Dysplasie coxofémorale : traitement et législation - Le Point Vétérinaire n° 282 du 01/01/2008
Le Point Vétérinaire n° 282 du 01/01/2008

Orthopédie canine

Mise à jour

Avis d'experts

Auteur(s) : Isabelle Valin*, Bernard Bouvy**, Robert Moraillon***

Fonctions :
*Clinique vétérinaire
5, rue Fernet
94700 Maisons-Alfort
**Centre hospitalier vétérinaire
43, avenue Aristide-Briand 94110 Arcueil
***Unité pédagogique de médecine ENV d’Alfort
7, avenue du Général-de-Gaulle
94704 Maisons-Alfort

Le développement de techniques prospectives fiables, comme la symphysiodèse, semble faire diminuer l’incidence clinique de la dysplasie coxofémorale chez le chien.

Le traitement de la dysplasie coxofémorale doit toujours être proposé en fonction de l’état clinique de l’animal, et non à partir de l’examen radiographique ; la corrélation entre les symptômes et le cliché est tellement faible que, si cette consigne n’est pas suivie, tous les abus chirurgicaux sont permis, quelle que soit la procédure : résection, ostéotomie de correction, prothèse.

Quels traitements peuvent être proposés chez le jeune chien dysplasique ?

Isabelle Valin : Aucun traitement de la dysplasie coxofémorale (DCF) n’est totalement satisfaisant ; un chien dysplasique reste dysplasique, même après une correction chirurgicale. C’est pourquoi la prévention et l’éradication au niveau des éleveurs sont si importantes.

L’expression clinique de cette malformation est variable, d’une race à l’autre et d’un individu à l’autre(1) (). Les recommandations thérapeutiques sont donc adaptées à chaque cas, en prenant en compte l’âge de l’animal, le degré d’évolution de la dysplasie et le handicap fonctionnel effectif, le type d’activité du chien (compagnie, travail, sport), le profil du propriétaire (lui-même plus ou moins actif, plus ou moins exigeant). L’aspect financier du traitement doit aussi être considéré.

• Il convient de recommander au propriétaire d’un jeune chien en croissance une hygiène de vie préventive. L’alimentation doit être équilibrée, sans carence ni excès de calcium. Les aliments industriels sont actuellement souvent satisfaisants. Le surpoids doit être combattu : un chiot trop lourd fragilise son cartilage et traumatise ses articulations. Il est, par conséquent, préférable qu’un chiot soit maigre. Il convient donc de lutter contre les éleveurs qui considèrent que certains chiens, pour être dans le standard, doivent être “ronds”. Il est toujours temps de faire grossir un chien à l’âge adulte. Un exercice régulier, sans excès, doit être pratiqué par le chiot. Le temps consacré à l’exercice peut être mis à profit pour l’éducation de l’animal. Les escaliers doivent être évités ainsi que les jeux de balle, etc. Le jogging n’est conseillé que lorsque la maturité squelettique est atteinte. Tout traumatisme articulaire favorise la synovite, laquelle contribue à un épanchement articulaire qui, à son tour, engendre une instabilité articulaire.

En cas de dysplasie avérée, les ostéotomies de correction ont pour objectif d’améliorer à long terme la fonction articulaire. Cependant, environ 75 % des jeunes animaux traités de façon conservatrice reprennent une activité correcte à maturité. Les 25 % restants nécessiteront, à un moment de leur vie, un traitement, qu’il soit médical ou chirurgical. Lors de signes cliniques chez le jeune chien, le traitement conservateur consiste à attendre que la capsule se fibrose et se densifie pour lui éviter de plus amples étirements, et que l’os sous-chondral en se densifiant ne soit plus sujet aux fractures. En cas de boiterie aiguë, le traitement conservateur correspond à celui d’une entorse : mise au repos pour 10 à 14 jours, même si l’état clinique de l’animal s’améliore plus rapidement. Ensuite, une rééducation progressive est mise en œuvre (la marche au pas en laisse est très utile pour les phases de rééducation). Elle tend à densifier les tissus articulaires et péri-articulaires de façon harmonieuse : massage, mouvements passifs du membre, augmentation progressive du temps d’exercice de cinq minutes deux fois par jour jusqu’à vingt minutes deux fois par jour, d’abord sur terrain plat puis accidenté (faire monter des pentes, réaliser des cercles, nager). Les anti-inflammatoires sont prescrits aux doses minimales actives, toujours avec une ration alimentaire.

