LASER THÉRAPEUTIQUE
Dossier
Auteur(s) : Thierry Poitte
Fonctions : Clinique vétérinaire, 8, rue des Culquoilès,
La Croix-Michaud, 17630 La Flotte-en-Ré
Clinique vétérinaire,
9, avenue du Général-de-Gaulle,
17410 Saint-Martin-de-Ré
Les propriétés thérapeutiques du laser relèvent de ses actions antalgique, anti-inflammatoire et cicatrisante.
La recherche et la compréhension des modes d’action de la thérapie laser ont fait l’objet de nombreuses études depuis la découverte de la photobiomodulation par Mester, en 1967, jusqu’à nos jours. À la suite des progrès technologiques dans la fabrication des diodes laser et de l’engouement clinique de nombreux thérapeutes, les scientifiques multiplient les publications susceptibles d’éclairer les modes d’action cellulaires de l’irradiance laser [9].
La douleur est un processus complexe de construction et d’interprétation d’une information nociceptive. Elle emprunte un câblage électrique de la périphérie vers le cortex, soumis à des influences inhibitrices descendantes et à des systèmes amplificateurs d’hypersensibilisation. L’action analgésique d’un médicament ou d’une méthode de physiothérapie vise à renforcer les contrôles inhibiteurs descendants et/ou à atténuer les influences excitatrices, afin de retrouver un état d’équilibre, témoin d’une absence de douleur (photo 1).
Les quatre acteurs de cette séquence douloureuse sont les neuromédiateurs se fixant sur les récepteurs des canaux ioniques et les cellules gliales qui assurent également le rôle de soutien structurel. Ces quatre acteurs sont des cibles thérapeutiques privilégiées.
> La lumière laser relève les potentiels d’action des terminaisons nerveuses libres endommagées, ce qui rend leur dépolarisation plus difficile. Cette action concerne les fibres de petit calibre peu myélinisées, à conduction rapide, de type Aδ, et les fibres de faible calibre amyélinisées, à conduction lente, de type C.
Ce blocage de dépolarisation gêne l’ouverture des canaux sodiques voltage-dépendants et limite la conductibilité de l’influx douloureux [3, 6].
> La lumière laser diminue la libération synaptique de la substance P, principal neuromédiateur excitateur impliqué dans la physiopathologie de la douleur. Elle réduit la formation de bradykinine, issue des globulines plasmatiques, et puissant agent algogène de la “soupe inflammatoire”, sensibilisatrice des nocicepteurs (figure 1) [7, 21].
> L’activation préférentielle des fibres tactiles de gros diamètre Aα et Aβ par l’énergie absorbée fait intervenir le mécanisme du gate control. Développée par Melzack et Wall, cette théorie du portillon repose sur le principe de convergence des neurones non spécifiques, qui reçoivent des informations nociceptives et non nociceptives d’un même territoire cutané. Le recrutement dans la corne postérieure de la moelle épinière (substance gélatineuse de Rolando) des interneurones inhibiteurs ferme la “porte” au message nociceptif. Ce concept est le support des méthodes de contre-stimulation (tord-nez du cheval), de stimulation électrique à haute fréquence et faible intensité (Transcutaneous Electrical Nerve Stimulation, TENS) et du laser thérapeutique, procurant ainsi une analgésie localisée et de courte durée particulièrement utile lors de douleurs aiguës (figure 2).
> Les augmentations significatives des taux d’endorphines et de sérotonine dans le liquide céphalorachidien après illumination au laser traduisent l’activation des contrôles inhibiteurs diffus nociceptifs (CIDN) découverts par notre confrère Le Bars [2, 8, 12].
> Situés dans le tronc cérébral et envoyant des efférences sérotoninergiques, noradrénergiques et endorphiniques vers les différents segments médullaires, les CIDN procurent une analgésie généralisée plus durable, particulièrement utile lors de douleurs diffuses chroniques. La réversibilité des effets antalgiques du rayonnement laser par l’injection de naloxone confirme l’implication des endorphines [13].
