Offres de services en élevage : possibilités et perspectives - Le Point Vétérinaire expert rural n° 383 du 01/03/2018
Le Point Vétérinaire expert rural n° 383 du 01/03/2018

CLIENTÈLE RURALE

Article de synthèse

Auteur(s) : Céline Lardy

Fonctions : Newsmed Le Point Vétérinaire
11-15 quai de Dion-Bouton
92800 Puteaux

La création d’offres de services en pratique rurale connaît un véritable essor et se diversifie. Repenser différemment la structure vétérinaire, en s’affranchissant du schéma classique vétérinaires/ASV, devient nécessaire.

Lors des dernières journées des groupements techniques vétérinaires (GTV) (Reims, Marne, 17-19 mai 2017), Pierre Mathevet a présenté ses réflexions sur les possibilités de proposer des offres de services et les conséquences concernant la structure vétérinaire [4]. Avec la tendance à l’accroissement des structures vétérinaires, le paysage de la profession évolue. Au sein de ces structures complexes, les praticiens se spécialisent et les investissements sont plus facilement envisageables. Cette pluridisciplinarité permet de proposer des services différents. Mais ces offres de services doivent être réfléchies et préparées. Il convient de les adapter aux demandes sur le terrain, ce qui présuppose de connaître celles-ci, d’étudier leurs faisabilité et rentabilité, sans négliger l’aspect de la communication et de la gestion de la relation avec les éleveurs.

Proposer des offres de services permet de sortir du modèle économique fondé sur la vente de médicaments et de recentrer l’activité sur le cœur du métier : la zootechnie, l’épidémiologie, la gestion intégrée des maladies et l’amélioration de la production. L’avenir de la profession et le maintien du maillage vétérinaire, garant de la gestion du risque sanitaire, en dépendent.

D’ores et déjà, de nouveaux services ont été créés par certains confrères, comme l’imagerie médicale, le pet food vétérinaire, les analyses, la médecine et la chirurgie des nouveaux animaux de compagnie (NAC), les visites conseil formalisées en pratique canine, le suivi de reproduction et d’alimentation en pratique rurale, les médecines naturelles ou encore l’audit parasitaire (encadré 1). Cela amène parfois à réfléchir à une nouvelle distribution des rôles en cabinet vétérinaire. Ainsi, dans les grandes structures, la composition classique du personnel (praticiens et auxiliaires spécialisés vétérinaires [ASV]) ne doit pas être considérée comme immuable. À l’avenir, elle pourrait changer pour se rapprocher de celle d’une entreprise plus classique, avec de nouveaux métiers vétérinaires ou non vétérinaires (pareur, directeur de communication, etc.), afin de faire face à l’évolution de la profession (photo 1).

PROPOSER UNE OFFRE DE SERVICES : ÉTAPES PRÉALABLES

1. Discuter avec les éleveurs

Toute offre de services doit répondre aux besoins et aux attentes de la cible visée. Déterminer ces besoins est complexe, tant pour l’éleveur que pour le vétérinaire. En effet, il est souvent facile de voir ce qui ne va pas, mais il ne l’est pas d’identifier les pistes susceptibles de répondre aux difficultés.

Ainsi, la communication avec les éleveurs est primordiale et doit être régulière. Les réponses ne viendront pas aisément. De plus, il est illusoire de vouloir reproduire un service qui existe ailleurs dans sa propre clientèle. En effet, les contraintes géographiques et les systèmes d’élevage sont des éléments importants à prendre en compte (photo 3).

Pour adapter les offres aux besoins, il est conseillé de proposer des idées de nouveaux services aux éleveurs et de recueillir leurs remarques. Cela peut être réalisé au cours de petites réunions auxquelles les éleveurs les plus actifs (et les meilleurs clients) sont conviés, le tout animé par le vétérinaire. Cela permet, d’une part, de recueillir les impressions à chaud, de renforcer le lien avec les éleveurs, de favoriser les échanges entre eux et, d’autre part, d’effectuer des ajustements collectifs.

Cependant, même une fois les besoins identifiés, tous les éleveurs n’ont pas les mêmes attentes. D’où la possibilité de développer une offre de services personnalisable ou multiple. Ainsi, pour un même service, plusieurs offres sont possibles. Elles varient selon un axe à la fois financier et technique. Par exemple, le vétérinaire peut proposer une offre d’entrée de gamme (qui, pour un service de suivi de reproduction, pourrait être une échographie post-partum systématique), une offre medium (avec en plus un examen des ovaires et la gestion de l’infertilité) et une offre premium (suivi alimentaire, concentrations cellulaires, etc.). Cette démarche complexifie l’offre de services, mais présente l’avantage d’élargir la cible en les adaptant au plus grand nombre.

