Épididymectomie chez le taureau - Ma revue n° 019 du 01/01/2019 - Le Point Vétérinaire.fr
Ma revue n° 019 du 01/01/2019

CASTRATION DU MÂLE

Appareil génito-urinaire

Auteur(s) : Sylvie Chastant-Maillard

Fonctions : Reproduction
UMR 1225 IHAP, Inra-ENVT
23, chemin des Capelles, 31076 ToulouseMembre de la commission “vaches laitières”
de la SNGTV
s.chastant@envt.fr

Cet article propose une alternative simple à la vasectomie pour la préparation des taureaux souffleurs.

La vasectomie est fréquemment à l’origine de mises en cause de la responsabilité civile professionnelle des praticiens(1). L’ablation d’une portion du canal déférent est délicate, elle nécessite de s’approcher d’un tronc vasculaire (plexus pampiniforme drainant le sang veineux à la sortie du testicule) et de repérer avec certitude un tubule de 2 mm de diamètre. Les litiges portent sur des échecs chirurgicaux, l’animal opéré restant fertile. Cependant, il existe une solution alternative chirurgicale plus simple que la vasectomie : l’épididymectomie. Cette technique consiste en l’ablation non plus du canal déférent, mais d’une autre portion des voies d’excrétion du testicule, la queue de l’épididyme, plus simple à identifier et plus facile d’accès que le canal déférent (figure 1) [1-4].

INDICATION

Cette opération est indiquée pour la préparation de taureaux boute-en-train, dans un objectif de détection des chaleurs et/ou pour tirer parti de l’effet mâle (meilleure expression et induction des chaleurs).

MATÉRIEL CHIRURGICAL

L’équipement chirurgical se compose d’une lame de bistouri, de deux clamps et de matériel de suture résorbable.

CONTENTION

Il est souvent plus facile et plus sécurisant d’intervenir sur un animal en décubitus latéral, mais une contention dans une cage en position debout est également possible (sous sédation).

ANESTHÉSIE

L’anesthésie comprend :

– a minima une sédation associée à une anesthésie locale (à l’aide d’une solution de lidocaïne 2 %) sous la peau, à l’aplomb de la queue de l’épididyme. Il est également possible d’injecter en plus de la lidocaïne dans l’épididyme ;

– et/ou une anesthésie épidurale haute (permettant le couchage et l’anesthésie du scrotum).

PRÉPARATION DE LA ZONE

Le tiers distal du scrotum est tondu, si nécessaire ; une préparation chirurgicale classique est ensuite effectuée.

TEMPS OPÉRATOIRES

1. Incision

Avec une main placée au-dessus du testicule, celui-ci est poussé au fond du scrotum afin que la queue de l’épididyme devienne plus visible (photo).

Le scrotum est incisé sur 2 à 3 cm, directement sur la queue de l’épididyme, parallèlement au raphé médian. La longueur de l’incision est volontairement limitée pour ne pas risquer l’extériorisation du testicule hors du scrotum (figure 2).

La vaginale est ainsi atteinte. Celle-ci est délicatement ouverte à l’aide de ciseaux ou simplement avec le bistouri : l’épididyme s’extériorise alors spontanément sous la pression (attention à ne pas inciser l’épididyme ni l’albuginée du testicule). Il est important de maintenir la pression à partir de la partie dorsale du testicule.

2. Section de l’épididyme

Il convient de :

– détacher l’épididyme du testicule par dissection aux ciseaux mousse et au doigt ;

– placer une pince du côté du canal déférent et une autre aussi proximalement que le rend possible le diamètre de l’épididyme ;

– placer une ligature sur le canal déférent, en aval du clamp, et une autre sur la base de l’épididyme caudal, en amont de celui-ci. Il n’est pas indispensable que la ligature soit réellement placée à la base de l’épididyme (l’objectif est simplement de sectionner une partie des voies excrétrices) ;

– sectionner la partie située entre les deux ligatures (environ 3 cm d’épididyme).

3. Sutures

Plaie vaginale

La plaie vaginale est suturée à l’aide de points simples ou en U. Certains auteurs suggèrent de faire apparaître l’extrémité de l’épididyme (partie corps) dans la ligne de suture, de façon à limiter le risque de réanastomose [1]. Néanmoins, ce risque de réanastomose fonctionnelle (perméable aux spermatozoïdes) est très faible, même après la simple exérèse du corps de l’épididyme.

Incision scrotale

La peau du scrotum est suturée à l’aide de deux ou trois points simples. Certains auteurs suggèrent de laisser la plaie cutanée ouverte, sa taille étant limitée [4].

La même intervention est réalisée sur l’épididyme du testicule opposé.

PHASE POSTOPÉRATOIRE

L’intervention s’accompagne de très faibles hémorragies. Une antibiothérapie postopératoire de 5 jours est conseillée. L’animal doit être maintenu sur une litière propre et sèche au cours des 5 jours qui suivent l’intervention.

Le taureau peut être considéré comme stérile après 3 semaines (le temps que les spermatozoïdes contenus dans les voies génitales perdent leur fécondance). Théoriquement, un contrôle de la semence devrait être pratiqué.

Conclusion

Les auteurs américains proposent d’associer l’épididymectomie à d’autres techniques qui interdisent l’intromission du pénis, telles que la déviation de ce dernier, sa fixation à la ligne blanche, l’occlusion des corps caverneux ou l’occlusion physique de l’orifice préputial. Cette association n’a cependant d’intérêt que dans un contexte où le risque de transmission de maladies vénériennes (notamment la trichomonose) est important. En Europe, l’épididymectomie peut être réalisée seule. L’intervention est plus simple et plus rapide que la vasectomie, avec le même résultat, à savoir l’obtention d’un taureau stérile, mais conservant un comportement mâle. L’épididymectomie est donc une alternative méconnue à la vasectomie, qui mériterait sans doute une plus grande diffusion.

  • (1) Voir l’article “Responsabilité civile professionnelle et chirurgie bovine” de P. Tartera, dans ce numéro.

Références

  • 1. Hendrickson DA. Surgical techniques for teaser bull preparation. Chapter 14. In: Techniques in Large Animal Surgery. Blackwell Publishing. 3rd ed. 2007:251-256.
  • 2. Morgan G. Surgical correction of the abnormalities of the reproductive organs of bulls and preparation of teaser animals. Chapter 32. In: Current Therapy in Large Animal Theriogenology. RS Youngquist and WR Threlfall eds. Saunders, Saint Louis, USA. 2007:243-252.
  • 3. Noordsy JL, Kent Ames N. Chapter 15: Surgery of the male reproductive system. Food Animal Surgery. 4th ed. Veterinary Learning System. Yardley, USA. 2006:199-241.
  • 4. Walker DF, Vaughan JT. Chapter 3: Surgery of the penis. In: Bovine and Equine Urogenital Surgery. Eds Lea and Febiger, Philadelphia. 1980:10-36.

Conflit d’intérêts

Aucun.

Points forts

→ La vasectomie est à l’origine de nombreux échecs thérapeutiques (taureau toujours fertile malgré l’intervention).

→ L’épididymectomie est une opération simple, qui consiste à réséquer la queue de l’épididyme, facile à identifier.

→ Les soins postopératoires sont limités. La stérilité du taureau est obtenue sous 3 semaines.

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