Un cas de colite histiocytaire réfractaire au traitement médical chez un boxer - Le Point Vétérinaire expert canin n° 369 du 01/10/2016
Le Point Vétérinaire expert canin n° 369 du 01/10/2016

GASTRO-ENTÉROLOGIE CANINE

Cas clinique

Auteur(s) : Julien Fritz*, Maud Ménard**, Henri-Jean Boulouis***, Valérie Freiche****

Fonctions :
*Biopole Alfort – Service de bactériologie
**Service de médecine Interne
Centre hospitalier universitaire
vétérinaire d’Alfort (CHUVA-ENVA)
7, avenue du Général-de-Gaulle, 94704
Maisons-Alfort Cedex

Lors de colite histiocytaire, les démarches diagnostique et thérapeutique se superposent et nécessitent à présent la réalisation d’un antibiogramme. Le pronostic de cette maladie, autrefois incurable, reste réservé.

Un chien boxer mâle entier de 3 ans est présenté en consultation de gastro-entérologie au service de médecine interne pour une diarrhée évoluant au moins depuis son adoption à l’âge de 2 ans (photo 1).

CAS CLINIQUE

1. Anamnèse

Depuis l’acquisition, le chien présente une diarrhée mucoïde, associée à une augmentation de la fréquence des défécations (dix fois par promenade) et à une hématochézie, du ténesme ainsi qu’une urgence à la défécation. Des épisodes de dysorexie concomitants sont également rapportés. Des traitements antiparasitaire (pyrantel, praziquantel, fébantel) et antibiotique (métronidazole) ont été prescrits par le vétérinaire traitant, suivis de peu d’amélioration.

Divers traitements antibiotiques (enrofloxacine pendant 6 semaines, puis association amoxicilline-métronidazole pendant 2 semaines), de même que des anti-inflammatoires stéroïdiens à dose anti-inflammatoire (prednisolone 1 mg/kg/j pendant 2 semaines) ont été administrés.

En raison de la persistance de la diarrhée et de l’aggravation de la dysorexie, l’animal est présenté au service de médecine interne du Centre hospitalier universitaire d’Alfort (CHUVA).

2. Commémoratifs

Le chien est traité contre les parasites internes avec une association de pyrantel, de praziquantel et de fébantel. Il vit dans une maison avec jardin et a des contacts avec d’autres chiens. Il mange des croquettes hypoallergéniques et n’a pas d’antécédent médical notable autre que ses troubles digestifs pour lesquels différents traitements symptomatiques et antimicrobiens ont été mis en place, avec des résultats peu satisfaisants ou transitoires.

3. Examen clinique

À l’examen d’admission, une cachexie est mise en évidence (note d’état corporel [NEC] : 1,5/5 ; poids vif = 25,8 kg). La palpation abdominale est tendue, non douloureuse, et révèle une dilatation des anses intestinales par un contenu liquidien. Les paramètres vitaux sont dans les valeurs usuelles (VU), le reste de l’examen clinique est sans anomalie. Au toucher rectal, la prostate est normale et aucune anomalie n’est observée lors de la palpation de la muqueuse rectale.

4. Bilan clinique

La sémiologie oriente vers une diarrhée d’origine colique (augmentée en fréquence, mucoïde, avec hématochézie, ténesme et urgences à la défécation). Le bilan anamnestique et clinique fait donc état d’une colite cachectisante répondant transitoirement aux traitements antibiotiques et anti-inflammatoires stéroïdiens (à dose anti-inflammatoire), chez un chien boxer mâle entier de 3 ans.

5. Hypothèses diagnostiques

En raison des signes cliniques, différentes hypothèses diagnostiques sont envisagées (tableau 1) [5].

Dans ce contexte, la présentation clinique et la race de l’animal (bien que le traitement à l’enrofloxacine pendant 6 semaines n’ait pas permis d’amélioration) permettent de privilégier l’hypothèse de colite histiocytaire.

Quoique très rare à cette localisation et à cet âge, un lymphome digestif est également envisageable. Les autres hypothèses évoquées sont une entérite répondant aux immunomodulateurs ou une colopathie infectieuse.

6. Examens complémentaires

Analyses sanguines

Un hémogramme et une analyse biochimique sont réalisés afin d’explorer les conséquences de la diarrhée et dans le cadre du bilan préanesthésique endoscopique (tableaux 2 et 3).