• Si le traitement conservateur est insuffisant, que le type d’activité future du chien est le travail ou le sport, ou bien encore que le propriétaire préfère ne pas prendre le risque du développement invalidant de l’arthrose, le traitement chirurgical peut être envisagé. En cas de hanche subluxée et réductible (test d’Ortolani positif), avec des signes cliniques invalidants, ou si l’avenir présage d’une dégradation de la fonctionnalité de la hanche, il s’agit d’une indication d’ostéotomie de correction.

Une triple ostéotomie pelvienne (TOP) est entreprise si le col et la tête fémoraux sont correctement orientés, une ostéotomie intertrochantérienne si l’antéversion ou la valgisation du col fémoral sont anormales ( et , et et et et ). Nous avons parfois associé les deux types d’ostéotomie. Les ostéotomies de correction permettent de conserver les composantes naturelles de la hanche en leur redonnant une nouvelle orientation, pour augmenter les surfaces portantes et limiter l’évolution arthrosique.

Afin que la TOP donne toute satisfaction, il est préférable que la hanche ne présente pas ou peu de remaniement dégénératif sur les radiographies, que l’angle de réduction soit inférieur à 30° et celui de subluxation inférieur à 10°, que la réduction soit nette et franche (test d’Ortolani “bruyant”) et que l’arthroscopie ne révèle pas de dommage cartilagineux. Certains chirurgiens limitent leurs indications chirurgicales à ces cas-là. L’objectif est alors de conserver des hanches dysplasiques, réorientées pour ne développer qu’une arthrose modérée. Cette indication s’adresse à des animaux jeunes, peu ou pas boiteux, qui présentent des subluxations radiographiques, et pour lesquels une évolution invalidante de la dysplasie est préjugée. Ces cas de figure sont pourtant rares. L’âge de présentation du chien n’est pas toujours contrôlé : plus il est âgé, plus la présence d’arthrose est vraisemblable, et, comme l’animal est souvent boiteux, il risque de présenter déjà des lésions de dégénérescence articulaire ou des fractures du rebord acétabulaire. Ces jeunes animaux souffrent parfois beaucoup et peuvent être invalides. Des ostéotomies de correction sont alors réalisées malgré la présence de remaniements déjà installés. Cela permet de conserver des hanches dysplasiques, réorientées, cette fois, pour soulager les contraintes anormales et douloureuses. Dans notre expérience, la douleur est nettement diminuée. L’arthrose se développe, mais elle est mieux supportée par l’animal grâce à l’amélioration de la couverture articulaire et à la décharge des zones de contrainte. Dans ces cas, l’objectif n’est pas une hanche parfaite, mais le soulagement clinique immédiat du chien. Le propriétaire doit en être dûment informé. Ce principe permet de proposer une cure chirurgicale conservatrice chez des animaux boiteux. Dans ces conditions, les indications des chirurgies de correction dépendent moins de l’âge de l’animal que de l’état de l’articulation : à cinq mois, une articulation peut être totalement dégénérée de façon irréversible, alors qu’à deux ans une hanche peut être discrètement arthrosique mais douloureuse, donc rester une indication pour l’ostéotomie de correction. Cependant, l’âge optimal pour cette procédure se situe entre cinq et 12 mois. Avant cinq mois, le manque de maturité squelettique peut entraîner un débricolage d’implant, au-delà de douze mois, le risque de développement d’une arthrose est plus élevé. D’où l’importance du diagnostic précoce de la dysplasie ( et ).

Une nouvelle technique de prévention est apparue : la symphysiodèse pubienne. Celle-ci consiste à bloquer la croissance de la symphyse pubienne afin de provoquer, lors de la croissance du bassin, une ventroversion des acétabulums, qui vient contrebalancer le défaut de ventroversion d’un acétabulum dysplasique. Les candidats à ce genre de procédure sont des chiots de moins de 20 semaines issus d’une lignée dysplasique et ceux pour lesquels le test de PennHip® est positif. L’intervention chirurgicale est beaucoup moins lourde qu’une ostéotomie de correction. Cette technique permet d’obtenir chez les adultes des hanches avantageuses à la fois sur les plans fonctionnel et clinique. La couverture articulaire est satisfaisante en fin de croissance et le suivi à long terme est encourageant. Mais les chiens qui ont subi une symphysiodèse présente, lors de leur cotation officielle par radiographie, une lecture avantageuse sur le plan légal. C’est pourquoi ils doivent être chirurgicalement écartés de la reproduction. Une stérilisation à cet âge précoce est-elle réalisable, en même temps que la symphysiodèse ? Si non, comment s’assurer que ces animaux adultes correctement évalués quant à la dysplasie ne soient pas mis à la reproduction ? Une question éthique se pose.

