Malformation occipitale et syringo-hydromyélie - Le Point Vétérinaire n° 261 du 01/12/2005
Le Point Vétérinaire n° 261 du 01/12/2005

NEUROLOGIE CANINE

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CAS CLINIQUE

Auteur(s) : Kirsten Gnirs*, Yannick Ruel**

Fonctions :
*3, rue du Dauphiné
94100 Saint-Maur-des-Fossés
**IMV Paris XVe,
10-12; rue Robert-de-Flers,
75015 Paris

Un bouledogue français présente des épisodes de douleur cervicale, un torticolis et une baisse de l’état général. Une syringo-hydromyélie, affection rare et sous-diagnostiquée, est identifiée.

Les malformations de la fosse caudale associées à une syringo-hydromyélie ont été décrites principalement chez le jeune cavalier king Charles mais peuvent affecter tous les chiens de petite taille.

Cas clinique

1. Anammèse et commémoratifs

Un chien bouledogue français femelle âgée de deux ans est présenté en consultation de neurologie. Le chien refuse d’aller se promener, gémit au lever et au coucher, se plaint lorsqu’on le porte et reste prostré. L’animal présente des épisodes de douleur cervicale, une tête tournée vers la droite et une baisse de l’état général (apathie, dysorexie) qui évolue depuis plus d’un mois. Une amélioration transitoire et incomplète a été observée à la suite d’un traitement avec un anti-inflammatoire non stéroïdien (carprofène, Rimadyl®). Un traitement avec des anti-inflammatoires stéroïdiens (méthylprednisolone, Oromédrol®) a également été tenté mais interrompu précocement en raison d’une intolérance digestive aiguë.

2. Examen clinique

À l’examen clinique, le chien présente un torticolis avec la tête légèrement déviée vers la droite, une raideur cervicale marquée, une douleur à la latéroflexion droite et un refus complet de latéroflexion gauche. L’hyperextension et la flexion des cervicales sont également douloureuses. Le chien présente un prurit en région cervicale qui s’exprime par un réflexe de pédalage et de grattage sans contact cutané lorsque la peau est stimulée superficiellement en région cervicale crâniale gauche. Il ne présente aucun trouble de la locomotion et l’examen clinique ne révèle pas de déficit postural. Aucune amyotrophie n’est constatée. L’examen des nerfs crâniens ne révèle aucune anomalie. Aucun trouble de la vigilance ou du comportement n’est observé.

3. Hypothèses diagnostiques

Une lésion localisée au rachis cervical est suspectée. Les diverses affections qui peuvent induire cette cervicalgie sont :

- une hernie discale ;

- une méningite (d’origine infectieuse ou immunitaire) ;

- une spondylodiscite ;

- une malformation congénitale vertébrale ;

- une malformation congénitale médullaire ;

- un processus néoplasique vertébral ou médullaire.

4. Examens complémentaires

Une myélographie de la colonne cervicale est réalisée afin d’explorer les anomalies osseuses et les affections médullaires compressives. L’anesthésie générale est réalisée avec du diazepam (Valium®) et du thiopental sodique (Nesdonal®) et maintenue par relais gazeux (isoflurane). Le produit de contraste iodé (Omnipaque 300®, 0,4 ml/kg) est injecté au niveau de la citerne atlanto-occipitale. Du liquide cérébro-spinal (LCS) est recueilli à cette occasion et soumis à l’analyse (protéines, numération et formule cellulaires). La myélographie (PHOTO 1) ne révèle pas de déviation majeure des colonnes de contraste bien que celles-ci semblent modérément repoussées vers les bords du canal vertébral, comme si la moelle épinière était “gonflée” (signe d’une lésion intramédullaire). L’analyse de LCS ne montre aucune anomalie (protéinorachie = 0,2 g/l, hématies = 2 cellules/mm3, absence de leucocytes).

