Quel impact de l’ensilage d’herbe chez l’animal et le produit ? - Le Point Vétérinaire expert rural n° 367 du 01/07/2016
Le Point Vétérinaire expert rural n° 367 du 01/07/2016

INGRÉDIENTS DE LA RATION

Questions-réponses

Auteur(s) : Béatrice Bouquet*, Aurélien Voisin**

Fonctions :
*Bvet
BP 20008
80230 Saint-Valéry-sur-Somme
**Clinique vétérinaire de Biscaye
19, avenue Jean-Prat
65100 Lourdes
Bali87@hotmail.fr

À la condition de maîtriser la récolte et la conservation, l’ensilage d’herbe présente des atouts : un apport de fibres dans la ration, une autonomie protéique de l’exploitation et la qualité du produit final.

L’ensilage d’herbe est à mi-chemin entre celui de maïs et celui de luzerne, par exemple pour les apports alimentaires et les risques liés à la technique de conservation [2]. Il représente la meilleure façon de conserver toute sa valeur nutritionnelle à l’herbe, alors que celle-ci profite d’une image “terroir” appréciée du consommateur. À toutes les étapes de la récolte et de la confection de l’ensilage d’herbe, un grand soin s’impose, pour optimiser sa valeur nutritionnelle, mais aussi pour prévenir les risques sanitaires.

QUELLES SONT LES VALEURS NUTRITIONNELLES ?

L’ensilage d’herbe est un fourrage (plus de 20 % de cellulose brute) “qui nourrit”. Les apports nutritionnels sont très variables selon la composition de l’herbe, la météorologie et le stade de récolte en particulier. Assez modeste, l’apport énergétique est aussi celui qui fluctue le plus : de 0,65 à 0,98 unité fourragère lait (UFL), d’après les données de la chambre d’agriculture de Bretagne. L’apport protéique va de 80 à 110 g pour les protéines digestibles dans l’intestin permises par l’azote (PDIN) et de 50 à 70 g pour les protéines digestibles dans l’intestin permises par l’énergie (PDIE), par kg de matière sèche (MS). Ainsi, en général, cet ensilage est moins énergétique que celui de maïs, mais plus riche en matières azotées [5].

L’ENSILAGE D’HERBE PERMET-IL DE RODUIRE MOINS CHER ?

L’économie de correcteur azoté permise par l’adjonction d’ensilage d’herbe dans la ration peut être intéressante. Pour cela, la mise en silo doit avoir été effectuée à des stades précoces, mais le rendement s’en ressent, ce qui peut déplaire à l’éleveur. Un stade “épi 10 cm” est à rechercher, facile à déterminer dans une culture de ray-grass “pur”, plus difficile en mélange de semences ou en prairie permanente.

Pour améliorer le rendement, plutôt que de couper l’herbe plus tardivement, l’éleveur peut chercher à rehausser la MS (idéalement 30 %) en soignant l’étape de préfanage au champ (photo 1). La marge de progrès est étroite, et les spécialistes conseillent de ne pas dépasser 24 heures, car, au-delà, la perte de valeur énergétique est, à l’inverse, importante.

SOUS CETTE FORME DE CONSERVATION LA RODUCTION AUGMENTE-T-ELLE ?

Dans un essai de l’Institut national de la recherche agronomique (Inra) sur 42 vaches, celles qui reçoivent de l’ensilage d’herbe produisent 0,7 kg (p < 0,05) de lait de plus que celles qui consomment du foin [6]. Leur lait est toutefois significativement plus pauvre en matières grasses (– 1,2 g/kg), en protéines (– 1 g/kg) et en caséine. Le rapport caséine/protéines et la teneur en protéines solubles du lait restent constants. La teneur en calcium est légèrement plus faible et celle en phosphore plus élevée, avec la ration à base de foin.

Dans cet essai, des multipares en milieu de lactation ont été étudiées sur deux périodes de 4 semaines. Elles ont reçu une ration de fourrage iso-énergétique à base d’ensilage d’herbe (11,5 kg de MS) ou de foin (12,5 kg de MS). Les deux fourrages ont été fauchés le même jour sur la même parcelle de prairie naturelle. Chaque ration a été complémentée avec la même quantité d’orge et de tourteau de soja dans des proportions calculées pour que les apports azotés soient voisins et non limitants dans les deux traitements. Les bilans énergétiques sont proches dans les deux lots et les quelques résultats à la baisse sont essentiellement dus à un effet de dilution des matières utiles.

