GASTRO-ENTÉROLOGIE CANINE
Analyse d’article
Auteur(s) : Magali Decome
Fonctions : Faculté de médecine vétérinaire
3200, rue Sicotte
Service de médecine interne,
Saint-Hyacinthe
J25 2M2, Québec, Canada
Une maladie inflammatoire chronique des intestins (MICI) est une entéropathie chronique dont les signes cliniques persistent depuis plus de 3 semaines ou qui sont récurrents. Le diagnostic définitif est établi sur la base des résultats histopathologiques démontrant un infiltrat inflammatoire de la muqueuse intestinale. L’estimation du pronostic reste extrêmement difficile. Des index cliniques et des grades histologiques sont décrits, mais aucune corrélation entre ceux-ci n’a pu être mise en évidence.
La sévérité d’une MICI est classée selon deux scores en médecine vétérinaire : le score CIBDAI (Clinical Inflammatory Bowel Disease Activity Index) et le score CCECAI (Canine Chronic Enteropathy Clinical Activity Index). Ces deux scores reposent sur l’attitude de l’animal, son appétit, la présence de vomissements, la consistance et la fréquence des selles et une perte de poids pour le premier, en ajoutant la concentration sérique en albumine, la présence d’une ascite ou d’un oedème périphérique, ainsi que de prurit pour le second [1, 5]. Ainsi, une MICI peut être qualifiée de légère, de modérée, de sévère ou de très sévère, selon l’index utilisé.
D’autres marqueurs potentiels de la sévérité de l’atteinte ont été étudiés tels que la concentration sérique en protéine C réactive, la cobalaminémie ou l’albuminémie [1]. La concentration en vitamine D semble être un facteur pronostique intéressant en médecine humaine pour le suivi de nombreuses maladies pouvant entraîner la mort [10].
Chez de nombreuses espèces, la vitamine D est produite dans la peau (isomérisation du 7-déhydrocholestérol par les rayons ultraviolets), mais ce n’est pas le cas chez le chien et le chat. Chez ces derniers, elle est majoritairement apportée par l’ingestion de vitamines D2 et D3. Une fois absorbées, ces dernières sont liées à des protéines et transportées vers le foie ou stockée dans les graisses. La 25-hydroxyvitamine D (25(OH) D) est produite dans le foie par hydroxylation. Son temps de demi-vie est de 2 semaines environ et sa concentration sérique reflète la concentration en vitamine D [2]. La 1,25-dihydroxyvitamine D (1,25(OH)D) est le métabolite le plus actif de la vitamine D et découle d’une deuxième hydroxylation, contrôlée par l’enzyme 1α-hydroxylase dont l’activité est régulée par la glande parathyroïde. La vitamine D est primordiale pour la régulation de la concentration sanguine en calcium ionisé et en phosphore. Ainsi, lorsque la concentration en calcium ionisé est faible, l’hormone parathyroïdienne (PTH) stimule la production rénale de 1α-hydroxylase [8]. La 1,25(OH)D favorise l’absorption intestinale de calcium et la mobilisation de celui-ci par les os.
Le tractus gastro-intestinal ayant un rôle primordial chez le chien et le chat dans le maintien de la concentration en vitamine D, une hypovitaminose D et observée lors de MICI. Toutefois, dans ces affections, le mécanisme de l’hypovitaminose D, probablement multifactoriel, est encore mal compris.
Un manque d’apport, secondaire à une baisse d’appétit, est suggéré. Cependant, son influence n’est pas établie, la concentration en 25(OH)D étant inférieure chez les chiens atteints de MICI, en comparaison avec des chiens hospitalisés pour des maladies non gastro-intestinales et présentant également pour la plupart un manque d’appétit. Le défaut d’absorption secondaire à l’inflammation de la muqueuse intestinale ou à une lymphangiectasie est également suspecté. De plus, il semble que la concentration en vitamine D soit négativement corrélée aux marqueurs de l’inflammation tels que des cytokines proinflammatoires et les protéines de la phase aiguë de l’inflammation, pour des raisons encore inconnues [4, 9, 11].
De nombreuses études ont relevé une corrélation entre la concentration en 25(OH)D et la mortalité en médecine humaine, dont une méta-analyse [10]. Des essais similaires ont été réalisés chez le chien et le chat, qui montrent que le risque de mortalité est plus élevé chez les animaux présentant une hypovitaminose D.
Enfin, s’il est accepté que l’hypovitaminose D soit la conséquence d’une MICI, des études récentes menées chez les rongeurs suggèrent qu’une hypovitaminose D pourrait prédisposer à une atteinte intestinale. En effet, la vitamine D semble être importante dans la régulation de la réponse immunitaire à la flore commensale et dans le maintien des populations bactériennes normales [3, 7]. De plus, d’après les résultats d’une étude menée in vitro, la vitamine D jouerait également un rôle important dans le maintien de l’intégrité de la muqueuse et de la fonction de barrière gastro-intestinale [6].
La concentration en vitamine D est de plus en plus considérée comme un facteur pronostique dans de nombreuses affections, dont les MICI. Une valeur basse est associée à un plus haut risque de mortalité. Toutefois, des superpositions importantes entre les groupes sont observées dans les études. De plus, il semble qu’une hypovitaminose D, souvent considérée comme la conséquence d’une MICI, puisse être également un facteur prédisposant. Actuellement, l’intérêt de la mise en place d’une complémentation en vitamine D en cas de MICI reste à étudier.
Aucun.
OBJECTIFS
Doser la concentration sérique en vitamine D (25(OH)D) chez des chiens atteints d’entéropathie chronique et déterminer leur évolution clinique.
MÉTHODE
Il s’agit d’une étude rétrospective (2007-2013) qui inclut des chiens qui présentent des signes cliniques compatibles avec une entéropathie chronique et chez lesquels un diagnostic histopathologique de maladie inflammatoire chronique des intestins (MICI) a été établi. La concentration sérique en 25(OH)D est mesurée de façon rétrospective sur des échantillons congelés à - 70 °C. La sévérité de la MICI est estimée selon le score CIBDAI (Canine Inflammatory Bowel Disease Activity Index).
RÉSULTATS
• 41 chiens sont inclus dans l’étude. Ils sont classés en deux groupes (les survivants au moment de l’étude : 26 animaux ; les nonsurvivants : 15 animaux).
• Le diagnostic histopathologique est comparable entre les groupes et compatible avec une entérite lymphoplasmocytaire ou mixte lymphoplasmocytaire et éosinophilique.
• La concentration en 25(OH)D, en albumine et en calcium total est significativement inférieure dans le groupe des non-survivants.
• L’âge et le score CIBDAI sont significativement supérieurs dans le groupe des non-survivants, mais les changements histopathologiques ne sont pas significativement différents entre les deux lots.
• Un odds ratio de 1,08 est observé pour le risque de mort lors d’hypovitaminose D.
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