En raison de la lésion douteuse visualisée à la myélographie, un examen en imagerie par résonnance magnétique de la moelle cervicale (IRM) est proposé (PHOTOS 2A ET 2B). L’IRM met en évidence une dilatation liquidienne intramédullaire étendue (une syringo-hydromyélie) entre C2 et C6, associée à une malformation de la fosse caudale avec engagement du cervelet dans le foramen magnum.

Un scanner est réalisé conjointement afin de visualiser la conformation osseuse occipitale caudale. Les reconstructions bi- et tridimensionnelles (PHOTO 3) mettent en évidence un aplatissement, voire une incurvation concave de l’os occipital, qui réduit le volume de la fosse caudale. L’exploration de la région cervicale (coupe transverse et reconstruction sagittale) a également été effectuée et ne révèle aucune anomalie visible du parenchyme médullaire (PHOTOS 4A ET 4B).

5. Traitement

Le traitement proposé dans un premier temps est de nature médicale. Des corticoïdes (prednisolone, Mégasolone®, 1 mg/kg/j) associés à des inhibiteurs de l’anhydrase carbonique (acétazolamide, Diamox®, Théraplix®, 7 mg/kg trois fois par jour) sont administrés quotidiennement. Afin d’éviter des signes digestifs liés aux corticoïdes, un antiacide (oméprazol, Mopral®, 0,5 mg/kg/j) est administré conjointement.

Une résolution des signes cliniques est observée dès la première semaine de traitement, malgré une persistance du réflexe de grattage lors de stimulation cutanée en région cervicale gauche. Après deux mois de traitement, le Diamox® est arrêté, et les corticoïdes sont alors administrés à raison de 0,5 mg/kg un jour sur deux. Le grattage cervical est toujours présent bien que moins intense. Neuf mois après le diagnostic, le propriétaire du chien lui administre encore 0,25 mg/kg un jour sur trois, ne se résolvant pas à arrêter complètement le traitement. Hormis le grattage, aucun autre signe n’est réapparu.

Discussion

1. Définition et diagnostic étiologique

Une syringo-hydromyélie se définit comme une accumulation de liquide qui forme un kyste au sein de la moelle épinière.

Lorsque cette cavitation est délimitée par le canal central (épendyme), il s’agit d’une hydromyélie. Lorsque la dilatation liquidienne s’étend au parenchyme médullaire, on parle de syringomyélie [1]. Comme il est difficile de différencier ces deux entités pathologiques par imagerie médicale, les termes de syringo-hydromyélie ou de syringomyélie “au sens large” sont souvent utilisés.

Le liquide accumulé est similaire au liquide cérébro-spinal . Bien que rare, cette affection est certainement sous-diagnostiquée. L’accès récent à une imagerie de pointe de type résonance magnétique devrait augmenter son incidence. La syringo-hydromyélie n’a longtemps été mise en évidence qu’au moment de l’autopsie [8].

Une syringo-hydromyélie peut être d’origine congénitale. L’anomalie est alors localisée au secteur médullaire ou à différents segments du système nerveux central (lors de syndrome de Dandy-Walker ou d’Arnold Chiari). Dans ce cas, l’affection peut être acquise à la suite d’une obstruction au flux de LCS (tumeur, phénomènes inflammatoires ou traumatiques) ou idiopathique [6, 11]. La syringo-hydromyélie d’origine congénitale est souvent associée à des malformations intracrâniennes qui affectent notamment la fosse caudale. Chez le chien, l’une des entités rencontrées est proche du syndrome d’Arnold Chiari, décrit chez l’homme. Ce syndrome est associé à des malformations de degré variable de diverses structures :

- aplatissement ou sous-développement de l’os occipital réduisant le volume de la fosse caudale, anomalies squelettiques au niveau de la jonction cranio-cervicale (= foramen magnum) ;

- compression de la partie caudale de l’encéphale (tronc cérébral et cervelet) pouvant évoluer vers une hernie de la partie caudo-ventrale du cervelet (partie caudale + hémisphères cérébelleux adjacents) à travers le foramen magnum vers le canal cervical ;

- déplacement caudal de la moelle allongée ;

- fibrose des méninges, généralement secondaire à une arachnoïdite ;

- syringo-hydromyélie, hydrocéphalie, etc. [1, 11].

