Aspects échographiques de la thyroïde chez le chat et le chien - Le Point Vétérinaire n° 355 du 01/05/2015
Le Point Vétérinaire n° 355 du 01/05/2015

ENDOCRINOLOGIE ET IMAGERIE

Dossier

Auteur(s) : Virginie Fouriez-Lablée*, Clément Bordenave**, Marion Fusellier-Tesson***

Fonctions :
*Service d’imagerie médicale,
Centre hospitalier universitaire vétérinaire Oniris,
102, route de Gachet, 44307 Nantes Cedex 03
virginie.fouriez-lablee@oniris-nantes.fr
clement.bordenave@oniris-nantes.fr
marion.fusellier@oniris-nantes.fr

L’échographie des thyroïdes est à privilégier en première intention lors de suspicion d’une atteinte thyroïdienne chez le chat et le chien. Cet examen bénéficie d’une grande disponibilité et d’une bonne innocuité, et sa mise en œuvre est aisée sur un animal vigile.

Les affections de la thyroïde sont nombreuses et fréquentes chez les carnivores domestiques.

L’hyperthyroïdie est une dysendocrinie souvent retrouvée chez le chat âgé de plus de 8 ans. Elle est caractérisée par une augmentation excessive de la concentration plasmatique en hormones thyroïdiennes, souvent corrélée à une hypertrophie bilatérale ou unilatérale des thyroïdes.

L’hypothyroïdie est une affection très rare chez le chat. Elle est relativement plus fréquente chez le chien et est caractérisée par une diminution de la concentration en hormones thyroïdiennes circulantes. L’hypothyroïdie canine primaire consiste en une destruction ou en une atrophie du parenchyme thyroïdien (dues à une thyroïdite auto-immune, à une atrophie folliculaire, à une atteinte thyroïdienne iatrogène ou à une origine néoplasique, comme le carcinome thyroïdien.)

L’examen échographique des thyroïdes du chat et du chien est indiqué lors de la palpation d’une masse en région cervicale ventrale pour en explorer la cause. Il permet également d’évaluer la morphologie des thyroïdes, ainsi que leurs rapports anatomiques lors de suspicion d’une dysendocrinie d’origine thyroïdienne. Enfin, des prélèvements cytologiques échoguidés, en particulier en cas de suspicion d’une tumeur d’origine thyroïdienne, peuvent être pratiqués à cette occasion.

1 Technique d’examen et aspect échographique normal des thyroïdes

Technique d’examen

L’animal est positionné en décubitus dorsal dans un coussin de contention, avec le cou en extension maximale. Les régions ventrale et latérale du cou sont tondues et imprégnées de gel échographique. Un standoff-pad (manchons couplants) peut être utilisé pour améliorer la visualisation des organes très superficiels [9].

Une sonde échographique linéaire de haute fréquence (> 10 MHz) est recommandée pour étudier les organes superficiels du cou chez le chien et le chat [

9].

L’examen débute par des coupes transversales afin de faciliter le repérage des lobes thyroïdiens. La sonde échographique est positionnée juste en arrière du larynx et est déplacée caudalement vers la base du cou (photo 1). Après le repérage d’un lobe thyroïdien, une rotation à 90° de la sonde échographique permet de l’explorer en coupe longitudinale. Chaque lobe peut ainsi être étudié plus précisément [13].

Aspect échographique normal des thyroïdes

Les deux lobes thyroïdiens sont identifiables de part et d’autre de la trachée en position dorso-latérale, caudalement au larynx et médialement aux artères carotides communes. Les muscles sterno- hyoïdiens, sterno-thyroïdiens et sterno-céphaliques sont situés respectivement ventralement, dorso-latéralement et latéralement aux lobes thyroïdiens. L’œsophage est positionné dorsalement au lobe thyroïdien gauche [9].

Les thyroïdes ont une forme ovalaire ou triangulaire en coupe transversale et un aspect fusiforme en coupe longitudinale. Le pôle cranial est arrondi et le pôle caudal, plus effilé. Le parenchyme thyroïdien est homogène, hyperéchogène à isoéchogène aux tissus musculaires environnants. Il peut contenir quelques foyers hyperéchogènes ou hypoéchogènes (photos 2 et 3).

Les lobes thyroïdiens sont délimités par une fine capsule hyperéchogène.

Une vascularisation thyroïdienne intraparenchymateuse peut être identifiée au Doppler couleur [9, 13].

Un tissu thyroïdien ectopique doit être recherché à la base du cou, à l’entrée de la poitrine ou dans le médiastin cranial. En région médiastinale, il est difficile à identifier par échographie et le recours à la scintigraphie est alors nécessaire [12].

Chez un chien de taille moyenne, un lobe thyroïdien mesure environ 25 à 30 mm de long et 4 à 6 mm de large [5, 9]. Chez le chat, sa longueur est d’environ 20 mm et sa largeur de 2 à 3 mm [10].

2 Aspect échographique anormal et affections thyroïdiennes

Hyperthyroïdie féline

Lors d’hyperthyroïdie féline, une hyperplasie diffuse de la glande ou une atteinte focale nodulaire sont observées (photo 4). La taille de la glande est généralement augmentée, les contours sont arrondis et le parenchyme présente un aspect hypoéchogène souvent homogène. Quelques foyers hypoéchogènes ou anéchogènes peuvent être observés, à l’origine d’un aspect hétérogène du lobe. Enfin, quelques kystes bien délimités, des cavités liquidiennes anéchogènes associées à un artefact de renforcement postérieur, sont également parfois présents (photo 5) [1, 3, 10].

Le diagnostic différentiel inclut les tumeurs thyroïdiennes, dont les adénomes et les adénocarcinomes thyroïdiens ou parathyroïdiens [3].

