de l’épaule affecte les chiens de races de petite et grande tailles. Les petits chiens, en particulier les formats nains ou toys, présentent une laxité congénitale des tissus mous de l’épaule et sont prédisposés à la dysplasie de la glène. L’aspect congénital fait que les animaux atteints sont symptomatiques dès l’âge de 3 à 10 mois. Il existe des prédispositions chez le caniche nain et toy, le chihuahua, le loulou de poméranie, le berger des shetlands, le teckel, le carlin, le pékinois, le pinscher nain, le lhassa apso et le cavalier king charles [29]. Chez les chiens de grande taille, cette instabilité résulterait de microtraumatismes et atteindrait donc plutôt les chiens sportifs. Elle serait l’une des causes les plus fréquentes de boiterie de l’épaule chez les chiens adultes [29].

Diagnostic clinique

Cette instabilité est à l’origine d’une boiterie chronique unilatérale, avec l’extrémité du membre tenue en abduction et le coude fléchi et en adduction. À l’examen orthopédique, le test du tendon bicipital et le test du tiroir médio-latéral peuvent être positifs [11]. Chez un animal sédaté, une augmentation de l’angle d’abduction peut être mesurée par goniométrie. Cette mesure est significative lorsque la différence par rapport à l’épaule controlatérale est supérieure à 20° [8].

Examens d’imagerie

Cette augmentation d’angle peut également être mise en évidence par la radiographie sous contrainte. Des clichés radiographiques standards apportent peu d’informations (signes d’arthropathie non spécifiques) et le compartiment médial est difficilement accessible par l’échographie [7, 10]. L’IRM ou l’arthrographie scanner sont des examens non invasifs qui permettent une bonne évaluation des structures musculo-tendineuses de l’épaule. Ils sont cependant statiques et ne peuvent pas révéler directement une instabilité [12, 23].

Arthroscopie

Le diagnostic définitif d’instabilité médiale est établi par l’arthroscopie qui permet de vérifier les atteintes sur le ligament gléno-huméral médial, le tendon du muscle subscapulaire et la capsule articulaire [24]. Certaines lésions non spécifiques sont cependant observées chez des animaux sains et non boiteux [11, 29].

Traitements et pronostic

Le traitement médical repose sur l’utilisation d’AINS par voie orale, une période de repos, la mise en place d’un bandage spica splint et un programme de rééducation. Cependant, les chiens pris en charge chirurgicalement ont trois fois plus de chances de retrouver la pleine fonctionnalité de leur membre un an après l’intervention [13]. Cinq techniques chirurgicales sont décrites.

Capsulorraphie thermique

La capsulorraphie thermique induit une rétraction des protéines de collagène de la capsule sous contrôle arthroscopique. Elle ne présente un intérêt que pour des instabilités médiales de faible grade [9, 21]. Le taux élevé de complications et l’acquisition d’un matériel spécifique rendent cette technique peu accessible [9]. Elle est par ailleurs actuellement abandonnée en médecine humaine, en raison d’un risque élevé de récidive [29].

Prothèse extracapsulaire

La mise en place d’une prothèse extracapsulaire (par exemple TightRope® d’Arthrex, ou ancres chirurgicales) pour renforcer le ligament collatéral médial est une technique de choix permettant un retour à l’activité, y compris sportive, chez plus de 90 % des chiens seize à vingt semaines après l’intervention. Son succès repose en partie sur un contrôle strict de l’activité en phase postopératoire immédiate, avec la mise en place d’un spica splint durant quatre à seize semaines, associée à une rééducation classique [24].

Transposition du tendon du biceps

La technique de transposition du tendon du biceps ne nécessite pas de matériel spécifique et est réalisée par arthrotomie. Les résultats sont bons à excellents chez plus de 80 % des chiens quatre mois après l’intervention [28]. Toutefois, il manque des données sur l’évaluation à long terme de ces chiens. En outre, la modification de la biomécanique de l’épaule imposée par cette transposition risque de provoquer une incongruence et la prolifération de lésions d’arthrose [29].

Imbrication du tendon du muscle subscapulaire

L’imbrication du tendon du muscle subscapulaire ne demande aucun matériel spécifique, mais se révèle peu efficace et ne doit éventuellement être considérée que comme une technique adjuvante [25].

