L’efficacité alimentaire : une donnée essentielle dans la gestion de l’alimentation des troupeaux laitiers - Le Point Vétérinaire expert rural n° 348 du 01/09/2014
Le Point Vétérinaire expert rural n° 348 du 01/09/2014

ALIMENTATION DES BOVINS LAITIERS

Article de synthèse

Auteur(s) : Daniele Castellani

Fonctions : Membre de la Commission vache
laitière SNGTV
Cabinet vétérinaire
39, Grande-Rue
69590 Saint-Symphorien-sur-Coise

La quantité de lait produite par vache et par kilogramme de matière sèche ingérée dépend de nombreux facteurs liés à la composition, à la valorisation de la ration et à la conduite du troupeau.

Actuellement, la zootechnie laitière française évolue profondément (arrêts des quotas en 2015, production qui ne sera plus limitée, augmentation de la taille des troupeaux). Les éleveurs ont un réel besoin d’optimiser les performances de santé et de production afin de garantir la rentabilité économique de leur exploitation et de faire face à l’envolée des prix des entrants et à la variabilité du prix du lait [5].

L’efficacité alimentaire est un paramètre qui définit les performances de nutrition d’un troupeau laitier à partir de la production obtenue. Cet article expose les principales interactions entre le management des animaux et leur aptitude à transformer les aliments ingérés en lait.

EFFICACITÉ ALIMENTAIRE : DÉFINITION ET OBJECTIFS

1. Définition de l’efficacité alimentaire, ou indice de conversion

L’objectif d’une conduite nutritionnelle raisonnée est d’optimiser l’ingestion journalière des animaux [17]. L’efficacité alimentaire est un indicateur récent, d’ordre technico-économique, permettant de quantifier la capacité d’un troupeau de vaches laitières à valoriser la ration proposée. Encore appelée DE (dairy efficiency), ou indice de conversion, elle se définit comme le nombre de kilogrammes de lait produits grâce à l’ingestion d’un kilogramme de matière sèche (MS). Lorsque le lait standard à 3,5 % de matière grasse (MG) est utilisé pour le calcul de l’efficacité alimentaire, cette dernière se nomme FE (feed efficiency) [16]. Le lait standard correspond à la quantité de lait corrigée selon la matière protéique et la matière grasse présentes, afin d’obtenir un produit uniformisé et comparable entre élevages. En France, deux taux de MG standards sont utilisés : 38 et 40 g/l, avec un taux protéique de 32 g/l.

Ce paramètre, employé couramment aux États-Unis et dans d’autres pays où des suivis réguliers de troupeaux en alimentation sont effectués, permet de maîtriser objectivement la gestion de la table d’alimentation [12].

L’optimum serait d’approcher une valeur moyenne de 1,5 kg de lait standard à 3,5 % de matière grasse (normes américaines) (tableau 1) [11, 13]. Cette valeur permettrait, en effet, de contenir les coûts de production et d’améliorer ainsi l’IOFC (income over feed costs, résultat économique d’exploitation au net des coûts d’alimentation) (tableau 2 et figure 1) [1, 17].

Toutefois, la norme 1,4-1,5 est issue d’études effectuées presque exclusivement dans des troupeaux de prim’holsteins, où la variabilité saisonnière de la qualité de la ration est presque inexistante (absence des aléas du pâturage), avec des vaches logées 24 heures sur 24 en bâtiment et stimulées sans cesse afin d’augmenter l’ingestion et la lactation (trois traites par jour, utilisation d’hormones, etc.).

Ainsi, un seuil légèrement inférieur, proche de 1,4 kg de lait standard à 4 % de MG produit à la suite de l’ingestion de 1 kg de MS, semble plus adapté à la typologie de l’élevage français. En effet, les troupeaux sont composés de différentes races avec une génétique laitière moindre et le pâturage a une place plus importante dans le plan de rationnement, avec ses conséquences sur les besoins d’entretien et sur la constance des apports nutritifs [3, 9].

