Hypertension pulmonaire chez une chienne - Le Point Vétérinaire expert canin n° 395 du 01/05/2019
Le Point Vétérinaire expert canin n° 395 du 01/05/2019

CARDIOLOGIE

Cas clinique

Auteur(s) : François Serres

Fonctions : DESV médecine interne,
option cardiologie
Oncovet
Avenue Paul-Langevin
59650 Villeneuve-d’Ascq

Une suspicion de thrombose pulmonaire doit être émise lorsqu’un animal présente des anomalies de la coagulation et une dyspnée sans lésion pulmonaire majeure.

DIAGNOSTIC

Une chienne chihuahua non stérilisée, âgée de 3 ans, est présentée pour l’exploration d’une polypnée d’apparition suraiguë, associée à une anorexie et à une hyperthermie, apparues brutalement moins de 5 jours auparavant. Un bilan biochimique, réalisé la veille, a montré une légère hypoglycémie. L’examen clinique est normal, en dehors d’une récente perte de poids importante et de la présence d’une nette polypnée sans discordance (fréquence respiratoire : 75 mouvements par minute). L’examen radiographique du thorax ne montre aucune anomalie pulmonaire, mais une cardiomégalie droite est identifiée. Un examen échographique est réalisé. Des modifications importantes sont visibles : le ventricule droit est très dilaté. Le tronc pulmonaire présente une dilatation marquée, associée à un bombement des sigmoïdes pulmonaires. L’examen au mode Doppler couleur montre une insuffisance pulmonaire étendue (photo 1). Au mode Doppler pulsé, un flux pulmonaire systolique laminaire et de vélocité normale est visible, avec un flux asymétrique en lame de couteau, caractéristique d’une hypertension artérielle pulmonaire (photo 2). Cette dernière est confirmée par la mesure de la vélocité des reflux pulmonaire et tricuspidien, qui confirme une hypertension marquée (pression artérielle pulmonaire systolique estimée à 70 mmHg, norme : < 25 mmHg).

Une mesure de protéine C-réactive montre des valeurs nettement élevées (45 mg/l, norme : < 10 mg/l), en faveur d’une affection inflammatoire/infectieuse occulte. Une leuco­cytose minime et une thrombopénie y sont associées. Un bilan de coagulation montre des mesures des temps de thrombine et de céphaline activée normales, mais identifie une valeur de D-dimère (marqueur de thrombose) élevée (au Nycocard Reader® : 5 mg/l, norme : < 0,5 mg/l). Ce résultat est en faveur d’une consommation plaquettaire par trouble de l’hémostase. L’examen échographique abdominal permet de diagnostiquer une métrite.

Une infection à point de départ utérin est l’hypothèse principale, avec suspicion de phénomènes de thrombose secondaire, ayant entraîné une hypertension pulmonaire secondaire. Cette dernière est responsable des anomalies visibles à l’échographie.

DISCUSSION

Une suspicion de thrombose pulmonaire doit être émise face à un animal qui présente une dyspnée sans lésion pulmonaire majeure et des anomalies de la coagulation. Ces thromboses pulmonaires peuvent provoquer, secondairement, une hypertension pulmonaire. Celle-ci peut être suspectée sur la base de modifications de la morphologie du cœur droit, ou de l’examen Doppler. L’observation d’une modification du profil du flux pulmonaire est un signe fort en faveur d’une hypertension pulmonaire. Le flux pulmonaire systolique, s’écoulant entre des cavités à basse pression, présente habituellement un aspect symétrique en cloche. Lors d’hypertension pulmonaire, la surpression dans le tronc pulmonaire modifie la morphologie du flux, qui prend un aspect en lame de couteau, avec parfois une encoche correspondant à une fermeture partielle de la valve pulmonaire au cours de la systole [1]. Cette modification morphologique peut être utilisée comme élément de suspicion d’une hypertension pulmonaire. Il est possible de la quantifier (en mesurant le temps d’éjection et d’accélération du flux). Plusieurs études ont montré que le temps d’accélération et le rapport accélération/temps d’éjection permettent de prédire une hypertension pulmonaire avec une sensibilité et une spécificité élevées, ce qui est intéressant chez des animaux qui ne présentent pas de reflux tricuspidien ou pulmonaire [1, 2]. 

Références

  • 1. Schober KE, Baade H. Doppler echocardiographic prediction of pulmonary hypertension in west highland white terriers with chronic pulmonary disease. J. Vet. Intern. Med. 2006;20:912-920.
  • 2. Serres F, Chetboul V, Gouni V et coll. Diagnostic value of echo-doppler and tissue doppler imaging in dogs with pulmonary arterial hypertension J. Vet. Intern. Med. 2007;21 (6):1280-1289.

Conflit d’intérêts

Aucun.

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