• Si la hanche est subluxée, ou luxée et irréductible et que le chien souffre malgré un traitement anti-inflammatoire et conservateur adapté, seule une chirurgie d’exérèse/arthroplastie peut être proposée (, et ). Les prothèses totales de hanche nécessitent, pour être réalisées dans de bonnes conditions, une maturité squelettique (de 10 à 18 mois). Si la hanche est luxée et irréductible et que le chien ne souffre pas, le traitement conservateur est poursuivi, en réservant pour l’avenir une possible prothèse de hanche.

Quels traitements peuvent être proposés chez le chien âgé ?

• Chez le chien adulte dysplasique, le traitement conservateur doit être privilégié et la décision chirurgicale repoussée. Il s’agit du traitement général de l’arthrose. L’exercice physique régulier, la natation, permet la conservation du potentiel musculaire et de la souplesse articulaire. L’échauffement au pas en laisse est recommandé avant tout exercice plus soutenu. Un contrôle drastique de l’embonpoint est effectué. En médecine humaine, certains orthopédistes refusent de poser des prothèses totales de hanche chez les patients obèses, avant qu’ils n’aient fait la démarche de maigrir ; les risques de complications sont tels qu’ils ne veulent pas les assumer. Des cures plus ou moins prolongées de chondroprotecteurs et d’acides gras polyinsaturés (oméga 3) permettent de limiter l’expression clinique de l’arthrose. La manière dont des molécules de poids moléculaire élevé comme la glucosamine ou la chondroïtine sulfate peuvent passer la barrière intestinale, rejoindre l’articulation et être intégrées à la trame du cartilage articulaire n’est pas rapportée. Cependant, quelques études cliniques, tant chez l’animal que chez l’homme, relèvent les bénéfices de l’utilisation de ces produits. En médecine humaine, le seuil de douleur, le déverrouillage matinal et l’augmentation du périmètre de marche sont comparés entre des patients qui reçoivent un placebo et d’autres traités avec des chondroprotecteurs. Ces indicateurs sont meilleurs pour les individus arthrosiques qui prennent ces produits. Les propriétaires de chiens arthrosiques font les mêmes constatations. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) disponibles actuellement permettent de traiter de façon satisfaisante (sur une durée de trois semaines) les poussées inflammatoires de l’arthrose. La tolérance digestive des AINS rend possible leur utilisation au long cours, afin de soulager l’animal. En gardant une activité physique, celui-ci conserve son potentiel musculaire et protège ainsi ses articulations. Les anti-inflammatoires naturels utilisés en phytothérapie peuvent retarder l’emploi de produits plus puissants. La physiothérapie, bien que peu développée en France chez les animaux, permet de conserver un jeu articulaire indolore.

• C’est seulement lorsque l’invalidité devient permanente, la douleur rebelle aux anti-inflammatoires ou l’intolérance digestive insurmontable (malgré le changement de produit) que le traitement chirurgical est abordé.

Bien que très dévalorisée, la résection/arthroplastie de la hanche reste une solution satisfaisante chez les chiens pour lesquels la prothèse ne peut pas être envisagée (raisons économiques ou médicales). Une résection pratiquée sur une hanche encore musclée permet de mener une vie courante satisfaisante. L’intervention vise à éliminer le contact anormal et douloureux des éléments articulaires qui ont perdu leur cartilage. Les séquelles sont régulières : l’extension et l’abduction sont limitées, mais la douleur est éliminée. Certains auteurs rapportent des résultats incertains : douleur résiduelle par compression du nerf sciatique, par persistance du frottement de la base du col sur l’acétabulum, complications plus fréquentes chez les individus lourds (> 20 kg). Cependant, les résultats fonctionnels dépendent surtout de la technique chirurgicale. Même si cette intervention est courante et qu’elle ne présente pas de difficultés particulières, le soin apporté à son indication et à sa réalisation permet d’obtenir des résultats plus constants. Il convient ainsi de ne pas opérer des animaux trop démusclés (prévenir cette démusculation), d’éliminer la base du col et de reconstituer l’abord chirurgical de façon soigneuse.

