BÉNÉFICES/RISQUES DE LA DESLORÉLINE POUR LA CASTRATION CHEZ LES RONGEURS - Le Point Vétérinaire n° 422 du 01/10/2021
Le Point Vétérinaire n° 422 du 01/10/2021

REPRODUCTION DES NAC

Thérapeutique

Auteur(s) : Didier Boussarie*, Yassine Mallem**

Fonctions :
*Clinique de Fismes
2, rue des Comtes Thibault
51170 Fismes
**Auteur coordinateur
***Unité de pharmacologie
et toxicologie d’Oniris
101, route de Gachet
44300 Nantes

L’implant de desloréline représente une méthode contraceptive efficace chez le rat mâle et femelle et chez le cochon d’Inde femelle.

La desloréline (Suprelorin®) est aujourd’hui largement utilisée en médecine vétérinaire pour stériliser chimiquement les chiens mâles et les furets des deux sexes, et pour prévenir et traiter la maladie surrénalienne chez ces derniers. Elle est également employée pour son action contraceptive, à tort ou à raison, et sans autorisation de mise sur le marché, donc sous la responsabilité du vétérinaire prescripteur, chez les rongeurs de compagnie de sexe mâle ou femelle, notamment les cobayes et les rats.

MODE D’ACTION

La desloréline est un agoniste des récepteurs de la gonadolibérine (GnRH) avec une puissance très supérieure à cette dernière. Administrée en continu à faible dose, elle agit selon un processus de désensibilisation des récepteurs à la GnRH (down regulation), en supprimant la fonction de l’axe gonado-hypophysaire, par le blocage de la synthèse et de la libération de l’hormone folliculo-stimulante (FSH) et de l’hormone lutéinisante (LH). La faible dose de desloréline réduit la fonctionnalité des organes reproducteurs mâles, la libido et la spermatogenèse et abaisse les taux plasmatiques de testostérone, de quatre à six semaines après l’implantation.

Une augmentation transitoire et de courte durée de la testostérone plasmatique peut être observée immédiatement après l’implantation. Cet eff et inhibiteur résulte, chez la femelle, du rétrocontrôle exercé par les oestrogènes en forte concentration sur l’axe hypothalamo-hypophysaire.

CHEZ LE COCHON D’INDE

L’implant de desloréline ne provoque chez le cobaye mâle qu’une décroissance partielle de la spermatogenèse et de la concentration en testostérone. C’est donc une méthode inefficace pour obtenir un eff et contraceptif chez cet animal [4, 8]. En revanche, la desloréline induit une suppression du cycle oestral chez le cobaye femelle (ainsi que chez la lapine) et constitue donc une bonne méthode de contraception [8].

L’implant a par ailleurs été testé pour traiter médicalement onze femelles nullipares âgées de 4 et 7 ans et atteintes de kystes ovariens [7]. Des échographies abdominales de contrôle, réalisées huit puis seize semaines après sa pose, n’ont montré aucune variation significative de la taille des kystes. La desloréline serait donc inefficace dans le traitement des kystes ovariens, mais aucune autopsie n’ayant pu être réalisée sur les cochons d’Inde de l’étude, la nature des kystes traités n’est pas connue.

D’autres observations semblent montrer que la desloréline ne serait efficace qu’en présence de kystes sécrétants (folliculaires) [6]. Leur signe d’appel est dans un premier temps une perte de poils symétrique, qui commence sur les flancs, mais il est inconstant et, en pratique, il est souvent difficile d’affirmer que l’animal est atteint de kystes sécrétants.

CHEZ LE RAT

La desloréline a fait l’objet de davantage d’études expérimentales et de publications chez les rongeurs myomorphes, notamment chez le rat. L’administration d’un implant de desloréline dosé à 4,7 mg supprime l’activité reproductrice des rats, qu’ils soient mâles ou femelles [8].

