Ataxie chronique chez un jeune beauceron - Le Point Vétérinaire n° 398 du 01/09/2019
Le Point Vétérinaire n° 398 du 01/09/2019

NEUROLOGIE

Quel est votre diagnostic ?

Auteur(s) : Alexis Bertrand*, Nathalie Jamet**

Fonctions :
*Clinique vétérinaire Benjamin Franklin
38, rue du Danemark
56400 Brech
alexisbertrand@hotmail.fr

Présentation clinique

Un chien beauceron mâle castré, âgé d’un an, est référé pour un examen tomodensitométrique destiné à explorer des troubles précoces et persistants de la marche. Selon les propriétaires, l’animal a toujours présenté une démarche anormale et semblé “maladroit”. Ils décrivent également une ambulation souvent “ébrieuse”, ainsi qu’une incapacité à monter dans la voiture par lui-même. Ces anomalies varient d’un jour à l’autre et semblent aggravées par l’exercice. Le chien ne présente pas de douleur objectivable. Son état général a toujours été bon et son comportement normal. Un traitement à base d’anti-inflammatoires stéroïdiens, à dose anti-inflammatoire durant 10 jours, a permis une amélioration uniquement temporaire des symptômes.

Le chien présente un état de conscience normal, un examen des nerfs crâniens sans anomalie et une ataxie modérée des quatre membres. Un scanner et un myéloscanner sont réalisés (photos 1, 2 et 3).

Qualité des images tomodensitométriques

→ L’animal est bien positionné, et les plans de coupe sont réalisés dans un plan sagittal et un plan transversal parfaits. Les images sont de qualité diagnostique.

Description des images

→ Plusieurs anomalies sont visibles. Sur les images sans préparation, les acettes articulaires de l’articulation intervertébrale C2-C3 apparaissent hypertrophiées. La moelle épinière semble modérément comprimée latéralement à ce niveau.

→ Sur les images du myéloscanner, l’espace sous-arachnoïdien est dilaté dorsalement en regard de C2-C3, et reprend plus caudalement des dimensions normales (aspect “en goutte d’eau”). La moelle épinière apparaît comprimée dorsalement à ce niveau.

Interprétation

→ Le myéloscanner objective une malformation des facettes articulaires vertébrales en regard de l’espace C2-C3, ainsi que la présence d’un diverticule sous-arachnoïdien qui induit une compression latérale, et surtout dorsale, de la moelle épinière.

DISCUSSION

La spondylomyélopathie cervicale, ou syndrome de Wobbler, regroupe différentes affections qui entraînent, à des degrés variables, des troubles nerveux et des douleurs cervicales chez les chiens de grande taille. Les malformations associées des facettes articulaires et des ligaments, comme dans le cas décrit, font partie des nombreuses formes possibles. Il existe plusieurs options thérapeutiques, selon le type d’anomalie (s), comme une décompression et/ou une stabilisation chirurgicale (recommandée dans l’occurrence relatée) [1].

Les diverticules sous-arachnoïdiens (ou adhérences leptoméningées, anciennement “kystes” arachnoïdiens) sont des dilatations focales qui peuvent conduire à une atteinte médullaire compressive à l’évolution progressive. Les chiens de grande taille ont tendance à présenter ce type de lésions en région cervicale, ceux de petit gabarit sont plutôt atteints de lésions thoracolombaires. La localisation en C2-C3 est la plus fréquente pour les diverticules sousarachnoïdiens cervicaux. L’ataxie est le signe clinique le plus souvent observé. Le rottweiler semble être prédisposé. L’étiologie de ces lésions reste mal connue, plusieurs hypothèses ont été formulées évoquant une origine génétique, mécanique, ou secondaire à des lésions inflammatoires (après une hernie discale ou une méningite, par exemple). Dans le cas présenté, il est possible que les malformations des articulations intervertébrales aient pu favoriser l’apparition du diverticule. Environ un cinquième des chiens atteints présentent ou ont présenté une lésion médullaire au niveau du site ou à proximité [2]. Le traitement chirurgical, qui apparaît supérieur au médical en termes de résultats, aboutit le plus souvent à une amélioration des signes cliniques [3].

L’association de ces lésions (hypertrophie des facettes et diverticules) ne semble pas fréquemment rapportée. Dans une étude, un seul chien présente cette association, sur une population de 122 animaux atteints [2]. Il est donc difficile d’établir le meilleur traitement et un pronostic pour un cas particulier.

Références

  • 1. Da Costa RC. Spondylomyelopathy (Wobbler syndrome) in dogs. Vet. Clin. Small Anim. 2010;40:881-913.
  • 2. Mauler DA, De Decker S, De Risio L, et coll. Signalment, clinical presentation and diagnostic findings in 122 dogs with spinal arachnoid diverticula. J. Vet. Intern. Med. 2014;28:175-181.
  • 3. Mauler DA, De Decker S, De Risio L, et coll. Spinal arachnoid diverticula: outcome in 96 medically or surgically treated dogs. J. Vet. Intern. Med. 2017;31:849-853.
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