2. Efficacité alimentaire et objectifs de production

L’efficacité alimentaire est plus élevée dans les troupeaux les plus productifs, par une meilleure valorisation de la ration distribuée (figure 2) [10, 13, 16]. En effet, une production de lait plus importante amortit plus facilement les apports nutritionnels (coût) journaliers fixes pour l’entretien des animaux en énergie et, dans une moindre mesure, en protéines (au minimum 8 à 9 kg de MS d’une ration type apportant 0,9 unité fourragère lait [UFL]/kg MS et 14 % de matières azotées totales [MAT]/kg MS) [10, 16, 17, 26]. Même si la consommation globale annuelle en concentrés est plus grande dans les troupeaux davantage productifs, le ratio entre la production laitière et la consommation est plus favorable (figure 3 et tableau 3).

Valoriser la ration

Ainsi, l’idéal serait de composer des rations permettant d’exprimer au mieux le potentiel du troupeau afin d’améliorer la marge économique brute hors coûts d’alimentation (IOFC), sans rechercher l’hyperproductivisme à outrance et en respectant la typologie de l’exploitation : ses objectifs, dont celui d’une autonomie fourragère maximale [1, 17, 26].

L’efficacité alimentaire étant le rapport entre le résultat (production de lait) et les moyens déployés (choix des quantités et de la qualité des aliments qui composent la ration), deux stratégies sont possibles pour augmenter sa valeur :

— améliorer la production laitière obtenue à la suite de l’ingestion d’une quantité de ration donnée ;

— maintenir la production laitière tout en diminuant la quantité de ration ingérée.

En écartant la possibilité de commettre une erreur dans la composition de la ration, il semble plus aisé d’intervenir en améliorant ses paramètres d’ingestion et de valorisation pour augmenter la quantité de lait produit, plutôt que de réduire sa consommation [17]. Une valorisation efficace prime en effet sur la quantité car, au fur et à mesure que la quantité de MS ingérée augmente, sa digestibilité diminue (problématique chez les vaches hautes productrices avec une capacité d’ingestion accrue).

Optimiser les fourrages

Optimiser les fourrages est un impératif zootechnique en élevage laitier. En effet, deux variables entrent en jeu dans l’efficacité alimentaire : la production laitière liée à l’ingestion des concentrés et celle liée à l’ingestion des fourrages. La quantité de lait produit due à la consommation de concentrés est immuable, entre 0,5 et 2 kg de lait selon la quantité consommée (phénomène de substitution), et seule la deuxième variable peut être modulée en fonction des stratégies de rationnement et des aliments choisis (photo 1).

MAÎTRISE DE L’EFFICACITÉ ALIMENTAIRE

Il est possible d’agir sur différents leviers pour améliorer la valorisation des fourrages qui composent la ration, soit l’efficacité alimentaire.

1. Choisir les aliments

Il convient de choisir les aliments capables d’équilibrer le contenu fourrager de la ration de base (semi-complète ou complète) en fonction de leur nature chimique et de leur cinétique digestive, pour garantir des processus de fermentation de qualité dans le rumen et, par conséquent, un apport maximal de nutriments à la mamelle (objectif ultime de l’efficacité alimentaire).

Seule la présence harmonieuse d’aliments de vitesses de digestion différentes pour l’énergie et pour les protéines (rapide, moyenne et lente) peut assurer une utilisation optimale des principes nutritifs par la flore ruminale [18, 22].

En dehors des premiers mois de lactation, où l’expression du potentiel génétique laitier des animaux est étroitement liée aux apports en matière azotée, les productions quantitative et qualitative de lait dépendent d’un bon équilibre entre les apports en glucides cytoplasmiques et pariétaux. Les fourrages qui apportent des glucides garantissant en grande partie des courbes fermentatives à vitesse moyenne sont à privilégier, suivis de ceux à vitesses lente et rapide. Dans ces conditions, un turn-over du contenu ruminal assez rapide est maintenu et une ingestion optimale est assurée en évitant l’accumulation d’acides gras volatils responsables de la diminution du pH [24].

