Interprétation de l’examen cytologique oculaire - Le Point Vétérinaire n° 282 du 01/01/2008
Le Point Vétérinaire n° 282 du 01/01/2008

Ophtalmologie du chien et du chat

Mise à jour

Le point sur…

Auteur(s) : Georges de Geyer

Fonctions : Clinique vétérinaire
35, avenue Patton
49000 Angers

L’examen cytologique est rapide et peut s’appliquer à tous les étages de l’œil et de ses annexes. Il apporte des informations suffisantes pour orienter, voire établir le diagnostic.

L’examen cytologique par empreinte ou par exfoliation à la cytobrosse permet d’étudier grâce aux colorations classiques(1) les cellules épithéliales, inflammatoires et les éléments figurés de la surface oculaire.

Les prélèvements obtenus par la ponction des masses, des milieux intraoculaires et de l’orbite peuvent mettre en évidence des cellules inflammatoires ou néoplasiques et des éléments figurés. À l’état normal, l’humeur aqueuse et le vitré sont acellulaires. Ce dernier montre un fond granuleux et parfois des pigments libres.

Diagnose des cellules épithéliales

1. Aspect normal

L’intégrité des cellules épithéliales des conjonctives et de la cornée contribue à la transparence de la cornée. Les conjonctives ont, en effet, des fonctions sécrétoires et absorbantes vis-à-vis des toxines présentes dans le film lacrymal préoculaire. L’analyse des cellules épithéliales est donc utile.

Cellules obtenues par exfoliation

• La conjonctive normale est une muqueuse dont l’épithélium est stratifié, squameux et non kératinisé chez les carnivores domestiques et les rongeurs. Des études en microscopie électronique montrent, selon leur ultra-structure, cinq types de cellules épithéliales correspondant à cinq fonctions différentes. En cytologie, les cellules sont classées par des critères de taille, de forme et de ratio nucléo-cytoplasmique (RNC) selon leur position dans l’épithélium [2].

Les cellules superficielles sont polyédriques, plus ou moins jointives, avec un noyau central à la chromatine uniforme et un RNC moyen ().

Les cellules intermédiaires sont polyédriques ou ovales, plus ou moins jointives avec une taille plus faible et un RNC supérieur à celui des cellules superficielles.

Les cellules basales sont plus petites, rondes ou ovales, jointives avec un RNC élevé ().

• Les mélanocytes sont ronds avec un cytoplasme très chargé de granules brunâtres en périphérie du noyau. Leur nombre est variable selon les individus. Ils transmettent aux cellules épithéliales leurs pigments sous la forme de petits granules grisâtres ou brunâtres.

• Les cellules caliciformes (cellules à mucus) sont ovales ou rectangulaires avec un noyau rejeté au pôle inférieur de la cellule, un cytoplasme hétérogène et un pôle supérieur flou. Elles sont plus nombreuses au niveau du tarse palpébral et de la face antérieure de la membrane nictitante. Elles sont peu nombreuses en région bulbaire. Le mucus apparaît sous la forme de filaments rosés.

• Quelques lymphocytes et polynucléaires neutrophiles (PNN) peuvent être observés sur les conjonctives saines, à l’inverse des polynucléaires éosinophiles et basophiles. De rares bactéries sont notées dans le mucus en dehors de toute inflammation. En effet, le mucus est un système d’évacuation des bactéries, et il existe une flore commensale au niveau du bord libre palpébral et des conjonctives.

Cellules obtenues par impression

L’empreinte par filtre de la face antérieure de la membrane nictitante normale montre de nombreuses cellules à mucus en amas.

Les cellules épithéliales superficielles de la cornée se présentent sous la forme de grandes cellules polyédriques jointives à faible RNC ().