QUEL DANGER REPRÉSENTENT LES MYCOTOXINES ?

Comme tout ensilage, en particulier de graminées, le risque associé aux mycotoxines est à prendre en considération. Ces substances sont principalement produites au champ, dans certaines conditions météorologiques (température, humidité). Elles persistent dans l’ensilage, même si celui-ci a été correctement réalisé. Elles peuvent aussi s’y multiplier au cours de la conservation (mais jamais y apparaître spontanément, contrairement aux moisissures “visibles” sur le front d’attaque, par exemple) [9].

Les mycotoxines ne sont pas spécifiques d’une plante donnée, d’où une certaine complexité à s’y retrouver. Leur diversité, leur impact et leurs aspects dose-dépendants sont encore mal cernés. Une recherche de multiples mycotoxines dans l’aliment est maintenant possible en routine en France. Le laboratoire d’analyses des Côtes-d’Armor Labocea possède une base de données sur le sujet. Avec l’expérience, le recul empirique sur l’impact associé à la présence de telle ou telle mycotoxine s’accroît. De véritables études scientifiques sont difficiles à mener tant le nombre de mycotoxines est important et la quantification de l’effet délicate à mesurer, et qui plus est à reproduire. Ces aspects seront abordés dans un prochain article sur l’ensilage de maïs car cet ingrédient de la ration est bien étudié pour le risque “mycotoxines” [8].

ET LE BOTULISME ?

Les neurotoxines de Clostridium botulinum proviennent généralement d’un ensilage souillé par de la terre, insuffisamment acide, dans lequel la bactérie tellurique a crû et sporulé, de cadavres de ravageurs ensilés par mégarde, ou de lisier de volaille (qui peut lui aussi contenir des carcasses) épandu ou dispersé par inadvertance au champ. La bactérie a besoin d’anaérobiose, de protéines (d’où le risque avec l’ensilage d’herbe), d’une température suffisante, d’humidité, de peu de sel et d’une faible acidité pour se multiplier et ainsi produire des neurotoxines.

Un cas clinique avec une mortalité de 80 vaches dans un troupeau de 101 bovins sur plusieurs mois a été relié épidémiologiquement et analytiquement à la consommation d’un ensilage d’herbe. Il a été présenté au dernier Forum européen de buiatrie par Anne Relun (Oniris), à l’occasion d’un concours de cas organisé par Virbac.

L’ensilage d’herbe avait été contaminé par des spores de C. botulinum souche D/C. Du fumier de volaille avait été déposé en bout de parcelle ensilée. Seules les vaches qui n’avaient pas pu trier leur nourriture (car leur ration avait été mélangée) ont été affectées. L’ensilage en cause avait une odeur nauséabonde de pourriture (photo 2). Le botulisme provoque une paralysie flasque, puis la mort inéluctablement [11]. Les bactéries et les toxines ont été recherchées par un test sur souris, puis par PCR (polymerase chain reaction) à l’Institut Pasteur de Paris, qui héberge le Centre national de référence (CNR) des bactéries anaérobies et du botulisme, dirigé par Michel Popoff, chargé de contribuer à la surveillance du botulisme humain et vétérinaire, et qui réalise les analyses. Au sein de l’unité bactéries anaérobies et toxines, des recherches sont menées sur les facteurs génétiques et environnementaux régulant la toxinogenèse de ces bactéries pathogènes, sur le passage de leurs toxines à travers la barrière intestinale, incluant l’étude moléculaire de celles-ci.

L’incubation est de 24 heures à 17 jours dans les différents cas bovins rapportés. En plus de l’ingestion de neurotoxines produites à l’extérieur, leur production secondaire dans l’intestin (botulisme viscéral) pourrait conduire à des cas survenant plus longtemps après la consommation de l’ensilage d’herbe à risque lors de défaut de propreté [11].

QUEL RISQUE “BUTYRIQUES” ?

Ce sont également des clostridies qui fabriquent les spores butyriques, mais celles-ci ne sont pas dangereuses pour la santé, ni pour l’homme ni pour l’animal. Elles constituent uniquement un péril technologique : gonflement tardif des meules, mauvais goût et mauvaise odeur du produit fini. Pour cette raison, la question de la conservation de l’herbe sous forme d’ensilage est depuis longtemps un sujet de débats au sein des filières fromagères d’appellation d’origine contrôlée (AOC), en particulier en fabrication de pâte pressée cuite(1).

