Les deux types de leucose bovine - Le Point Vétérinaire n° 294 du 01/04/2009
Le Point Vétérinaire n° 294 du 01/04/2009

Maladies infectieuses et tumorales des bovins

Fiche technique

Auteur(s) : Dominique Rémy*, Brigitte Moussay**, Loïc Guiouillier***, Yves Millemann****, Guillaume Belbis*****

Fonctions :
*Unité de reproduction animale, ENV d’Alfort, 7, av. du Général-de-Gaulle, 94700 Maisons-Alfort
**Cabinet vétérinaire, 5, rue de la Petite Vitesse, 53140 Pré-en-Pail
***Cabinet vétérinaire, 5, rue de la Petite Vitesse, 53140 Pré-en-Pail
****Unité de pathologie du bétail, ENV d’Alfort, 7, av. du Général-de-Gaulle
*****Unité de pathologie du bétail, ENV d’Alfort, 7, av. du Général-de-Gaulle

Si la leucose bovine enzootique, quasiment éradiquée en France, est d’origine virale, l’étiologie précise de la leucose bovine sporadique est encore inconnue.

La leucose bovine enzootique

Définition et répartition

La leucose bovine enzootique (LBE) est une maladie contagieuse des bovins due à un virus de la famille des Retroviridae (virus leucémogène bovin) qui est présente à l’état enzootique dans les cheptels bovins.

Elle se développe le plus souvent de manière asymptomatique, principalement chez des bovins adultes, parfois accompagnée d’une lymphocytose persistante, ou sous une forme tumorale.

Cette maladie affecte les bovins dans les conditions naturelles et est non transmissible à l’homme.

Décrite pour la première fois en Allemagne en 1871, elle est universellement répandue. En France, une prophylaxie a permis son éradication quasiment totale, et le pays est considéré officiellement indemne de LBE depuis 2003.

Étiologie

Le virus leucémogène bovin est un ribovirus enveloppé, classé au sein de la famille des Retroviridae (genre Deltaretrovirus), dans la sous-famille des Oncornavirinae. Il a un tropisme pour le lymphocyte B dans lequel il peut persister. L’infection peut rester inapparente pendant toute la vie de l’animal. Mais une lymphocytose persistante peut apparaître chez 10 à 90 % des individus selon les troupeaux et les auteurs. Un lymphosarcome généralisé peut se développer chez 1 à 5 % des sujets infectés (animaux âgés en général de 5 à 8 ans).

Épidémiologie

Les bovins infectés (malades ou infectés latents) par leurs lymphocytes, dans lesquels persiste le virus, par ailleurs peu résistant dans le milieu extérieur, sont sources de contagion.

Le sang est la principale matière virulente, une quantité infime suffit. Il existe une transmission verticale de la mère à son veau (3 à 20 % des veaux peuvent s’infecter), par le colostrum ou le lait (moins de 2 %) [13].

Le sperme, l’urine, les fèces, la salive et les sécrétions respiratoires sont des matières exceptionnellement contaminées ; le sperme congelé ne peut pas transmettre le virus [3].

La transmission est principalement indirecte, mécanique par arthropodes piqueurs (tabanidés en particulier), iatrogène (aiguilles et seringues, instruments de chirurgie, matériel de tatouage, d’écornage, etc., contaminés par du sang). Le virus est surtout introduit dans un élevage indemne lors d’achat ou de prêt d’un bovin infecté. Sa diffusion au sein du troupeau est lente (favorisée par les injections en série ou par l’activité des arthropodes hématophages), ce qui confère à la maladie un caractère sporadique sur quelques individus âgés de 5 à 8 ans.

Le diagnostic

Voir l’article “Les leucoses bovines : étude de deux cas” du même auteur, dans ce numéro.

Prophylaxie

La prophylaxie est exclusivement sanitaire. Elle s’appuie sur l’introduction d’animaux provenant d’exploitations officiellement indemnes et sur des mesures d’hygiène. Elle consiste en un traitement antiparasitaire pour limiter la transmission par les vecteurs et en l’utilisation de matériel à usage unique pour les injections.

La leucose bovine sporadique

L’étiologie précise de la leucose bovine sporadique (LBS) n’est pas connue, même s’il paraît vraisemblable qu’un virus n’est pas en cause. Trois formes cliniques ont été décrites :

- la forme cutanée, qui survient entre 1,5 an et 2 ans et se traduit par l’apparition de plaques ou de nodules (1 à 5 cm) sur le cou, le dos, la croupe et les cuisses. La peau devient plus épaisse et les poils tombent. Puis le nodule régresse. La guérison est possible, mais des rechutes ont été signalées. Certaines lésions peuvent s’ulcérer, devenir très douloureuses et évoluer, plus rarement, sous une forme tumorale ;

- la forme juvénile de la leucose sporadique est une maladie tumorale maligne associée à une leucémie qui survient chez des ani-maux plus jeunes (2 semaines à 6 mois et plus rarement jusqu’à 2 ans). Elle commence par une perte de poids et d’appétit. Puis, une dépression précède une phase d’hyperthermie, d’anémie et l’apparition d’une adénomégalie généralisée. Les signes cliniques peuvent varier selon les organes infiltrés ou comprimés par les nœuds lymphatiques hypertrophiés. L’infiltration de la moelle osseuse par l’invasion lymphocytaire peut s’accompagner d’une atteinte des autres lignées et provoquer une anémie et, souvent, une thrombocytopénie. La mort survient rapidement, de deux à six semaines après l’évolution des signes cliniques. Une forme congénitale, qui n’entraîne pas la mort du nouveau-né, a été plusieurs fois décrite. D’autres organes sont aussi infiltrés, dont le canal rachidien. La caillette, l’utérus et le cœur sont moins fréquemment atteints ;

- la forme thymique n’est pas exceptionnelle chez les animaux âgés d’1 à 2 ans. Elle est caractérisée par une hypertrophie thymique, une lymphadénite périphérique associée à une hypertension de la jugulaire et des troubles respiratoires liés à la compression par les nœuds médiastinaux hypertrophiés. Une expansion métastatique a été plusieurs fois décrite [7]. Plusieurs cas sont survenus en l’espace de six mois chez des jeunes bovins âgés de 3 à 9 mois dont la plupart étaient issus du même père. Une composante héréditaire pourrait donc intervenir dans cette maladie. Cette observation survenue dans l’ouest de la France a été attribuée au taureau “Bunny” [14].

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