2. Ne pas se fixer un objectif inatteignable

Quel que soit le type de services proposés, seulement 15 à 20 % de la clientèle est susceptible d’y souscrire. Une surévaluation du succès d’un service peut être source de frustration, d’incompréhension et de découragement pour le vétérinaire.

Une fois l’offre de services mise en place, le praticien doit s’intéresser en priorité aux éleveurs non convaincus, pour tenter de comprendre les raisons de leur choix. Bien souvent, le coût n’est pas la raison unique ni principale de celui-ci : un manque de temps et de personnel ou de motivation, des réticences, etc., sont plus fréquemment à l’origine de leur manque d’intérêt.

3. Connaître les contraintes des éleveurs

Les contraintes communes des éleveurs sont bien connues : pénurie de main-d’œuvre, manque de temps, charge administrative importante (avec des pénalités financières conséquentes), difficultés de trésorerie, manque de visibilité à moyen terme, etc. Les services proposés doivent donc en tenir compte, et être non chronophages, faciles à mettre en œuvre, engendrant une rentabilité immédiate et visible, ou améliorant le niveau de production.

Mais chaque éleveur a des contraintes, des freins, des compétences, un niveau d’endettement ou des valeurs qui lui sont propres. Le vétérinaire est bien placé pour connaître tous ces éléments et proposer, en regard, une solution de services adaptée à chacun. La mise en place d’offres de services est souvent le fruit d’un cheminement long et progressif (encadré 2).

QUELLES PERSPECTIVES EN CLINIQUE VÉTÉRINAIRE ?

1. Adapter l’offre aux contraintes

La plupart des services proposés (suivi de reproduction, plan de vaccination, etc.) imposent à l’éleveur d’y consacrer du temps et de la main-d’œuvre (manipulation des animaux, contention, etc.) dont il ne dispose pas toujours (encadré 3). Les éleveurs peuvent alors avoir recours à des services de remplacement, coûteux, afin de bénéficier d’une main-d’œuvre supplémentaire, lors de la mise en place d’un plan de vaccination, par exemple. Leur choix se portera donc plutôt sur des conseils leur évitant d’avoir recours à des voisins ou au service de remplacement. Une offre de services clés en main pourrait alors inclure de la main-d’œuvre qualifiée pour la contention, l’administration des produits, etc., permettant de gagner du temps et de s’assurer de la bonne observance au cours de l’opération. Disposer d’un salarié, qui viendrait en renfort du ou des vétérinaires, formé par eux, est un atout supplémentaire pour le cabinet vétérinaire. Néanmoins, cette solution a un coût, qu’il convient de calculer, sans perdre de vue que cela permet d’élargir la cible et de convaincre des éleveurs pour lesquels le temps et la main-d’œuvre sont les principaux freins. Proposer une offre globale et clés en main peut être un argument de poids pour certains d’entre eux.

2. Déléguer et être présent en élevage

La mise en place d’offres de services est chronophage également pour les vétérinaires. Déléguer certains actes ou travaux permet de proposer une offre de services viable pour tout le monde. En effet, les praticiens rencontrent aussi des difficultés à trouver du temps, ce qui entrave leur rôle de conseiller. Pour exemple, le taux de bilans sanitaires d’élevage réalisés ou de visites d’élevage donnant lieu à un rapport est encore loin d’atteindre les 100 %.

De même, les données disponibles en élevage sont nombreuses et souvent sous-exploitées par manque de temps, de la part de l’éleveur comme de celle du vétérinaire (contrôle laitier, reproduction, robot de traite, lorsqu’il existe, etc.). Disposer d’une personne sur place faciliterait l’analyse de ces données. Cette dernière pourrait également se charger des prévisites, en réalisant un questionnaire préalable à la visite et en analysant les données récoltées. Cela libérerait d’autant les vétérinaires pour la partie technique (photo 4).

D’autres aspects pourraient également être délégués, dans le cadre d’une offre de services globale. En effet, d’un côté, les éleveurs réclament un interlocuteur unique, qui connaisse leur élevage et qui puisse le suivre dans son intégralité. De l’autre, la multiplication des interlocuteurs (et souvent des discours) en élevage n’est plus à prouver : contrôle laitier, groupement, firmes d’alimentation, centre d’insémination, etc. Remettre progressivement un pied dans chacun de ces domaines, redevenir l’interlocuteur privilégié, tel est le défi du vétérinaire. Et telle est l’attente des éleveurs.