La subacidose du rumen est la principale maladie métabolique responsable tout au long de la lactation de la diminution de l’efficacité alimentaire (baisse de l’appétit, et du bilan énergétique et protéique du rumen à la suite de contre-performances de la flore cellulolytique, dégradation de l’état général) [3, 4, 11, 20]. À l’inverse, la cétose subclinique affecte les animaux principalement dans le péripartum [21]. Par conséquent, il convient de prendre en considération la dynamique digestive des différents ingrédients pour établir la ration du troupeau en lactation, avant de s’intéresser à leur quantité. Il n’est, en effet, pas nécessaire de discuter des quantités fourragères journalières à apporter au kilogramme près lorsqu’il est impossible de les quantifier (et cela est la réalité quotidienne de nombreux élevages : vaches à la pâture ou alimentées avec une désileuse qui ne pèse pas, bâtiment sous-dimensionné, etc.).

2. Espaces à l’auge et de repos suffisants

La présence d’un espace suffisant à l’auge et sur l’aire de repos pour tous les animaux, et le maintien d’un bon confort du lieu de vie favorisent la consommation quotidienne d’aliments et leur digestion (photo 2) [3, 8].

Accès à l’alimentation

Une vache dominante passe davantage de temps au cornadis, mange pendant plus longtemps et ingère potentiellement plus de MS dans la journée [8]. En situation de compétition pour l’accès à la ration, elle a tendance à repousser et à éloigner les dominées, les empêchant de se nourrir à volonté [15]. Lors des repas, la vache dominante peut accepter près d’elle un animal de même statut hiérarchique ou requérir un espace vide. Le rythme alimentaire des individus dominés en est modifié : diminution de la durée des repas, augmentation de leur fréquence et de la vitesse d’ingestion. Ces perturbations peuvent aggraver une situation à risque vis-à-vis de la subacidose (libération rapide d’acides gras volatils, diminution du pH), engendrer des épisodes de stress répétés et allonger la station debout, avec ses répercussions néfastes sur la fourbure. Ces troubles du comportement aboutissent à une diminution de l’ingestion des animaux et, par conséquent, de l’indice de conversion.

Un bâtiment bien dimensionné ou surdimensionné avec un taux d’occupation de 80 à 90 % (100 places pour 80 à 90 vaches) est susceptible d’améliorer l’ingestion des vaches taries et en début de lactation, catégories d’animaux dont l’appétit est moindre [19].

En raison des prix de construction (entre 5 000 et 8 000 € par place, y compris la nurserie et la salle de traite), il est difficile de mettre ce conseil en avant. Il est peut-être plus pertinent, principalement dans les élevages avec zéro pâturage, de préconiser la présence d’une aire d’exercice, couverte ou non, avec un sol en dur, qui communique avec le bâtiment, permettant aux animaux d’interagir librement et de maintenir les relations sociales et hiérarchiques loin de la zone d’accès à la ration. Il est ainsi possible d’augmenter artificiellement, plusieurs heures par jour et à moindre coût, le nombre de places à la table d’alimentation et aux abreuvoirs pour les animaux non dominants, les primipares et les bovins qui présentent un trouble de locomotion momentané (ce qui facilite également l’expression des chaleurs).

De même, une largeur et une qualité de sol du couloir d’alimentation adéquates (5 m de profondeur, béton non glissant, bords et angles peu traumatisants) fluidifient tout mouvement d’animaux dans cette zone charnière du bâtiment, améliorant la prise alimentaire.

