Étape 7 : Arthroscopie du genou : généralités et ostéochondrite disséquante - Le Point Vétérinaire n° 390 du 01/11/2018
Le Point Vétérinaire n° 390 du 01/11/2018

En 10 étapes

Auteur(s) : Claire Deroy-Bordenave*, Guillaume Ragetly**

Fonctions :
*Clinique vétérinaire Alliance
8, boulevard Godart
33300 Bordeaux
**Centre hospitalier vétérinaire Frégis
43, avenue Aristide-Briand
94110 Arcueil

Particulièrement efficace pour l’exploration du genou, l’arthroscopie permet entre autres le traitement des lésions d’ostéochondrite disséquante. Celles-ci se situent le plus souvent sur le condyle fémoral latéral.

Les boiteries du genou constituent un motif fréquent de consultation et se présentent tant chez le chien en croissance ou jeune adulte que chez le chien âgé.

L’arthroscopie est un outil diagnostique et thérapeutique particulièrement efficace dans l’exploration de l’articulation du genou, notamment des ménisques et des ligaments croisés.

Les indications principales de l’arthroscopie du genou sont l’ostéochondrite disséquante (OCD) des condyles fémoraux, et les lésions méniscales et des ligaments croisés [2, 4, 5]. Elle peut également être utilisée pour l’évaluation de l’arthrose, le traitement de luxation de la rotule, l’examen du tendon long extenseur des doigts, un lavage et un débridement articulaires lors d’arthrite septique, ou encore pour la réalisation de biopsies de la membrane synoviale [3].

PRÉPARATION DE L’ANIMAL

La voie d’abord craniale parapatellaire est celle généralement utilisée et décrite ici. L’animal est alors placé en décubitus dorsal à l’extrémité de la table avec le membre concerné suspendu, le genou en extension et placé de manière quasi verticale, pour la préparation (photo 1). Le membre controlatéral est attaché afin de ne pas gêner le geste chirurgical. Le chirurgien se place derrière l’animal et l’écran est installé en face du chirurgien (photo 2).

La tonte et l’asepsie se font de manière circonférentielle au niveau du grasset, bien que certains auteurs recommandent une préparation plus large, afin de pouvoir modifier la procédure lorsqu’une conversion en arthrotomie s’avère nécessaire. Si des étapes chirurgicales concomitantes (ostéotomie de nivellement du tibia, suture extracapsulaire, notamment) sont décidées en phase préopératoire sur la base des examens d’imagerie, une préparation adéquate doit également être prévue.

LES SITES DE PONCTION DES VOIES D’ABORD

Trois voies d’accès sont généralement réalisées lors de l’arthroscopie du genou : la voie de drainage (egress), le port arthroscopique et le port instrumental (figure).

→ Le port arthroscopique est situé latéralement ou médialement au tendon patellaire, à égale distance entre la tubérosité tibiale et l’extrémité distale de la rotule (photo 3a). La distension de l’articulation est débutée par cette voie d’abord. Une incision est ensuite réalisée le long de l’aiguille (lame 11). La chemise et son mandrin sont insérés dans l’articulation en mettant le genou en extension et avec une orientation proximale et médiale, si l’insertion est latérale, ou latérale, si l’insertion est médiale. L’insertion peut être continuée jusqu’à leur palpation sous la peau du côté opposé dans l’articulation proximale (facilitant la localisation pour l’egress). Le mandrin est ensuite retiré pour mettre en place l’arthroscope (photo 3b) [1].

→ La voie de drainage est créée là où la chemise et le mandrin sont palpés. Une canule de drainage ou deux aiguilles peuvent être mises en place (photo 3c) [1].

→ Le port instrumental est situé symétriquement au port arthroscopique par rapport au tendon patellaire. Une incision (lame 11) est réalisée à travers la peau, les tissus et la capsule en direction de la fosse intercondylienne fémorale (photo 3d) [1]. Le port est ensuite élargi à l’aide d’une pince hémostatique droite afin de réduire le risque d’hémorragie. Les instruments (palpeur, shaver, etc.) sont ensuite introduits dans le port instrumental (photo 3e).

STRUCTURES À ÉVALUER

L’exploration arthroscopique commence par le genou proximal avec l’évaluation de la surface caudale de la rotule et de la trochlée fémorale (photo 4). Elle continue ensuite dans le compartiment médial, avec un examen de la capsule articulaire et de la surface abaxiale de la lèvre médiale de la trochlée, puis dans le compartiment latéral, avec l’évaluation de la capsule articulaire, de la surface abaxiale de la lèvre latérale de la trochlée, et du tendon extenseur long des doigts (photo 5).

L’exploration du genou continue par l’espace intra-articulaire fémoro-tibial. Le coussinet graisseux et les proliférations de la membrane synoviale, gênant la bonne visibilité de cet espace, peuvent être en partie réséqués, à l’aide du shaver (photo 6). Le degré de visibilité réduit par le coussinet graisseux dépend de la taille de celui-ci et de la localisation du port arthroscopique, ainsi que de la sévérité d’une éventuelle synovite. Cette résection reste controversée et est chirurgien-dépendante.

Les condyles fémoraux médial et latéral sont donc évalués pour exclure des lésions d’OCD ou des lésions acquises cartilagineuses. L’articulation est fléchie et étendue pour permettre une observation maximale de la surface des condyles.