2. Pathogénie

L’origine de la malformation occipitale caudale associée à une syringo-hydromyélie est inconnue, mais ce syndrome apparaît comme un trouble du développement, d’origine génétique ou non [4]. Chez le cavalier king Charles, l’étude génétique suggère une transmission autosomique récessive [3, 9]. Il semblerait que le tissu d’origine neuro-ectodermique (cervelet, tronc cérébral) soit normal mais qu’il soit comprimé dans une structure osseuse de taille insuffisante. Plusieurs mécanismes pathogéniques sont suggérés pour expliquer la formation de syringo-hydromyélie.

La première étape consiste en une dilatation du canal central (= hydromyélie) secondaire à une augmentation de pression au sein du système nerveux central. Au fur et à mesure de l’augmentation de pression, le LCS s’infiltre à travers les parois de la moelle épinière via les espaces périvasculaires et dissèque le parenchyme médullaire au niveau de la substance grise. Il en résulte la formation d’une cavité liquidienne communicant avec le canal central. On parle alors de syringomyélie communicante ou syringo-hydromyélie.

Dans le cas présent, le développement de cette cavitation médullaire est associé à la malformation occipitale caudale. Une dynamique anormale du LCS au niveau du foramen magnum semble à l’origine de la dilatation cavitaire. La malformation de la fosse caudale (compression osseuse directe et engagement du cervelet au niveau du foramen magnum) et l’hypertrophie méningée progressive (résultant des turbulences chroniques du flux de LCS au niveau de la jonction cranio-cervicale) perturbent conjointement l’écoulement du LCS entre le quatrième ventricule et l’espace sous arachnoïdien médullaire (voir l’ENCADRÉ “Mécanismes pathogéniques à l’origine de la formation et du maintien de la syringomyélie”) [5].

3. Aspect clinique

La syringo-hydromyélie associée à une malformation occipitale caudale (= syndrome d’Arnold Chiari) est décrite chez plusieurs races de chien. La race la plus représentée est le cavalier king Charles chez lequel une origine génétique a été mise en évidence [3]. Cependant, l’atteinte d’autres races, toutes de petite taille (yorkshire terrier, bichon, carlin, chihuahua, shih tzu, bouledogue français, etc.), est décrite dans la littérature [5, 6].

L’âge d’apparition des signes cliniques est très variable (quatre mois et demi à treize ans [5]), de même que les signes cliniques observés. Certains animaux sont asymptomatiques, ce qui suggère que la gravité des signes cliniques n’est pas corrélée à l’étendue des lésions [3]. Les signes cliniques les plus fréquemment décrits sont :

- une cervicalgie qui semble résulter de l’élongation des racines nerveuses et de la dure-mère. Une inflammation locale, primaire ou associée à une hémorragie dans le syrinx, peut également contribuer à la sensation douloureuse ;

- un grattage de la région du cou et de l’épaule, souvent unilatéral, est généralement déclenché par l’animal tirant sur sa laisse, ou à la suite d’une période d’excitation ou de n’importe quel stimulus cutané. Ce prurit s’apparente à une paresthésie et résulte de l’atteinte des fibres du tractus spinothalamique. Ces fibres sont responsables de la sensation de douleur et semblent être les premières lésées lors de l’extension de la syringo-hydromyélie [8]. Il n’y a pas de lésion dermatologique associée, et souvent pas de contact cutané lors du mouvement de grattage [8]. L’association de grattage et de cervicalgie est très en faveur d’une syringo-hydromyélie cervicale selon certains auteurs [4, 5, 8, 10]. D’autres n’ont observé le prurit qu’exceptionnellement [7] ;

