JURISPRUDENCE
Juridique
Auteur(s) : Christian Diaz
Fonctions : 7, rue Saint-Jean
31130 Balma
Le tribunal correctionnel de Vesoul a récemment rendu un jugement exemplaire dans une affaire d’importation frauduleuse de chiots et de falsification de documents.
M. M. – ancien vétérinaire, officiellement retraité – est prévenu d’avoir, pendant 3 années (de 2015 à 2018), effectué un travail dissimulé, introduit des animaux dans des conditions non conformes aux conditions sanitaires, exercé illégalement la profession vétérinaire et commis des faux en écriture, et cela avec la complicité du Dr vétérinaire P.
→ Le travail dissimulé repose sur l’exercice dans un but lucratif d’une activité de vente d’animaux, notamment de chiens, après radiation du Répertoire des métiers ou du registre du commerce et des sociétés.
→ Les chiots importés de Slovaquie n’auraient pas été vaccinés contre la rage et leur âge réel n’était pas celui indiqué sur le passeport.
→ L’injection de vaccins est assimilée à un acte d’exercice illégal de la médecine vétérinaire.
→ La rédaction de certificats vétérinaires et la falsification de factures à l’en-tête d’une clinique vétérinaire constituent des faux en écriture.
Il est poursuivi pour complicité, tant pour les faux en écriture que pour l’exercice illégal, notamment en tant que fournisseur des vaccins administrés par M. M.
Le tribunal juge que les faits sont établis et condamne les coupables à des peines d’emprisonnement avec sursis (15 et 5 mois). De plus M. M. est condamné à une amende de 8 000 € et le Dr P. à 2 ans de suspension de son activité professionnelle.
Enfin, le Conseil national de l’Ordre et le Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL), parties civiles, perçoivent des dommages et intérêts de la part des deux protagonistes.
Ce jugement, que d’aucuns ont qualifié d’exemplaire, appelle quelques commentaires.
Si M. M. a, d’après le jugement, établi lui-même des documents non conformes, eu égard à son statut, il est possible de s’interroger sur la validité des pièces accompagnant les chiots venant de Slovaquie. Il a été retenu que certains chiots étaient trop jeunes et n’étaient pas vaccinés contre la rage, d’après des résultats de laboratoire. Cependant, la Slovaquie étant un pays européen, une identification par transpondeur et une vaccination antirabique certifiée sur le passeport européen par un vétérinaire du pays d’origine sont des exigences suffisantes pour l’importation de chiots à partir de 15?semaines. Les textes ne prévoient pas l’obligation de titrage.
Le jugement ne dit pas si des actions ont été menées contre les vétérinaires slovaques auteurs de ces certifications suspectes.
Si des peines d’emprisonnement ont bien été prononcées, elles ont été assorties du sursis pour leur totalité, eu égard à l’absence de condamnation pour crime ou délit de droit commun dans les 5?années précédant les faits.
Le tribunal a prononcé des peines complémentaires d’interdiction d’exercice professionnel pour les deux prévenus. Or, si M. M. était officiellement retraité, le Dr?P. était, lui, officiellement en activité au moment des faits. Sur ce point, la complicité semble être sanctionnée plus lourdement que les faits principaux.
Il n’est pas inutile de rappeler ici que, si les chambres de discipline vétérinaires sont compétentes pour prononcer des peines d’interdiction d’exercice, de telles sanctions peuvent également émaner des tribunaux de l’ordre judiciaire à titre de peine complémentaire.
L’Ordre des vétérinaires et le SNVEL ont été reconnus comme parties civiles et ont obtenu des dommages et intérêts de la part des deux prévenus.
Si le SNVEL a pour mission de défendre les intérêts catégoriels des vétérinaires, l’Ordre est le garant de la qualité du service rendu au public par la profession vétérinaire.
En les accueillant comme parties civiles, le tribunal a validé leur intérêt à agir dans cette affaire.
Aucun.
Tribunal de grande instance de Vesoul (Haute-Saône), 18/10/2018.