Celle-ci est également favorisée en stimulant l’appétit grâce à une distribution de la ration deux fois par jour et en rapprochant les aliments de l’auge plusieurs fois dans la journée, principalement en période de fortes chaleurs ou dans toute autre situation responsable d’une baisse de la consommation (période de post-partum dans des troupeaux avec des vêlages groupés, transitions alimentaires brutales, risque de subacidose importante, flambée de boiteries, etc.) [8].

Zone de repos

La qualité du couchage au sein de la stabulation influence la durée de la digestion (la vache rumine principalement lorsqu’elle est couchée, entre 8 et 12 h/j), soit la quantité de nutriments dont la mamelle dispose pour la synthèse du lait.

En effet, il existe une corrélation étroite et directe entre la production laitière et le temps que la vache passe couchée : pour améliorer l’efficacité alimentaire, donc les performances de production, il convient de garantir une zone de couchage confortable, facilement accessible, en harmonie avec le nombre et la taille des animaux, pour leur permettre de maximiser le temps octroyé au métabolisme digestif.

3. Préserver l’appétence de la ration

Un tri méticuleux des aliments mal conservés et le maintien d’une teneur de MS optimale (35 à 40 % MS) sont des procédures à préconiser afin de préserver l’appétence de la ration [3].

Il convient également d’ajouter de l’eau à la ration mélangée (1 à 2 l par animal) lors de sa préparation si les aliments qui la composent sont trop secs (ration riche en ensilage de maïs, plus de 13 kg de MS, lorsque celui-ci a un taux d’humidité inférieur à 65 %, par exemple) et de fractionner sa distribution si les fourrages utilisés ou le climat favorisent une reprise excessive des fermentations et le réchauffement à l’auge.

4. Vérifier le respect des apports

Le respect des apports en énergie, en protéines et fibres doit être vérifié régulièrement pour prévenir toute détérioration des processus digestifs. Le contenu azoté de la ration est un excellent indicateur de la qualité et de la vitesse de la digestion dans le rumen par son implication dans le développement de la flore cellulolytique (50 à 60 % de la MS microbienne est composée de MAT) [9]. Le niveau de la MAT de la ration est ainsi un élément qui permet d’optimiser l’ingestion en respectant les préconisations : environ 16 à 17 % de MAT par kilogramme de MS de ration en début de lactation, 13 à 14 % de MAT en milieu et en fin de lactation. La maîtrise conjointe de l’utilisation d’aliments riches en glucides solubles et en amidon (zone de tolérance entre 20 à 30 % par kilogramme de MS, avec un optimum de 25 %) favorise l’activité de la flore cellulolytique (volume de la masse microbienne, stabilité du pH) améliorant la valorisation des fourrages [9].

La quantité de fibres insolubles dans les détergents neutres (NDF) (zone de tolérance entre 35 à 50 % par kilogramme de MS, pour un optimum de 35 à 40 %) est un autre paramètre à surveiller lors du calcul de la ration. Des quantités excessives peuvent être responsables de la diminution de la vitesse de digestion, de l’ingestion et de la production, donc de l’efficacité alimentaire [4, 11, 16].

Par exemple, avec des apports de NDF proches de 35 %, le taux de digestion horaire de la MS ingérée est d’environ 10 %, ce qui correspond à une durée de digestion totale de 10 heures, qui est le temps passé par la vache à ruminer dans la journée. Au fur et à mesure que la quantité de NDF augmente, la vitesse des phénomènes digestifs diminue pour atteindre un seuil proche à 5 %. Ainsi environ 20 heures de rumination par jour sont nécessaires pour digérer la totalité de la MS ingérée (figure 4) [24].

Ainsi, le respect du taux de NDF d’une ration n’est pas synonyme d’une activité de rumination de qualité, mais de la concordance avec les besoins chimiques en cellulose, en hémicellulose et en lignine.

Pour assurer l’activité masticatoire, environ un tiers de NDF doit être apporté par des fourrages structurés capables de stimuler la mastication méricique garante du maintien d’un pH ruminal proche de la neutralité [23]. Cela est la meilleure défense naturelle que la vache possède pour contenir les dégâts liés à la subacidose.