Chez les animaux dysplasiques qui présentent des contractures des adducteurs, la pectinectomie a un effet antalgique. Ces contractures se rencontrent essentiellement chez les bergers allemands. Les retrievers sont plus laxes et souffrent moins de leurs adducteurs.

Pour ces animaux, la solution de choix est la prothèse totale de hanche. La décision revient au propriétaire, qui doit être dûment informé des avantages et des inconvénients des deux techniques. L’examen clinique doit exclure de l’indication de la prothèse les animaux qui présentent un trouble neurologique, une autre affection sur le membre concerné, une maladie systémique (diabète, infection cutanée chronique) ou une arthrite septique sur la hanche atteinte. Si la prothèse de hanche redonne une fonction proche de la normale et permet à l’animal de garder une activité sportive, ses deux inconvénients majeurs restent le coût et les complications potentielles, qui, même pour des chirurgiens entraînés, sont de 5 % (). Certaines de ces complications sont curables, comme la luxation de la prothèse qu’une reprise chirurgicale peut traiter. D’autres, comme les infections et les descellements, se soldent par le retrait de la prothèse, donc par une situation de résection/ arthroplastie. D’autres encore, comme une fracture du fémur, ont des conséquences plus dramatiques. Le propriétaire du chien dysplasique doit être averti de tous ces risques pour prendre une décision en connaissance de cause. Il existe actuellement des prothèses cimentées et non cimentées (). Les secondes ont été développées à la suite de complications de descellement et d’infection liées au ciment des prothèses classiques. Les prothèses non cimentées sont adaptées précisément au calibre du fût fémoral et peuvent être recolonisées par de l’os. Les prothèses cimentées ont, elles aussi, évolué. Elles sont à présent modulables, avec des longueurs de col adaptables et des cupules variables. Parfaitement posée, une prothèse totale de hanche redonne une activité normale à un chien. Cependant, la qualité de sa mise en place dépend essentiellement de l’expérience du chirurgien. La courbe d’apprentissage est longue et le nombre d’indications absolues de prothèse chez le chien reste faible. L’effectif des chirurgiens dûment formés à cette procédure doit donc être limité. La pose d’une prothèse ne peut en acun cas être improvisée.

L’arthroscopie de la hanche a-t-elle un intérêt pour le traitement de la dysplasie coxofémorale ?

Bernard Bouvy : L’arthroscopie de la hanche est un examen récemment décrit qui vient utilement compléter la radiographie dans l’évaluation des lésions associées à la dysplasie coxofémorale juvénile. Elle est techniquement simple à réaliser chez le chien, relativement aux autres arthroscopies, en particulier lorsque la laxité est significative et pas encore jugulée par la fibrose capsulaire secondaire. Elle est devenue un outil de sélection des chiots et des jeunes adultes potentiellement candidats à une TOP.

Les critères radiographiques usuels de sélection pour cette intervention sont l’absence ou le faible degré d’arthrose visible et l’absence de comblement des acétabulums. Une projection DAR est également préconisée par certains pour estimer la qualité du sourcil acétabulaire osseux.

Elle est, à notre sens, peu facile à mettre en œuvre. La limite de l’évaluation radiographique réside dans l’incapacité à détecter les stades précoces d’arthrose et à évaluer l’état des cartilages. La corrélation entre les lésions “radiologiquement” et “arthroscopiquement” visibles est faible, et ce d’autant plus que le stade des lésions radiologiques est débutant. L’expérience passée de la sélection purement radiographique pour la TOP nous a montré des cas où le résultat clinique était peu satisfaisant alors que le cliché préopératoire semblait en faveur de cet acte.

