Abdomen aigu chez un chiot de 2 mois - Le Point Vétérinaire n° 394 du 01/04/2019
Le Point Vétérinaire n° 394 du 01/04/2019

GASTRO-ENTÉROLOGIE

Quel est votre diagnostic ?

Auteur(s) : Delphine Dullin

Fonctions : Vets4Pets in Pets at Home
Old Market Retail Park
High Street
Basildon SS13 3BY
Royaume-Uni

Présentation clinique

Un labrador retriever femelle âgée de 10 semaines est présenté pour une diarrhée évoluant depuis 1 semaine, compliquée par des vomissements, un abattement et une hématochésie depuis la veille. Les autres chiots de la portée présentent également une diarrhée avec maintien d’un bon état général. L’élevage respecte un plan de prévention parasitaire adéquat. La portée est actuellement sous traitement symptomatique à base de Smecta®. Le chiot pèse 12,8 kg et sa note d’état corporel est de 5/9. L’examen clinique révèle un abattement et une déshydratation estimée à 5 %. La palpation abdominale identifie des anses digestives à contenu liquidien et une masse digestive dense en forme de crosse de position centro-caudale et de palpation inconfortable. Le reste de l’examen et le bilan hémato-biochimique ne révèlent pas d’autre anomalie.

Une échographie abdominale est réalisée à l’aide d’une sonde linéaire pour explorer la masse (photos 1 et 2).

Qualité des images

Les images sont de bonne qualité, la définition et le grain permettent de distinguer nettement les différentes structures.

Description des images

→ Une anse digestive est anormalement distendue par un contenu mixte. Sa paroi est anormalement épaisse, avec le double du nombre habituel de couches.

→ Dans la lumière de cette anse apparaît une structure pouvant être identifiée comme une seconde anse par sa forme cylindrique et sa paroi, constituée de cinq couches concentriques d’échogénicité alternée.

→ Entre les deux parois évoquées, une zone hyperéchogène contenant des foyers anéchogènes multifocaux bien définis est visualisée.

→ Sont également repérés : des nœuds lymphatiques discrètement hypertrophiés et des anses digestives distendues par du liquide, avec un hyperpéristaltisme segmentaire en amont de la zone d’intérêt.

Interprétation

→ Les images échographiques sont diagnostiques d’une intussusception. L’épaisseur de la couche digestive externe est anormale, car constituée de deux parois : celle de l’ intussuscepiens, accolée à celle, inversée, de l’ intussusceptum.

→ La zone hyperéchogène entre les deux anses correspond à la graisse mésentérique ayant suivi l ’intussusceptum. Les petits foyers anéchogènes correspondent à des logettes de liquide physiologique ayant transsudé sous pression mécanique ou exsudé par inflammation.

L’intussusception est irréductible manuellement par abord externe. Une réduction chirurgicale, suivie d’une entérectomie de l’ intussusceptum, nécrotique, est réalisée (photo 3).

DISCUSSION

Une intussusception est un télescopage d’un segment digestif (intussusceptum) dans la lumière du segment contigu (intussuscepiens) [3, 4]. Elle se développe à la suite d’une désynchronisation péristaltique, situation fréquente en cas de diarrhée, indépendamment de la cause (parasitisme, corps étranger, parvovirus, tumeur, chirurgie digestive, etc.) [4]. Dans l’espèce canine, le chiot est majoritairement concerné, alors que la distribution féline est bimodale (moins de 1 an et plus de 6 ans) [2].

En cas de diarrhée avec abattement, une intussusception doit faire partie des hypothèses diagnostiques et être recherchée quotidiennement chez les animaux hospitalisés pour ce motif. Dans la majorité des cas, la palpation révèle une masse cylindrique et le diagnostic définitif s’établit par échographie [4].

Certaines peuvent se résoudre spontanément, notamment chez le chiot, mais elles ont tendance à récidiver. La correction chirurgicale est la règle, après une prise en charge médicale, indispensable chez ces animaux déshydratés et douloureux [4]. Les récidives surviennent dans 6 à 27 % des cas, dans les 3 semaines [4]. Une entéroplication préventive était recommandée, mais des études récentes la remettent en question en l’absence de différence significative du taux de récidives avec ou sans, et en soulignant la sévérité et le taux de complications digestives (perforation, obstruction, strangulation) [1-3].

Références

  • 1. Applewhite AA, Hawthorne JC, Cornell KK. Complications of enteroplication for the prevention of intussusception recurrence in dogs: 35 cases (1989-1999). J. Am. Vet. Med. Assoc. 2001;219:1415-1418.
  • 2. Haider G et coll. Enteroplication in cats with intussusception: a retrospective study (2001-2016). J. Feline Med. Surg. 2018; dol:10.1177/1098612 X18786599
  • 3. Levitt L, Bauer MS. Intussusception in dogs and cats: a review of thirty-six cases. Can. Vet. J. 1992;33:660-664.
  • 4. Tobias K, Johnston S. Veterinary Surgery: Small Animal. 1st ed. Elsevier. 2012:1536-1538.

Conflit d’intérêts

Aucun.

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