Nouveau look et changement d’objectif pour la visite sanitaire bovine “version 3.0” - Le Point Vétérinaire expert rural n° 329 du 01/10/2012
Le Point Vétérinaire expert rural n° 329 du 01/10/2012

ANTIBIORÉSISTANCE

Réglementation

Auteur(s) : Éric Vandaële

Fonctions : Le Fougerais
44850 Saint-Mars-du-Désert

Anonymisée, la “version 3.0” de cette visite ne sert plus à cibler les élevages à contrôler. Son objectif : la réduction de 25 % des usages antibiotiques.

Atravers une note de service(1) publiée au Bulletin officiel cet été, le ministère de l’Agriculture modifie à la fois le fond, la forme et même l’objectif de la visite sanitaire bovine. Une sorte de “version 3.0” pour la visite 2012-2013, après la version 1.0 qui a démarré en 2005 pour les maladies réglementées et la version 2.0 de 2008 qui s’est élargie au pack hygiène (encadré 1). Le point le plus visible de la version 3.0 est la place accordée à l’antibiorésistance, puisque environ la moitié des questions posées portent directement ou indirectement sur cette thématique quasi absente jusque-là.

Une visite obligatoire qui devient anonyme

Le bouleversement de la version 3.0 va bien au-delà de l’élargissement annoncé dès la fin 2011 par la mesure n° 4 du Plan national de réduction des risques d’antibiorésistance vétérinaire. En effet, les services vétérinaires ne sont plus destinataires des comptes rendus de visite, sauf sous une forme anonymisée, à des fins statistiques. Cette visite ne peut donc plus servir à cibler les contrôles officiels (avec d’éventuelles sanctions), comme c’était pourtant l’objectif affiché des années passées.

Promotion des vaccins, réduction des antibiotiques

Une bonne moitié des 32 questions de type QCM (questions à choix multiple) posées lors de cette visite vise ainsi explicitement à alimenter une « discussion » entre l’éleveur et le vété-rinaire sur la problématique de l’antibiothérapie, à travers, entre autres, la promotion des vaccinations et des bonnes pratiques sanitaires (encadré 2 et encadré 3 complémentaire sur www.WK-Vet.fr). Les vétérinaires sanitaires ont ainsi la charge de mettre en œuvre une importante campagne de sensibilisation et d’information dans les élevages pour restreindre l’usage des antibiotiques (notamment par automédication), ainsi que celui des fluoroquinolones et des céphalosporines de 3e et 4e générations (C3G/C4G).

Seules les questions relatives à la pharmacie et à l’antibiothérapie sont présentées dans cet article.

Le suivi du décret prescription-délivrance

Sur la pharmacie, les questions 16 à 18 évaluent la réalité de la mise en œuvre du décret prescription-délivrance et du fameux « suivi sanitaire permanent » des élevages par un vétérinaire qui permet la prescription de comptoir « hors examen clinique ». Le dispositif bilan sanitaire d’élevage, protocole de soins, etc. est-il mis en place ? À quel rythme sont réalisées les visites de suivi entre deux bilans annuels ? Les programmes de vaccination et de prévention prévus au protocole de soins sont-ils appliqués ?

Pour le ministère de l’Agriculture, « le vétérinaire devrait sensibiliser l’éleveur à l’intérêt d’une démarche de prévention en l’invitant à comparer tous les coûts, directs (perte de revenus et de production) et indirects (le temps passé au traitement des malades), liés aux affections bactériennes, à ceux des actions préventives telles que la vaccination ou l’aménagement de locaux, des niches individuelles, l’achat d’un pèse-colostrum, etc. »

Les antibiotiques critiques ciblés en priorité

Sur l’antibiothérapie, les questions 21 à 26 portent sur un seul antibiotique choisi par le vétérinaire dans la pharmacie de l’élevage, en privilégiant un antibiotique critique (C3G/C4G ou fluoroquinolone), ou à défaut un antibiotique oral ou injectable plutôt qu’intramammaire. En expliquant son choix, le praticien « sensibilise l’éleveur aux antibiotiques critiques ». La question « vous arrive-t-il d’utiliser cet antibiotique pour d’autres maladies ? » permet « d’évaluer l’automédication et de sensibiliser à ses risques ». Les écarts entre l’usage fait par l’éleveur (dose, durée, indication) et l’ordonnance ou le protocole de soins sont détectés et discutés. Lors du dernier usage, une discussion sur le nombre d’antibiotiques reçus simultanément permet de le sensibiliser à la polyantibiothérapie. À travers la lecture du registre d’élevage, le praticien compte le nombre de traitements réalisés dans l’année écoulée avec la même spécialité antibiotique.

L’ordonnance est-elle lue ? Lisible ? Respectée ?

Les questions 27 à 32 sur l’ordonnance s’appuient sur l’exemple de l’antibiotique retenu précédemment.La question « relisez-vous l’ordonnance avant d’utiliser un médicament ? » permet « d’évaluer l’intérêt que l’éleveur lui accorde ». La vérification de la présence de toutes les mentions réglementaires mesure aussi l’intérêt du vétérinaire et le « soin qu’il porte à sa rédaction ». Sa relecture par l’éleveur à haute voix d’une ordonnance manuscrite permet au vétérinaire d’en juger la lisibilité.

Le respect de l’ordonnance est analysé sur trois points essentiels, l’identité des animaux mentionnés, le schéma thérapeutique (dose, durée, fréquence et voie) et le temps d’attente. Si « l’éleveur s’écarte de l’ordonnance sur ces points, il est sensibilisé aux risques de ces pratiques ».

