Boiterie persistante chez un chien de 2 ans - Le Point Vétérinaire n° 397 du 01/07/2019
Le Point Vétérinaire n° 397 du 01/07/2019

ORTHOPÉDIE CANINE

Quel est votre diagnostic ?

Auteur(s) : Pierre Tamigi*, Pierre Maitre**

Fonctions :
*Dip ECVS
Clinique vétérinaire Alliance
8, boulevard Godard
33300 Bordeaux

Présentation clinique

Un bouvier de l’Appenzell mâle castré, âgé de 2 ans, est présenté en consultation d’orthopédie pour un second avis à propos d’une légère boiterie persistante du membre pelvien droit, avec appui, évoluant depuis 15 jours.

Selon le propriétaire, la boiterie a débuté à la suite d’un traumatisme (chute d’environ 50 cm). Le vétérinaire traitant diagnostique alors, via une radiographie, une fracture peu déplacée de la malléole latérale du tarse droit.

Un traitement à base d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (0,2 mg/kg/j de méloxicam), associé à du repos, est mis en place. Le propriétaire rapporte une amélioration peu significative.

L’examen montre une boiterie modérée, avec appui, du membre pelvien droit. À la palpation, une tuméfaction du compartiment médial et latéral du tarse droit est notée, ainsi qu’une instabilité dans le plan latéro-médial lors de la manipulation.

Un examen radiographique du tarse droit sous contrainte est effectué, sous sédation, afin d’explorer cette instabilité (photos 1 et 2). Des radiographies controlatérales sont également réalisées au même moment à titre de comparaison.

Qualité des images radiographiques

→ Les clichés sont pris en vue de face (dorso-plantaire) en valgus et en varus sans rotation. La densité, le contraste et la netteté des images sont satisfaisants.

Description des images

→ La trame osseuse de l’extrémité distale de la fibula est hétérogène. Une ligne radio-transparente transverse est encore visible au niveau de l’apex de la fibula distale, associée à une réaction périostée régulière et lamellaire.

→ La trame osseuse, en regard de l’apex distal interne de la malléole médiale, présente une diminution focale. Des fragments osseux libres de très petite taille sont visualisés en regard de la partie médiale de la malléole médiale.

→ La mise sous contrainte en valgus-flexion montre un élargissement de l’interligne articulaire du compartiment médial plus important que celui observé sur la mise sous contrainte en valgus-extension, ainsi que sur le membre controlatéral.

Interprétation des images

→ Une fracture de l’extrémité distale de la fibula est en cours de cicatrisation.

→ La branche courte du ligament collatéral médial présente une avulsion.

DISCUSSION

Afin de pouvoir comparer et d’objectiver les variations angulaires, des radiographies de face du tarse droit sont réalisées, avec les contraintes de varus sur tarse fléchi et sur tarse en extension. Elles ne montrent pas d’élargissement majeur de l’interligne articulaire et restent similaires aux clichés effectués sur le membre controlatéral.

L’instabilité en valgus indique une atteinte du compartiment médial du tarse [5].

Les ligaments collatéraux médiaux du tarse sont composés de 2 branches [1, 3] :

– une branche longue, elle-même composée de plusieurs bandes qui partent de la malléole médiale pour s’insérer principalement sur l’os tarsal I, l’os central du tarse, le talus et l’os tarsal II. Des insertions mineures sur les os métatarsiens I et II sont également décrites. La branche longue du ligament collatéral médial est tendue en extension et lâche en flexion ;

– une branche courte, divisée en 2 parties : une partie tibio-centrale, tendue en extension et lâche en flexion, et une partie tibio-talienne tendue en flexion et lâche en extension.

Dans le cas présent, le fait que l’instabilité soit majoritairement présente en flexion permet de suspecter une atteinte, a minima, de la partie tibio-talienne de la branche courte du ligament collatéral médial.

En médecine humaine et équine, l’échographie est l’examen de choix pour le suivi lésionnel des affections tendineuses. Toutefois, chez les carnivores domestiques, les ligaments sont parfois trop fins pour être visualisés à l’échographie. De plus, l’image reste modifiée jusqu’à la guérison complète [4]. Il est donc important de mettre en relation les examens clinique et échographique pour le suivi de la cicatrisation [2].

Références

  • 1. Evans HE, De Lahunta A. Ligaments and joints of the pelvic limb, in : Miller’s anatomy of the dog, 4th Édition, éd. Elsevier, pp. 181-183.
  • 2. Gremeau V, Coudreuse JM, Collado H, et coll. Évaluation de la gravité des lésions du ligament collatéral latéral de cheville : étude de corrélation clinique-échographie. Journal de traumatologie du sport. Décembre 2011;28 (4):215-221.
  • 3. Johtnston SA, Tobias KM. Tarsus and metatarsus, in : Veterinary surgery small animal, 2nd edition, ed. Elsevier, vol. 1:1194-1119.
  • 4. Krafft E. Place de?l’échographie dans le diagnostic des ruptures du ligament croisé cranial chez le chien : étude clinique sur 13 chiens. ENV de Lyon, 2007:16-26.
  • 5. Sjöström L, Håkanson N. Traumatic injuries associated with the short lateral collateral ligaments of the talocrural joint of the dog. JSAP. 1994,35 (3):163-168.

Conflit d’intérêts

Aucun.

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