Dès lors, différents types de salariés sont susceptibles de devenir des soutiens précieux du vétérinaire dans le développement de son offre de services : agents technicocommerciaux qui, sur le terrain, apportent du service et vendent des produits ; techniciens qui aident à la contention, à la manipulation et à l’administration des produits ; analyste de données, etc.

Le parage fonctionnel est aussi primordial pour la productivité des vaches laitières. Des vétérinaires se sont lancés dans cette activité. Or le coût horaire d’un pareur est inférieur à celui d’un vétérinaire. Ne serait-il donc pas plus rentable d’employer un pareur, pour dégager du temps au vétérinaire sur les tâches qu’il ne peut déléguer ?

Cependant, toute embauche est un investissement. Le retour sur investissement ainsi que les objectifs de rentabilité à atteindre (accroissement des ventes, vente de services) doivent donc être évalués. Il est également primordial que le personnel soit bien formé et compétent pour avoir un impact direct sur la satisfaction et la fidélisation des éleveurs et sur la qualité du travail effectué.

Ces intervenants peuvent être mutualisés sur plusieurs structures, ce qui diminue les coûts.

3. Conséquences sur l’organisation du travail en clinique

Ainsi, la mise en place d’une offre de services peut conduire à multiplier les intervenants. À terme, la structure du cabinet en lui-même peut être revue, afin de professionnaliser certains aspects jusque-là attribués aux associés (ou inexistants) : communication interne, gestion des équipes, planification technique, management, communication externe permise par l’assouplissement du Code de déontologie et marketing.

Ces différents postes peuvent être créés au sein du cabinet, à temps plein ou partiel, ou bien être mutualisés sur plusieurs cliniques. Il est également possible d’envisager le recours à des prestataires de services.

L’agrandissement de la structure impose de fédérer les équipes autour de projets communs, de communiquer avec elles, d’établir des procédures et de vérifier leur application. La multiplication des intervenants ne doit entraîner ni confusion du discours ni désorganisation pénalisante et contre-productive. Pour conserver une dynamique au sein des équipes, la professionnalisation des ressources humaines, de l’organisation et du management devient alors indispensable. Dans les grandes structures, ces obligations sont parfois vécues comme des freins car les vétérinaires sont encore peu préparés à ce type de postes. Il peut alors être intéressant de confier toutes ces responsabilités à une seule et même personne, salariée ou vétérinaire associé, dont le travail serait entièrement dédié à ces tâches. Malgré tout, selon l’importance du personnel, une ASV peut se voir confier la responsabilité du pôle ASV. Pour ce faire, elle doit avoir des compétences techniques, de leadership et de management.

Un poste de directeur de clinique, salarié, en charge du management des autres salariés, peut aussi être judicieux. Ce type d’organisation, encore peu répandu en France, semble assez prometteur. Cependant, les décisions et les orientations stratégiques, que le directeur de clinique sera en charge de mettre en place et d’appliquer, restent du ressort de la communauté d’associés.

Conclusion

L’offre de services vétérinaire est multiple. Chaque praticien possède ses propres compétences et ses propres centres d’intérêt. La relation avec l’éleveur est primordiale et conditionne la connaissance de ses besoins. À l’heure actuelle, les praticiens ont su se diversifier et proposer des services innovants. Aller plus loin en étoffant et en diversifiant le personnel, et en sortant du cadre classique sera sans doute une nécessité. Cela amènera la structure vétérinaire à se rapprocher de l’organisation d’une entreprise classique. L’avenir est encore à inventer.

Références

1. Camuset P. Mise en place d’une offre de services en parasitologie. Proceedings des JNGT V, Reims, 2017:473-478. 2. Camuset P. Un exemple de mise en place d’une offre de services globale en clientèle bovine laitière. Proceedings des JNGTV, Reims, 2017:229-231. 3. Deleu A et coll. La vaccination : un axe de service à développer. Proceedings des JNGTV, Reims, 2017:201-207. 4. Mathevet P. Offres de services de la clinique vétérinaire : élargissons le cadre. Proceedings des JNGTV, Reims, 2017:141-146.

Conflit d’intérêts

Aucun.