L’analgésie procurée par le laser provient également de la stimulation de la production d’adénosine triphosphate (ATP) [16]. En effet, si la contraction musculaire exige une grande quantité d’énergie, le relâchement musculaire est lui aussi consommateur d’ATP. Sans cet apport, la contracture persiste, l’ischémie induite accumule les déchets acides et aggrave la douleur.
La vasodilatation induite par le rayonnement laser s’associe donc à la fourniture d’énergie pour réduire les douleurs musculaires.
Ce raisonnement de carence énergétique s’applique aussi aux zones focalisées hautement irritables d’hypertonicité musculaire, dénommées points gâchettes ou trigger points. Situés profondément au milieu du muscle, au sein d’une bande très tendue de fibres musculaires, ces points sont susceptibles de déclencher sous leur pression des douleurs vives à distance. Un grand nombre de ces trigger points correspond à des points moteurs et/ou à des points d’acupuncture réactionnels.
Leur stimulation (et leur relâchement) est dorénavant possible par les puissances et longueurs d’onde des nouveaux lasers thérapeutiques, ainsi que par des protocoles spécifiques d’acupuncture laser(1).
Les canaux ioniques qui tapissent les membranes des fibres nociceptives afférentes assurent spécifiquement la conversion des stimuli nociceptifs (chaleur, froid, pression, etc.) en réponses électriques. Cependant, cette transduction est sous l’influence de facteurs acides locaux et explique le lien fort unissant douleur et inflammation. L’action analgésique procède donc aussi de l’action anti-inflammatoire suivante.
L’action anti-inflammatoire est liée à la réduction des taux de prostaglandine PGE2 et d’interleukine Il-1, impliquées notamment dans la pathogénie de l’arthrose, et à la stimulation de l’activité phagocytaire des leucocytes et des macrophages [18].
L’amélioration de la microcirculation, la dilatation des vaisseaux lymphatiques et donc l’activation du drainage lymphatique contribuent à la résolution de l’œdème.
Cela permet une meilleure élimination des déchets et des résidus acides, qui diminue les conditions locales d’inflammation (figure 3).
Enfin, les augmentations du nombre de lymphocytes T et du taux d’immunoglobulines ont été révélées dans plusieurs études [1, 10, 11].
L’action cicatrisante et régénératrice du laser s’explique par la production accrue d’ATP qui favorise la croissance et la réparation cellulaires.
Elle se traduit au niveau des différentes étapes du processus de cicatrisation :
– le rayonnement laser stimule les activités phagocytaires et fibrinoclastiques des macrophages, des leucocytes et des lymphocytes. Il contribue ainsi à la détoxification du site et fait le lit de la cicatrisation ;
– la prolifération et la maturation des cellules épithéliales participent à la phase de réparation tissulaire (épithélialisation) ;
– la prolifération des fibroblastes associée à une augmentation de leur activité accroît la sécrétion de collagène et la synthèse de matrice extracellulaire. L’angiogenèse locale accélèrela formation du tissu de granulation ;
– la consolidation osseuse est renforcée par l’action stimulante des infrarouges sur la viabilité ostéocytaire et la multiplication des ostéoblastes [4, 5, 17, 20].
L’exposition des plaies infectées à une longueur d’onde de 660 nm se traduit par des effets bactéricides et virulicides [15].
La thérapie laser pourrait favoriser une augmentation du métabolisme des neurones et une meilleure capacité à produire la myéline. Des essais in vivo ont démontré une régénération et une maturation de fibres nerveuses périphériques qui ont subi un traumatisme [14].
Les propriétés antalgiques, anti-inflammatoires et régénératrices de la thérapie laser justifient son indication dans les maladies inflammatoires et douloureuses suivantes : arthrose, tendinites, complexe gingivostomatite félin, retards de cicatrisation, certaines affections dermatologiques.
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