2. Anomalies des cellules épithéliales

Cellules conjonctivales

• Les anomalies possibles des cellules épithéliales conjonctivales sont :

- une augmentation de la taille des cellules ;

- des anomalies du cytoplasme (lacunes, inclusions) ;

- un plus grand nombre de cellules à RNC élevé (hyperplasie) ;

- une grande différence de taille entre les cellules et les noyaux sur une même plage cellulaire ;

- un défaut de la répartition de la chromatine, des cellules binucléées ;

- une kératinisation (grande cellule plate avec noyau absent ou dégénéré, cytoplasme granuleux) ().

Ces anomalies ne sont pas spécifiques, et accompagnent les processus inflammatoires chroniques comme la sécheresse oculaire par déficit aqueux ou les affections virales.

• L’augmentation du nombre de cellules conjonctivales pigmentées est difficile à interpréter. Elle est fréquemment notée chez les chats qui présentent un séquestre cornéen.

• Les inclusions intracytoplasmiques dans les cellules conjonctivales ont, dans la majorité des cas, une origine non identifiable : débris cytoplasmique ou nucléaire, dépôt provenant d’un traitement par pommade. Dans les infiltrats neutrophiliques, la présence de PNN dans le cytoplasme de cellules épithéliales qui ont pris vraisemblablement une fonction macrophagique est fréquemment observée.

Chlamydophila se traduit, dans les quinze premiers jours de l’infection féline, par une inclusion intracytoplasmique basophile de taille variable. Cette inclusion se situe souvent près du noyau dont la membrane présente une déformation concave discrète ().

Elle ne doit pas être confondue avec une rupture du noyau avec sortie de chromatine. Une infection par Chlamydophila est peu probable si la cytologie ne montre pas de PNN.

Les corps de Lentz sont visibles, en association avec des lymphocytes et des PNN, dans les six premières semaines d’infection par le virus de la maladie de Carré, d’autant plus que l’infection est aiguë. À la coloration Harris Shorr, un corps de Lentz apparaît comme une tache sphérique ou polygonale, acidophile et entourée d’un halo.

• Des éléments ponctués à la surface des cellules épithéliales peuvent être des bactéries ou des mycoplasmes.

• L’anomalie la plus fréquente des cellules à mucus est leur augmentation en nombre avec des formes pyramidales, rondes ou allongées (). Elle traduit une inflammation conjonctivale chronique, notamment lors de sécheresse oculaire ou d’irritation chronique. Plus rare, la diminution ou la disparition des cellules à mucus est observée lors de nécrose conjonctivale d’origine virale, de brûlure, de maladie dysimmunitaire ou de kératoconjonctivite sèche évoluée. Dans la conjonctivite folliculaire, les cellules à mucus sont absentes en regard des follicules.

• Les techniques d’immunomarquage permettront, dans l’avenir, d’identifier de manière routinière en laboratoire spécialisé les cellules de Langerhans, les antigènes de surface anormalement exprimés lors d’inflammation et les marqueurs d’apoptose.

Cellules cornéennes

Les anomalies des cellules cornéennes sont une diminution de leur taille et un RNC élevé (hyperplasie, conjonctivalisation), la présence de micro-organismes ou de dépôts pigmentés intracytoplasmiques, la disparition des jonctions intercellulaires, des signes de kératinisation (sécheresse oculaire). Lors de conjonctivalisation chez le chat, des cellules à mucus peuvent être observées ().

Cellules inflammatoires

Les cellules inflammatoires de la surface oculaire sont facilement accessibles à la cytologie grâce au phénomène d’exocytose qui correspond à leur migration du stroma vers et dans l’épithélium.

1. Polynucléaires neutrophiles

En présence d’un écoulement oculaire grisâtre, la cytologie permet de faire la différence entre une suppuration (présence de nombreux PNN) et un excès de mucus (PNN peu nombreux ou absents et cellules caliciformes). Un écoulement verdâtre ou jaunâtre contient toujours des PNN.

La présence de matériel pycnotique dans les PNN signe une apoptose.