La dernière question sur le registre d’élevage permet de vérifier que le dernier traitement par cet antibiotique y a bien été inscrit. Pour le ministère de l’Agriculture, « cette question doit être l’occasion pour le vétérinaire d’insister sur l’intérêt de ce registre en tant que support d’informations échangées entre l’éleveur et le vétérinaire, avec des questions du type : “Présentez-vous le registre d’élevage au vétérinaire lors de ses interventions ?” ou “Lors de son intervention, le vétérinaire vous demande-t-il de présenter le registre d’élevage ?” ». Tout un programme…

  • (1) Note de service DGAL/SDSPA/N2012-8154 du 18/07/2012.

ENCADRÉ 1
La visite sanitaire bovine passe de la fièvre aphteuse aux antibiotiques critiques

“Version 1.0” 2005-2007 : les maladies réglementées

La visite sanitaire bovine a été instaurée par un arrêté du 24 janvier 2005.

Elle est alors annuelle, obligatoire et réalisée par le vétérinaire sanitaire.

Gratuite pour l’éleveur, le vétérinaire est rémunéré par l’État 4 AMV (soit environ 50 €), soit un budget total de 12 millions d’euros.

Cette visite est centrée sur les maladies réglementées, la détection des avortements pour la brucellose et le dépistage de la tuberculose.

Une fiche à remettre à l’éleveur décrit les signes d’alerte de la fièvre aphteuse.

Le cas des élevages classés « insuffisants » par le vétérinaire sanitaire est examiné par la direction des services vétérinaires.

Au bilan, sur les 255 000 à 259 000 visites prévues, près de 95 % ont été réalisées. Plus des trois quarts des élevages sont « satisfaisants » (de 76 à 78 %) et le restant (de 21 à 23 %) « à améliorer ». À peine 1 % sont notés « insuffisants » par le vétérinaire sanitaire.

“Versions 2.0” 2008-2011 : le pack hygiène

Un nouvel arrêté du 28 décembre 2007 réoriente une première fois la visite vers un bilan sanitaire plus global et le paquet hygiène. La gestion de la pharmacie vétérinaire (stockage, ordonnance, temps d’attente, etc.) y fait son apparition tout comme l’hygiène de la traite et les documents sanitaires obligatoires (registre d’élevage, etc.).

Cette fois, la fiche à remettre à l’éleveur rappelle les principes du paquet hygiène.

La visite devient bisannuelle et est rémunérée 8 AMV (soit environ 100 €), ce qui n’alourdit pas le coût de cette visite pour l’État.

« Le premier objectif de la visite est de contribuer à cibler les contrôles officiels sur les élevages à risque, ceux présentant un réel problème de santé publique. Si les conclusions alertent les services vétérinaires, il devra impérativement être réalisé une inspection avant toute décision ». Le second objectif est « la prévention avec le maintien d’un maillage sanitaire et d’un dialogue constructif entre éleveur et vétérinaire »

Le dernier bilan 2011 met en exergue un taux de réalisation en baisse à 89 % sur 110 000 exploitations à visiter. Mais la quasi-totalité des visites (91 %) se conclut avec un bilan « satisfaisant », ce qui ne correspond sans doute pas à la réalité de la situation. Neuf pour cents sont « à améliorer ». Seulement 0,3 % (281 exploitations) sont classées insuffisantes.

“Version 3.0” (2012-…) : l’antibiorésistance

La visite reste bisannuelle et rémunérée 8 AMV (soit environ 110 €). Mais le reste est modifié.

Ses conclusions ne sont pas transmises aux services d’inspection. Elles ne sont d’ailleurs pas à télédéclarer par le vétérinaire, sauf par tirage à sort à des fins d’exploitations statistiques et sous une forme anonymisée. Cette visite ne donne plus lieu à un classement formel des élevages.

Le formulaire moins administratif est davantage un prétexte à la sensibilisation, à l’information et au dialogue. C’est plus une trame de discussion qu’une fiche de collecte de résultats.

L’antibiorésistance en constitue la part essentielle. Une fiche sur le plan Écoantibio 2017 est remise à l’éleveur pour l’inciter à « réduire l’utilisation des antibiotiques ».

Les ateliers de veaux de boucherie sont toujours inclus dans ce dispositif.

ENCADRE 2
Plan Écoantibio 2017 : bonnes et mauvaises pratiques

À la fin de la visite obligatoire, une fiche sur le plan Écoantibio 2017 est remise pour inciter l’éleveur à « réduire l’utilisation des antibiotiques ».

→ Selon cette fiche, les bonnes pratiques consistent :

– à privilégier la prévention et l’hygiène ;

– à recourir « le plus tôt possible » au vétérinaire pour toute prescription des antibiotiques et au thermomètre avant leur utilisation précoce (les antibiogrammes ne sont pas mentionnés sur cette fiche) ;

– à respecter la prescription en termes de dose et de durée.

→ Les mauvaises pratiques à éviter, car « inutiles, dangereuses et éventuellement coûteuses », sont :

– d’arrêter un traitement en cours avant son terme ;

– de changer un traitement sans l’avis du vétérinaire ;

– de donner des doses inférieures ou supérieures à celles de l’ordonnance ;

– d’influer sur le choix du vétérinaire (en lui réclamant tel ou tel antibiotique).

→ Remarque : l’application d’une dose plus élevée ou l’arrêt d’un traitement avant son terme ne présentent toutefois pas un risque de sélection d’antibiorésistance.

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