L’hémogramme est normal. L’examen du frottis sanguin révèle une acanthocytose et des signes de régénération plaquettaire probablement secondaires à la diarrhée hémorragique. La biochimie sanguine montre une hypoalbuminémie compatible avec une entéropathie chronique à caractère exsudatif, une hyperfolatémie probablement consécutive à une prolifération bactérienne secondaire, ainsi qu’une augmentation des phosphatases alcalines (PAL), probablement cortico-induite. Les autres paramètres mesurés sont dans les VU, en particulier le dosage des TLI (trypsin-like-immunoreactivity), permettant d’exclure une insuffisance pancréatique exocrine, qui semblait peu compatible avec le tableau clinique. La cobalaminémie est dans les VU.

Échographie

Une échographie abdominale est proposée afin d’effectuer un bilan lésionnel. Elle met en évidence des signes marqués de colite transverse et ascendante avec de probables ulcères et une adénomégalie locorégionale modérée (réactionnelle) (photos 2a et 2b). L’exploration du reste de la cavité abdominale ne révèle pas d’autre anomalie.

Endoscopie et biopsies

L’endoscopie par voie basse (vidéo-endoscope Olympus GIF 180) confirme des lésions de colite chronique à caractère ulcératif très marquée dans le côlon ascendant et transverse compatibles avec une colite histiocytaire bactérienne ou une infiltration néoplasique en raison de plages plus dysplasiques à l’examen macroscopique (photos 3a et 3b). Des biopsies coliques perendoscopiques sont ensuite réalisées à l’aide d’une pince à biopsies à cuillères ovales profondes. Une biopsie est transmise au laboratoire de bactériologie pour mise en culture.

Traitement provisoire

En raison de l’anamnèse et des examens complémentaires, une forte suspicion de colite histiocytaire du boxer est émise. Un traitement probabiliste est alors mis en place dans l’attente des résultats des analyses histologique et bactériologique des biopsies coliques: enrofloxacine (5 mg/kg, une fois par jour, par voie orale), métronidazole (6,4 mg/kg, deux fois par jour, par voie orale) et diosmectite (trois sachets, trois fois par jour, par voie orale). L’aliment hypoallergénique est maintenu. Ce traitement n’entraîne qu’une amélioration partielle. Après 5 jours de traitement, une discrète diminution de la fréquence et de l’intensité de la diarrhée est rapportée.

Analyse histologique et bactériologique

L’analyse histologique par coloration à l’hémalun-éosine-safran (HES) confirme le diagnostic de colite histiocytaire (photos 4a et 4b).

L’analyse bactériologique met en évidence deux souches d’Escherichia coli (colonies de taille et d’aspect macroscopique différents), dont une présente une sensibilité intermédiaire pour l’enrofloxacine (tableau 4).

7. Diagnostic

Ces examens permettent de conclure à une colite histiocytaire du boxer dont une des souches d’E. coli présente une sensibilité intermédiaire in vitro pour l’enrofloxacine.

8. Traitement

Le traitement antibiotique est modulé dès réception de l’antibiogramme. De la marbofloxacine (2,2 mg/kg, une fois par jour, par voie orale) est prescrite pendant 8 semaines. La diosmectite et l’alimentation hypoallergénique sont maintenues.

9. Suivi

Après 15 jours

Après 15 jours de traitement, les propriétaires rapportent une améliorationclinique : les selles sont mieux formées, une diminution de la fréquence des défécations est notée, ainsi qu’une disparition de l’hématochézie et une amélioration de l’appétit. Une reprise de poids est également constatée (+ 1 kg). Il est conseillé de poursuivre le traitement et d’augmenter la ration de 20 %.