Les PNN proviennent d’une diapédèse à partir des capillaires du chorion conjonctival sous l’influence d’un signal d’origine conjonctivale ou cornéenne. Quand le signal provient de l’épithélium cornéen, les PNN migrent avec le film lacrymal à partir de la conjonctive (ulcère cornéen par exemple) ou dans le stroma superficiel à partir des capillaires limbiques (kératite herpétique féline par exemple) ou des vaisseaux néoformés (nécrose cornéenne par exemple).

Polynucléaires seuls

Des PNN, en l’absence apparente de micro-organismes, évoquent :

- sur un prélèvement palpébral, une démodécie, une mycose, une maladie auto-immune de type pemphigus ou pemphigoïde. Le pemphigus foliacé s’accompagne de la présence de cellules acantholytiques, cellules épidermiques rondes, isolées et encerclées par de nombreux PNN ;

- sur un frottis conjonctival, une infection virale aiguë (maladie de Carré chez le chien, herpèsvirose ou calicivirose chez le chat), une infection par Chlamydophila de plus de deux semaines d’évolution chez le chat, une sécheresse oculaire ou une vascularite. Lors de sécheresse lacrymale par déficit aqueux, les PNN sont nombreux quand la cause est une adénite chronique idiopathique des glandes lacrymales et peu nombreux lors de paralysie du nerf parasympathique ;

- sur un prélèvement cornéen, un abcès par corps étranger, une infection virale (herpès du chat), un ulcère d’évolution récente ;

- sur un échantillon d’humeur aqueuse et de vitré, un traumatisme ou une infection fongique dont l’agent n’est pas toujours visible à l’examen cytologique. L’hypopyon accompagnant une kératite stromale profonde non perforée d’origine bactérienne ou fongique est stérile. Il signe une uvéite secondaire au passage de toxines d’origine infectieuse dans l’humeur aqueuse et il n’est pas recommandé de l’analyser.

Polynucléaires associés à des bactéries

• Des PNN et des bactéries peuvent être observés à tous les niveaux oculaires lors de pyodermite palpébrale, d’abcès ou de phlegmon palpébral, de conjonctivite, de dacryocystite, d’abcès cornéen, d’endophtalmie, d’abcès ou de cellulite orbitaire.

Une position extracellulaire de bactéries (coques ou bacilles) et des PNN non dégénérés signent une contamination (). Une position intracellulaire de bactéries et des PNN dégénérés avec un noyau plus pâle, gonflé et peu segmenté signent une véritable infection primaire (). Les faux positifs sont les précipités ponctués et hétérogènes de colorant, les granules de mastocytes et les grains de mélanine gris-vert ou bruns. Sur certaines conjonctivites bactériennes chroniques avec hyperplasie épithéliale, les bactéries, non visibles sur le frottis, peuvent être mises en évidence par cytoponction superficielle de la conjonctive à l’aide d’une aiguille 25 G. Dans l’ophtalmie néonatale des chatons, la présence de bactéries et de PNN très dégénérés dans le pus sous-palpébral est significative et permet d’écarter, a priori, une atteinte virale. À l’inverse, chez le jeune chat, une infection bactérienne des conjonctives ou de la cornée ne permet pas d’écarter une maladie virale à herpèsvirus ou calicivirus.

Toute chirurgie oculaire (luxation de glande nictitante, éversion du bord libre de la membrane nictitante, entropion, cataracte) doit être précédée d’une antibiothérapie locale si des bactéries et des PNN ont été mis en évidence lors de l’examen préopératoire. Sur un ulcère récent, superficiel ou profond, à l’emporte-pièce, l’empreinte par filtre permet de détecter les bactéries et de suivre leur régression sous traitement topique. À l’inverse, lors de kératite stromale profonde avec nécrose, la mise en évidence des bactéries nécessite une rotation appuyée de la cytobrosse ou un raclage.

• La cytoponction de la glande lacrymale superficielle permet de dévoiler une infection ascendante en association avec une conjonctivite suppurée et un résultat de test de Schirmer inférieur à 15 mm/min.

