Grippe équine : retour sur les épidémies récentes en France et dans le monde - Le Point Vétérinaire n° 296 du 01/06/2009
Le Point Vétérinaire n° 296 du 01/06/2009

Épidémiologie équine

Infos

FOCUS

Auteur(s) : Guillaume Fortier*, Xavier d’Ablon**

Fonctions :
*Collège Syndrome respiratoire aigu (SRA), Respe, Mondeville
Laboratoire Frank-Duncombe
1, route de Rosel
14000 Caen
**Collège Syndrome respiratoire aigu (SRA), Respe, Mondeville
Clinique vétérinaire
34, av. Hocquart-de-Turto
14800 Deauville

Les derniers épisodes de grippe équine observés en France démontrent l’importance de la prévention et de l’adéquation des vaccins aux souches circulantes.

Les épisodes de 2007 au Japon et en Australie

Les deux grandes épidémies de grippe équine au Japon et en Australie, en 2007, ont rappelé que ce virus pouvait très rapidement provoquer des dégâts économiques et sanitaires importants en utilisant deux stratégies très efficaces : sa forte contagiosité chez les populations “naïves” de chevaux (Australie) et sa propagation plus silencieuse au sein d’effectifs préalablement immunisés (Japon).

Les souches de virus influenza isolées et génotypées lors de ces épisodes appartiennent au sous-lignage floridien et sont proches de la souche Wisconsin/03 (H3N8).

L’épisode français de 2009

Ces types de souches sont détectés en Europe depuis quelques années, et la dernière épidémie s’est produite en France à Grosbois, grand centre d’entraînement de trotteurs à l’est de Paris (Val-de-Marne) (photo 1). Ces souches françaises de 2009 sont très proches des souches responsables des épidémies suscitées en 2007.

Cette épidémie s’est rapidement étendue dans le sud de la France (Cagnes-sur-Mer, Alpes-Maritimes), mais aussi dans différents départements à la suite de mouvements de chevaux depuis le centre de Grosbois vers leurs haras d’origine.

Le nombre important de chevaux atteints, générant notamment des non-partants, des mesures de restriction de mouvements et de diagnostic systématique, est à rapprocher de la souche en cause. Cette dernière appartient en effet au groupe de virus hautement pathogènes pour le cheval. Les organismes internationaux ou nationaux de surveillance comme l’Office international des épizooties (OIE), ou l’USDA aux États-Unis, avaient d’ailleurs, dès 2004, attiré l’attention sur la nécessité d’une incorporation rapide de ces souches dans les futurs vaccins antigrippaux destinés aux chevaux.

Parallèlement, la régression rapide de ces foyers peut être rapprochée du statut immunitaire des chevaux en France vis-à-vis de ce virus (virus influenza équin), c’est-à-dire d’une population d’équidés correctement ou assez régulièrement vaccinés, mais aussi de la vigilance des vétérinaires sentinelles et des organismes socioprofessionnels du Réseau d’épidémiosurveillance des pathologies équines (Respe) par lesquels l’information a rapidement circulé.

Conseils de prévention

En dehors des facteurs de risque liés à la souche elle-même, les mécanismes de dissémination du virus sont toujours les mêmes, et ce pour tous les virus grippaux :

- tout d’abord de véritables “aérosols” de virus qui entourent les chevaux contagieux, c’est-à-dire ceux qui présentent une fièvre et un jetage (photo 2) ;

- ensuite une résistance possible du virus dans les milieux extérieurs en conditions humides et douces, et son possible transport passif lors de manipulation de chevaux, du matériel de soins ou de contention.

Paradoxalement, le savon et les désinfectants standard sont très efficaces pour “stériliser” les objets ou les personnes souillés.

En dehors de la dissémination de proximité, le transport de chevaux représente le plus grand risque de dissémination rapide et efficace sur de grandes distances (photo 3).

Malgré les précautions prises lors de ces transports, hautement liés à la vie de ces athlètes, et ce quelles que soient les disciplines, les chevaux contagieux ne sont pas forcément détectables en temps réel, le jour de leur départ ou de leur arrivée. La quarantaine reste de mise pour limiter la défaillance toujours possible des examens cliniques ou des tests rapides sur les écouvillons naso-pharyngés.

Les suivis très documentés et le nombre important de tests effectués au sein ou en périphérie des foyers ont permis de montrer que les chevaux pouvaient “héberger” des charges virales très faibles, détectées seulement à l’aide d’outils performants comme la polymerase chain reaction (PCR), et non par les examens rapides très efficaces au pic d’excrétion du virus.

Ces différences ont fait l’objet de rapports très documentés lors des choix effectués pour la quarantaine des jeux Olympiques de Pékin et l’application des tests systématiques avant, pendant et après la période d’observation des concurrents (chevaux).

L’hyperthermie prononcée ou le syndrome grippal classique peuvent ne pas être la règle, notamment pour des effectifs ou des chevaux dont le système immunitaire a déjà “croisé” un vaccin ou un virus sauvage, ce qui a été le cas au Japon, avec un double effet : une assez grande difficulté à caractériser les foyers, mais aussi une rapide extinction des foyers grâce à ces barrières vaccinales préalables. De plus, les chevaux correctement vaccinés présentent généralement moins de symptômes et excrètent moins de virus, ce qui diminue l’efficacité des tests rapides, renforçant ainsi l’intérêt de la PCR.

La vaccination des chevaux deux fois par an reste le meilleur rempart à l’infection, notamment pour les individus à risque : ceux qui voyagent pour les épreuves internationales ou qui croisent de nombreux autres chevaux au cours de l’année pour le rassemblement, les compétitions, etc.

Le diagnostic rapide de la maladie demeure le moyen de lutte ou de contrôle le plus efficace, ainsi que l’arrêt des mouvements de chevaux en dehors de leur foyer, tant que le virus circule.

L’information des vétérinaires, la déclaration rapide des cas, la détection efficace du virus et la caractérisation des souches sont autant de moyens qui limitent la dissémination et permettent d’évaluer le risque sanitaire et économique.

Comme pour les autres espèces de mammifères auxquelles le cheval ne saurait déroger, l’adéquation du vaccin aux souches circulantes reste de mise, et l’actualité le prouve.

L’épisode de cette année n’est certainement pas le dernier à se déclarer sur le Vieux Continent, qui reste une zone grippale endémique, mais la mise en place des moyens humains, pharmaceutiques et techniques précédemment cités permettent sûrement d’en limiter les impacts.

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