PARASITOSES SUBTROPICALES EN ÉLEVAGE DE RUMINANTS
Avis d’experts
Auteur(s) : Fred H.M. Borgsteede
Fonctions : Animal Health Service, Deventer, Pays-Bas
Central Veterinary Institute Lelystad, Pays-Bas
(actuellement retraité)
Le cas de toxocarose bovine récemment décrit aux Pays-Bas a été clos après un traitement assorti d’un abattage total.
Nous avons décrit un seul cas pour cette parasitose dans notre pays, dont les conditions climatiques sont assez proches de celles du nord de la France [1].
D’après une synthèse proposée par Roberts en 1993, T. vitulorum n’est pas endémique au-dessus du 50e degré de latitude dans l’hémisphère Nord [2]. Les cas décrits dans cette partie de la planète sont toujours importés de régions situées en dessous de cette latitude.
Pourtant, ce parasite me semble capable de survivre dans les régions du Nord. S’il est au stade larvaire dans l’organisme d’une vache laitière, la température extérieure importe peu. Pour sa phase de développement extérieur, elle reste possible, même si le froid engendre un plus long temps de développement, à la saison de pâture dans les pays du nord de l’Europe (figure 1).
Nous n’avons pas réellement étudié les caractéristiques épidémiologiques du parasite dans le cas observé récemment aux Pays-Bas [1]. Celui-ci a été identifié à partir de la description clinique fournie par le praticien : diarrhées avec de gros vers sur les marges de l’anus (photo 1). Par la suite, l’examen fécal a confirmé la présence d’un grand nombre d’œufs de T. vitulorum (photo 2).
Des arbres généalogiques ont pu être établis. Ils nous ont éclairés sur l’origine de l’infection. Les animaux infectés du troupeau sont nés dans l’exploitation, mais l’éleveur a commencé l’élevage de vaches piémontaises en 1997. Les premières vaches avaient été importées du sud de la France.
L’infection s’est donc initialement établie dans l’élevage néerlandais en l’absence de signes cliniques évidents, et ce jusqu’en 2008.
Pour le traitement, nous recommandons tout simplement un benzimidazole, car c’est le plus efficace vis-à-vis des ascaridés dont fait partie T. vitulorum. Mais le cycle de vie de ce parasiteest compliqué, comme celui des autres espèces du même genre parasitaire (par exemple T. canis chez le chien et T. cati chez le chat). Lorsqu’une petite génisse s’infecte, elle devient un potentiel réservoir larvaire dans le troupeau. Plus tard, lorsqu’elle va produire du lait, elle pourra transmettre des larves à son veau nouveau-né. Le risque est plus élevé à la première lactation. Aux suivantes, l’infection reste possible mais la probabilité est moindre. Il n’existe aucune manifestation clinique du portage parasitaire chez le bovin adulte. La coproscopie est négative. Le traitement de ces vaches requiert d’importantes doses d’anthelmintiques dans des catégories de poids élevé. Il est permis de se demander s’il est vraiment efficace vis-à-vis des larves.
Chez le veau, la situation est différente. Après ingestion d’un lait contenant des larves de T. vitulorum, une phase de développement est nécessaire pour que le parasite atteigne sa maturité et que les femelles puissent produire des œufs. Si un traitement est administré au veau susceptible d’être infecté 3 semaines après la naissance, cela peut prévenir l’excrétion fécale. Mais comme le veau boit du lait en continu pendant plusieurs mois, le traitement est répété toutes les 3 semaines jusqu’au sevrage (et même une dernière fois 3 semaines plus tard).
Une décision de réformer toutes les vaches, parce qu’elles étaient considérées (potentiellement) comme réservoirs, a été prise dans le cas récemment décrit aux Pays-Bas. À notre sens, cette décision n’était pas nécessaire. C’est un choix de l’éleveur, pas un conseil de notre part. Je suis certain que la pâture était encore positive en ce qui concerne la présence d’œufs après le retrait des animaux. Aucun suivi coproscopique n’a été entrepris par la suite. Nous avions conseillé à l’éleveur de ne pas faire pâturer sur cette parcelle les bovins introduits par la suite, car ils pouvaient être exposés à l’infection pendant une année.
Si un praticien découvre ce type d’infection dans un élevage, il devrait soigneusement rechercher les signes cliniques comme la diarrhée. Un diagnostic différentiel sur les fèces doit être mis en œuvre (il convient de déterminer s’il s’agit d’une diarrhée virale, bactérienne, coccidienne, à Toxocara, etc.). Si la diarrhée est endiguée, il existe peu de risque d’observer une dégradation des performances de croissance. Il est simplement recommandé de ne pas transférer les animaux infectés dans d’autres fermes. Pour les vaches en lactation, l’impact potentiel et les précautions à envisager sont plus difficiles à établir. L’historique dans la ferme d’origine est à prendre en considération.
L’idéal serait de disposer d’un test sérologique susceptible de prouver l’infection chez une vache.
Chez les taureaux, l’infection est, comme il se doit d’après le cycle de vie, une impasse épidémiologique.
Pendant la dernière décennie, nous avons enregistré un cas d’infection à Parafilaria bovicola chez un bovin importé. Après réforme de ce dernier, aucun autre cas n’a été observé aux alentours. Echinococcus granulosus est un autre des parasites nouvellement introduits sur notre territoire. Il est arrivé via un bovin importé de Roumanie.
La vigilance est de mise face à l’importation de bovins depuis des pays membres de l’Union européenne comme la Roumanie ou la Bulgarie. Le risque est d’importer de nouvelles maladies ou des maladies considérées comme éradiquées par le passé (figure 2).
Ainsi, ce cas parasitaire atypique illustre les risques de dissémination (parasitaire ou non) en lien avec les mouvements d’animaux à travers l’Europe. Des techniques diagnostiques permettant d’établir la non-infection à l’import restent à développer pour certains agents pathogènes notamment parasitaires.
→ En élevage infecté, il convient de traiter les veaux avec des benzimidazoles, toutes les 3 semaines jusque après le sevrage.
→ Il serait intéressant de disposer d’un test sérologique susceptible de prouver la présence de l’infection par Toxocara vitulorum chez une vache.
→ Le taureau est une impasse épidémiologique.
– Borgsteede FHM, Holzhauer M, Herder FL et coll. Toxocara vitulorum in suckling calves in the Netherlands. Res. Vet. Sci. 2012 ; 92 : 254-256
– Roberts JA. Toxocara vitulorum in ruminants. Helminthological abstracts. 1993 ; 62 : 151-174.
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