Les spores butyriques proviennent de la terre résiduelle dans l’ensilage. Elles contaminent le lait via les bouses, en cas d’un défaut de propreté.

Le soin apporté à la confection du silo, mais aussi à l’entretien de la parcelle est capital. Il convient d’être attentif à :

– la lutte contre les ravageurs qui édifient des monticules dans la parcelle (taupes, rongeurs) (photo 3) ;

– la propreté du tracteur de tassage ;

– la météo le jour de la récolte ;

– la hauteur de coupe, qui doit être adaptée, etc.

Les spores butyriques sont contrôlées dans le lait de chaque producteur par les laboratoires interprofessionnels dispersés sur le territoire. Les éleveurs encourent des pénalités en cas de dépassement, avec une certaine tolérance jusqu’à maintenant via le reclassement du lait pour d’autres fabrications. Cependant, la tendance est au renforcement des exigences.

ET LA LISTÉRIOSE ?

Listeria monocytogenes est un bacille Gram positif ubiquitaire. Il est présent dans la terre, l’herbe, les débris végétaux, mais est aussi un agent commensal de l’intestin animal.

Les vaches (et les taurillons à l’engrais) peuvent contracter une listériose via l’ensilage, mais le risque est plus élevé pour les caprins et encore davantage pour les ovins. La forme la plus spectaculaire est la méningite à Listeria, avec de la fièvre et une atteinte unilatérale des nerfs crâniens, mais celle-ci est rare. Les avortements et les mammites à Listeria sont plus fréquents et plus insidieux. La bactérie est surveillée en routine dans des filières de production à la ferme. Le portage est possible pendant de longues années, d’où un risque persistant de réexcrétion dans un élevage affecté et de contamination des produits finis, donc de l’homme. Les fromages élaborés à base de lait cru assurent leur propre défense contre la prolifération de Listeria monocytogenes grâce à la biodiversité microbienne.

Sept épisodes de listériose alimentaire ont été rapportés ces 30 dernières années en France. Les aliments mis en cause étaient de la langue de porc en gelée (1992 et 2000), des rillettes (1993 et 2000), du brie (1995), du pont-l’évêque (1997), des époisses (1999), des tartinettes (2002) et de la mortadelle (2003) [1]. La charcuterie, le poisson cru et les graines germées ont été fréquemment impliqués dans des toxi-infections alimentaires collectives (TIAC) à Listeria, mais le péril “listériose” via les produits laitiers reste également redouté pour le risque abortif chez la femme enceinte.

L’agent pathogène ne survit pas à la chaleur, mais est résistant au froid. Il aime l’eau et la matière organique, d’où un danger par l’intermédiaire de l’abreuvoir d’eau “sale”, à considérer tout autant que celui de l’ensilage. L’acidification élimine ce risque, mais la fenêtre de récolte pour une bonne descente de pH (richesse en glucides) est plus étroite pour l’herbe que pour le maïs, et encore davantage quand l’herbe contient des dactyles et des légumineuses. C’est une des raisons pour lesquelles l’usage de conservateurs est recommandé dans la confection de l’ensilage d’herbe. L’enrubanné, herbe fermentée conservée en “portions individuelles”, s’il est récolté tôt, et avec plusieurs couches de plastique, dilue aussi le risque pour la vache (photo 4).

L’ENSILAGE D’HERBE DANS LA RATION : UN ATOUT POUR LE PRODUIT ?

L’herbe a une bonne image auprès du consommateur, alors que l’ensilage (de maïs surtout) est mal perçu. Le changement des habitudes de consommation en diététique humaine fait évoluer les esprits : encouragés par les diététiciens, nous (re) mangeons nous aussi des produits fermentés, comme le pain au levain, la choucroute, le yaourt kéfir et la sauce soja. Pour l’herbe distribuée aux vaches, des éléments objectifs ont été recherchés pour justifier l’acceptation de la forme fermentée dans des cahiers des charges de production qui soignent leur image tout autant que leur produit (fromages de montagne : cantal, reblochon, abondance, etc.). L’effet du mode de conservation de l’herbe dans la ration a été comparé sur la flaveur, la texture ou encore la couleur en production fromagère. En conditions contrôlées, il a été démontré que le type d’alimentation offert aux animaux peut modifier sensiblement les propriétés sensorielles des fromages [13].