Chez les mâles, une diminution de deux tiers de la taille les testicules est observée après la pose d’un implant de desloréline [3]. Ainsi, une étude portant sur 22 mâles montre que l’implant de 4,7 mg de desloréline entraîne une suppression de la fonction testiculaire et de celle des glandes sexuelles accessoires, de l’expression de la protéine HSP70 et de la fertilité [3]. L’effet contraceptif peut se prolonger pendant onze mois.

Chez le rat femelle, la desloréline produit un effet inhibiteur à long terme sur les structures ovarienne et utérine, avec une diminution significative du nombre des follicules ovariens [2]. Dans une autre étude, il est montré que l’effet contraceptif s’installe au bout de deux semaines et qu’il se prolonge au moins quatre mois (absence de gestation en présence de mâles) [5]. Une réaction locale et une prise de poids pendant les quinze premiers jours sont les seuls effets secondaires notables. L’administration d’un implant de desloréline dosé à 4,7 mg provoque une suppression de l’activité sexuelle chez des femelles durant au moins un an [1, 2].

Cependant, la desloréline ne semble pas avoir d’effet préventif sur le développement des tumeurs mammaires du rat, mâle ou femelle, mais cela reste à confirmer chez un plus grand nombre d’animaux [9].

CONCLUSION

L’implant de desloréline ne constitue pas une méthode contraceptive efficace chez le cobaye mâle. Il n’est pas non plus conseillé pour traiter les kystes ovariens dans cette espèce : bien que son efficacité soit rapportée dans le cas des kystes sécrétants, les différentes publications ne précisent pas la nature des kystes et l’examen clinique ne fournit pas des preuves suffisantes de différenciation du type de kyste. Il en va autrement chez le rat, puisque la desloréline supprime l’activité reproductrice des mâles et des femelles pour une durée d’un an au minimum, mais elle ne semble pas efficace pour la prévention des fibroadénomes mammaires, avant ou après leur retrait chirurgical.

Conflit d’intérêts : Aucun

Références

  • 1. Alkis I, Cetin Y, Sendag S et coll. Long term suppression of oestrus and prevention of pregnancy by desloreline implant in rats. Bull. Vet. Inst. Pulawy. 2011;55:237-240.
  • 2. Cetin y, Alkis I, Sendag S et coll. Long-term effect of desloreline implant on ovarian pre-antral follicles and uterine histology in female rats. Reprod. Domest. Anim. 2013;48 (2):195-199.
  • 3. Eºki F, Cetin N, Uslu S et coll. Effects of long-term release GnRH agonist "deslorelin" on testicular HSP expression, accessory sex glands and testicular functions in adult male rats. Theriogenology. 2019;134:104-111.
  • 4. Glocova K, Cizek P, Novotny R et coll. Effect of GnRH agonist deslorelin implant on spermatogenesis and testosterone concentration in Guinea pigs (Cavia aperea porcellus). Theriogenology. 2020;154:232-236.
  • 5. Grosset C, Peters S, Peron T et coll. Contraceptive effect and potential side-effects of desloreline acetate implants in rats (Rattus norvegicus): preleminary observations. Can. J. Vet. Res. 2012;76:209-214.
  • 6. Kohutova S, Jekl V, Knotek Z et coll. The effect of desloreline acetate on the oestruss cycle of female guinea pigs. Vet. Med. 2015;60 (3):155-160.
  • 7. Schuetzenhofer G, Goericke-Pesch S, Wehrend A. Effects of deslorelin implants on ovarian cys ts in guinea pigs. Schweiz. Arch. Tierheilkd. 2011;153 (9):416-417.
  • 8. Stempel S, Goericke-Pesch S. GnRH agonist implants in small animal practice: what do we know 13 years following EU registration? Tierarztl. Prax. Ausg. K Kleintiere Heimtiere. 2020;48 (6):420-432.
  • 9. Vergneau-Grosset C, Pena L, Cluzel C et coll. Evaluation of desloreline implant on subsequent mammary tumors of rats (Rattus norvegicus). J. Exot. Pet Med. 2019;31:108-116.
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