Le contrôle antidopage dans les sports équestres - Le Point Vétérinaire n° 294 du 01/04/2009
Le Point Vétérinaire n° 294 du 01/04/2009

Réglementation antidopage

Pratique

SUR ORDONNANCE

Auteur(s) : Marc Gogny*, Hervé Pouliquen**

Fonctions :
*Unité de pharmacologie et toxicologie, ENV de Nantes
Atlanpôle La Chantrerie, 44307 Nantes Cedex 3

Le vétérinaire doit indiquer les substances dopantes sur les ordonnances. Ce devoir d’information est souvent défaillant.

Lors d’une visite dans un centre équestre, le vétérinaire délivre de la phénylbutazone pour une jument atteinte d’une légère boiterie.

Il ignore que l’animal est engagé dans une compétition la semaine suivante. Lors de l’épreuve, la jument est contrôlée et le résultat se révèle positif.

Renforcement du dispositif antidopage

Depuis la loi du 5 avril 2006 (loi “Lamour”) qui crée l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), et ses modifications en 2008, les contrôles ont été amplifiés et les sanctions durcies. La Fédération française d’équitation a ainsi adopté un nouveau règlement de discipline en 2008, qui prévoit, lors de dopage animal, l’annulation des résultats individuels, des médailles, des points et des prix, ainsi qu’une interdiction s’exerçant sur la participation de l’animal et/ou du propriétaire, de l’entraîneur ou du sportif à des compétitions, à leur organisation directe ou indirecte (y compris les entraînements), voire sur l’enseignement contre rémunération de la pratique de l’équitation.

La durée de suspension ne peut être inférieure à deux ans, sauf dans quelques cas limités. Les sanctions, prononcées par la Commission fédérale de première instance de lutte contre le dopage animal, sont entérinées par l’AFLD qui peut les alléger ou les alourdir.

Recours éventuel contre le vétérinaire

Dans l’exemple fictif évoqué ici, la cavalière, mineure, participe aux championnats de France. Elle ignore tout des traitements administrés avant l’épreuve. La propriétaire de la jument, qui ne monte plus et n’est pas licenciée, met l’animal à la disposition du centre équestre. Elle n’a été informée de la visite du vétérinaire qu’a posteriori, par le moniteur qui gère le centre et qui a supervisé le traitement.

Dans cette situation, la Commission fédérale de première instance considère le dirigeant du centre équestre comme responsable. C’est donc lui qui est suspendu. La sanction va de l’interdiction d’organiser des compétitions ou des manifestations sportives à celle d’enseigner. Si la commission prononce une interdiction d’organiser des compétitions et d’y préparer les cavaliers pendant deux ans, et que l’AFLD entérine cette décision, les conséquences sur la fréquentation du centre équestre, donc sur sa rentabilité, peuvent être sensibles. La situation est encore aggravée si la sanction prononcée entraîne une perte d’emploi pour le moniteur. Un recours contre le vétérinaire est donc envisageable.

Il est donc fondamental pour le praticien d’indiquer par écrit, sur l’ordonnance, le temps de retrait préconisé, c’est-à-dire la durée pendant laquelle l’engagement en compétition est déconseillé, ou, à défaut, de mentionner que l’engagement en compétition ne peut avoir lieu qu’après une analyse sanguine.

Substances interdites

Le décret du 26 janvier 2009 met à jour la liste des substances interdites chez l’homme uniquement. C’est donc l’arrêté du 21 novembre 1996 qui s’applique encore pour l’animal. Schématique-ment, seuls les antibiotiques (excepté les formes retard à base de procaïne en raison de la présence de l’anesthésique local), les vaccins et les antiparasitaires ne sont pas considérés comme dopants. Certaines substances acceptées au niveau international sous réserve de déclaration préalable, comme l’altrénogest (Regumate®), sont des substances dopantes en France en compétition.

La Fédération équestre internationale publie une liste de « temps de détection » après administration pour un nombre limité de substances. Ces données résultent d’études expérimentales chez un petit nombre de chevaux, donnant les temps pendant lesquels ces substances ont pu être détectées après administration. Par exemple, pour la phénylbutazone, un temps de 7 jours est déterminé sur 6 chevaux après l’administration orale biquotidienne pendant 10 jours à la dose de 8,8 mg/kg le premier jour et de 4,4 mg/kg les jours suivants. Ce temps de détection n’est donc qu’indicatif. Il peut varier notablement selon le cheval, la voie d’administration, la spécialité employée, la durée du traitement, et même selon la méthode utilisée par le laboratoire de contrôle. La phénylbutazone peut être détectée à des concentrations aussi faibles que 10 ng/ml. Une telle concentration plasmatique ne correspond à aucune efficacité thérapeutique, mais la réglementation actuelle n’en tient pas compte.

Le temps de retrait indiqué sur l’ordonnance doit donc inclure une large marge de sécurité, notamment pour les substances comme la phénylbutazone dont la phase finale d’élimination est tardive. Cela suppose pour le prescripteur de bien s’informer sur les propriétés pharmacologiques du produit utilisé.

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