- une scoliose, ou un torticolis, qui résulterait de l’extension ventrale du syrinx, affectant alors les cellules de la corne ventrale qui innervent la musculature épi-axiale. Une dénervation asymétrique des muscles du cou provoque alors une amyotrophie et une déviation de la colonne vertébrale [9]. Le torticolis n’est pas forcément localisé du côté de la cavitation médullaire [9] ;

- une ataxie ou une parésie, avec ou sans déficit de la proprioception consciente, affecte souvent les quatre membres en raison d’une atteinte de la moelle cervicale. Cependant, la parésie est souvent plus marquée sur les membres antérieurs, ce qui est attribué à une atteinte des noyaux qui innervent les membres thoraciques (“central cord syndrome”). Lors de l’extension du syrinx, une compression des tractus descendants de la substance blanche peut induire des déficits nerveux des membres postérieurs. L’ataxie et l’hypermétrie observées peuvent également être attribuées à une lésion cérébelleuse ;

- des signes cliniques qui témoignent d’une atteinte cérébelleuse : tremblements de la tête et du corps, nystagmus non directionnel, ataxie avec hyperhémie ;

- des signes cliniques qui témoignent d’une atteinte vestibulaire : tête penchée, corps incurvé, perte d’équilibre, nystagmus, strabisme ;

- des signes cliniques attribués à une atteinte d’autres nerfs crâniens, notamment une paralysie faciale (nerf VII), sont parfois décrits chez le cavalier king Charles [7] ;

- des troubles du comportement ou des crises convulsives, certainement secondaires à l’hydrocéphalie.

4. Examens complémentaires et diagnostic

• La myélographie ne permet que rarement de confirmer une syringo-hydromyélie et ne présente aucun intérêt dans l’exploration d’une malformation occipitale caudale. Elle peut, comme dans le cas du bouledogue français, montrer une dilatation intramédullaire. Cependant, dans de rares cas, une augmentation de la taille du canal central, mise en évidence par le liquide de contraste, est observée [6].

• Dans certains cas, la syringomyélie peut être détectée au scanner, mais l’examen tomo-densitométrique ne permet généralement pas de mettre en évidence la dilatation liquidienne médullaire. Même si l’eau a un coefficient d’atténuation inférieur à celui du parenchyme nerveux, une lésion hypodense est rarement visualisée en raison du degré variable d’infiltration du liquide par des protéines ou des graisses. L’examen tomodensitométrique ne permet pas non plus d’évaluer finement les modifications parenchymateuses (tronc cérébral et cervelet) localisées à la fosse caudale, en raison d’un artefact de durcissement de faisceau qui produit une image hétérogène au niveau de la fosse postérieure. En revanche, c’est la technique de choix pour visualiser les structures osseuses. La malformation occipitale caudale peut être évaluée en coupe transversale et surtout après reconstruction bi- et tridimensionnelle. Les lésions osseuses observées comprennent une modification de la silhouette de l’os occipital (aplatissement, incurvation intracrânienne, etc.), une réduction du volume de la fosse caudale, des anomalies de conformation vertébrales comme des angulations anormales de la dent de l’axis ou des malformations du foramen magnum (sténose) [2]. Un engagement caudal du cervelet à travers le foramen magnum peut également être visualisé. Cette observation est plus facile en IRM.

• L’IRM est la technique de choix pour mettre en évidence les lésions du tissu nerveux et notamment les infiltrations liquidiennes [11]. La coupe qui permet d’évaluer l’ensemble des lésions est la vue sagittale médiane en séquence T1 ou T2.

Les lésions à rechercher sont :

- une atténuation ou une oblitération de l’espace sous-arachnoïdien caudal au niveau du foramen magnum ;

- une compression du cervelet caudal par l’os occipital qui peut évoluer vers un engagement du cervelet ;

- une syringo-hydromyélie généralement en région cervicale. La lésion apparaît hypo-intense (noire) en séquence T1, hyperintense (blanche) en séquence T2, et est généralement iso-intense au LCS environnant. Le diagnostic différentiel inclut alors un œdème ou une hémorragie médullaire, ou une myélomalacie ;

- une angulation dorsale de la moelle au niveau des premières vertèbres ;

- une dilatation des ventricules latéraux.

