Utilisation des radiofréquences : principes de la coblation - Le Point Vétérinaire n° 236 du 01/06/2003
Le Point Vétérinaire n° 236 du 01/06/2003

CHIRURGIE ORTHOPÉDIQUE DU CHIEN

Éclairer

NOUVEAUTÉS

Auteur(s) : Aymeric Deneuche

Fonctions : Service de chirurgie-ENVA
7, av. du Général-de-Gaulle
94704 Maisons-Alfort

La coblation permet une désintégration moléculaire contrôlée des tissus mous non calcifiés.

Le terme de coblation provient de l’anglais “cool ablation”. Il s’agit d’un processus unique et breveté [1], qui utilise des radiofréquences bipolaires (0,1 à 10 MHz) pour obtenir une ablation rapide et précise des parties molles non calcifiées, tout en limitant les dommages thermiques sur les tissus adjacents [2]. Ce système permet également la rétraction tissulaire et l’hémostase.

Un processus non thermique

Contrairement à la plupart des autres techniques électrochirurgicales utilisant les radiofréquences, la coblation n’est pas un processus thermique (voir le TABLEAU “Comparaison de la coblation et de l’électrochirurgie conventionnelle monopolaire”). Le courant ne passe pas directement à travers les tissus et la montée en température du tissu est minimale. La majeure partie du courant est consommée par un processus d’ionisation dans une couche plasma (couche en phase gazeuse d’ions électriquement chargés) (PHOTOS 1 et 2).

Ce processus non thermique produit des molécules élémentaires et des molécules gazeuses de masse faible (oxygène, hydrogène, CO, CO2, méthane), rapidement expulsées par l’irrigation du site opératoire. La réduction volumétrique des tissus est immédiate, avec une nécrose minimale des tissus environnants. Le cartilage pathologique peut donc être retiré couche par couche. L’énergie libérée permet aussi une coagulation simultanée des petits vaisseaux (diamètre inférieur à 2 mm).

En mode rétraction, un champ électrique à basse tension chauffe etrétracte le collagène tissulaire, sans ablation ni suppression du tissu. Le champ électrique est trop bas pour générer une couche plasma dont la puissance permette l’ablation. L’énergie est conduite dans le tissu ; celui-ci en absorbe une partie, qui est ensuite éliminée sous forme de chaleur. La quantité d’énergie absorbée par le tissu dépend de l’impédance, ou résistance, du tissu spécifique au passage du courant (“chauffage résistif”). Les fibres de collagène commencent à rétrécir à une température de 60°C jusqu’à une température de 75°C. L’application de ces températures pendant de courts instants préserve la viabilité cellulaire [4]. Contrairement aux systèmes monopolaires pour lesquels le courant traverse l’animal, l’électrode de retour et l’embout bipolaire du wand CAPSure ArthroCare sont configurés pour limiter le chemin de pénétration de l’énergie dans le tissu à une profondeur d’environ 2 mm [10]. Le profil de température est plus régulier et la profondeur de pénétration mieux contrôlée qu’avec un système monopolaire, ce qui réduit le risque de lésions iatrogènes périphériques.

Description du matériel

Le système est constitué d’un régulateur System 2000®(1), commandé au pied (choix : ablation, rétraction, hémostase, réglage de la puissance).

Le cordon patient, autoclavable ou stérilisable au gaz, est réutilisable. À l’extrémité de ce dernier sont connectées les wands, pièces à main de tailles et de formes diverses qui optimisent l’accessibilité des lésions articulaires. Il existe des arthrowands en angle droit pour les ablations perpendiculaires, des arthrowands en biseau et des arthrowands dômes qui optimisent le contact avec les structures tissulaires à surfaces courbes. En arthroscopie canine, le wand que nous avons trouvé le plus polyvalent est le 2,3 mm 35° Short Bevel®. Des wands d’autres diamètres existent (1,5 ; 3 ; 3,5 ; 4 et 4,5 mm), dont certains avec une tige malléable. Les arthrowands à aspiration permettent une visibilité accrue lors des ablations et des excisions rapides de tissus mous. Des wands particuliers servent aux rétractions ; d’autres, en forme de lame ou de crochet, aux sections. Ces wands, normalement à usage unique, sont stérilisables et réutilisables en clientèle vétérinaire.