• Les infections bactériennes orbitaires sont pratiquement toujours unilatérales et se traduisent par une exophtalmie avec douleur. La cytologie montre des PNN et des bactéries dont l’identification avec un antibiogramme est indispensable. Une cause sous-jacente doit être recherchée, comme un corps étranger, une infection des sinus ou une infection dentaire chez le chien et une malocclusion dentaire chez le lapin et le cobaye.

Prolifération bactérienne

La prolifération bactérienne, en l’absence ou avec peu de PNN, est fréquente sur les paupières et les conjonctives. Elle implique la recherche d’autres gîtes bactériens (plis faciaux, narines, babines, oreilles, doigts). La prolifération bactérienne primitive sur le rebord des paupières peut avoir une conséquence sur le film lacrymal en modifiant la composition du meibum (). Cela a été observé en particulier chez le cocker, le terrier du Yorkshire, l’épagneul cavalier king-charles, les chiens brachycéphales et le chat persan. La prolifération bactérienne est habituelle sur le rebord palpébral d’un entropion chronique et nécessite une antibiothérapie locale avant l’intervention chirurgicale correctrice. Simonsiella, bactérie d’origine buccale et dont l’aspect est caractéristique, n’a pas de signification pathologique démontrée au niveau des conjonctives.

Formes mycosiques associées aux PNN

Les champignons visibles en cytologie se présentent sous la forme de spores, de levures ou de mycéliums. Des spores situées au niveau des paupières évoquent un dermatophyte comme Microsporum ou Trichophyton. Elles sont particulièrement visibles chez les rongeurs et les lagomorphes. Des levures rondes ou ovales bourgeonnantes sont parfois observées sur la surface palpébrale ou conjonctivale ().

La prolifération de Malassezia sur les paupières est commune, rarement primaire, et doit être traitée. La présence de Malassezia sur les conjonctives provient d’une contamination par transfert direct à partir des paupières ou par l’intermédiaire d’un poil servant de vecteur (). L’utilité d’un traitement n’est pas démontré. Des levures rondes, bourgeonnantes ou non, capsulées ou non peuvent être mises en évidence dans, respectivement, le vitré pour Candida, les paupières, conjonctives, humeur aqueuse, vitré et orbite pour Cryptococcus neoformans, la cornée pour Cladosporium, l’humeur aqueuse et le vitré pour Blastomyces dermatidis, le vitré et l’orbite pour Histoplasma capsulatum. Des mycéliums de la surface conjonctivale ou cornéenne comme Aspergillus ou Fusarium sont rares chez le chien et le chat (tableau complémentaire “La cytologie comme aide au diagnostic des conjonctivites”, sur planete-vet.com) [4]. La mise en évidence par examen cytologique des éléments fongiques est difficile lorsque la kératite est ancienne. En effet, le mycélium peut être empaqueté dans une enveloppe épithéliale. Ou Aspergillus, qui a une attraction pour l’endothélium, s’établit dans le stroma cornéen profond après effraction cornéenne.

Une coloration complémentaire de type PAS ou Gomori permet parfois de mieux visualiser le champignon. Une identification par culture est indispensable.

2. Cellules inflammatoires dominées par des lymphocytes et plasmocytes

Les lymphocytes et les plasmocytes sont très fréquents dans les conjonctives en raison de leur structure lympho-épithéliale. Associés à une hypertrophie folliculaire ou à une conjonctivite folliculaire, ils traduisent [2, 4] :

- un état réactionnel chronique secondaire à une infection bactérienne ou par Chlamydophila (en association avec des PNN), une infection virale (herpèsvirus félin) ou une irritation de type ectropion, entropion, distichiasis ou trichiasis ;

- une conjonctivite accompagnant une kératite immune ou une blépharite auto-immune ;

- une maladie immunitaire des conjonctives (allergie, infiltration lymphoplasmocytaire de la membrane nictitante, réaction médicamenteuse).

