L’acétate d’osatérone n’induit pas d’effets indésirables sur la libido - Le Point Vétérinaire n° 279 du 01/10/2007
Le Point Vétérinaire n° 279 du 01/10/2007

HYPERPLASIE BÉNIGNE DE LA PROSTATE CHEZ LE CHIEN

Info

FOCUS

Auteur(s) : Éric Vandaële

Fonctions : 4, square de Tourville
44470 Carquefou

La réponse clinique induite par une cure de sept jours de comprimés d’acétate d’osatérone persiste six mois, sans qu’il s’agisse d’une castration chimique.

Les innovations liées au traitement de la fonction de reproduction sont rares. La dernière d’importance date de 1996, avec le lancement de l’aglépristone (Alizine®) comme traitement abortif des chiennes saillies sans le consentement de leurs propriétaires. Cette solution injectable, permet au groupe pharmaceutique Virbac d’occuper la première place de ce petit marché lié à la reproduction chez les animaux de compagnie (6 millions d’euros au total). De plus, les médicaments de la fonction de la reproduction s’adressent, pour la quasi-totalité d’entre eux, aux femelles pour modifier, améliorer ou inhiber leur cycle œstral. La mise sur le marché (AMM) des comprimés Ypozane® destinés au traitement de l’hyperplasie bénigne de la prostate des chiens mâles entiers, à base d’un nouvel antiandrogène, l’acétate d’osatérone, est donc exceptionnelle (encadré, figure complémentaire “Structure de l’acétate d’osatérone”, sur planete-vet.com). En outre, la nouvelle spécialité bénéficie d’une AMM européenne dite centralisée, valable d’emblée dans toute l’Union européenne, après un avis favorable des experts de l’Agence européenne du médicament. Cette procédure permet de disposer du rapport officiel d’évaluation de cette agence.

Un comprimé par jour pendant sept jours

• L’acétate d’osatérone se présente en comprimés non sécables. Quatre dosages sont proposés selon le poids des chiens : XS (1,875 mg) pour les chiens de 3 à 7,5 kg, S (3,75 mg) jusqu’à 15 kg, M (7,5 mg) jusqu’à 30 kg et L (15 mg) jusqu’à 60 kg. Le schéma posologique comprend l’administration pendant sept jours d’un seul comprimé par jour à la dose de 0,25 à 0,50 mg/kg. Cette cure d’une semaine revient entre 10 et 45 € (prix public TTC). Son efficacité sur le volume prostatique et les signes cliniques dure six mois.

• Comme antiandrogène, dérivé des stéroïdes, l’acétate d’osatérone a une action double sur la cellule prostatique (figure 1). D’abord, il bloque le passage de la testostérone dans la cellule prostatique. Ensuite, dans la cellule, il inhibe de manière compétitive la fixation de la testostérone et de son dérivé, la dihydrotestostérone, à leurs récepteurs prostatiques. Les effets de la testostérone sont donc inhibés, ce qui conduit à une diminution du volume de la prostate et à une régression des signes cliniques éventuels.

Une accumulation liée à une lente élimination

Par voie orale, la résorption digestive est rapide, avec un pic plasmatique atteint en deux heures environ (avec ou sans nourriture). L’élimination de l’osatérone et de son métabolite actif (un dérivé hydroxylé) est lente, avec une demi-vie de 80 à 100 heures. Elle est principalement biliaire (60 %) et, secondairement, urinaire (25 %). Ces caractéristiques conduisent à une accumulation progressive de la molécule durant les sept jours de traitement, puis à une persistance des concentrations plasmatiques pendant plusieurs jours après l’arrêt de celui-ci.

Efficace six mois, mais pas plus

• La réponse clinique apparaît dès la première semaine de traitement et augmente encore durant la semaine suivante (sans traitement). Elle persiste six mois. Au-delà, le volume de la prostate peut augmenter de nouveau et les signes cliniques réapparaître (figure complémentaire “Évolution du volume prostatique et du score clinique sur un an”, sur planete-vet.com). Toutefois, même un an après le traitement, le volume prostatique et les signes cliniques associés sont en moyenne inférieurs à ceux d’avant la cure.

• Sur 142 chiens, l’étude clinique multicentrique comparative évaluée par l’Agence européenne du médicament confirme l’efficacité de ce protocole renouvelé tous les six mois, si nécessaire (figure 2) [1]. Il est possible de lui associer un traitement antibiotique en cas de prostatite infectieuse. Onze chiens de cet essai qui en étaient atteints recevaient également des antibiotiques.

• En ce qui concerne les mises en garde, le profil d’activité de la molécule conduit à éviter le contact direct avec ce médicament pour les femmes enceintes. Toutefois, le contact cutané ou même une contamination orale (les mains portées à la bouche) ne semble pas représenter un risque sérieux pour l’utilisateur.

Une augmentation de l’appétit

Chez les chiens, les études de tolérance à une, trois et cinq fois la dose recommandée pendant dix jours ne mettent pas en évidence d’effets indésirables, à l’exception d’une baisse de la cortisolémie à dose élevée. Cet effet n’est pas observé à la dose recommandée (0,25 mg/kg), car la molécule n’a qu’une très faible affinité pour les récepteurs glucocorticoïdes.

Sur le terrain, les études cliniques ont surtout rapporté des cas d’augmentation légère de l’appétit. Le traitement ne semble pas avoir d’effet progestagène, comme le développement des glandes mammaires chez les chiens mâles traités.

Pas de castration chimique par l’osatérone

Ce traitement est compatible avec le maintien de la fonction de reproduction des chiens mâles reproducteurs. La libido, le spermogramme, donc les performances de reproduction des animaux traités ne sont pas modifiés par l’administration de cet antiandrogène. Cela constitue un des atouts essentiels de cette cure, même si le chien mâle n’est pas destiné à la reproduction.

Encadré : Hyperplasie bénigne de la prostate

• Plus de 80 % des chiens mâles et entiers, âgés de plus de six ans seraient atteints d’une hyperplasie de la prostate, souvent bénigne.

• Les recommandations des experts pour le dépistage de cette affection (en dehors de tout signe clinique) sont les suivantes [2] :

- l’examen clinique annuel des chiens mâles et âgés, réalisé par exemple lors de la consultation dite vaccinale ou d’un bilan gériatrique, doit inclure un toucher rectal ;

- en cas d’anomalie, l’examen échographique peut permettre de confirmer la lésion. Les deux tiers des vétérinaires sont équipés d’un échographe.

Une hématurie, une constipation ou d’autres signes cliniques orientent le praticien vers ces examens.

• Selon les études de marché, les praticiens déclarent diagnostiquer deux à cinq cas par mois. Et, en l’absence de traitement spécifique, seulement une minorité de ces chiens (10 à 50 % selon les vétérinaires) recevraient de l’acétate de delmadinone (Tardak®), subiraient une castration chirurgicale, solution efficace mais radicale et irréversible, ou se verraient administrer des spécialités humaines (Androcur®, etc.). Jusqu’à présent, cette castration chimique ou chirurgicale constitue parfois un frein pour le propriétaire.

EN SAVOIR PLUS

- Agence européenne du médicament. Documentation de référence sur le site de : http://www.emea.europa.eu/vetdocs/vets/Epar/ypozane/ypozane.htm

- Collectif. Affections de la prostate chez le chien âgé. RPC n° XI. Recommandations pratiques cliniques en gériatrie vétérinaire. Éd. du Point Vétérinaire. 2004 : 31 et 183.

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