Boiterie postérieure permanente chez un jeune chien - Le Point Vétérinaire n° 383 du 01/03/2018
Le Point Vétérinaire n° 383 du 01/03/2018

ORTHOPÉDIE

Quel est votre diagnostic ?

Auteur(s) : Cécile Roumilhac*, Eugénie Soliveres**

Fonctions :
*Assistantes hospitalières en imagerie médicale
CHUV d’Alfort
7, avenue du Général-de-Gaulle
94700 Maisons-Alfort

Présentation clinique

Un chien labrador mâle entier de 1 an et demi est présenté pour une boiterie du membre pelvien droit évoluant depuis son adoption à l’âge de 3 mois. Les propriétaires observent une boiterie permanente et sans appui, plus marquée à froid. Aucun épisode traumatique pouvant être à l’origine de la boiterie n’est rapporté. Les traitements anti-inflammatoires n’ont pas permis d’amélioration clinique.

À l’examen clinique, l’état général du chien est bon. L’examen orthopédique révèle une amyotrophie du quadriceps droit, un report de poids à gauche et une discrète rotation de l’extrémité distale du membre pelvien droit. La palpation/pression met en évidence une douleur au tarse droit, sans gonflement ni chaleur associés. À la mobilisation segmentaire, des craquements sont notés lors de la flexion et de l’extension de ce tarse. Des radiographies du tarse droit de face et de profil sont réalisées (photos 1 et 2).

Qualité de l’image

La densité, le contraste, la netteté et le cadrage sont satisfaisants.

Description de l’image

Les tissus mous ne présentent pas d’anomalies particulières. Sur la vue de face, une augmentation de la densité osseuse compatible avec une sclérose de l’os sous-chondral tibial, un élargissement de l’interligne articulaire tibio-talienne en partie médiale, une irrégularité de la lèvre médiale de la trochlée du talus sont observés. Un fragment d’opacité minérale de 2 mm est visible dans l’espace articulaire sur les deux vues.

Interprétation et prise en charge thérapeutique

Les lésions radiographiques permettent d’identifier une ostéochondrite disséquante (OCD) de la lèvre médiale de la trochlée du talus. Il s’agit d’une affection du jeune chien, souvent bilatérale (50 % des cas) [2, 4]. Des radiographies du membre controlatéral montrent également des lésions d’OCD de la trochlée du talus. Un examen tomodensitométrique permet de mettre en évidence un épaississement de la capsule articulaire et une encoche dans l’os sous-chondral de la lèvre médiale de la trochlée du talus, et de confirmer la présence d’un unique fragment minéralisé faisant protrusion dorsalement dans l’espace articulaire. Une arthroscopie par un abord antéro-latéral objective la synovite et le volet cartilagineux, en partie détaché de l’os sous-chondral. Celui-ci est retiré par un abord combiné postéro- et antéro-médial. Une résolution complète de la boiterie est obtenue dans les semaines postopératoires.

DISCUSSION

L’ostéochondrose (OC) est une cause fréquente de boiterie chez les jeunes chiens de grande race. Les signes cliniques se manifestent entre 6 et 9 mois. Cette affection résulte d’une nécrose du cartilage épiphysaire menant à un défaut d’ossification endochondrale. Des fissures peuvent survenir dans l’os sous-chondral et un fragment cartilagineux se détache parfois. Ce dernier peut se minéraliser et devenir radio-opaque, permettant alors le diagnostic radiographique d’une OCD [3]. Concernant l’articulation du tarse, ces lésions sont observées le plus souvent sur la lèvre médiale de la trochlée du talus (85 % des cas), mais affectent aussi la lèvre latérale [2]. Elles sont alors difficilement identifiables à la radiographie en raison de la superposition avec le calcaneus. Une vue oblique plantaro-médiale-dorso-latérale et une vue dorso-plantaire en flexion peuvent permettre de désuperposer ces structures afin de mieux évaluer l’articulation [2]. Lors de suspicion d’une OC du tarse, le scanner et l’imagerie par résonance magnétique offrent une évaluation plus fine des surfaces articulaires. Le nombre, la localisation et la taille des fragments peuvent être déterminés avec une meilleure fiabilité [2]. Il s’agit d’informations essentielles lorsqu’un traitement par arthroscopie est envisagé, notamment pour déterminer la voie d’abord. Cette prise en charge permet une bonne amélioration clinique, avec parfois la persistance d’une boiterie à l’effort. À long terme, ces animaux présentent souvent de l’arthrose, qui peut nécessiter l’instauration d’un traitement médical [1].

Références

  • 1. Fossum TW. Diseases of the joints in small animal surgery. 4th ed. Elsevier. 2013: 1371-1374.
  • 2. Gielen I, van Bree H, Van Ryssen B et coll. Radiographic, computed tomographic and arthroscopic findings in 23 dogs with osteochondrosis of the tarsocrural joint. Vet. Rec. 2002;150:442-447.
  • 3. Thebault A. L’ostéochondrite disséquante chez le chien. Point Vét. 2006;271:20-25.
  • 4. Thrall DE. Orthopedic diseases of young and growing dogs and cats. In: Textbook of veterinary diagnostic radiology. 6th ed. Elsevier. 2013:267-268.

Conflit d’intérêts

Aucun.

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