ENCADRÉ 1
Mise en place d’une offre de services en parasitologie

Philippe Camuset a présenté la démarche qui les a conduits, lui et ses associés, à mettre en place un suivi de parasitologie en élevage. Dans les années 1990, après la lecture de publications anglo-saxonnes prévenant du risque parasitaire lié à l’utilisation de macrolides de façon non raisonnée et répétée (limitant le contact parasitaire, donc la réaction immunitaire), les vétérinaires d’Yvetot (Seine-Maritime) ont décidé d’objectiver la charge parasitaire des animaux. En 1995, ils ont alors proposé le dosage du pepsinogène sérique en fin de première saison de pâture, à une époque où un traitement systématique de rentrée était souvent la règle. L’idée était de permettre le contact parasitaire, pour favoriser l’immunité et diminuer les traitements de seconde année de pâture, et de pratiquer un traitement raisonné.

Dans le même temps, des informations (souvent liées à la gestion du parasitisme) étaient adressées aux éleveurs dans une lettre mensuelle. Ces conseils répétés ont permis de sensibiliser ces derniers. Ils sont alors devenus réceptifs à l’idée d’un audit parasitaire. D’abord motivés par des cas cliniques, les audits l’ont ensuite été par la réalisation d’examens parasitaires. Les premiers éleveurs adhérents étaient des éleveurs convaincus. Dans les élevages où des épisodes cliniques ont eu lieu, la visite d’urgence, aux conséquences financières quelquefois lourdes, a permis d’ouvrir la discussion sur la pertinence d’un audit (photo 2).

Cette population a tendance à perdre sa motivation une fois que la situation sanitaire s’est améliorée. Puis le bouche-à-oreille fait son œuvre et les éleveurs deviennent spontanément demandeurs, par souci de rentabilité et d’optimisation des performances. L’utilisation des examens complémentaires met en lumière la nécessité des ajustements annuels.

Depuis 2012, le nombre d’élevages suivis en parasitologie a doublé.

L’offre élaborée comprend un audit initial avant la mise à l’herbe, visant à cerner la conduite d’élevage de chaque lot d’animaux, ce qui donne généralement une idée assez précise du risque parasitaire. Les mesures de lutte sont décidées conjointement avec l’éleveur, en fonction du niveau de risque accepté et de ses objectifs de production, l’objectif étant de limiter l’usage des antiparasitaires, pour des raisons économiques et environnementales, en augmentant le niveau de production. Les premières années, les traitements antiparasitaires sont suivis en temps réel. Des relances téléphoniques sont effectuées pour que les éleveurs effectuent leurs traitements en temps voulu.

En cas d’épisode clinique, le protocole complet est réévalué.

Le programme hivernal est déterminé à l’automne (bilan zootechnique et dosage du pepsinogène sérique 1 mois avant la rentrée en stabulation).

Cette prestation est facturée 80 € HT la première année et 40 € les années suivantes, et ne comprend pas les visites lors d’épisodes cliniques ni les examens complémentaires. Un audit demande environ 2 heures de travail. Le tarif est volontairement sous-évalué afin de développer cette activité.

D’après [1].

ENCADRÉ 2
Exemple de mise en place d’une offre de services en pratique rurale

Bien que les offres de services ne soient pas transposables telles quelles d’un cabinet vétérinaire à l’autre, il est néanmoins intéressant de s’inspirer de la démarche de confrères. Ainsi, Philippe Camuset a présenté l’offre de services mise en place dans son cabinet, dans une clientèle principalement laitière. Après la mise en place de suivis de reproduction dans les années 1980, une offre d’audit de troupeau en parasitologie a été créée 20 ans plus tard. En 10 ans, 40 % de la clientèle a souscrit à cette offre. Au cours de cette période, une lettre d’information mensuelle, délivrant des informations techniques et pratiques, était adressée aux éleveurs afin de maintenir le lien avec eux. Un forfait de soins global a été proposé aux éleveurs, permettant ainsi de rééquilibrer la proportion des honoraires par rapport à la vente de médicaments. Il inclut les soins aux animaux malades, le suivi de reproduction (troupeau et pré-troupeau), une assistance en alimentation, le dépistage des maladies métaboliques et le suivi de maladies à protocole (diarrhée virale bovine [BVD], broncho-pneumonie infectieuse enzootique [BPIE], paratuberculose, etc.). Ne sont pas inclus dans ce forfait les médicaments (facturés classiquement avec une remise éventuelle), les interventions chirurgicales, les analyses parasitaires de laboratoire, le suivi de qualité du lait, ni les visites hors ouverture. Le service est facturé 36,50 € par vache vêlée et par an (20,30 € par vache et par an pour le suivi de reproduction seul).

7 % des éleveurs du cabinet ont souscrit à cette offre, qui n’a été proposée qu’à ceux situés à moins de 10 km du cabinet. Les élevages adhérents bénéficient de l’aspect préventif et sont peu consommateurs de soins. Cette activité génère 13 % du chiffre d’affaires.