Arthrodèse

Enfin, chez quatorze chiens présentant une instabilité grave associée à une arthrose marquée, une arthrodèse a permis une récupération satisfaisante pour 85,7 % d’entre eux [28]. Chez les races de petite taille, lorsque l’instabilité de l’épaule est associée à une dysplasie de la glène, le traitement est chirurgical et consiste en une arthrodèse de l’épaule ou une arthroplastie d’excision de la glène.

Instabilités latérales de l’épaule

L’instabilité latérale et son traitement sont peu décrits. Dans une étude portant sur trois chiens, deux ont répondu à un traitement médical (repos de quatre à six semaines et injection intra-articulaire de 40 mg de méthylprednisolone). Le dernier a été pris en charge chirurgicalement et a subi une capsulorraphie latérale (prothèse/ancres chirurgicales par arthrotomie) à la suite d’un échec de traitement. La guérison de la boiterie est intervenue après quatre semaines de repos [22]. Une approche arthrosco pique de reconstruction du ligament gléno-huméral latéral par suture, qui a permis de résoudre la boiterie, est également décrite chez deux chiens [26].

CONCLUSION

Une suspicion d’atteinte de l’épaule repose sur la mise en évidence d’une anomalie clinique lors de la réalisation de tests spécifiques. Une fois l’examen clinique réalisé, lorsque le praticien suspecte une atteinte orthopédique de l’épaule, il dispose de différents examens d’imagerie pour préciser le diagnostic. L’échographie ne permet pas de détecter les lésions qui concernent le compartiment médial et son intérêt se limite majoritairement à l’exploration des atteintes musculo-tendineuses. L’examen tomodensimétique et l’IRM permettent de réaliser de manière plus spécifique un bilan lésionnel osseux et musculotendineux. Malgré une plus grande disponibilité de ces différents examens, l’interprétation de leurs résultats doit se faire avec précaution, car les lésions décelées n’ont pas systématiquement une signification clinique, compte tenu de la récente description de l’anatomie de l’épaule par la tomodensitométrie et l’imagerie par résonance magnétique.

  • (1) Voir l’article « Conduite à tenir face à une boiterie de l’épaule chez le chien » dans ce dossier.

  • (2) Voir la fiche « Rééducation fonctionnelle de l’épaule chez le chien : objectifs et planification » dans ce dossier.

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Conflit d’intérêts : Aucun

Encadré :
INFILTRATION DE PLASMA RICHE EN PLAQUETTES ASSOCIÉ À DES CELLULES SOUCHES

Les cellules souches mésenchymateuses, retrouvées dans la moelle osseuse et le tissu adipeux, ont des propriétés anti-inflammatoires, antifibrotiques et proangiogéniques qui se manifestent, dans le cadre de la cicatrisation tendineuse, par :

– une augmentation de la densité des fibres de collagène ;

– une amélioration de l’architecture tissulaire ;

– la restauration d’une interface correcte tendon-os ;

– une amélioration de la force biomécanique.

Il est démontré que ces cellules peuvent survivre au moins 30 jours après avoir été implantées dans un environnement tendineux, à condition de disposer de facteurs de croissance et d’un réseau d’attache. Si ces deux conditions sont réduites dans le cadre d’une tendinopathie, du fait de la désorganisation fibrineuse, l’utilisation de plasma riche en plaquettes apporte ces éléments nécessaires.

Dans l’étude évaluant l’efficacité de ce protocole, les cellules mésenchymateuses ont été préparées par un organisme spécialisé à partir d’un prélèvement de 30 g du ligament falciforme de l’animal, obtenu par minilaparotomie, et le plasma riche en plaquettes via un prélèvement jugulaire. L’injection obtenue correspondait à un volume de 1 ml par tendon, administré sous guidage échographique. Dans cette étude, 88 % des 55 chiens présentaient un appui sur le membre atteint comparable à celui du membre controlatéral 90 jours après l’injection, et les 12 % restants montraient au moins une amélioration échographique des lésions. Cependant, sans groupe témoin, il est difficile de tirer des conclusions d’efficacité aussi tranchées sur un tel protocole. De plus, seuls 25 chiens sur les 55 initiaux ont fait l’objet d’un contrôle à 90 jours.

D’après [5].

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