Après un mois

Après 1 mois de traitement, les propriétaires rapportent une reprise de la diarrhée avec une hématochézie les 5 jours précédents. L’examen clinique ne met pas en évidence de nouvelle anomalie. Une coloscopie est réalisée et montre une persistance des lésions ulcératives, laissant suspecter une récidive. Une nouvelle analyse bactériologique de muqueuse colique révèle à nouveau deux bactéries coliques : un staphylocoque dont la culture n’a pas permis l’identification précise, probablement opportuniste, et une souche d’Escherichia coli. Dans l’attente des résultats de l’antibiogramme et en raison de la rechute clinique et des lésions coliques persistantes, le traitement est modifié. La marbofloxacine est remplacée par de l’ofloxacine (7 mg/kg, une fois par jour, par voie orale) pendant 6 semaines pour des raisons économiques. De la sulfasalazine (25 mg/kg, deux fois par jour, par voie orale) ainsi que de la prednisolone (0,7 mg/kg, une fois par jour, par voie orale) sont ajoutées au traitement pendant 6 semaines. L’alimentation hypoallergénique est maintenue.

L’antibiogramme révèle par la suite le même spectre de résistance que la seconde souche d’Escherichia coli de sensibilité intermédiaire pour l’enrofloxacine, toujours sensible in vitro à la marbofloxacine (tableau 5). Compte tenu de l’amélioration clinique, le traitement antibiotique à base d’ofloxacine est maintenu pendant 4 semaines.

Après trois mois

Après 3 mois, soit 5 semaines après la dernière modulation du traitement, les propriétaires rapportent une résolution complète de la diarrhée et de l’hématochézie : les selles sont moulées et la fréquence de défécation est normale (deux fois par jour). Une prise de poids est constatée (+ 8 kg en comparaison du poids le jour de la consultation initiale, NEC = 3,5/5). L’animal présente une polyuro-polydipsie et une polyphagie attribuées aux effets secondaires des anti-inflammatoires stéroïdiens. Son état général est bon et aucune anomalie n’est notée à l’examen clinique. L’analyse biochimique révèle une augmentation des paramètres hépatiques (PAL = 380 U/l, VU : 50 à 110 ; alanine aminotransférase [Alat] = 171 U/l, VU : 15 à 155), probablement cortico-induite, sans autre anomalie (urée = 0,33 g/l ; créatinine = 13 mg/l ; glycémie = 1,05 g/l) avec une normalisation de l’albuminémie (albumine = 36 g/l ; protéines totales = 67 g/l). L’antibiothérapie à base d’ofloxacine est poursuivie à la même dose (7 mg/kg, une fois par jour, par voie orale) pendant 3 semaines, en association avec la prednisolone à dose dégressive (0,46 mg/kg, une fois par jour, par voie orale, pendant 1 semaine, puis 0,15 mg/kg, une fois par jour, par voie orale, pendant 2 semaines). Enfin, la sulfasalazine est arrêtée.

Après vingt mois

Au suivi à 20 mois après la consultation initiale et 15 mois après l’arrêt de tout traitement, le propriétaire rapporte que son chien est en bon état général, mais présente par intermittence une diarrhée à caractère colique modéré avec une rare hématochézie.

DISCUSSION

1. Épidémiologie

La colite histiocytaire concernerait 5,1 % des boxers dans une publication (27 boxers sur 527 dans l’étude de Bush et coll. [1]).

Cette entité a fait l’objet de publications chez le bouledogue français, le mastiff, le pinscher et l’alaskan malamute. Un cas isolé est rapporté chez le chat [8]. Considérée comme incurable depuis sa description en 1965 jusqu’en 2004, la colite histiocytaire est à présent mieux connue et mieux traitée. La guérison du chien du cas décrit semble d’autant plus difficile à évaluer que la bactérie responsable est résistante à l’enrofloxacine, contrairement à la majorité des cas décrits.

2. Une maladie récente et encore peu connue

La colite histiocytaire est une maladie décrite aux États-Unis depuis 1965 [13]. Elle était considérée comme une entéropathie répondant aux immunomodulateurs, incurable jusqu’en 2004, où des succès thérapeutiques, après traitement à l’enrofloxacine, ont pour la première fois été décrits [8]. Les progrès de l’immuno-histochimie ont permis de mettre en évidence des Escherichia coli adhésives et entéro-invasives colonisant la muqueuse colique à la faveur d’une dysplasie colique d’origine dysimmunitaire [12]. Cela démontre la proximité phylogénique, ainsi que des similitudes génotypiques et phénotypiques, des facteurs de virulence des souches d’E. coli responsables de colite histiocytaire canine et de la souche LF82 d’E. coli impliquée dans la maladie de Crohn chez l’homme [12].