Lors d’un adénome thyroïdien unilatéral sécrétant, le lobe controlatéral n’est pas toujours identifiable par échographie en raison de son atrophie [10].

Hypothyroïdie canine

Lors d’hypothyroïdie canine, le volume de la glande est généralement diminué, sa forme est plus arrondie (moins triangulaire) en coupe transversale et le parenchyme plus nettement hypoéchogène, le plus souvent homogène.

Le parenchyme est hypoéchogène aux structures musculaires environnantes, comme le muscle sterno-thyroïdien [4].

Un parenchyme hétérogène entouré d’une capsule thyroïdienne aux contours irréguliers est aussi observable [2, 7]. Cependant, certaines études ne mettent pas en évidence de différence significative à l’examen échographique des thyroïdes de chiens eu- et hypothyroïdiens [13].

Carcinomes thyroïdiens

Les carcinomes thyroïdiens du chien et du chat sont souvent suspectés à un stade d’évolution avancé par la palpation d’une volumineuse masse cervicale en région ventrale.

L’examen échographique permet d’en déterminer l’origine thyroïdienne, de dresser un bilan d’extension locorégionale et de réaliser des prélèvements cytologiques [11].

L’examen échographique met en évidence le plus souvent une masse hétérogène hypoéchogène nettement ou peu délimitée, avec une vascularisation périphérique importante (photo 6). La trachée et l’œsophage peuvent être déplacés ventralement et latéralement [11].

Des foyers de minéralisation sont fréquemment observés au sein du parenchyme tumoral. Il s’agit alors de zones hyperéchogènes associées à un artefact de cône d’ombre franc [11].

Sont aussi régulièrement constatés une dissémination métastatique aux nœuds lymphatiques de drainage, ainsi qu’un envahissement œsophagien ou vasculaire (en particulier de l’artère carotide commune et/ou des veines jugulaires) [6, 8].

Conclusion

L’échographie ne remplace pas la scintigraphie thyroïdienne, qui reste le gold standard pour l’exploration de la fonction thyroïdienne. Cependant, elle apporte des renseignements complémentaires indispensables lors de l’exploration d’une masse cervicale, permettant la réalisation de cytoponctions échoguidées ainsi qu’un bilan d’extension locorégionale sur un animal vigile, en particulier avant une scintigraphie et une chirurgie d’exérèse.

D’autres investigations complémentaires d’imagerie médicale permettent d’explorer l’anatomie thyroïdienne. La tomodensitométrie et l’imagerie par résonance magnétique des thyroïdes ont récemment été décrites [8]. Ces examens d’imagerie en coupe associés aux autres procédés d’imagerie précédemment cités précisent le bilan locorégional et à distance, en particulier lors de l’évolution d’un carcinome thyroïdien. 

Références

  • 1. Barberet V, Baeumlin Y, Taeymans O et coll. Pre- and post-treatment ultrasonography of the thyroid gland in hyperthyroid cats. Vet. Radiol. Ultrasound. 2010;51 (3):324-330.
  • 2. Brömel C, Pollard RE, Kass PH et coll. Ultrasonographic evaluation of the thyroid gland in healthy, hypothyroid and euthyroid golden retrievers with nonthyroidal illness. J. Vet. Intern. Med. 2005;19:499-506.
  • 3. Phillips DE, Radlinsky mg, Fischer JR et coll. Cystic thyroid and parathyroid lesions in cats. J. Am. Anim. Hosp. Assoc. 2003;39:349-354.
  • 4. Reese S, Breyer U, Deeg C et coll. Thyroid sonography as an effective tool to discriminate between euthyroid sick and hypothyroid dogs. J. Vet. Intern. Med. 2005;19:491-498.
  • 5. Taeymans O, Duchateau L, Schreurs E et coll. Intra- and inter-observer variability of ultrasonographic measurements of the thyroid gland in healthy Beagles. Vet. Radiol. Ultrasound. 2005;46 (2):139-142.
  • 6. Taeymans O, Peremans K, Saunders JH. Thyroid imaging in the dog: Current status and future directions. J. Vet. Intern. Med. 2007;21:673-684.
  • 7. Taeymans O, Daminet S, Duchateau L et coll. Pre- and post-treatment ultrasonography in hypothyroid dogs. Vet. Radiol. Ultrasound. 2007;48 (3):262-269.
  • 8. Taeymans O, Penninck DG, Peters RM. Comparison between clinical, ultrasound, CT, MRI and pathology findings in dogs presented for suspected thyroid carcinoma. Vet. Radiol. Ultrasound. 2013;54 (1):61-70.
  • 9. Wisner ER, Mattoon JS, Nyland TG et coll. Normal ultrasonographic anatomy of the canine neck. Vet. Radiol. Ultrasound. 1991;32 (4):185-190.
  • 10. Wisner ER, Théon AP, Nyland TG et coll. Ultrasonographic examination of the thyroid gland of hyperthyroid cats: Comparison to 99m TcO4-scintigraphy. Vet. Radiol. Ultrasound. 1994;35 (1):53-58.
  • 11. Wisner ER, Nyland TG, Mattoon JS. Ultrasonographic examination of cervical masses in the dog and cat. Vet. Radiol. Ultrasound. 1994;35 (4):310-315.
  • 12. Wisner ER, Mattoon JS, Nyland TG. Neck. In: Nyland TG, Mattoon JS, eds. Small animal diagnostic ultrasound. 2nd ed. Ed. WB Saunders, Philadelphia. 2002:285-304.
  • 13. Zwingenberger A, Wisner E. Neck. In: Penninck D, D’Anjou MA, eds. Atlas of small animal ultrasonography. 1st ed. Ed. Blackwell Plublishing, Iowa. 2008:91-117.

Conflit d’intérêts

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