L’arthroscopie permet, par rapport à la radiographie, l’évaluation des cartilages fémoraux et acétabulaires. Il s’agit d’approcher le pronostic biologique et non plus seulement mécanique de la chirurgie correctrice juvénile. L’objectif de la TOP étant d’améliorer la congruence articulaire par l’augmentation de la couverture dorso-acétabulaire et la médialisation de la tête fémorale, il est particulièrement utile de pouvoir compter sur un sourcil acétabulaire cartilagineux le plus sain possible. Le labrum, ou fibrocartilage à la jonction de la capsule articulaire et de l’os acétabulaire, est également évaluable sous arthroscopie ; plus il est en bon état, plus les chances de succès de la TOP sont élevées. De plus, la préservation de zones cartilagineuses saines les plus étendues possible au moment de la correction chirurgicale est de bon augure pour limiter l’évolution de l’arthrose à l’âge adulte, d’un point de vue sinon lésionnel au moins fonctionnel.

La double sélection radiographique et arthroscopique, la radiographie étant un facteur d’exclusion et l’arthroscopie un facteur d’inclusion, permet de sélectionner plus finement les candidats à l’intervention chirurgicale et d’éviter à certains maîtres d’investir dans une chirurgie juvénile trop tardive sur le plan biologique. Au vu de l’expérience et du suivi de nos cas ainsi sélectionnés depuis quelques années, nous avons de bonnes raisons de penser que, même en ne corrigeant qu’une seule hanche “bien choisie” dans le jeune âge, les chiens bénéficiaires ont une faible probabilité de devoir subir une intervention de dernier recours telle qu’une exérèse tête/col ou une prothèse totale de hanche, une fois adultes ou âgés.

Quelles sont les actions ouvertes à l’acheteur d’un chien dysplasique ?

Robert Moraillon : L’article 22 de la loi n° 89-142 du 22 juin 1989 stipule que, pour l’espèce canine, la DCF figure dans la liste des vices rédhibitoires énumérés à l’article 285-1 du Code rural. Le législateur précise qu’« en ce qui concerne cette maladie, pour les animaux vendus avant l’âge d’un an, les résultats de tous les examens radiographiques pratiqués jusqu’à cet âge sont pris en compte en cas d’action résultant des vices rédhibitoires ».

L’article 285-2 renvoie au décret n° 90-572 du 28 juin 1990 qui indique que le délai imparti à l’acheteur d’un animal, tant pour introduire l’une des actions ouvertes par l’existence d’un vice rédhibitoire que pour provoquer la nomination des experts, est de 30 jours. Ce délai court à partir du jour de la livraison.

Le diagnostic de DCF est avant tout radiologique. Il obéit à un protocole précis pour la réalisation et l’interprétation des clichés. L’interprétation selon les critères définis permet de classer les chiens selon cinq stades, depuis le stade A (aucun signe de dysplasie) jusqu’au stade E (grave dysplasie de la hanche), en passant par le stade B (hanches presque normales). Un chien atteint d’une maladie de stade B ne peut faire l’objet d’une action en rédhibition, qui, en revanche, est possible pour les stades C, D et E. Il convient cependant de remarquer que la classification est contestable : des travaux sérieux montrent que l’appréciation change d’un lecteur à l’autre à partir d’une même radiographie et que le classement d’un chien peut varier considérablement, de A à D, en fonction de discrètes modifications de son positionnement lors de la prise des clichés.

Le nouvel article 285 du Code rural prévoit judicieusement l’emploi possible, pour évaluer un animal soupçonné de dysplasie, de tous les clichés réalisés avant l’âge d’un an : le signe majeur de la dysplasie (la subluxation comme conséquence d’une trop grande laxité ligamentaire) n’est jamais dû à un mal-positionnement, alors qu’il peut ne pas être décelé sur un cliché pris dans certaines conditions. C’est ainsi qu’une dysplasie bilatérale se traduisant par une hyperlaxité ligamentaire peut être dissimulée chez un animal ayant fait l’objet d’une contention des hanches à l’aide d’un bandage au moment de la prise du cliché. Par conséquent, si, parmi plusieurs radiographies réalisées chez un même animal, une seule met en évidence une subluxation, l’expert peut conclure à l’existence d’une dysplasie.

Cette législation, inscrivant la dysplasie sur la liste des vices rédhibitoires, est cependant mal adaptée à la réalité du marché. Les animaux sont souvent vendus vers l’âge de trois mois ; la dysplasie est alors difficile à déceler et le délai d’action n’est que de 30 jours. Seules les atteintes très marquées peuvent être détectées à cet âge, et un animal peut présenter à quatre mois des hanches apparemment normales et se révéler dysplasique à un an.

