Suspicion d’endocardite chez un chat insuffisant aortique - Le Point Vétérinaire expert canin n° 387 du 01/07/2018
Le Point Vétérinaire expert canin n° 387 du 01/07/2018

CARDIOLOGIE

Cas clinique

Auteur(s) : Alexis Bertrand*, Nora Bouhsina**, Marion Fusellier-Tesson***

Fonctions :
*Service d’imagerie médicale, CHUV Oniris,
BP 50707, 44307 Nantes Cedex 03
alexis.bertrand@oniris-nantes.fr
nora.bouhsina@oniris-nantes.fr
marion.fusellier@oniris-nantes.fr

Un œdème aigu du poumon n’est pas systématiquement dû à une insuffisance mitrale. Indépendamment des causes extracardiaques, il peut être imputable à une endocardite.

Un chat mâle castré de 9 ans est référé après une détresse respiratoire due à un œdème pulmonaire aigu suspecté d’être d’origine cardiogénique. La fréquence respiratoire s’est normalisée à la suite de l’administration de plusieurs bolus de furosémide. Un mois auparavant, l’animal a présenté un abattement marqué. Par ailleurs, un souffle systolique parasternal gauche de grade 4 sur 6 est rapporté par le vétérinaire traitant. L’animal est positif pour le virus de la leucose féline (FeLV) et celui de l’immunodéficience féline (FIV), et reçoit depuis 1 mois des traitements antibiotique et corticoïde pour une anémie hyporégénérative d’origine inconnue.

À sa présentation, l’animal est très léthargique, normotherme, avec une fréquence et une auscultation respiratoire normales. Un souffle cardiaque systolo-diastolique de grade 4 sur 6 est audible, plus marqué en région parasternale gauche.

Une échocardiographie est réalisée pour identifier l’atteinte cardiaque.

DIAGNOSTIC

Le mode bidimensionnel révèle un épaississement irrégulier des valvules aortiques (4,8 mm pour la valvule coronaire gauche), qui apparaissent très hyperéchogènes (photos 1 et 2). L’atrium gauche est légèrement dilaté (21 mm de diamètre), de même que le ventricule gauche en diastole (26,7 mm).

L’image Doppler objective un flux aortique turbulent et de vélocité augmentée (3,1 m/s) compatible avec une sténose aortique modérée (gradient de pression de 38,4 mmHg), ainsi qu’un reflux aortique important. L’examen au Doppler continu de ce reflux révèle une pente de décélération très marquée, avec un temps de demi-pression très court (71 ms) montrant une équilibration rapide des pressions entre l’aorte et le ventricule gauche en diastole, compatible avec une insuffisance aortique sévère (photo 3). Le diagnostic différentiel inclut une endocardite infectieuse (EI), une malformation congénitale de la valve aortique ou une tumeur valvulaire, entraînant une insuffisance valvulaire sévère et une sténose modérée. Étant donné l’abattement très marqué, l’aspect végétatif des lésions et la durée d’évolution inconnue, une endocardite est fortement suspectée. Les propriétaires ont décliné des examens plus avancés (hémocultures, notamment) et le chat a été euthanasié.

DISCUSSION

Les EI sont rares chez les chats (prévalence de 0,007 %), sans prédisposition de sexe ou de race [1]. Aucune affection cardiaque ne semble constituer un facteur de risque, contrairement au chien lors de sténose sous-valvulaire aortique. Les valves mitrales et aortiques sont les plus affectées. Le pronostic est sombre (médiane de survie de 31 jours) [1]. Les chats et les chiens atteints d’EI sont souvent présentés en insuffisance cardiaque congestive ou pour une boiterie (secondaire à une polyarthrite) [1, 2]. Le diagnostic peut être difficile à établir et les critères de Duke utilisés en médecine humaine ont été adaptés [1, 3]. Ils s’appuient sur l’examen clinique, les images échocardiographiques, les résultats d’hémoculture et la réponse au traitement. Dans notre cas, le chat présentait un critère majeur (les lésions végétatives) associé à un critère mineur (une insuffisance aortique importante de durée d’évolution inconnue et n’étant pas associée à une atteinte myocardique primitive). Il ne s’agit pas d’un diagnostic de certitude, mais très probable avec l’association de ces critères.

Références

  • 1. Paler JS et coll. Infective endocarditis in 13 cats. J. Vet. Cardiol. 2016;18:213-225.
  • 2. MacDonald KA et coll. A prospective study of canine infective endocarditis in Northern California (1999-2001): emergence of Bartonella as a prevalent etiologic agent. J. Vet. Intern. Med. 2004;18:56-54.
  • 3. Sykes JE et coll. Evaluation of the relationship between causative organisms and clinical characteristics of infective endocarditis in dogs: 71 cases (1992-2005). J. Am. Vet. Med. Assoc. 2006;228:1723-1734.

Conflit d’intérêts

Aucun.

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