- D’autres anomalies ont été observées de façon plus exceptionnelle dans la littérature [2, 5] : des foyers inflammatoires ou tumoraux, une hernie discale, une angulation anormale de la dent de l’axis, des kystes arachnoïdiens intracrâniens [5, 8].

• L’analyse du LCS ne révèle généralement aucune anomalie, comme chez ce bouledogue français. Dans certains cas, une pléocytose modérée [4, 8] ou une protéinorachie discrète [10], alors témoin d’une inflammation, peuvent être observées.

• L’examen électromyographique est la technique de référence pour mettre en évidence précocement un dysfonctionnement nerveux périphérique. Dans le cas d’une syringo-hydromyélie, l’électromyographie peut révéler une activité spontanée anormale (de type potentiels de fibrillation) dans les muscles paracervicaux, qui résulte de la destruction de motoneurones de la corne ventrale [8, 9].

5. Traitement

Le traitement médical consiste en l’administration d’anti-inflammatoires, de diurétiques et/ou d’inhibiteurs de l’anhydrase carbonique. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (caprofène, méloxicam) sont indiqués pour leur action antalgique mais offrent un bénéfice moindre par rapport aux corticoïdes (dexaméthasone ou prednisolone) [5]. En plus de diminuer la sécrétion de LCS, les corticoïdes, en raison de leur action anti-inflammatoire, agissent sur l’arachnoïdite, et donc sur la fibrose méningée qui s’ensuit et qui participe à la pathogénie de la maladie en comprimant la jonction cranio-cervicale [8]. Il convient de rechercher la dose minimale efficace pour contrôler les signes cliniques. Dans la plupart des cas, la démangeaison et la raideur cervicale persistent mais dans une moindre mesure [8]. L’acétazolamide est également indiqué ; il diminue la production de LCS et limite l’hypertension de la syringo-hydromyélie [3]. La réponse aux diurétiques de l’anse (furosémide) est très variable [4, 6] et l’administration d’antiépileptiques et de psychotropes n’induit aucun bénéfice [8]. En cas de crises convulsives, un traitement anti-convulsivant (phénobarbital ou bromure de potassium) peut être administré.

Le traitement chirurgical peut également être proposé. Plusieurs techniques ont été décrites : soit une décompression du syrinx par myélotomie et/ou mise en place d’un shunt entre le syrinx et l’espace sous-arachnoïdien, soit une décompression de la fosse caudale par craniotomie sous-occipitale et laminectomie cervicale crâniale associée [1]. Ces interventions ont été réalisées chez peu de chiens [5-8] et le recul est insuffisant pour évaluer leur efficacité à long terme. La chirurgie est généralement proposée lorsque la situation clinique du chien se dégrade malgré le traitement médical, ou lorsque l’animal présente des déficits très marqués (paraplégie). Chez l’homme, le traitement d’une syringo-hydromyélie cervicale, associée ou non à une malformation de la fosse caudale, est controversé. Lors de maux chroniques ou évolutifs, une approche chirurgicale est recommandée. Lors d’hydrocéphalie, un shunt ventriculo-péritonéal peut également être envisagé [6].

6. Pronostic

Le traitement médical chez le chien donne généralement de bons résultats et certains animaux deviennent complètement asymptomatiques [3]. Chez l’homme, le pronostic après traitement chirurgical est d’autant plus favorable que l’intervention est réalisée précocement [4]. Il semble meilleur après traitement chirurgical d’une malformation occipitale isolée [7]. Chez le chien, peu de cas sont recensés. Une étude a montré un bénéfice évident chez l’ensemble (5/5) des chiens pour lesquels le traitement médical était inefficace. Ils ont tous été traités par une décompression du foramen magnum [5]. Dans une autre étude réalisée sur deux chiens, le traitement chirurgical s’est révélé bénéfique [7].

