LE VACCIN ORAL CONTRE BORDETELLA BRONCHISEPTICA CHEZ LE CHIEN - Le Point Vétérinaire n° 413 du 01/01/2021
Le Point Vétérinaire n° 413 du 01/01/2021

MÉDECINE PRÉVENTIVE CANINE

Thérapeutique

Auteur(s) : Michel Pépin*, Yassine Mallem**

Fonctions :
*Université de Lyon, VetAgro Sup
1, avenue Bourgelat
69280 Marcy-L’Étoile
**Unité de pharmacologie
et toxicologie
Oniris, site de La Chantrerie
101, route de Gachet
44300 Nantes

La panoplie des vaccins contre la toux de chenil, également appelée complexe des infections respiratoires canines (Circ), s’est récemment enrichie d’un vaccin dirigé contre Bordetella bronchiseptica administrable par voie orale.

La toux de chenil est une cause de morbidité importante, fréquemment contractée par les chiens de tout âge, même si les jeunes y sont plus sensibles. Les rassemblements canins (chenil, chasse, expositions, etc.) permettent une propagation rapide de la maladie. Si elle est bien définie sur le plan clinique, ses causes multiples et complexes justifient sa nouvelle appellation : complexe des infections respiratoires canines (Circ, ou canine infectious respiratory disease complex en anglais, CIRDC) [3].

UNE ÉTIOLOGIE COMPLEXE

Dans une récente revue, dix agents pathogènes ont été identifiés comme susceptibles de participer à ce complexe des infections respiratoires canines, dont sept virus différents et trois groupes de bactéries (tableau) [3].

La prévalence et l’importance de chaque agent pathogène restent cependant difficiles à apprécier, car les études varient selon le statut des chiens inclus (toutvenant, avec signes cliniques, cas contact, vivant en collectivité, etc.) et les modalités de diagnostic (recherche directe de l’agent pathogène ou indirect via la sérologie) [3, 8, 10]. À ces deux paramètres importants se superpose une variabilité suivant le pays. Par exemple, pour le virus parainfluenza canin (CPiV), la prévalence varie de 67,5 % pour une étude polonaise de 2016 à 6,5 % pour une enquête réalisée en Autriche en 2019 [6, 7]. Une autre difficulté est liée à l’identification de nouveaux agents pathogènes, à l’instar du coronavirus respiratoire canin (CRCoV), du pneumovirus canin (CnPnV) ou encore des mycoplasmes, qui n’étaient pas ou peu pris en compte dans les études antérieures (pour les mycoplasmes en particulier) [3, 10, 11].

De cette méta-analyse, il ressort cependant que les trois principaux agents pathogènes impliqués dans le complexe des infections respiratoires canines sont le CPiV, la bactérie Bordetella bronchiseptica et les mycoplasmes (M. cynos et M. canis).

LA VACCINATION CONTRE LE CIRC EN 2020

Les spécialités

La vaccination contre le complexe des infections respiratoires canines présente des limites (immunité non stérilisante, pas de vaccins contre les nouveaux agents pathogènes) et une efficacité relative. Toutefois, couplée à une prophylaxie sanitaire rigoureuse, elle reste essentielle pour la gestion de la maladie [9].

En France, vingt-sept spécialités vaccinales contenant au moins un agent infectieux impliqué dans le complexe des infections respiratoires canines sont actuellement disponibles. En excluant les vaccins essentiels chez le chien qui contiennent les valences “hépatite infectieuse canine” (CAV-1/2) et “maladie de Carré” (CDV) – ce qui explique leur faible prévalence dans le tableau –, associées ou non à la valence CPiV, et le seul vaccin dirigé contre l’herpèsvirus canin (CHV), il reste six spécialités avec les valences CPiV et/ou B. bronchiseptica. Ces dernières peuvent être administrées par voie parentérale (deux vaccins non réplicatifs), intranasale (trois vaccins réplicatifs) ou orale (un vaccin réplicatif). Elles sont considérées par les groupes d’experts internationaux comme des vaccins dits circonstanciels ou non essentiels [2, 4, 9]. Les voies intranasale et orale permettent de stimuler à la fois l’immunité muqueuse et systémique, sans démonstration, en l’état actuel des études publiées, de la supériorité de ces voies d’administration par comparaison avec la voie parentérale [5].

