Myocardite atriale droite et pneumonie chez un chiot - Le Point Vétérinaire expert canin n° 382 du 01/01/2018
Le Point Vétérinaire expert canin n° 382 du 01/01/2018

CARDIOLOGIE

Cas clinique

Auteur(s) : Alexis Bertrand*, Nora Bouhsina**, Marion Fusellier-Tesson***

Fonctions :
*Service d’imagerie médicale
CHUV Oniris
BP 50707, 44307 Nantes Cedex 03
Alexis Bertrand alexis.bertrand@oniris-nantes.fr
**Service d’imagerie médicale
CHUV Oniris
BP 50707, 44307 Nantes Cedex 03
Nora Bouhsina nora.bouhsina@oniris-nantes.fr
***Service d’imagerie médicale
CHUV Oniris
BP 50707, 44307 Nantes Cedex 03
marion.fusellier@oniris-nantes.fr

La myocardite est une atteinte sévère qu’il convient de rapidement identifier pour espérer la traiter.

Un chiot staffordshire bull-terrier femelle de 4 mois est présenté pour une toux apparue 1 semaine auparavant et un abattement évoluant depuis 2 jours. L’examen clinique révèle une toux sèche et une hyperthermie (39,3 °C). L’auscultation pulmonaire et la fréquence respiratoire (36 mouvements par minute) sont normales. Le rythme cardiaque est régulier avec une fréquence normale, et des pouls fémoraux sont synchrones et normaux. Un souffle systolique apexien droit de grade 2/6 est également noté.

DIAGNOSTIC

Une analyse sanguine montre une lymphopénie (0,4 × 109/l, normes de 1,05 à 5,10 × 109/l). Les radiographies thoraciques révèlent une dilatation du cœur droit, associée à une opacification alvéolaire très marquée dans les lobes moyen et caudal droits. Une pneumonie est suspectée (photo 1).

L’échocardiographie révèle un épaississement marqué de la paroi atriale droite (jusqu’à 6 mm d’épaisseur), qui présente un contour irrégulier, et une échogénicité homogène, proche de celle du myocarde (photo 2). Des insuffisances mitrale et tricuspide minimes sont mises en évidence. Le reflux tricuspidien présente une vélocité de 2,44 m/s, compatible avec une pression artérielle pulmonaire dans les valeurs usuelles hautes (29 mmHg). Le reste de l’examen cardiaque est normal.

Une origine inflammatoire infectieuse des lésions observées sur l’atrium est suspectée (myocardite par contiguïté avec les lobes pulmonaires atteints ou par voie hématogène). Une lésion congénitale (hamartome cardiaque) ou une néoplasie ne peuvent être exclues.

Un anti-inflammatoire et un antibiotique sont administrés pour traiter la pneumonie. L’état général du chiot s’améliore brièvement, avant d’empirer à nouveau. À la demande des propriétaires, l’animal est euthanasié. L’examen histopathologique objective une myocardite de l’atrium droit. Celle-ci est sévère, diffuse, chronique et sclérosante, avec la présence d’un tissu de granulation mature postinflammatoire et/ou postnécrotique, et une infiltration lymphocytaire et plasmocytaire multifocale modérée, associée à une pneumonie neutrophilique marquée diffuse en cours de surinfection bactérienne. Une origine infectieuse primitivement virale est suspectée, mais aucun agent pathogène n’a été identifié.

DISCUSSION

Les myocardites chez le chien, sauf les myocardites traumatiques, peuvent être dues à de nombreux agents bactériens, viraux, parasitaires ou fongiques. L’infection par Borrelia burgdorferi serait une cause fréquente (6 des 11 cas dans une étude récente [1]). Ces maladies peuvent entraîner une insuffisance cardiaque ou des arythmies. Chez ce chiot, le retentissement cardiaque est minime et il s’agit d’une découverte fortuite, les symptômes faisant principalement suite à la pneumonie. Au vu de la localisation des lésions, une atteinte du nœud sinusal et des arythmies supraventriculaires auraient été possibles. L’aspect échographique est très variable et peut être normal. Des images semblables à celles d’une cardiomyopathie dilatée sont décrites [1]. Dans le cas rapporté, elles étaient identiques à celles d’un cas de myocardite éosinophilique idiopathique [2]. Cet aspect n’est pas spécifique, et peut évoquer un thrombus, un infiltrat néoplasique ou un hamartome cardiaque.

Un dosage de la troponine I (cTnI) aurait pu orienter le diagnostic vers une myocardite du vivant de l’animal. La cTnI est un marqueur de dégâts cellulaires myocardiques. Des biopsies endomyocardiques (gold standard en médecine humaine) auraient également pu être effectuées, mais il s’agit d’un geste risqué [2]. Un examen bactériologique pour objectiver la cause infectieuse de la pneumonie et/ou une hémoculture auraient aussi été idéaux.

Références

  • 1. Janus I, Nozsczyk-Nowak A, Nowak M et coll. Myocarditis in dogs: etiology, clinical and histopathological features (11 cases: 2007-2013). Irish Vet. J. 2014;67:3-8.
  • 2. Keeshen TP, Chalkley M, Stauthammer C. A case of unexplained eosinophilic myocarditis in a dog. J. Vet. Cardiol. 2015;18:278-283.

Conflit d’intérêts

Aucun.