Un pronostic défavorable (dégradation ou décès) est décrit dans 15 % [7] à 35 % [5] des cas ; une absence d’évolution des signes malgré le traitement est observée dans 20 % [5] à 25 % [7] des cas, et une amélioration, voire une résolution des signes cliniques, est constatée dans près de la moitié des cas (43 % [5], 51 % [7]) (voir le TABLEAU “Évolution clinique des cas recensés dans la littérature”). En outre, certains chiens présentent une résolution spontanée des signes cliniques [6, 7].

Ce cas clinique met en avant la nécessité d’intégrer la syringomyélie dans le diagnostic différentiel de prurit alésionnel de la région cervicale et de cervicalgie. Bien que cette affection soit nettement plus représentée chez le chien cavalier king Charles, elle doit cependant être prise en considération chez les autres chiens de petites races.

Mécanismes pathogéniques à l’origine de la formation et du maintien de la syringomyélie

Une controverse persiste quant au mécanisme patho-génique à l’origine de la formation, du maintien et de la progression du syrinx. Des études récentes chez l’homme montrent qu’il existe un va-et-vient physiologique du liquide cérébro-spinal (LCS) entre la cavité crânienne et le canal médullaire, en fonction du cycle cardiaque. En systole, l’encéphale s’étend légèrement en raison de l’augmentation du flux sanguin intracérébral. Le LCS est alors chassé vers l’espace sous-arachnoïdien cervical. En diastole, le LCS retrouve sa place initiale dans l’encéphale.

Lors d’obstruction au niveau du foramen magnum, le LCS ne peut plus se déplacer. Cependant, la pression exercée pendant la systole semble suffisante pour conduire, soit le LCS, soit une vague de pression, du compartiment intracrânien au canal central de la moelle cervicale, provoquant son expansion progressive (“water-hammer effect”) [5]. Des augmentations transitoires et brutales de pression intra-crânienne, intra-thoracique ou intra-abdominale (comme lors de toux ou de défécation) semblent être à l’origine de la progression de cette lésion : le LCS présente davantage de difficulté à se déplacer dans l’espace sous-arachnoïdien écrasé par la moelle dilatée que dans les fissurations du parenchyme médullaire (“slosh effect”).

Un effet de “valve” au niveau du tissu cérébelleux hernié qui permettrait au LCS de diffuser préférentiellement du compartiment crânien à la colonne cervicale a également été suggéré [5].

La théorie du “suck effect suggère que lors d’augmentation de pression intra-thoracique et intra-abdominale, la pression dans le sac lombaire augmente plus rapidement que dans le crâne. Lors de compression au niveau de la jonction cranio-cervicale, un rapide équilibrage des pressions est alors difficile, ce qui conduit à une syringomyélie.

Un mécanisme pathogénique identique est suspecté chez l’animal, bien que la conformation de la partie caudale de l’encéphale soit différente entre ces deux espèces, et que le cerveau s’appuie, chez l’homme, verticalement sur le foramen magnum et non pas horizontalement comme chez le chien [5]. Chez l’enfant comme chez le chien, les malformations occipitales caudales de type Arnold Chiari ne sont pas forcément accompagnées de lésions médullaires [2].

Points forts

Les signes cliniques associés à une syringo-hydromyélie sont un grattage de la région cervico-scapulaire, une cervicalgie, un torticolis, une scoliose, une parésie, un syndrome vestibulaire, une atteinte des nerfs crâniens et des crises convulsives. Ils peuvent s’exprimer à des degrés très variables.

L’examen diagnostique de choix est l’imagerie par résonance magnétique (IRM).

Le traitement médical repose sur l’administration de corticoïdes et d’inhibiteurs de l’anhydrase carbonique. Le traitement chirurgical peut être bénéfique et a pour but une décompression du cervelet ou de la moelle cervicale.

Le pronostic est variable. Une résolution spontanée des signes cliniques est possible.

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