Le vaccin oral

La dernière spécialité, dont l’autorisation de mise sur le marché (AMM) date du 20 décembre 2018, est Versican® Plus Bb oral. Ce vaccin, composé d’une souche vivante de Bordetella bronchiseptica à la virulence atténuée, réduit, selon le laboratoire producteur, les signes cliniques et l’excrétion de la bactérie. Il est administrable à partir de 8 semaines d’âge, voire en deçà hors AMM. Il induit une immunité de douze mois et peut être administré simultanément avec les autres vaccins de la gamme Versican®. Comme pour les autres vaccins réplicatifs contre Bordetella bronchiseptica, la mise en place de l’immunité est rapide après la première injection (quelques jours) et justifie une vaccination en urgence par rapport aux vaccins non réplicatifs, qui nécessitent deux injections lors de la primovaccination. La souche vaccinale peut être excrétée après la vaccination pendant plusieurs semaines. Cette dernière caractéristique doit être appréciée avec justesse compte tenu du caractère zoonotique (rare) de B. bronchiseptica envers les très jeunes enfants ou les personnes immunodéprimées [1, 12].

Les rares données de pharmacovigilance disponibles actuellement ne mentionnent pas d’événements indésirables différents de ceux listés dans le dossier d’AMM, en particulier les signes digestifs (vomissements, diarrhée) [Xavier Pineau, CPVL, communication personnelle].

En comparaison de la voie intranasale, la voie orale est plus facile d’administration. Comme l’a fort justement dit le Pr Michael Day(1), qui présidait le groupe d’experts “vaccins” de la World Small Animal Veterinary Association (WSAVA) [4] : « Il est très intéressant pour les vétérinaires européens d’avoir désormais une autre option pour la protection non essentielle contre Bordetella . Il y aura ainsi différentes situations où, selon les circonstances, la voie d’administration orale, la voie intranasale ou la voie injectable sera la plus appropriée. »

Références

  • 1. Chomel BB. Emerging and re-emerging zoonoses of dogs and cats. Animals (Basel). 2014;4 (3):434-445.
  • 2. Day MJ. Small animal vaccination: a practical guide for vets in the UK. In Practice. 2017;39:110-118.
  • 3. Day MJ, Carey S, Clercx C et coll. Aetiology of canine infectious respiratory disease complex and prevalence of its pathogens in Europe. J. Comp. Pathol. 2020;176:86-108.
  • 4. Day MJ, Horzinek MC, Schultz RD et coll. WSAVA Guidelines for the vaccination of dogs and cats. J. Small Anim. Pract. 2016;57 (1):E1-E45.
  • 5. Ellis JA. How well do vaccines for Bordetella bronchiseptica work in dogs? A critical review of the literature 1977-2014. Vet. J. 2015;204 (1):5-16.
  • 6. Hiebl A, Auer A, Bagrinovschi G et coll. Detection of selected viral pathogens in dogs with canine infectious respiratory disease in Austria. J. Small Anim. Pract. 2019;60 (10):594-600.
  • 7. Kaczorek E, Schulz P, Malaczewska J et coll. Prevalence of respiratory pathogens detected in dogs with kennel cough in Poland. Acta Vet. Brno. 2016;85:329-336.
  • 8. Maboni G, Seguel M, Lorton A et coll. Canine infectious respiratory disease: New insights into the etiology and epidemiology of associated pathogens. PLoS One. 2019;14 (4):e0215817.
  • 9. Mitchell JA, Brownlie J. The challenges in developing effective canine infectious respiratory disease vaccines. J. Pharm. Pharmacol. 2015;67 (3):372-381.
  • 10. Mitchell JA, Cardwell JM, Leach H et coll. European surveillance of emerging pathogens associated with canine infectious respiratory disease. Vet. Microbiol. 2017;212:31-38.
  • 11. Priestnall SL, Mitchell JA, Walker CA et coll. New and emerging pathogens in canine infectious respiratory disease. Vet. Pathol. 2014;51 (2):492-504.
  • 12. Szvalb AD, Rolston KV, Mori N et coll. Infections with the agent of “kennel cough” in patients with cancer. J. Infect. 2019;78 (1):48-53.

Conflit d’intérêts : Aucun

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