ANESTHÉSIE ET PHARMACOLOGIE
Fiche
Auteur(s) : Olga Nikolayenkova-Topie*, Gwenola Touzot-Jourde**
Fonctions :
*Service transversal d’anesthésie-réanimation,
Oniris, site de la Chantrerie,
route de Gachet, 44300 Nantes
L’alfaxalone est intéressante pour l’anesthésie générale du chien et du chat, aussi bien pour l’induction que pour l’entretien. Son mode d’action est proche de celui du propofol, mais ses effets secondaires diffèrent.
L’alfaxalone est un anesthésique général injectable de la classe des neurostéroïdes dont le mécanisme d’action est similaire à celui du propofol. Cette molécule présente un bon indice thérapeutique et son effet est de courte durée (encadré 1). Elle est utilisée comme agent d’induction et d’entretien de l’anesthésie. Lors d’utilisation suivant les recommandations, elle entraîne une dépression respiratoire et cardio-vasculaire inférieure à celle induite par le propofol. Sa dose efficace varie en fonction des analgésiques et sédatifs administrés en association.
→ L’alfaxalone (3α-hydroxy-5α-pregnane-11,20-dione) est un anesthésique général de la classe des neurostéroïdes de synthèse. Elle agit sur le récepteur des voies inhibitrices dans le système nerveux central GABAA (acide γ-aminobutyrique), et entraîne la perte de conscience et une relaxation musculaire [4, 5].
→ Le mécanisme principal de l’action anesthésique de l’alfaxalone est la modulation allostérique positive du récepteur GABAA potentialisant des effets du neurotransmetteur endogène GABA, qui provoque le mouvement des ions Cl dans la cellule. Ce mouvement entraîne une hyperpolarisation du neurone et une inhibition de la propagation d’excitation neuronale [23].
L’action du principe actif répond ainsi à deux des trois aspects de la triade indispensable à l’anesthésie générale (inconscience, myorelaxation, analgésie) et son utilisation doit s’intégrer dans un protocole incorporant un analgésique. Comme avec le propofol, l’analgésie après une induction avec l’alfaxalone seule est négligeable [13]. Une association avec un sédatif possédant un spectre analgésique comme les α2-agonistes et des analgésiques (morphiniques, anti-inflammatoires non stéroïdiens [AINS]) est nécessaire pour obtenir une anesthésie stable et un réveil de bonne qualité chez un animal dont la douleur postopératoire est contrôlée [9].
→ Le métabolisme de l’alfaxalone chez le chien et le chat est hépatique et passe tout d’abord par la phaséI (cytochrome P450 dépendante) pour former cinq métabolites communs aux deux espèces. Pour les métabolites issus de la phasé II (glucurono- et sulfo-conjugaisons dépendants), deux sur quatre sont communs (alfaxalone glucuronide et 20-hydroxy-alfaxalone sulfate). Pour les deux métabolites restants, le 3β-alfaxalone sulfate est trouvé chez le chat et la 2α-hydroxy-alfaxalone glucuronide est produite chez le chien uniquement. Ce sont les métabolites majeurs dans ces deux espèces [23]. Aucun effet négatif rénal ou hépatique n’a été rapporté [24]. Des études chez l’homme et le rat ont démontré une prédominance d’excrétion dans les urines par comparaison à la bile [20, 21].
→ Lors du réveil, il est possible d’observer une agitation et une hypersensibilité au bruit des animaux. Ces effets ne sont pas liés à la dose utilisée [1, 2, 4]. Des tremblements, voire un opisthotonos de courte durée peuvent également être observés au réveil [2]. Ces signes sont rares lors de l’utilisation d’un protocole anesthésique incorporant un sédatif qui permet un réveil plus progressif.
→ La dépression cardio-respiratoire est dose-dépendante, et se caractérise par une diminution de l’efficacité de la ventilation en fréquence et en amplitude (hypoventilation) et une baisse de la température corporelle pouvant aller jusqu’à l’hypothermie, ainsi que de la pression artérielle (hypotension à fortes doses) [19, 22]. Une dépression respiratoire légère à la dose de 2 mg/kg est rapportée lors d’association avec une prémédication [22]. Les apnées sont possibles lors de l’induction, et associées à une injection trop rapide ou à une dose élevée. L’incidence de l’apnée est moins importante avec l’alfaxalone à cinq fois la dose recommandée de 2 mg/kg qu’avec le propofol à deux fois la dose recommandée sans prémédication de 6,5 mg/kg lors de l’induction chez le chien [3]. À la suite de l’administration de 6 mg/kg par voie intraveineuse (IV) d’alfaxalone, une apnée de 30 secondes suivie d’une diminution de la fréquence respiratoire est observée et résulte en une hypoxémie et une hypoventilation [14]. À la dose recommandée de 2 mg/kg, l’alfaxalone ne provoque pas de diminution significative de la pression artérielle, ce qui n’est pas le cas avec le propofol à dose équipotente. [8, 12]. Cette caractéristique est particulièrement avantageuse chez les animaux plus susceptibles de développer une hypotension, comme lors d’une instabilité cardio-vasculaire liée à une hypovolémie.
