CHIRURGIE ORTHOPÉDIQUE
Analyse d’article
Auteur(s) : Quentin Cabon
Fonctions : Service de chirurgie
VetAgro Sup
Campus vétérinaire de Lyon
1, avenue Bourgelat
69280 Marcy-L’Étoile
La spondylomyélopathie cervicale caudale (SCC), également dénommée syndrome de Wobbler, est caractérisée par une anomalie de développement de la colonne vertébrale cervicale ayant pour conséquence une compression de la moelle épinière et/ou des racines nerveuses, à l’origine de douleurs cervicales et de signes neurologiques [9].
Sous la dénomination de SCC sont regroupées deux affections dont la pathogénie diffère : les SCC secondaires à des anomalies osseuses versus les SCC secondaires à des anomalies du disque intervertébral. Les espaces intervertébraux les plus fréquemment affectés sont C5-C6 et C6-C7, en raison d’une rotation axiale et d’une torsion trois fois plus importante dans la portion caudale de la moelle épinière en comparaison avec la portion craniale [9]. La “SCC discale” est diagnostiquée chez des chiens de grande race, d’âge adulte. Le doberman est très fortement prédisposé. En plus de présenter un canal médullaire de taille réduite, voire sténosé, ces chiens souffrent d’une hernie discale protrusive de type Hansen II, principale responsable de la compression médullaire [8, 9]. La “SCC osseuse” est, quant à elle, identifiée principalement chez de jeunes chiens de races géantes, tels que le dogue allemand. Elle est caractérisée par une sténose sévère du canal médullaire (dorsale, dorso-latérale ou latérale), principalement responsable de la compression médullaire [4, 7]. Une arthrose facettaire peut également s’ajouter à la compression médullaire, ainsi que, plus rarement, une protrusion discale, une hypertrophie du ligament jaune et des kystes synoviaux extraduraux [9].
En plus des lésions statiques énumérées ci-dessus existent des lésions dynamiques dans la pathogénie de la SCC, qui, selon la position du cou (flexion, extension ou traction), peuvent améliorer ou aggraver la compression médullaire [10, 12]. Les signes cliniques sont donc la conséquence de la combinaison d’anomalies primaires, comme la sténose du canal vertébral, associées à des lésions secondaires (protrusion discale, arthrose facettaire). Les cas de SCC discale ont une composante majoritairement dynamique, tandis que les cas de SCC osseuse sont très majoritairement à composante statique [9].
L’évaluation de l’aspect dynamique de la compression est très importante pour guider le choix du traitement. Ainsi, des images en extension et en flexion du cou sont nécessaires, ainsi que des clichés sur lesquels le cou apparaît maintenu en traction. Parmi les différentes méthodes d’imagerie médicale, l’IRM est considérée comme l’examen de choix, les vues en traction étant réalisables également [12]. En cas d’indisponibilité, des radiographies associées à une myélographie ou à un myéloscan sont indiquées. L’évaluation de la composante dynamique d’une SCC est toutefois encore très subjective à l’heure actuelle [9].
Le traitement conservateur est généralement considéré comme temporaire, avant d’envisager une intervention chirurgicale. Une étude récente a permis d’observer une régression des signes chez 54 % et 81 % des chiens traités respectivement médicalement et chirurgicalement. L’auteur conclut à une meilleure chance de récupération à la suite du traitement chirurgical, sans différence entre les deux groupes en matière de survie et de qualité de vie à long terme [3].
La prise de décision chirurgicale dépend de plusieurs facteurs : sévérité de la douleur et des signes neurologiques, type de compression médullaire, éventuelle réponse au traitement médical, attentes du propriétaire, existence d’une maladie concomitante avec un impact sur le pronostic à long terme [8]. Une fois l’intervention décidée, de nombreuses techniques chirurgicales sont décrites afin de traiter la SCC, témoignant de l’absence de consensus à ce jour, conséquence d’une pathogénie encore incomprise [1-3, 5, 6, 8, 9, 11].