5. Gérer les performances de reproduction

De bonnes performances de reproduction permettent au troupeau d’être composé, tout au long de l’année, principalement d’animaux qui se trouvent dans la première moitié de la lactation, donc dans la période physiologiquement la plus propice à la production laitière et à l’efficacité alimentaire [1, 16]. L’idéal serait de la maintenir au minimum 9 mois sur 12, sauf en cas de vêlages groupés, un mois moyen de lactation de 5 à 5,5, soit 150 à 165 jours en lactation (JEL) [4]. À cette période, le métabolisme hormonal est le plus favorable à la synthèse du lait et les besoins nutritifs pour la gestation sont minimes : la vache peut ainsi utiliser la plupart des nutriments pour la production (figure 5).

Si les paramètres de reproduction sont satisfaisants, la répartition entre animaux de rangs de lactation différents est correcte. Cela signifie qu’il existe au même moment dans le troupeau des vaches dont l’indice de conversion est potentiellement le meilleur (troisième lactation et plus) et d’autres (première et deuxième lactations) qui n’ont pas terminé leur développement (besoins de croissance) et dont la capacité d’ingestion est inférieure.

La gestion de l’alimentation est intimement liée à celle de la reproduction, et tout effort mis en place pour faire croître l’indice de conversion est peu fructueux en cas de défaillance de la fertilité et de la fécondité d’un troupeau.

Souvent, ces contre-performances reproductives ont pour origine, notamment, une gestion alimentaire défaillante pendant le tarissement et juste après le vêlage, engendrant des désordres métaboliques cliniquement repérables par des problèmes d’involution utérine, une sous-production, une reprise retardée de la cyclicité ovarienne et une perte d’état corporel importante (égale ou supérieure à 1 point de note d’état corporel [NEC]), signe d’un déficit énergétique marqué [14, 21].

Dans ces conditions, mises à part les difficultés de reproduction, les animaux doivent aussi dépenser plus d’énergie pour retrouver leur état optimal et l’efficacité alimentaire diminue. Reconstituer les réserves (la graisse) coûte en effet très cher en énergie : environ 4,5 UFL/kg vif. Par exemple, pour une vache ayant perdu plus de 60 kg de poids vif (1 point de NEC) et hypofertile (intervalle vêlage-insémination fécondante supérieur à 120 jours), il convient d’utiliser environ 50 à 60 kg de MS (ration type apportant 0,9 UFL/kg MS et 14 % MAT/kg MS) par mois pendant les 7 mois qui précèdent le tarissement pour reconstituer les réserves, soit un manque à produire de 250 à 300 kg de lait au minimum sur la période par rapport à une congénère dont la NEC varie conformément aux préconisations (0,5 point).

Le suivi de l’état des animaux et la maîtrise de sa variation pendant la lactation sont donc essentiels dans le management de la nutrition. Un troupeau avec un état corporel moyen excessif (supérieur à 2,75 à 3) peut être considéré comme un signal d’efficacité alimentaire moindre car les besoins d’entretien des animaux sont plus importants (tableaux 4 et 5) [11, 16, 25].

6. Génétique, stress et additifs

La génétique, le stress et l’utilisation des additifs alimentaires peuvent aussi influencer l’efficacité alimentaire, même si leur importance semble plus limitée [4].

→ La génétique intervient directement sur le potentiel de production laitière, la taille, le poids et la conformation des animaux, plutôt que sur l’indice de conversion proprement dit ou sur la capacité d’ingestion. Toutefois, une vache génétiquement prédisposée à produire davantage a plus de chances d’avoir indirectement un meilleur indice de conversion.