→ L’alfaxalone est commercialisée sous le nom déposé d’Alfaxan®(1), à une concentration de 10 mg/ml solubilisée avec de la 2-hydroxy-propyl-β-cyclodextrine (photo 1). Aucun conservateur antimicrobien n’est ajouté dans la présentation commerciale actuelle. Concernant les recommandations sur la durée de conservation, il existe des différences en fonction des pays. Conformément au résumé des caractéristiques du produit (RCP) en France, tout liquide restant dans le flacon une fois la dose requise extraite doit être éliminé. En Australie et en Nouvelle-Zélande, le flacon est consommé de préférence en 24 heures, mais peut être conservé jusqu’à 7 jours après ouverture à la double condition d’un stockage à 4 °C et d’une technique aseptique de prélèvement (RCP australien). Un prélèvement aseptique consiste en un nettoyage du bouchon à l’alcool à 70 % et en l’utilisation d’une aiguille et d’une seringue stériles à chaque prélèvement (encadré 2). En cas de contamination, de doute ou de dépassement de la date, le flacon doit être éliminé selon les pratiques en vigueur régies par la réglementation sur les déchets [15, 18]. Tout flacon non entamé doit être éliminé après dépassement de sa date de péremption.
→ La voie IV est recommandée par l’autorisation de mise sur le marché. La vitesse d’administration peut être modulée. Des injections lentes continues sur 60 secondes à effet ou une administration d’un quart de la dose totale toutes les 15 secondes jusqu’à obtenir la profondeur suffisante pour l’intubation sont décrites, avec des résultats équivalents (photo 2) [4, 16]. L’administration peut aussi se faire en perfusion continue. La dose varie en fonction des molécules utilisées en prémédication et de leurs combinaisons. L’effet de potentialisation entre les molécules choisies permet d’employer de moindres doses de chaque molécule et de diminuer leurs effets secondaires. Une étude chez le chien a démontré que la dose d’alfaxalone nécessaire à l’induction après une prémédication avec du butorphanol à 0,1 mg/kg par voie intramusculaire (IM) ou de la médétomidine à 4 µg/kg IM était de 1,2 +/- 0,4 mg/kg IV, tandis que cette dose était de 0,8 +/- 0,3 mg/kg IV après une association de ces deux molécules [11].
Les propriétés pharmacologiques de l’alfaxalone offrent la possibilité d’utiliser cet anesthésique général pour l’induction de l’anesthésie, mais aussi pour l’entretien, aussi bien chez le chien que chez le chat. Ses effets secondaires sont limités lors d’une administration à effet associée à une surveillance de la profondeur de l’anesthésie, ce qui permet de l’employer chez des animaux débilités.
Aucun.
Sur le plan pratique, les avantages de l’utilisation de l’alfaxalone sont les suivants :
– une haute marge de sécurité à l’administration unique (surviérapportée à l’emploi de cinq fois la dose cliniquement utilisée) [25] ;
– l’absence d’accumulation cliniquement pertinente après une administration intraveineuse répétée à la dose de 2 mg/kg (métabolisme et élimination rapide) [25] ;
– un réveil et une reprise d’alimentation rapides [4] ;
– une dépression respiratoire négligeable sans apnée lors d’une induction lente à effet [4, 14, 19] ;
– une bonne myorelaxation [3-5] ;
– un pH neutre qui évite un dommage des tissus lors d’une administration périvasculaire accidentelle [6] ;
– des administrations intramusculaire et sous-cutanée permises par la formulation actuelle, mais en dehors du cadre de l’autorisation de mise sur le marché européenne (autorisée en Australie) [17, 22] ;
– un entretien de l’anesthésie en perfusion continue chez le chat et le chien [7, 19].
→ Garder le flacon entamé au réfrigérateur.
→ Nettoyer le bouchon multiponctionnable avec une solution d’alcool à 70 % avant chaque prélèvement.
→ Utiliser une nouvelle aiguille stérile à chaque prélèvement. Changer de seringue si elle est contaminée.
→ Jeter le flacon multiponctionnable en cas de contamination ou de doute.
D’après [22].
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