Les ligaments croisés cranial et caudal sont ensuite évalués ainsi que les ménisques médial et latéral. La visualisation des ménisques, en particulier de leur bord caudal, peut être difficile. Une manipulation du membre augmentant l’espace articulaire permet de l’améliorer : un assistant met l’articulation en valgus et en rotation externe pour la visualisation du ménisque médial, ou en varus pour celle du ménisque latéral. Une translation craniale du tibia, possible lors de rupture du ligament croisé cranial, facilite l’évaluation des ménisques après débridement du ligament rompu. L’utilisation d’un distracteur à genou peut également être utile pour optimiser l’examen. L’emploi d’un crochet palpateur est recommandé pour manipuler les ménisques et exclure une lésion de ceux-ci, notamment lorsqu’ils apparaissent normaux.

OSTÉO-CHONDRITE DISSÉQUANTE

L’OCD résulte d’une altération du processus d’ossification endochondrale, dite ostéochondrose. Celle-ci progresse parfois en la formation d’un flap cartilagineux.

L’OCD est une cause de boiterie du membre pelvien secondaire à un développement aberrant du cartilage épiphysaire chez les chiens en croissance. Le genou représente la quatrième localisation de l’OCD après l’épaule, le coude et le tarse. La lésion est localisée dans 96 % des cas sur la partie axiale du condyle fémoral latéral.

Cette affection touche les animaux de 5 à 9 mois, en particulier ceux dont la croissance est rapide, à savoir les individus de grande race (plus de 20 kg).

1. Diagnostic clinique et par imagerie

→ Dans la plupart des cas, un historique de boiterie chronique exacerbée par l’exercice existe et une douleur et des crépitements à la flexion et l’extension du genou ainsi qu’une amyotrophie sont décrits.

→ Le diagnostic est établi à l’aide d’un examen radiographique ou tomodensitométrique.

→ L’arthroscopie s’impose ensuite pour l’exploration de l’OCD, permettant un examen complet de l’articulation douloureuse et mettant parfois en évidence une fragmentation du cartilage articulaire non détectée par d’autres techniques d’imagerie [2]. Les lésions visibles sont un lambeau partiellement détaché du cartilage, des fragments articulaires ou encore un aspect soufflé du cartilage qui n’est pas encore détaché de la surface articulaire et de l’os sous-chondral (photo 7).

2. Traitement et pronostic

Le traitement de choix est chirurgical et peut se réaliser par arthroscopie [2]. Il consiste en l’exérèse complète du lambeau principal et de tous les fragments associés, suivie d’un curetage et de la création de micro-fractures de l’os sous-chondral favorisant l’apparition d’un fibrocartilage (photo 8).

Le pronostic de récupération fonctionnel après un traitement par arthroscopie reste néanmoins faible en raison de la perte de cartilage articulaire, de l’incongruence articulaire et de l’ostéo-arthrose secondaire.

D’autres techniques ont été développées pour le traitement des OCD se réalisant par arthrotomie : les greffes ostéochondrales et le SynACART® (implant ostéochondral synthétique) (photos 9, 10a et 10b). Le traitement par implant ou greffe apporte des résultats prometteurs, mais reste à ce jour encore peu étudié.

Conclusion

L’arthroscopie permet une exploration complète de l’ensemble de l’articulation du genou. Elle a un rôle capital dans la prise en charge de l’OCD et, pour l’instant, a complètement substitué l’arthrotomie, trop invasive et moins précise.

Références

  • 1. Beale BS, Hulse DA, Schulz KS et coll. Small animal arthroscopy. Saunders, Philadelphia. 2003:117-157.
  • 2. Bertrand SG, Lewis DD, Madison JB et coll. Arthroscopic examination and treatment of osteochondritis dissecans of the femoral condyle of six dogs. J. Am. Anim. Hosp. Assoc. 1997;33:451-458.
  • 3. Bevan JM, Taylor RA. Arthroscopic release of the medial femoropatellar ligament for canine medial patellar luxation. J. Am. Anim. Hosp. Assoc. 2004;40:321-326.
  • 4. Hoelzler MG, Millis DL, Francis DA et coll. Results of arthroscopic versus open arthrotomy for surgical management of cranial cruciate ligament deficiency in dogs. Vet. Surg. 2004;33:146-151.
  • 5. Pozzi A, Hildreth BE, Rajala-Schultz PJ. Comparison of arthroscopy and arthrotomy for diagnosis of medial meniscal pathology: an ex vivo study. Vet. Surg. 2008;37:749-756.

Conflit d’intérêts

Aucun.

Points forts

→ L’arthroscopie du genou a un objectif diagnostique et thérapeutique dans le cadre des boiteries de cette articulation.

→ Les indications principales de l’arthroscopie du genou sont la rupture du ligament croisé cranial, les lésions méniscales, l’ostéochondrite disséquante (OCD) et la rupture du ligament croisé caudal.

→ Les voies d’abord parapatellaires médiale et latérale du genou sont utilisées.

→ Plusieurs structures anatomiques sont systématiquement évaluées : les ligaments croisés cranial et caudal, les ménisques médial et latéral, la trochlée, les compartiments médial et latéral et le tendon extenseur long des doigts. L’arthroscopie du genou permet le diagnostic et le traitement des OCD.

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