L’emploi d’herbe sous forme d’ensilage plutôt que de foin donne des fromages plus jaunes, légèrement moins fermes, avec un goût moins intense, moins typique, plus amer et moins plaisant, d’une manière plus ou moins nette selon le fromage considéré. D’autres études montrent que des fromages de vaches nourries avec de l’ensilage d’herbe peuvent plaire et présenter une odeur moins amère et plus fruitée qu’avec une alimentation en vert ou du foin. Il est possible que les effets du mode de conservation de l’herbe sous forme d’ensilage ou de foin soient variables selon le type de fromage (photo 5) [13].

En définitive, un ensilage d’herbe de bonne qualité peut permettre l’élaboration de fromages très appréciés du consommateur, avec seulement un faible impact global sur le goût. Les caractéristiques gustatives des fromages affinés ne dépendent pas seulement de l’alimentation, mais également de la race, de la conduite du troupeau, de la technologie fromagère utilisée, et aussi des conditions et des durées d’affinage.

POURQUOI DES PRODUITS DIFFÉRENTS SELON LE FOURRAGE ?

L’influence du fourrage sur les caractéristiques sensorielles des produits est d’autant plus forte pour de nombreux fromages AOC, le lait étant maintenu dans son intégrité (pas de pasteurisation ni d’écrémage) avant la transformation fromagère.

Les différences de texture et de flaveur des fromages sont dues à la présence de molécules ou de structures spécifiques dans le lait. Seules quelques-unes sont issues directement de l’alimentation, comme les caroténoïdes. Ceux-ci sont mieux conservés dans l’ensilage car ils sont sensibles aux ultraviolets et détruits lors du séchage du foin. La teneur en caroténoïdes impacte directement la couleur (jaune) du fromage. Les terpènes aromatiques ont un impact bien moindre (encadré 1).

D’autres substances responsables de la texture et de la flaveur sont produites par l’animal sous l’influence de facteurs génétiques (dont les caséines), physiologiques et aussi alimentaires. Ainsi, la plasmine, une enzyme protéolytique, intervient dans la protéolyse primaire des fromages, qui influe aussi sur le “goût” en définitive. Les différences de teneurs en plasmine et en plasminogène pourraient être notamment liées à l’ingestion via l’herbe de plantes toxiques, notamment des renonculacées, dans les prairies (alpages).

Les conditions de pâturage influent aussi sur la composition en acides gras, qui impacte la flaveur, la texture mais aussi la santé du consommateur. D’une manière générale, les laits d’été, issus d’une alimentation à base de fourrage vert, sont plus riches en acides gras longs et plus insaturés que les laits d’hiver qui proviennent d’une alimentation à base de fourrages conservés. Ces acides gras seraient à l’origine d’une texture plus souple dans les fromages correspondants.

QUELLE HERBE POUR UN BÉNÉFICE PRODUIT PTIMAL ?

Au cours des dernières années, plusieurs essais ont été réalisés en Europe pour décrire et analyser l’effet de la diversité botanique des fourrages offerts aux animaux (sous forme pâturée ou conservée) sur les caractéristiques sensorielles de différents types de fromage, généralement à pâte pressée cuite (encadrés 2 et 3).

Le type de pâture d’où provient l’herbe influe considérablement : les pâturages de montagne donnent des fromages dont l’arôme est plus intense, plus “animal”, plus piquant, plus fruité et globalement plus diversifié que les pâturages de plaine.

Les attentes du consommateur semblent correspondre à ce type de fromage.

Dans diverses études, l’utilisation de prairies monospécifiques (de dactyles, par exemple) a induit des odeurs désagréables de moisi, de cave et de rance [13].

Conclusion

Ainsi, le fait d’incorporer de l’herbe, la qualité de sa récolte et de sa conservation et sa diversité influent sur les quantités produites, les possibilités de transformation, la qualité du produit laitier final et même sur la santé du consommateur. Des éléments objectifs vont ainsi dans le sens de l’opinion du consommateur qui aime qu’un produit laitier soit relié au terroir d’un point de vue alimentaire. Ces aspects ont été valorisés via l’existence de labels d’appellations d’origine protégée (AOP) ou contrôlée. Dans les cahiers des charges, certains types d’aliments sont interdits dans la ration. Jusque-là autorisés en AOP saint-nectaire, les fourrages fermentés seront interdits dans les rations des vaches laitières à partir du 1er mai 2017. L’herbe, ensilée ou pas, est globalement privilégiée(1).

  • (1) Voir la fiche “Produits laitiers sous appellations : le terroir et la traite” de B. Bouquet, dans ce numéro.

