Souffle sternal chez un maine coon - Le Point Vétérinaire n° 273 du 01/03/2007
Le Point Vétérinaire n° 273 du 01/03/2007

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CARDIOLOGIE

Auteur(s) : François Serres*, Valérie Chetboul**, Carolina Carlos Sampedrano***, Vassiliki Gouni****, Jean-Louis Pouchelon*****

Fonctions :
*Unité de cardiologie, ENVA
**Unité de cardiologie, ENVA
***UMR Inserm-ENVA U841
****Unité de cardiologie, ENVA
*****UMR Inserm-ENVA U841
******Unité de cardiologie, ENVA
*******UMR Inserm-ENVA U841
********Unité de cardiologie, ENVA
*********UMR Inserm-ENVA U841

Un chat mâle entier, de race maine coon, âgé de deux ans, est présenté à la consultation de cardiologie pour l’exploration d’un souffle systolique décelé au cours d’une consultation vaccinale.

Le chat a été testé pour la mutation MCH-1 : il est porteur hétérozygote. Des cas de myocardiopathie hypertrophique (MCH) ont en outre été rapportés dans la lignée de l’animal.

L’examen clinique ne révèle aucune anomalie de coloration ou de perfusion des muqueuses. La fréquence et l’amplitude des mouvements respiratoires sont normales.

L’examen cardiovasculaire met en évidence une fréquence cardiaque normale (160 à 180 battements par minute), associée à un rythme régulier.

Le pouls, synchrone, est bien frappé. Lors de l’auscultation, les bruits cardiaques sont d’intensité normale et la présence d’un souffle systolique sternal d’intensité 3/6 est confirmée.

Examens complémentaires

Un examen échocardiographique est mis en œuvre afin d’explorer l’anomalie décelée à l’auscultation. L’examen bidimensionnel et en mode temps-mouvement du ventricule gauche ne montre aucun épaississement pariétal systolique ou diastolique, aussi bien du septum interventriculaire que de la paroi libre du ventricule gauche (PHOTO 1). En revanche, un épaississement modéré associé à une hyper­échogénicité des feuillets mitraux est constaté. Cette anomalie s’accompagne d’un reflux mitral systolique de faible extension colorimétrique, mis en évidence au mode Doppler couleur (PHOTO 2). Cette lésion mitrale explique le souffle ausculté. Aucune dilatation cavitaire associée n’est détectée. Un examen Doppler tissulaire, réalisé simultanément, ne révèle pas d’anomalie des vitesses myocardiques sous-endocardiques et sous-épicardiques compatible avec l’évolution d’une myocardiopathie subclinique.

Un diagnostic de dysplasie mitrale mineure est ainsi établi. En dépit d’un génotype pathologique, aucune anomalie phénotypique compatible avec l’évolution d’une MCH n’est mise en évidence. Un suivi échographique annuel est recommandé. Aucun traitement n’est instauré.

Discussion

La MCH, maladie fréquente chez le chat adulte, peut également atteindre des animaux jeunes. Ainsi, chez le maine coon, une forme héréditaire de l’affection a été décrite et isolée dans une colonie d’animaux [2]. La mutation (nommée MCH-1) concerne le gène codant pour la myosin protein binding C et le mode de transmission décrit est autosomal dominant, avec cependant une expressivité variable [2, 3]. Des individus porteurs peuvent donc ne développer qu’une forme tardive ou subclinique de la maladie. Le test génétique détectant la mutation CMH-1 est maintenant disponible en France(1) et est largement employé par les éleveurs de chats de race maine coon et les particuliers. Cet examen ne décèle cependant que les animaux porteurs (homo- ou hétérozygotes), et non ceux qui sont malades. La détection d’un souffle chez un chat porteur de la mutation ne constitue donc pas une preuve de l’évolution phénotypique d’une MCH. D’autres cardiopathies congénitales ou acquises peuvent en effet être retrouvées chez ces animaux. Inversement, l’absence de souffle cardiaque n’exclut pas la maladie, le souffle n’étant décrit que dans un peu plus de la moitié des cas de MCH [4]. De plus, un génotype sain pour la mutation décrite ne permet pas d’exclure l’existence d’une myocardiopathie liée à une autre mutation.

L’examen au mode Doppler tissulaire met parfois en évidence la présence d’altérations myocardiques, notamment diastoliques, alors que l’examen échographique conventionnel est encore normal. Il permet donc dans certains cas de détecter précocement l’expression phénotypique de la mutation [1]. Les outils génétiques et d’imagerie sont ainsi complémentaires.

  • (1) Laboratoire Antagène, Immeuble Le Meltem, 2, allée des Séquoias, 69760 Limonest.

  • Chetboul V, Carlos Sampedrano C, Gouni V et coll. Two-dimensional color tissue Doppler imaging detects myocardial dysfunction before occurrence of hypertrophy in a young maine coon cat. Vet. Radiol. Ultrasound. 2006 ; 47 : 295-300.
  • Kittleson MD, Meurs KM, Munro MJ et coll. Familial hypertrophic cardiomyopathy in maine coon cats : an animal model of human disease. Circulation. 1999 ; 99 : 3172-3180.
  • Meurs KM, Sanchez X, David RM et coll. A cardiac myosin binding protein C mutation in the maine coon cat with familial hypertrophic cardiomyopathy. Hum. Mol. Gen. 2005 ; 14 : 3587-3593.
  • Rush JE, Freeman LM, Fenollosa NK et coll. Population and survival characteristics of cats with hypertrophic cardiomyopathy : 260 cases (1990-1999). J. Am. Vet. Med. Assoc. 2002 ; 220 : 202-207.
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