Les techniques chirurgicales ont toutes pour objectif la décompression médullaire, de manière directe (laminectomie dorsale, corpectomie ventrale, hémilaminectomie) ou indirecte (distraction-stabilisation, prothèse discale). Les techniques de décompression directe sont indiquées dans le traitement des SCC osseuses avec compression dorsale ou latérale, la corpectomie ventrale étant réservée au traitement des compressions ventrales statiques [2, 9]. En cas de lésion dynamique, souvent observée lors de SCC discale, les techniques de distraction-stabilisation sont indiquées [3, 5, 8, 9, 11]. Elles peuvent également améliorer un chien souffrant de SCC osseuse [6]. La distraction est réalisable par différents implants : bloc de polyméthylméthacrylate (PMMA), broche courbée, greffe osseuse cortico-spongieuse, cages ou vis de distraction dont l’utilisation peut ou non être spécifique du traitement de la SCC [1-3, 5, 6, 8, 9, 11]. Une fois l’espace intervertébral en distraction, la stabilisation vertébrale est réalisée par des vis ou des broches maintenues par du PMMA, ou, plus fréquemment, par des plaques et des vis. Les implants verrouillés sont associés à un risque de débricolage des vis beaucoup moins élevé que les implants standards [9]. De plus, les vis peuvent être monocorticales, tout en conservant une solidité suffisante à la stabilité du montage, permettant de réduire les risques de pénétration du canal médullaire [9]. Une des limites des techniques de fusion vertébrale est l’apparition d’un effet domino, responsable d’une dégénérescence accélérée sur les disques adjacents, et donc d’un risque de récidive élevé, aux alentours de 30 % [3, 9]. Afin de réduire ce risque, des prothèses de disques, ayant pour objectif de conserver la mobilité vertébrale normale tout en décomprimant la moelle épinière par distraction, sont actuellement explorées [1]. Environ 80 % des chiens traités chirurgicalement pour une SCC présentent une amélioration postopératoire. À ce jour, aucune étude comparative n’a été effectuée entre les différentes techniques.
La SCC est un phénomène complexe. La compréhension précise de la lésion chez un individu donné permet d’adapter au mieux la prise en charge, notamment en matière de traitement chirurgical, car aucun consensus n’existe à ce jour.
Aucun.
OBJECTIF
Décrire la technique et les résultats associés au traitement de la spondylomyélopathie cervicale caudale (SCC) par distraction-stabilisation à l’aide d’une vis intervertébrale et de plaques verrouillées.
MÉTHODE
Les chiens présentés pour une compression médullaire secondaire à une SCC ont été inclus rétrospectivement. Les chiens ont été traités par technique de distraction-stabilisation. Les implants utilisés sont une vis intervertébrale en titane de forme conique, permettant de réaliser la distraction vertébrale, ainsi qu’une ou deux plaques ventrales de type SOP(r) (string of pearls, pour collier de perles), fixées à l’aide de vis standards monocorticales. Un indice de distraction a été calculé sur les radiographies.
RÉSULTATS
• 16 chiens inclus, dont 11 traités avec deux plaques.
• Tous les chiens présentent une hernie de type Hansen II (unique lésion chez 8 chiens). Elle constituait l’unique lésion chez 8 d’entre eux.
• Nombre de sites affectés : un seul pour 81 % des individus (C6-C7 surtout), multiples pour 19 % d’entre eux.
• Autres lésions : déformation du corps de C7, hypertrophie des facettes articulaires dorsales.
• Distraction significative entre les phases préopératoire et postopératoire immédiate : + 6,6 %. Distraction non significative entre la phase préopératoire et le suivi à 6 semaines : + 2,8 %.
• Aucune différence de distraction entre une ou deux plaques.
• Pontage osseux à 6 semaines chez 10 des 16 chiens.
• Statut neurologique postopératoire : 9 améliorés, 6 inchangés, 1 aggravé. Statut neurologique à 6 semaines : 15 améliorés, dont 8 chiens normaux, 1 inchangé.
• Complications : le plus souvent mineures et à court terme (8 écrasements de la vis dans les plaques terminales vertébrales), 3 majeures (saignement, infection de plaie, effet domino).
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