Références

  • 1. Anses. La listériose. Fiche https://www.anses.fr/fr/system/files/MIC2011sa0171Fi.pdf
  • 2. Bouquet B. La luzerne top-modèle de la ration. Point Vét. 2016;366:44-49.
  • 3. Bouquet B. Qui sont les laboratoires chargés des contrôles sur le lait ? Point Vét. 2014;346:44-49.
  • 4. Burgaud C, Buchin S, Hauwuy?A et coll. Texture et flaveur du fromage selon la nature du pâturage : cas du fromage d’abondance. Inra Prod. Anim. 2002;15:31-36.
  • 5. Chambre d’agriculture de Bretagne. Fiche consultée le 13/6/16. L’ensilage d’herbe. http://www.bretagne.synagri.com/ca1/PJ.nsf/TECHPJPARCLEF/14032/$File/Ensilage%20herbe.pdf?OpenElement
  • 6. Coulon JB, Pradel P, Verdier I. Effet du mode de conservation du fourrage (foin ou ensilage) sur la production et la composition du lait. Renc. Rech. Rum. 1996;3:281-284.
  • 7. Institut Pasteur. Fiche info botulisme en ligne. Janvier 2013. http://www.pasteur.fr/fr/institut-pasteur/presse/fiches-info/botulisme
  • 8. Laurain J. Gérer le risque de mycotoxines en élevage laitier. Point Vét. 2015;Spécial rural:114-119.
  • 9. Marengue E. 43 mycotoxines recherchées en réponse à une vraie demande de terrain. Point Vét. 2010;310 (rural):62-64.
  • 10. Mariaca RG, Berger TFH, Gauch R. Occurrence of volatile mono- and sesquiterpenoids in highland and lowland plant species as possible precursors for flavor compounds in milk and dairy products J. Agric. Food Chem. 1997;45:4423-4434.
  • 11. Relun A. Epidemiological investigation of a major type D/C botulism outbreak in a French dairy cattle herd. European Buiatrics forum, Rome. Séance de cas cliniques Virbac. 2015:8p.
  • 12. Verdier-Metz I, Coulon JB, Viallon C et coll. Effet de la conservation du fourrage sur les caractéristiques physico-chimiques et sensorielles des fromages, Renc. Rech. Rum. 2000;7:318.
  • 13. Voisin A. Influence du type d’alimentation sur la texture et la flaveur du fromage. Thèse vétérinaire, ENV Toulouse. 2010;4021:97p.

Conflit d’intérêts

Aucun.

Points forts

→ L’ensilage d’herbe apporte 20 % de cellulose, 0,65 à 0,98 UFL et 80 à 110 g de PDIN.

→ Les mycotoxines sont principalement produites au champ et persistent dans l’ensilage.

→ Des fermentations butyriques élevées et des défauts de propreté dans l’élevage à différents niveaux vont de pair.

→ Les caractéristiques gustatives des fromages affinés ne dépendent pas seulement de l’alimentation des vaches.

ENCADRÉ 1
Terpènes

→ Les terpènes sont des molécules directement issues des plantes. Il existe une certaine hétérogénéité de leur répartition en fonction de l’espèce. Les dicotylédones en sont largement pourvues, alors que les graminées, majoritaires dans les prairies de plaine, n’en possèdent presque pas [10]. Il ne semble pas que la modification de leur teneur dans le fromage soit suffisante pour s’accompagner d’un effet direct important sur la flaveur des fromages, mais il y a polémique sur ce point. L’effet de ces molécules sur la flore d’affinage (qui impacte la flaveur) reste aussi à démontrer.

De très nombreuses plantes de montagne contiennent des terpènes volatils, parmi lesquelles le cumin des prés (Carum carvi), la grande berce (Heracleum sphondylium), la ligustique mutelline (Liguticum mutellina), l’aposéris fétide (Aposeris foetida), le fenouil des Alpes ou cistre (Meum athamanticum Jacq.), le petit boucage (Pimpinella saxifraga), l’achillée millefeuille (Achillea millefolium) et le thym serpolet (Thymus pulegioides). Les terpènes ne modifient que très légèrement les métabolites microbiens du fromage, y compris lorsque leur concentration est anormalement élevée. Ainsi, l’effet de la nature botanique des prairies sur les caractéristiques sensorielles des fromages ne semble pas lié à l’activité antimicrobienne des terpènes. Ces derniers auraient un impact direct sur la flaveur des fromages lorsque leur concentration est élevée.

