ORTHOPÉDIE
Quel est votre diagnostic ?
Auteur(s) : Alexandre Thibault*, Philippe Haudiquet**
Fonctions :
*(Dipl. ECVS, DESV de chirurgie)
Clinique vétérinaire VetRef
7, rue James Watt
49070 Angers Beaucouzé
clinique@vetref.fr
Un chien croisé jack russell terrier adulte est présenté pour une boiterie du membre postérieur gauche, survenue à la suite d’une course, qui évolue depuis un mois. L’examen général ne montre aucune autre anomalie. L’examen neurologique est normal. L’examen orthopédique à distance confirme une boiterie marquée du membre postérieur gauche, avec une suppression d’appui quasi permanente et le grasset en position majoritairement fléchie. L’examen rapproché révèle une tuméfaction médiale et craniale marquée, ainsi qu’une légère chaleur du grasset gauche. Il est stable, sans signe du tiroir. Une amyotrophie du membre est également notée.
Le membre controlatéral ne présente aucune anomalie.
Afin d’explorer ce trouble locomoteur, deux incidences radiographiques (face et profil) du grasset gauche sont réalisées, couplées à des clichés du membre controlatéral (photos 1 et 2).
→ La densité, le contraste et la netteté sont corrects. La qualité radiographique est satisfaisante pour l’interprétation.
→ Les clichés montrent une tuméfaction marquée de la capsule
articulaire, notamment en régions médiale et craniale, avec une inflammation du tendon tibio-rotulien. La rotule est en position anormalement proximale, patella alta (vue de profil), avec une fracture de la portion distale. Aucun signe d’arthrose n’est visible.
→ Les images sont compatibles avec une fracture d’avulsion de la rotule, localisée au site d’insertion du tendon tibio-patellaire. L’appareil extenseur du grasset (muscle quadriceps/ rotule/tendon patellaire/crête tibiale) n’est plus fonctionnel.
Les fractures patellaires, ou les lésions du tendon patellaire, sont rares chez le chien [3, 6]. La pathogénie est majoritairement liée à des traumatismes directs sur la partie craniale du grasset, ou résulte d’une contraction puissante du quadriceps simultanément à une flexion forcée du grasset [5]. Des causes iatrogéniques sont également rapportées (lésions peropératoires ou complications postchirurgicales lors de la stabilisation d’une luxation de la rotule ou d’une ostéotomie de nivellement du plateau tibial) [3].
Des chiens de tous les formats et de tous les âges peuvent être atteints. Cependant, les jeunes (moins d’un an) semblent épargnés : la faiblesse des cartilages de croissance des squelettes immatures favorise une avulsion de la crête tibiale lors de ce mécanisme [1, 2, 3].
La rotule, incluse dans l’appareil extenseur du grasset, est soumise à des forces distractives puissantes. Leur neutralisation est primordiale pour favoriser la cicatrisation : le traitement conservateur (repos) doit se limiter uniquement à des fractures proximales ou distales sans déplacement. Une aggravation est cependant possible. C’est pourquoi le traitement chirurgical est préféré dans la plupart des cas. Les fractures d’avulsion patellaire distale sont difficiles à traiter en raison du défaut de substance ne permettant pas une bonne fixation. Leur gestion est généralement similaire à celle des lésions tendineuses via la pose d’un hauban passant proximalement à la rotule et distalement dans la crête tibiale. La portion lésée est ensuite suturée à l’aide d’un monofilament irrésorbable, avec un passage dans la rotule si nécessaire [4, 7]. L’immobilisation postopératoire est conseillée pendant six à huit semaines à l’aide d’un fixateur externe, bandage ou attelle. Le pronostic reste réservé, avec environ 50 % de bonne amélioration, 25 % de résultat correct et 25 % de récupération insuffisante [3].
Aucun.