Quand la stimulation antigénique est intense, sont observés de nombreux lymphocytes et plasmocytes, des lymphoblastes, des immunoblastes, des corps fantômes (petites formes rondes extracellulaires légèrement bleutées produites par les lymphocytes) et des cellules de Mott au cytoplasme vésiculeux qui représentent des plasmocytes remplis d’anticorps (). Dans l’infiltration lymphoplasmocytaire de la membrane nictitante observée principalement chez le berger allemand et le colley, avec une dépigmentation et un infiltrat du bord libre, une poussée évolutive est signalée, selon notre expérience, par une augmentation nette des lymphocytes, alors que les plasmocytes dominent quand l’état est stationnaire.

3. Cellules inflammatoires éosinophiles

La présence de polynucléaires éosinophiles (PNE) n’est pas toujours facile à interpréter en cytologie [4].

• Chez le chat, les lésions de blépharite, de conjonctivite ou de kératite éosinophiliques sont cliniquement caractéristiques. La confirmation par examen cytologique peut être facile (nombreux PNE associés ou non à d’autres cellules inflammatoires : lymphocytes ou mastocytes) ou difficile (PNE dégranulés non reconnaissables, mais associés à une plage de granulations translucides légèrement éosinophiles ou PNE peu nombreux en l’absence d’autres cellules inflammatoires) (). Les maladies virales (herpèsvirus et calicivirus) et le mastocytome palpébral peuvent aussi s’accompagner de la présence non significative de quelques PNE associés à de nombreuses autres cellules inflammatoires.

• Chez le chien, les PNE sont faciles à détecter dans la furonculose idiopathique, la furonculose éosinophilique, le granulome éosinophilique et le pemphigus foliacé des paupières. Les PNE, qui sont mis en évidence en position sous-épithéliale par histopathologie dans certaines conjonctivites ou kératites du chien et qui évoquent une allergie, sont rarement dévoilés par la cytologie de surface. Les PNE peuvent être retrouvés dans le granulome épiscléral secondaire à une onchocercose.

4. Cellules inflammatoires dominées par les macrophages

Les macrophages définissent les lésions granulomateuses qui sont observées sur les paupières (cellulite juvénile, chalazion, leishmaniose, protothécose) et les conjonctives bulbaires (leishmaniose, onchocercose, épisclérite granulomateuse, histiocytose). Les inclusions notées dans les macrophages peuvent être des pigments ferreux (hémosidérose traduisant une hémorragie chronique ou ancienne), des débris cellulaires (inflammation chronique), des micro-organismes (mycobactérie, histoplasma, leishmanie) [5]. L’analyse cytologique d’un granulome s’effectue à partir d’une cytoponction ou d’une empreinte sur une partie superficielle sectionnée [5]. Une mise en culture ou une histopathologie sur prélèvement biopsique sont parfois nécessaires pour identifier l’agent infectieux causal.

5. Cellules inflammatoires mixtes

Une cytologie conjonctivale montrant une population inflammatoire polymorphe (PNN, lymphocytes, plasmocytes et macrophages), en l’absence d’élément figuré ou de clinique évocatrice peut poser des difficultés d’interprétation. Il s’agit néanmoins d’une situation fréquente dans les conjonctivites chroniques. Si les lésions conjonctivales sont banales (hyperhémie, hyperplasie folliculaire ou follicules), c’est la population majoritaire qui oriente vers une cause infectieuse (majorité de PNN) ou immunitaire (majorité de lymphocytes ou de plasmocytes).

Si les lésions conjonctivales sont atypiques (infiltrat important, nodule, membrane, pseudomembrane, érosion, ulcère), une biopsie s’impose. Les hypothèses diagnostiques s’orientent vers des causes inhabituelles telles qu’une maladie immunitaire, un syndrome de Lyell, une vascularite, une conjonctivite ligneuse ou lipogranuleuse.