En matière de DCF, la législation sur les vices rédhibitoires ne s’applique que si le diagnostic est établi dans le mois suivant la livraison et la requête pour la nomination d’un expert introduite dans ce même délai auprès du tribunal d’instance dans le ressort duquel se trouve l’animal.

Lorsque la dysplasie est découverte plus tardivement, l’acheteur dispose-t-il d’autres voies de recours ?

RM : Jusqu’en 2001, les tribunaux, considérant que la dysplasie pouvait être assimilée à un vice caché, grave, antérieur à la vente, ont pris des décisions admettant le recours par l’acheteur à une action en garantie pour vice caché avec à charge pour l’expert de démontrer l’existence de celui-ci, sa gravité et son antériorité par rapport à la vente.

Depuis 2001, la Cour de cassation a rendu des décisions aux termes desquelles les actions en garantie dans les ventes d’animaux sont régies, à défaut de conventions entre les parties, par la seule législation sur les vices rédhibitoires. La Cour n’admet plus les actions fondées sur la notion de vice caché et revient à une lecture très stricte de l’article 284 du Code rural. Depuis, des décisions contradictoires ont été rendues par des cours d’appel, certaines se conformant aux arrêts de la Cour de cassation (cour d’appel de Caen, 4 mars 2003, Écurie de Blary c/ Tellier), d’autres admettant les actions fondées sur le vice caché (cour d’appel de Bordeaux, 20 mai 2003, Defremont c/ Catry).

Cette interprétation restrictive a pour effet de réduire considérablement les actions ouvertes à l’acheteur. Une autre voie est désormais ouverte à l’acquéreur d’un chien dysplasique, à condition que le vendeur soit un professionnel (éleveur professionnel, chenil, animaleries, etc.), c’est-à-dire soit un commerçant, soit un éleveur professionnel, soit un éleveur qui vend régulièrement les produits de son élevage. Cette possibilité résulte de l’application du droit de la consommation qui transpose en droit français la directive européenne du 25 mai 1999 sur la vente et la garantie des biens de consommation, reprise dans l’ordonnance du 17 février 2005 modifiant l’article 211-4 du Code de la consommation. En droit français, les animaux sont des biens meubles, non dotés de la personnalité juridique. Ce texte offre au consommateur un fondement d’action supplémentaire concernant la conformité du bien acheté. Cette disposition permet un recours pendant deux ans à compter du jour de la découverte du vice caché lorsque le bien acheté n’est pas propre à l’usage habituellement attendu d’un bien semblable. Le Code de la consommation prévoit une garantie de droit si le vice est découvert dans les six mois suivant l’achat, ce qui évite à l’acheteur d’avoir à démontrer l’antériorité du vice par rapport à la vente.

En pratique, le vétérinaire qui constate l’existence d’une dysplasie dans les 30 jours suivant la livraison conseille une action en rédhibition (articles 184 et suivants du Code rural). Si la découverte du vice intervient après 30 jours, mais dans les six mois qui suivent la vente et que celle-ci a été effectuée par un professionnel, la garantie est de droit, ce qui signifie qu’il n’est pas nécessaire de démontrer l’antériorité du vice. Si la découverte est faite plus de six mois après la vente par un professionnel, l’action est possible dans les deux ans qui suivent, mais il convient alors de démontrer l’antériorité du vice par rapport à la vente. Le vétérinaire doit d’abord conseiller à son client une attitude conciliante, en lui demandant de prévenir le vendeur par lettre recommandée pour obtenir le remboursement du prix contre le retour de l’animal chez celui-ci ou pour négocier une minoration du coût.

Toute intervention chirurgicale pour corriger la dysplasie doit faire l’objet d’une information préalable du vendeur et de son autorisation, car celui-ci a toujours la possibilité de reprendre l’animal en restituant le prix à l’acheteur, notamment s’il estime que la somme demandée au titre de la réduction du prix de vente est excessive ou encore que les frais d’une opération sont trop élevés en comparaison de ce prix. Une intervention chirurgicale pour corriger une dysplasie ne présente généralement aucun caractère d’urgence, ce qui laisse à l’acheteur le temps nécessaire pour obtenir l’accord du vendeur.

  • (1) Voir l’article “La dysplasie coxofémorale : pathogénie et diagnostic”, d’I. Valin, D. Fau, M. Gatineau et B. Bouvy, dans Le Point Vétérinaire n° 281.

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