→ Le carotène est aussi un terpène. Pigment orangé du groupe des caroténoïdes, il est abondant dans les végétaux, en particulier dans la carotte, dont le nom est dérivé, mais aussi dans l’herbe, et chez les animaux. Le Β-carotène des végétaux est antioxydant et immunostimulant. Il est utilisé directement par les cellules ou après conversion en vitamine A. En marge de la photosynthèse, il absorbe l’excès d’énergie afin de prévenir la formation de composés superoxygénés qui détruiraient la feuille.

Il est très sensible aux rayons ultraviolets. Il est détruit en grande partie lors du séchage du foin et au cours de la conservation des fourrages. La dégradation de la molécule est d’autant plus grande que le foin reste longtemps au sol. La nature de l’alimentation a donc un effet marqué sur sa teneur dans le lait, donc sur la couleur du fromage. Les fromages fabriqués avec du lait issu d’une alimentation à base d’herbe fraîche sont plus jaunes que ceux qui le sont à partir d’un ensilage d’herbe, eux-mêmes plus jaunes que ceux confectionnés avec du lait de foin séché en grange, et encore davantage que ceux issus d’un séchage au sol.

→ Les fromages réalisés avec des laits de printemps sont beaucoup plus jaunes que ceux issus de laits d’hiver. L’ensilage de maïs, très pauvre en carotène, conduit à des fromages très blancs. La teneur en caroténoïdes est plus élevée dans le trèfle que dans les graminées. Cette différence se retrouve surtout pour l’ensilage après coupe directe avec conservateur. Elle est principalement due à la lutéine. L’ensilage, de manière générale, comporte des teneurs en caroténoïdes plus importantes que l’enrubannage et le foin, qui ne diffèrent pas beaucoup l’un de l’autre.

→ L’ensilage réalisé après coupe directe avec conservateur se différencie des autres formes d’ensilage par sa forte teneur en caroténoïdes. Le ressuyage et le préfanage, qui nécessitent de laisser les plantes sur la parcelle, provoquent une diminution de la teneur en caroténoïdes.

ENCADRÉ 2
Effet du mode de conservation de l’herbe

Dans un essai, l’herbe d’une même parcelle a été récoltée le même jour et conservée sous la forme soit d’ensilage (avec adjonction d’un conservateur acide), soit de foin (séché en grange). Dans les deux cas, la qualité de conservation a été excellente et les apports nutritifs offerts aux animaux ont été calculés pour être équivalents. Des fromages saint-nectaire ont été fabriqués dans une fromagerie expérimentale à partir du lait des vaches ayant consommé l’un ou l’autre des types de fourrages. Les fromages réalisés à partir du lait d’ensilage ont été plus jaunes et légèrement plus amers que ceux fabriqués avec du lait de foin. Les autres caractéristiques chimiques et sensorielles des fromages n’ont pas été différentes entre les deux traitements [12]. Ce résultat expérimental a été confirmé par des observations en fermes.

ENCADRÉ 3
Diversité botanique, exemple d’impact en production fromagère d’abondance

En production d’abondance, les fromages issus d’une alimentation à base de prairies de plaine ou de montagne ont été comparés. Les pâturages de vallée sont davantage dominés par les graminées que ceux de montagne. Ces derniers possèdent une diversité botanique légèrement plus importante, avec plus de renonculacées et de rosacées, et présentent une petite proportion de plantes toxiques pour les vaches (photos 6a et 6b). À côté de différences sensorielles d’un producteur à l’autre, il existe des écarts importants pour un même producteur selon les caractéristiques des prairies pâturées, entre plaine et montagne, et au sein des pelouses d’alpage. Les différences les plus importantes concernent la texture des fromages (plus cohésive, plus élastique et plus déformable en plaine qu’en montagne). Sur le plan de la flaveur, les fromages de montagne ont un arôme plus fruité, plus “animal”, “lait cuit”, et noisette, et moins piquant et “propionique” que les fromages de vallée. Même chose pour le gruyère. Il en existe six espèces différentes appartenant à deux familles botaniques en plaine, contre 50 espèces et 18?familles botaniques différentes en moyenne en montagne, avec notamment des composées, des renonculacées, des rosacées ou encore des plantaginacées (tableau).

REMERCIEMENTS

À Anne Relun, Oniris pour sa relecture du paragraphe consacré au botulisme.

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