Cellules tumorales

La cytologie permet une approche diagnostique d’une tumeur et est donc une aide à la décision chirurgicale [1]. Par exemple, pour une tumeur du bord libre palpébral, elle permet de différencier un granulome de type chalazion (traitement par incision et curetage) d’une néoplasie (traitement par exérèse). Celle-ci peut aussi préciser le caractère bénin ou malin d’une néoplasie. La différence entre une hyperplasie et une néoplasie bénigne est difficile à établir pour le praticien non confirmé dans cette discipline. Les limites de la cytologie en cancérologie sont les faux négatifs et la présence de cellules indifférenciées qui nécessitent un immunomarquage.

Des cellules rondes jointives, en une seule couche, évoquent une origine épithéliale, en multicouche avec un cytoplasme plus ou moins vacuolaire, un épithélium sécrétoire. Des cellules fusiformes révèlent une origine mésenchymateuse. Des cellules rondes et non jointives peuvent orienter le diagnostic vers un histiocytome, un mélanome, un mastocyte ou un lymphome. Les signes de malignité sont un RNC élevé, une coloration basophile du cytoplasme, une anisocytose, une anisocaryose, une anomalie des nucléoles et de la chromatine, des image de multiplication cellulaire ().

Le test Ki67, par cytomarquage, permet d’évaluer l’index de prolifération cellulaire du mastocytome, donc de proposer un pronostic et une chimiothérapie adaptée. Il peut être pratiqué en laboratoire spécialisé sur un prélèvement cytologique ou histologique.

La ponction révélant un liquide clair acellulaire évoque un kyste dont l’interprétation doit être prudente. En effet, certaines lésions comme l’hydrocystome palpébral présente un caractère prolifératif.

L’analyse cytologique de la cytoponction des nœuds lymphatiques locorégionaux est un complément indispensable lors de néoplasie oculaire.

La cytologie est l’une des clés du diagnostic ophtalmologique. L’intérêt principal est d’identifier un phénomène infectieux ou inflammatoire réactionnel ou une néoplasie. À la faveur d’un apprentissage et d’une pratique régulière, elle fournit des renseignements précis.

Le clinicien doit rester prudent vis-à-vis de son interprétation et ne pas hésiter à demander l’avis d’un cytologiste confirmé. Le diagnostic définitif est souvent obtenu grâce à d’autres examens complémentaires comme la bactériologie, la mycologie, la technique de polymerase chain reaction, l’immunomarquage, la sérologie ou l’histopathologie.

  • (1) Voir l’article “Intérêts et réalisation de la cytologie oculaire”, du même auteur. Point Vét. 2007 ; 280 : 27-30.

POINTS FORTS

• Les prélèvements obtenus par empreinte ou exfoliation permettent d’observer les cellules épithéliales, inflammatoires et des éléments figurés (bactéries, champignons) de la surface oculaire.

• Les prélèvements obtenus par ponction de masse, de milieux intraoculaires ou de l'orbite peuvent mettre en évidence des cellules inflammatoires, néoplasiques ainsi que des éléments figurés.

• Les champignons visibles à l’examen cytologique se présentent sous forme de spores, de levures ou de mycéliums.

• L’examen cytologique de cellules tumorales prélevées par ponction permet de suspecter leur caractère bénin ou malin.

Références

  • 1 - Attali-Soussay K, Jegou JP, Clerk B. Retrobulbar tumors in dogs and cats : 25 cases. Vet. Ophthalmol. 2001 ; 4 : 19-27.
  • 2 - Jegou JP, Liotet S. Intérêt du frottis conjonctival dans le diagnostic biologique des conjonctivites chez le chien et le chat. Prat. Med. Chir. Anim. Comp. 1991 ; 26 : 567-580.
  • 3 - Prasse KW, Winston SM. The eyes and associated structure. In : Cowell RL, Tyler RD, Meinkoth JH. Diagnostic cytology and hematology of the dog and cat. 2nd Ed. Ed. Mosby, St Louis. 1999 : 68-82.
  • 4 - Roze M. Manifestations conjonctivales et cornéennes de la leishmaniose. Prat. Med. Chir. Anim. Comp. 1988 : 4 ; 245-254.
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