Secret professionnel et auxiliaires vétérinaires - Le Point Vétérinaire n° 383 du 01/03/2018
Le Point Vétérinaire n° 383 du 01/03/2018

DÉONTOLOGIE

Éthique

Auteur(s) : Denise Remy

Fonctions : VetAgro Sup
Campus vétérinaire
de Lyon
1, avenue Bourgelat
69280 Marcy-l’Étoile

L’un de nos confrères a soulevé la question du secret professionnel des auxiliaires vétérinaires et du risque de condamnation du praticien lors de divulgation d’une information à caractère secret par l’auxiliaire.

Les auxiliaires vétérinaires sont-ils assujettis au secret professionnel comme leur employeur ? Il est logique que cela soit le cas, et que tous les membres de l’équipe vétérinaire respectent une confidentialité absolue quant à leurs clients, sans quoi le secret professionnel du vétérinaire n’aurait plus aucun sens. En effet, les auxiliaires reçoivent souvent des confidences de clients à l’accueil et assistent le vétérinaire à l’occasion de certaines consultations durant lesquelles le client peut se livrer (photo).

Cependant, pour que les auxiliaires soient assujettis au secret, un texte de loi, législatif ou réglementaire, est nécessaire car, comme nous l’avons vu, le secret ne s’auto-attribue pas, même s’il peut être déduit par bon sens et par souci de cohérence [3]. Or les auxiliaires ne sont pas constitués en un ordre professionnel et ne doivent obéir à aucun Code de déontologie. Ils ne sont ainsi pas soumis au secret professionnel par profession. Leur obligation vis-à-vis du secret professionnel trouve sa source dans la convention collective nationale des cabinets et cliniques vétérinaires du 5 juillet 1995, laquelle a été publiée, dans une version légèrement modifiée, au Journal officiel de la République française, le 24 janvier 1996 (arrêté du 16 janvier 1996) [2]. Il s’agit d’un texte réglementaire qui stipule, dans son article 17, paragraphe 3 : « Sans préjudice des dispositions de l’article L. 1121-1 du Code du travail, le salarié est tenu d’observer la plus grande discrétion, il est notamment tenu au secret professionnel. » « Sans préjudice des dispositions de l’article L. 1121-1 du Code du travail » signifie que l’obligation pour les salariés des cabinets et des cliniques vétérinaires de respecter le secret professionnel n’écarte pas pour autant cet article, qui s’applique également. Or l’article en question du Code du travail précise que les restrictions apportées aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives doivent être justifiées par la nature de la tâche à accomplir et être proportionnées à l’objectif recherché. En d’autres termes, le fait que les auxiliaires soient contraints de respecter le secret professionnel est justifié et ne saurait être considéré comme une contrainte professionnelle excessive. Les auxiliaires sont ainsi assujettis au secret professionnel par fonction ou par mission. Et ce devoir de discrétion n’a pas de limite dans le temps (comme celui qui incombe au vétérinaire [3]). La convention collective (article 17, paragraphe 5) stipule : « Le salarié reste astreint à l’ensemble de ces règles pendant et hors de ses heures de travail ainsi qu’après la rupture de son contrat de travail. » Les auxiliaires s’exposent, en cas de violation du secret, à des sanctions d’ordre civil et pénal en tous points identiques à celles qui seraient infligées au vétérinaire [3]. Ils échappent à une sanction ordinale, mais peuvent faire l’objet d’un licenciement pour faute de la part de leur employeur. Pour que le délit prévu par le Code pénal soit constitué, l’acte de révélation doit être volontaire. Par exemple, si un client dans la salle d’attente entend une conversation d’un autre client avec l’auxiliaire et apprend à cette occasion des informations confidentielles, l’auxiliaire ne peut être sanctionné pénalement. Il en va de même en cas d’oubli d’un document relatif à un client précédent, document qui traînerait sur le comptoir et que tous les clients suivants pourraient lire. En cas de révélation involontaire, la responsabilité civile de l’auxiliaire peut néanmoins être engagée (atteinte à l’intérêt privé de la personne). Un licenciement ou un rappel à l’ordre de l’employeur intervient également si l’auxiliaire a commis une imprudence ou une négligence. C’est au vétérinaire de veiller à ce que ses locaux professionnels soient agencés de manière à ce que le secret professionnel puisse être respecté (Code de déontologie vétérinaire, article R. 242-53 : « L’organisation et l’aménagement des locaux du domicile professionnel d’exercice doivent à la fois garantir l’indépendance du vétérinaire et permettre le respect du secret professionnel. » [1]).

Le vétérinaire ne peut pas, sauf cas particulier énoncé ci-après, être condamné en cas de violation du secret professionnel par l’un (e) de ses salarié (e) s. En effet, en droit pénal, nous sommes individuellement responsables de nos actes, même lorsque nous travaillons sous l’autorité d’un supérieur hiérarchique (ou au sein d’une institution). En revanche, et ce même si la convention collective nationale des cabinets et cliniques vétérinaires précise l’obligation de respect du secret professionnel, tous les confrères devraient mentionner cette obligation dans les contrats de travail de tous leurs collaborateurs et leur expliquer ce en quoi consiste ce devoir de confidentialité. Il est énoncé dans le Code de déontologie (article R. 242.33) : le vétérinaire « veille à définir avec précision les attributions du personnel placé sous son autorité, à le former aux règles de bonnes pratiques et à s’assurer qu’il les respecte » [3].

Si le vétérinaire a une responsabilité dans le fait qu’il y a eu violation du secret professionnel, il peut être inquiété. Cela peut être le cas si l’agencement des locaux est propice à des écoutes indiscrètes (violation involontaire de la part du salarié) ; dans ce cas, le vétérinaire risque une condamnation civile et disciplinaire, mais ne risque pas de condamnation pénale (il n’a pas accompli volontairement un acte délictueux). S’il fait usage de son autorité pour que la violation ait lieu, il risque d’être accusé de complicité d’acte délictueux, ce qui d’ailleurs ne dédouanera pas complètement l’auxiliaire de sa responsabilité.

Références

  • 1. Agence G-L nouvelle. Code de déontologie – L’Ordre national des vétérinaires [Internet]. [cited 2018 Feb 15]. Available from: https://www.veterinaire.fr/la-profession/code-dedeontologie. html
  • 2. Convention collective nationale des cabinets et cliniques vétérinaires du 5 juillet 1995. Étendue par arrêté du 16 janvier 1996 JORF 24 janvier 1996.
  • 3. Remy D. Le secret professionnel. Point Vét. 2017;(376):6-7.

Conflit d’intérêts

Aucun.

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