Il existe peu d’études portant sur de larges cohortes, a fortiori lorsque les bactéries responsables sont résistantes à l’enrofloxacine [2, 8, 11].

3. Quel traitement mettre en place ?

Démarche thérapeutique

Les recommandations actuelles concernant la démarche diagnostique des colites du chien préconisent dans un premier temps la prescription d’un antiparasitaire interne et la mise en place d’un régime hypoallergénique qui a été instauré chez le chien du présent cas dès le début des signes cliniques [9].

Lors de colite histiocytaire confirmée par analyse histologique, et dans ce cas uniquement, le traitement repose sur l’administration d’un antibiotique auquel la souche est sensible, dans le cadre réglementaire récent décrit ci-après.

Nécessité d’un antibiogramme

Un décret modifiant le Code de la santé publique, entré en vigueur au 1er janvier 2016, réglemente désormais la prescription des antibiotiques critiques dont la liste à été publiée par arrêté le 18 mars 2016. Il interdit la prescription des fluoroquinolones de troisième et quatrième générations sans antibiogramme démontrant une résistance aux antibiotiques non critiques. Cet antibiogramme, qui doit être réalisé selon la norme Afnor NFU 47-106 ou NFU-47-107 dans un délai de 3 mois au maximum avant prescription de l’antibiotique critique, est désormais une obligation légale. Sa prescription ne peut excéder 4 semaines sans nouvel examen clinique [13].

Chez ce boxer, dont la prise en charge a eu lieu avant l’entrée en vigueur de ce décret, l’enrofloxacine avait été administrée à une dose non rapportée, pendant une période de 6 semaines. Il a été démontré que la résistance plasmidique aux quinolones est nettement supérieure après un traitement à une dose inférieure ou sur une durée trop courte [7, 8]. Dans l’attente des résultats de l’antibiogramme initial, le premier traitement reposait sur l’administration d’enrofloxacine à 5 mg/kg/j par voie orale. D’après le résumé des caractéristiques de la présentation galénique choisie, à cette dose, la concentration sérique maximale est atteinte à 1,5 mg/l à 1 heure, et la molécule diffuse dans tous les tissus à une concentration au moins égale à celle-ci. L’antibiogramme a révélé par la suite une sensibilité intermédiaire in vitro de l’enrofloxacine pour une concentration minimale inhibitrice de 1 mg/l, soit une dose inférieure à celle administrée, ce qui semble cohérent avec l’échec thérapeutique.

Fréquence et causes possibles de la résistance à l’enrofloxacine

La résistance à l’enrofloxacine ne serait cependant pas marginale. Dans une étude incluant 14 chiens atteints de colite histiocytaire, une résistance à cet antibiotique est observée pour 6 chiens (analyse bactériologique sur biopsie colique) sur les 14 que comportait l’étude (43 %) [2]. Dans cette étude, les auteurs rapportent, comme pour le chien présenté, un cas d’échec thérapeutique alors que la souche est sensible in vitro à l’antibiotique administré (amoxicilline). Ces éléments soulignent à la fois les limites des informations fournies par un antibiogramme et l’importance de la pharmacodynamie (capacité de diffusion de l’antibiotique jusqu’à la bactérie ayant pénétré la muqueuse colique) [2].

Ici, en raison du premier antibiogramme, le choix s’est porté sur l’utilisation de la marbofloxacine, qui a permis une régression seulement transitoire des signes cliniques malgré une durée de traitement adaptée (8 semaines). En raison de la récidive, craignant l’apparition d’une résistance, et pour des raisons économiques, de l’ofloxacine a été prescrite à la place de la marbofloxacine. Cet antibiotique, prescrit dans la prise en charge du présent chien en 2015, fait désormais partie de la liste des antibiotiques réservés à l’usage humain et interdits à la prescription vétérinaire depuis le 1er janvier 2016 (article R. 5141-117-2) [13]. La distorsion entre les résultats de l’antibiogramme (qui révélait toujours une sensibilité de la souche d’E. coli à la marbofloxacine) et la réponse clinique défavorable peut s’expliquer :

– par les limites inhérentes aux informations fournies par un antibiogramme ;

– par le fait que la souche d’E. coli isolée à l’analyse bactériologique sur biopsie colique peut correspondre à une souche commensale, et non à la souche entéro-invasive responsable des signes cliniques [3].

Une observation similaire avait été soulignée dans une étude comportant 14 boxers atteints de colite histiocytaire: sur les 6 chiens présentant une résistance à l’enrofloxacine, 100 % montraient une résistance aux autres fluoroquinolones testées (la marbofloxacine, la ciprofloxacine et l’orbifloxacine) [2].

Thérapeutique adjuvante

Il est complexe de savoir si la réponse clinique favorable observée résulte uniquement du changement d’antibiotique dans la mesure où de la prednisolone et de la sulfasalazine ont été ajoutées conjointement au traitement. En effet, certains auteurs rapportent une stabilisation clinique avec l’utilisation d’anti-inflammatoires à tropisme digestif, de sulfasalazine et de mésalazine, considérant la proximité pathogénique entre la colite histiocytaire du chien et la maladie de Crohn chez l’homme [14].

L’introduction de la sulfasalazine peut avoir eu un effet synergique dans le traitement du chien de ce cas.

L’utilisation des immunomodulateurs pour le traitement de la colite histiocytaire reste encore controversée. Pour le cas rapporté, de la prednisolone a été prescrite, à dose anti-inflammatoire.

Enfin, une alimentation hypoallergénique est également conseillée par certains auteurs comme un adjuvant à la thérapeutique, et celle-ci a été mise en place d’emblée chez ce chien [2].

4. Comment optimiser le diagnostic et effectuer le suivi ?

L’examen gold standard repose sur la mise en évidence d’inclusions des histiocytes par coloration periodic acid schiff (PAS), qui est pathognomonique de la colite histiocytaire. Chez le chien du cas décrit, la présentation épidémio-clinique était suffisamment évocatrice pour établir le diagnostic avec une coloration HES associée à la culture bactérienne.

De plus, la World Small Animal Veterinary Association (WSAVA) a mis au point une grille de critères histologiques permettant d’évaluer objectivement l’intensité des lésions de la muqueuse colique [4]. Selon ces critères, la colite de ce chien était initialement considérée comme marquée. D’après l’étude de German et coll., les lésions de colite histiocytaire régressent histologiquement sur une durée de 6 mois. Cependant, les critères de cette étude reposent sur la fixation du colorant acid-schiff sur les macrophages, considéré comme pathognomonique, et non sur les critères WSAVA (s’intéressant notamment à l’aspect des cryptes et aux cellules de la lamina propria) utilisant la coloration HES, d’usage plus courant [6]. Dans le cas rapporté, il pourrait être approprié de réaliser un suivi des lésions par ces grilles d’évaluation histologique.

Sur le plan bactériologique, l’hybridation in situ en fluorescence (Fish) (actuellement disponible en routine seulement aux États-Unis et au Royaume-Uni) est l’examen qui permet de mettre en évidence et de suivre l’évolution des E. coli adhésives et invasives en effectuant un suivi par analyse bactériologique de muqueuse colique, afin de confirmer l’élimination des bactéries [6, 11]. De plus, la colonisation bactérienne étant secondaire à une dysplasie colique, il est légitime de se demander si une récidive est possible. Le suivi clinique reste le moyen de suivi le plus sensible.

Enfin, l’évaluation de la réponse au traitement d’une colite histiocytaire repose sur un suivi clinique et paraclinique (évaluation des conséquences hémato-biochimiques et, en particulier, suivi de l’albuminémie et de l’hémogramme).

5. Quels facteurs pronostiques pour le présent cas clinique ?

La colite histiocytaire, autrefois considérée comme incurable, reste toutefois une maladie dont le pronostic est réservé. La durée du traitement et le suivi clinique ont été évalués dans plusieurs études:

– Hostuler et coll. rapportent une rémission clinique sous traitement pour 9 chiens sur 9 (100 %), dont 3 chiens présentant une guérison clinique 14 mois après arrêt du traitement (33 %). Une amélioration clinique entre 3 et 12 jours semble être de bon pronostic [8]. Cela a été le cas de ce chien après l’administration d’ofloxacine ;

– Mansfield et coll. font état de 6 chiens (sur les 7 que comporte l’étude) pour lesquels le traitement a dû être maintenu (durée non précisée) et de 1 chien euthanasié pour lequel la bactérie était résistante à l’enrofloxacine, l’administration d’amoxicilline n’ayant pas été suivie d’une amélioration clinique [11]. Enfin, en raison de la composante dysimmunitaire de cette affection, les récidives seraient très fréquentes, d’après les auteurs des études précitées, bien que les pourcentages ne soient pas cités.

Le pronostic vital ne semble pas engagé à court terme pour le chien du cas décrit, mais sa guérison clinique sans traitement au long cours reste incertaine.

Conclusion

La nouvelle réglementation en vigueur concernant la prescription d’un antibiotique “critique” chez les animaux de compagnie va impacter la prise en charge de cette maladie, notamment par l’obligation légale de la réalisation d’un antibiogramme (de préférence après réalisation d’une Fish sur prélèvement de muqueuse colique) avant prescription d’une fluoroquinolone de troisième et quatrième générations. Si cette réglementation peut apparaître contraignante pour le praticien, il est important de souligner que différentes études confirment le risque de transmission de bactéries antibiorésistantes à l’homme [10].

Bien que la transmission à l’homme d’E. coli multirésistante d’origine canine n’ait pas été démontrée, ces observations doivent amener le vétérinaire praticien à un respect strict de la réglementation, mais aussi à informer le propriétaire et à inciter à prendre des précautions hygiéniques.

Références

  • 1. Bush et coll. Boxer colitis. Vet.Rec.1992;130(9):191.
  • 2. Craven M, Dogan B, Schukken A. Antimicrobial resistance: impacts clinical outcome of granulomatous colitis in boxer dogs, J. Vet. Intern. Med. 2010;24(4):819-824.
  • 3. Craven M, Simpson KW. Granulomatous colitis of boxer dogs. Vet. Clin. Small Anim. 2011;41:433-445.
  • 4. Day MJ, Washabau R. Histopathological standards for the diagnosis of gastrointestinal inflammation in endoscopic biopsy samplesfrom dog and cat: a report from the World Small Animal Veterinary Association gastrointestinal standardization group, J. Comp. Pathol. 2008;138:146
  • 5. Ettinger SJ, Feldman EC. Textbook of veterinary internal medicine. 7th ed. Saunder-Elsevier. 2010;2:1589-1591.
  • 6. German AJ, Hall EJ, Day MJ. An immunohistochemical study of histiocytic ulcerative colitis in boxer dogs. J. Comp. Pathol. 2000;122:163-175.
  • 7. Guarbadassi L, Schwarz S, Lloyd DH. Pet animal as reservoir of antimicrobial-resistant bacteria. J. Antimicrobial. Chemotherapy. 2004;54:321-332.
  • 8. Hostuler RA, Luria BJ, Guilford WG. Antibiotic-responsive histiocytic ulcerative colitis in 9 dogs., J. Vet. Intern. Med. 2004;18:499-504.
  • 9. Lechowski R, Cotard JP, Boulouis. J. Proper use of quinolones for canine colitis ambulatory treatment: literature review and request guidelines. J. Vet. Sci. 2013;16:193-197.
  • 10. Leonard E. K. Risk factors for carriage of antimicrobial-resistant Salmonella spp. and Escherichia coli in pet dogs from volunteer households in Ontario, Canada, in 2005 and 2006, Am. J. Vet. Res., 2015;76(11):959-968.
  • 11. Mansfield CS, James FE, Simpson KW. Remission of histiocytic colitis in boxer dogs correlates with eradication of invasive intramucosal Escherichia coli. J. Vet. Intern. Med. 2009;23:964-969.
  • 12. Simpson KW, Dogan B, Schukken YH. Adherent and invasive Escherichia coli is associated with granulomatous colitis in boxer dogs. Infection and Immunit. 2006:4778-4792.
  • 13. Site internet. www.legifrance.gouv.fr. JORF. 18 mars 2016;n°0066:texte40.
  • 14. Van Kruiningen et coll. A granulomatous colitis of dogs with histologic resemblance to Whipple’s disease. Pathol. Vet. 1965;2:521-544.

Conflit d’intérêts

Aucun.

REMERCIEMENTS

Au docteur Reyes-Gomez pour ses conseils, et à Corinne Bouillin et Christelle Gandoin pour leur soutien technique au Biopôle d’Alfort.

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