Effets tissulaires et résultats cliniques

Les chondrocytes restent viables dans la zone traitée, sur les tissus sains comme sur les tissus blessés, quel que soit le niveau de puissance de l’appareil [5]. Le traitement par coblation préserve la structure cartilagineuse et évite l’effilage ou le décollement laminaire du cartilage [6, 8].

Une étude multicentrique en cours révèle chez l’homme des résultats très satisfaisants en phase postopératoire. Les résultats préliminaires chez 107 patients font état d’une amélioration relative de la douleur par rapport à la phase préopératoire de 22 % de trois à six semaines, 46 % à douze semaines pour 50 patients et 52 % à six mois pour 20 patients (p = 0,0001) [1]. Sur une série de patients ayant subi une seconde arthroscopie dans les douze à dix-huit mois après le premier traitement par coblation, la lésion traitée est apparue améliorée ou stable, sans propagation et sans mise en évidence de nécrose au moment de la nouvelle intervention [3]. Les cas d’effets défavorables rapportés sont anecdotiques.

Applications en chirurgie ostéo-articulaire

La chirurgie par coblation permet l’élimination du cartilage endommagé avec une grande précision et un contrôle optimal. Cette technique permet d’obtenir des surfaces anatomiques lisses, qui favorisent la stabilité cartilagineuse [7, 8].

La technologie de coblation propre au système ArthroCare est utilisée dans la plupart des interventions pour traiter les chondromalacies de grade II ou III dans la classification Outerbridge [9] (voir le TABLEAU “Classification de Outerbridge…”).

L’arthroscopie est l’un des champs d’application privilégiés de la Coblation. Le caractère contrôlé de la résection tissulaire, associée à une coagulation simultanée, simplifie les suites postopératoires.

Ce système permet une synoviectomie partielle efficace et exsangue, qui augmente la visualisation.

La coblation est efficace pour le traitement des ostéochondrites disséquantes de l’épaule, du coude et du grasset, par désintégration du volet cartilagineux (PHOTO 3). Lors de minéralisation partielle du volet cartilagineux, elle permet une réduction du volet à sa seule composante osseuse et facilite ainsi son extraction. Il en est de même pour les fragmentations du processus coronoïde médial. Les berges cartilagineuses sont stabilisées efficacement.

La coblation est efficace pour le débridement des ligaments croisés rompus et le traitement des lésions méniscales. La réalisation de ténotomies bicipitales, lors de ténosynovite bicipitale ou de rupture partielle du tendon du biceps, est aisée avec ce système et autorise une visualisation correcte du site opératoire grâce à l’hémostase concomitante, contrairement à une section au couteau arthroscopique conventionnel.

Bien qu’aucune étude prospective comparative n’ait été réalisée, les résultats postopératoires semblent au moins aussi satisfaisants qu’en arthroscopie conventionnelle. Le geste chirurgical est indéniablement facilité et le temps chirurgical réduit.

La coblation est en outre utilisable pour toutes les interventions chirurgicales où une cicatrisation rapide, une douleur postopératoire moindre et un meilleur contrôle de l’ablation sont recherchés (voir le TABLEAU “Autres domaines d’application de la Coblation”).

  • (1) ArthroCare System 2000® ArthroCare Corporation 595 North Pastoria Ave Sunnyvale CA, 94086, États-Unis. www.arthrocare.com Commercialisé par Optomed endoscopie, 91974 Les Ulis

Remerciements : L'auteur remercie la société Optomed.

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