→ Tout type de stress peut être à l’origine d’une diminution des performances, y compris celles de production. Le stress thermique, lié aux fortes chaleurs, est susceptible d’avoir une incidence négative sur la valorisation de la ration du moment où l’index de température et d’humidité (ITH) dépasse la valeur de 72 [2]. Au-dessus de ce seuil, il est possible de constater une baisse de production de 0,2 à 0,9 kg de lait par animal, principalement chez les vaches multipares fortes productrices, pour lesquelles la production de chaleur est plus importante [21].

La baisse de l’ingestion, la perte d’efficacité digestive, la diminution de l’irrigation sanguine de la mamelle et la chute du pouvoir tampon de la salive à la suite de la diminution de la présence de bicarbonate peuvent expliquer en grande partie la détérioration de l’efficacité alimentaire. Parmi les mesures de contrôle, excepté celles précédemment indiquées (fractionner les apports, ajouter de l’eau à la ration, favoriser l’accès aux aliments et à l’eau), toute action visant une amélioration de la ventilation du bâtiment et une prise en charge spécifique de la composition de la ration est bénéfique [6]. Ainsi, une diminution des aliments riches en glucides rapidement fermentescibles conjointement à un apport supplémentaire en protéines et en bicarbonate de sodium peut contenir la perte de production en améliorant le métabolisme du rumen.

→ L’introduction d’additifs comme des levures est susceptible de favoriser l’activité de la flore cellulolytique, de réduire les risques de subacidose et de participer au maintien de l’efficacité alimentaire. Cependant, les résultats varient sensiblement selon des publications [4, 21].

L’apport de bicarbonate (1 % de la MS ingérée) réduit significativement les principaux symptômes de subacidose, et cela de manière d’autant plus importante que de réels facteurs de risque sont présents en élevage [21]. Toutefois, l’ingestion de MS, la production de lait, le rapport acétate/propionate, la valeur de la matière grasse du lait et l’efficacité alimentaire ne varient pas positivement à la suite de l’introduction systématique de bicarbonate dans la ration si la situation de départ est maîtrisée.

De même, afin de contenir les risques de subcétose, l’apport de monensin 3 semaines avant la fin du tarissement n’a d’efficacité qu’en situation de risque.

Conclusion

Depuis de nombreuses années, les performances des élevages industriels sont gérées, notamment, grâce au suivi des paramètres tels que les indices de conversion, de consommation et de croissance journalier, l’écart de la croissance par rapport à celle espérée, etc. Cela permet, en temps réel, à partir de ces données clés, de vérifier la concordance entre les objectifs et les résultats techniques obtenus afin d’intervenir rapidement en cas de d’anomalie.

Dans ce contexte, il semble qu’une approche technico-économique méthodique de la nutrition va devenir un outil d’accompagnement indispensable des grands troupeaux laitiers dans les années à venir [7].

L’efficacité alimentaire, comme le prix de la ration aux 1 000 l, la consommation de concentrés, l’IOFC et certains paramètres de reproduction, est un facteur de gestion qui doit être intégré au suivi de troupeau ou à l’audit d’élevage. En effet, ce “simple chiffre” objectivement calculé (quantifier avec précision les refus et la teneur en MS des fourrages) résume relativement bien la réponse des animaux aux stratégies de management adoptées par l’exploitation. Son suivi régulier, à partir de l’analyse multifactorielle de différents éléments capables de l’influencer, est une aide précieuse dans la gestion zootechnique de l’alimentation de la vache laitière.

Références

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Conflit d’intérêts

Aucun.

Points forts

→ L’optimum de l’efficacité alimentaire est de 1,4 kg de lait standard à 4 % de matière grasse en France.

→ L’efficacité alimentaire est meilleure dans les troupeaux les plus productifs.

→ La quantité de lait produite est liée à l’ingestion des fourrages : leur valorisation est essentielle et ceux qui fournissent des glucides à vitesse de fermentation moyenne sont à privilégier.

→ La qualité de l’accès à l’auge et à l’eau, du confort pour la rumination, de l’appétence et de la fibrosité de la ration, ainsi que le respect des quantités doivent être surveillés par le praticien.

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