18 % des éleveurs ont souscrit à un suivi de reproduction seul. L’ensemble des activités de suivi (reproduction, globale et parasitaire) génère 50 % du chiffre d’affaires. Ainsi, l’activité de suivi permet d’améliorer la visibilité financière. C’est également un puissant facteur d’émulation. Elle impose une mise à jour permanente des connaissances.

D’après [2].

ENCADRÉ 3
Réconcilier les éleveurs avec la vaccination

Connaître les motivations et les freins des éleveurs concernant la vaccination est primordial avant de proposer un tel service. Des études sur ce sujet ont été menées en 2013, après une vaste réflexion sur la vaccination, initiée à la suite du plan ÉcoAntibio. Elles portaient sur la place de la vaccination en élevage, les motivations pour vacciner ou non, et la place du vétérinaire dans la décision. Arnaud Deleu en a présenté les principaux résultats lors des dernières journées de Reims (Marne). Dans la première étude, 402 éleveurs ont été interrogés (tableau).

Les résultats montrent que 31 % des éleveurs ne vaccinent jamais leurs bovins contre aucune des quatre maladies, et aussi que, sur conseil de leur vétérinaire, une forte proportion d’entre eux seraient prêts à le faire.

Une autre étude qualitative a été menée. Elle montre que, pour les éleveurs, la santé de leurs animaux est liée à leur niveau de compétences. C’est pourquoi ils renâclent souvent à admettre les troubles de santé auxquels ils font face. Face aux maladies, ils reconnaissent trois principales conséquences : financières (liées aux coûts directs et indirects de la maladie), opérationnelles (surplus de travail occasionné par les traitements), psychologique (liée à la perte d’un animal). Selon cette étude, la vaccination n’est pas citée comme un moyen de prévention.

En effet, elle est souvent mise en œuvre après un épisode clinique et est perçue comme plutôt liée au traitement.

L’éleveur reconnaît que le vétérinaire est la principale source d’information sur le sujet. Les informations qu’il peut lire dans la presse professionnelle sont ensuite soumises à l’avis du praticien. La vision du vétérinaire pompier est toujours bien présente. Lorsque les éleveurs vaccinent peu, le vétérinaire est généralement contacté au dernier moment et dans l’urgence. Les groupes vaccinant régulièrement plébiscitent la visite d’élevage et privilégient les interventions préventives et le conseil. L’attitude du vétérinaire est essentielle dans ce schéma. Si le vétérinaire est présent et à l’écoute, qu’il prend le temps de discuter, dans une relation d’égal à égal, une relation partenariale peut s’installer. En revanche, s’il ne donne pas l’impression de s’impliquer, l’éleveur en vient à penser que ses motivations sont purement financières et le recours au vétérinaire est retardé. Cette situation favorise les échecs thérapeutiques et renforce l’idée que le rapport bénéfice/coût est défavorable. L’impression d’une motivation financière du vétérinaire est alors renforcée.

Deux avantages majeurs de la vaccination sont cités par les éleveurs : la diminution de la perte en animaux et l’organisation facilitée du travail, car planifiable (à l’inverse de l’épisode clinique). Le contrôle des maladies ou la diminution des pertes vétérinaires sont rarement cités. Le temps passé et les contraintes organisationnelles arrivent en tête des inconvénients, suivis de la manipulation, source de stress. Le coût est rarement évoqué.

En pratique, les bilans sanitaires d’élevage sont l’occasion de proposer des protocoles de vaccination adaptés. Mais, souvent, les vaccins restent bien au frais dans les réfrigérateurs par manque de temps.

D’où l’idée dans certaines clientèles de proposer de réaliser les vaccinations lors d’opérations de prophylaxie sanitaire. Un tarif horaire peut alors être pratiqué.

D’après [3].

Points forts

→ La création d’une offre de services doit être réfléchie en fonction des besoins de sa propre clientèle.

→ La discussion et l’échange avec les éleveurs est une étape préalable à toute proposition de services.

→ Le recours à des intervenants (salariés, prestataires de services) est une piste intéressante pour libérer du temps aux praticiens et pour diversifier les services.

→ La mise à disposition de techniciens en élevage pour aider à la manipulation et à la contention des animaux, ainsi qu’à l’administration des produits permet de proposer une offre de services clés en main.

→ La professionnalisation de certaines tâches (ressources humaines, management, gestion des équipes, établissement des procédures) peut se révéler nécessaire. De nouveaux métiers sont à envisager au sein des cliniques vétérinaires.

Abonné au Point Vétérinaire, retrouvez votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr