Le PIIINP dans le diagnostic de l’hypersomatotropisme et le suivi de la réponse au traitement chez le chat diabétique - Le Point Vétérinaire expert canin n° 369 du 01/10/2016
Le Point Vétérinaire expert canin n° 369 du 01/10/2016

ENDOCRINOLOGIE FÉLINE

Analyse d’article

Auteur(s) : Magali Decome

Fonctions : Faculté de médecine vétérinaire
3200, rue Sicotte
Service de médecine interne
Saint-Hyacinthe
J25 2M2 Canada

L’acromégalie est due à une surproduction d’hormone de croissance (GH), la plupart du temps secondaire à la présence d’une tumeur hypophysaire acidophile [7, 10]. D’autres hormones hypophysaires peuvent également être produites par l’adénome (GH, prolactine et thyréostimuline [TSH]) [8].

HYPERSOMATOTROPISME ET DIABÈTE SUCRÉ

Des auteurs estiment que 10 à 26 % des chats atteints d’acromégalie présentent un diabète sucré secondaire [1, 10]. Toutefois, il est probable que la prévalence de l’hypersomatotropisme soit sous-estimée.

Lors d’acromégalie, l’ensemble des tissus est exposé à une concentration supérieure à la normale en hormone de croissance, mais également au facteur de croissance analogue à l’insuline (IGF)-1. Les principaux signes cliniques observés lors d’acromégalie sont secondaires aux effets anaboliques et cataboliques de la GH et anaboliques de l’IGF-1. Une insulinorésistance est observée à la suite d’une réduction du nombre de récepteurs à l’insuline, d’une diminution de leur sensibilité, d’une altération de l’activité de l’insuline kinase, ainsi que de la baisse de l’expression des adipocytokines sensibles à l’insuline (adiponectine et visfatine) [2, 8, 10].

L’insulinorésistance observée lors d’acromégalie implique généralement une augmentation de la dose nécessaire d’insuline, dépassant 1,5 à 2 UI/kg/12 h.

COMMENT DIAGNOSTIQUER UN HYPERSOMATO­TROPISME ?

Un hypersomatotropisme doit être suspecté chez un chat atteint de diabète difficile à contrôler. Les mâles castrés d’âge moyen et âgés sont surreprésentés dans cette population. En plus de leur grande taille ou des modifications anatomiques (longues pattes, prognathisme, changements faciaux, organomégalie, etc.), des signes respiratoires (stridor), cardiaques (souffle), neurologiques et orthopédiques (boiterie et démarche plantigrade) sont souvent présents. Une hyponatrémie, une hypercholestérolémie et une augmentation légère des paramètres hépatiques peuvent aussi être observées, parfois associées à une hypercétonémie, à une hyperprotéinémie, à une hyperphosphatémie, à une maladie rénale chronique, à une cardiomyopathie hypertrophique ou à une hypertension artérielle systémique. Ces découvertes restent toutefois non spécifiques [3, 6, 8-10].

Le dosage de la GH est peu réalisé pour établir le diagnostic de l’hypersomatotropisme car sa production est pulsatile. Son manque de sensibilité justifie l’utilisation de méthodes indirectes, telles que le dosage de la concentration sérique en IGF-1. La sensibilité et la spécificité de celui-ci sont estimées à 84 % et à 92 % respectivement [1]. Récemment, différentes études se sont intéressées aux mesures alternatives, telles que le dosage de la ghréline ou du PIIINP (N-terminal type III procollagen propeptide). La ghréline est un peptide orexigène. La GH exerçant un rétrocontrôle négatif sur sa production, sa concentration diminue lors d’hypersomatotropisme [4].

Le PIIINP reflète la production de collagène. La GH stimulant la production de tissu mou ou osseux, elle active donc aussi celle de collagène. Chez l’homme, la concentration sérique en PIIINP est corrélée à celle en GH. Chez le chat, encore très peu d’études existent sur ce propeptide, mais, selon l’article étudié ici, il semble que la sensibilité et la spécificité de ce dosage pour différencier un diabète secondaire à un hypersomatotropisme d’un diabète sucré primaire soient de 86,7 % et de 100 %, respectivement. Ce test permettrait donc d’identifier les faux positifs ou les faux négatifs découlant du dosage de l’IGF-1 [5]. Les principales limites de cette étude sont l’effectif réduit et l’absence de confirmation histopathologique d’hypersomatotropisme chez tous les chats.

COMMENT SUIVRE LA RÉPONSE AU TRAITEMENT ?

La plupart du temps, à la suite d’une hypophysectomie ou d’un traitement radiothérapeutique, seule une surveillance clinique est réalisée pour évaluer la réponse au traitement. Différents auteurs ont donc recherché d’éventuels marqueurs de celle-ci.

Si l’IGF-1 semble être un test diagnostique intéressant pour le diagnostic de l’acromégalie, en revanche, ce dosage est peu fiable dans le suivi de la réponse au traitement après radiothérapie. Une des études sur le sujet ne rapporte aucune diminution significative de l’IGF-1 avant et après le traitement, alors que la concentration en ghréline des chats traités augmente progressivement pour devenir comparable à celle des chats sains. La ghréline est donc un biomarqueur fiable de la réponse au traitement, contrairement à l’IGF-1 [4].

De même, dans l’article étudié ici, une diminution significative de la concentration en PIIINP est observée chez 12 des 16 chats atteints d’hypersomatotropisme et traités par hypophysectomie. Une hausse est notée chez 4 chats, laquelle pourrait être liée au processus de cicatrisation faisant appel à la synthèse de collagène. Cette observation a d’ailleurs déjà été faite à la suite d’une chirurgie orthopédique [5].

Chez les chats traités par radiothérapie, une augmentation du PIIINP est aussi observée. Les auteurs suggèrent une différence dans l’efficacité du traitement (hypophysectomie versus radiothérapie), bien qu’une amélioration clinique soit observée dans les deux cas. Une erreur statistique n’est pas exclue, en raison du petit nombre de cas traités par radiothérapie (5 chats) [5].

Conclusion

Le dosage du PIIINP posséderait une bonne sensibilité et une bonne spécificité pour le diagnostic de l’hypersomatotropisme chez les chats diabétiques, et semble intéressant dans le suivi de ceux qui sont traités par hypophysectomie. D’autres études sont toutefois nécessaires pour confirmer ces résultats.

Conflit d’intérêts

Aucun.

RÉSUMÉ

OBJECTIFS

Étudier et comparer la concentration sérique en PIIINP (N-terminal type III procollagen propeptide) chez les chats atteints de diabète secondaire à un hypersomatotropisme avec celle de chats qui présentent un diabète sucré primaire, et suivre son évolution après traitement.

MÉTHODE

Des échantillons de sérum provenant d’études précédentes sont utilisés et séparés en deux groupes : les uns provenant de chats atteints de diabète sucré primaire, sans signe d’insulinorésistance, et les autres de chats qui présentent un diabète secondaire à un hypersomatotropisme. Ce dernier est confirmé par une lésion hypophysaire visualisée par imagerie médicale associée à une augmentation en facteur de croissance analogue à l’insuline (IGF)-1 (> 1 000 ng/ml) ou à une confirmation histopathologique. Un kit Elisa humain est utilisé pour le dosage du PIIINP.

RÉSULTATS

• Le kit Elisa humain est validé pour le dosage du PIIINP félin.

• La concentration en PIIINP est augmentée chez les chats atteints d’hypersomatotropisme par rapport aux chats atteints de diabète sucré primaire.

• La sensibilité et la spécificité du PIIINP pour différencier un diabète sucré primaire d’un diabète secondaire à un hypersomatotropisme sont de 86,7 % et de 100 % respectivement.

• Le PIIINP augmente chez les 5 chats atteints d’hypersomatotropisme qui ont été traités par radiothérapie (RT) entre la valeur pré-RT et la valeur 6 mois post-RT.

• Le PIIINP diminue chez 12 des 16 chats atteints d’hypersomatotropisme et traités par hypophysectomie entre la valeur avant l’intervention chirurgicale et 5 mois après.

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