COMPLICATIONS DE CHIRURGIE RESPIRATOIRE
Analyse d’article
Auteur(s) : Quentin Cabon
Fonctions : Service de chirurgie
VetAgro Sup
Campus vétérinaire de Lyon
1, avenue Bourgelat
69280 Marcy-L’Étoile
La paralysie laryngée (PL) est une affection commune chez le chien, mais beaucoup plus rare chez le chat [7, 9]. Elle peut être unilatérale ou bilatérale, acquise ou congénitale [9]. Le larynx est innervé par le nerf laryngé récurrent, une branche du nerf vague, qui a pour fonction de stimuler la contraction du muscle crico-aryténoïdien dorsal lors de l’inspiration. Cela a pour conséquence une abduction du cartilage aryténoïde, permettant ainsi le passage de l’air. Le muscle crico-aryténoïdien dorsal est le seul muscle abducteur du larynx. Ainsi, lors de son dysfonctionnement, le plus souvent secondaire à une anomalie de son innervation par le nerf laryngé récurrent, l’abduction du cartilage aryténoïde ne se fait plus, réduisant ainsi fortement le passage de l’air par diminution de la surface de la rima glottidis et générant alors les signes cliniques associés à la pl tels que le stridor, le changement de voix, les difficultés respiratoires et la fatigabilité [9].
La PL est fréquemment une manifestation d’une polyneuropathie généralisée, par dysfonctionnement de l’innervation provenant du nerf laryngé récurrent [3, 11]. La cause de la polyneuropathie peut être une dysendocrinie (hypothyroïdie), une maladie infectieuse ou auto-immune. Le plus souvent, la polyneuropathie est qualifiée d’idiopathique [3, 9]. Des cas de PL secondaire à un traumatisme direct du nerf laryngé récurrent (morsure, chirurgie de ligature du canal artériel) ou une intoxication aux organophosphates ont également été décrits [9].
Une évaluation hémato-biochimique complète doit être réalisée, comprenant un profil thyroïdien (T4et TSH ou thyroid-stimulating hormone). Les radiographies thoraciques permettent de diagnostiquer une bronchopneumonie par fausse déglutition sous-jacente ou encore un mégaœsophage, présent dans 10 à 15 % des cas, notamment lors d’une polyneuropathie. Le diagnostic de PL est confirmé par échographie laryngée ou par laryngoscopie sous tranquillisation légère [9]. Dans le cas d’une polyneuropathie, il est fréquent d’observer, chez ces chiens, une anomalie de la démarche et de la motilité œsophagienne [2, 13]. La réalisation d’un électromyogramme (EMG) est alors indiquée. L’anomalie de motilité œsophagienne est probablement associée à une dégénérescence du nerf laryngé pararécurrent et confirme l’hypothèse de polyneuropathie [1, 13].
Le traitement chirurgical est le traitement de choix de la PL [4]. Son objectif est d’augmenter l’aire de la rima glottidis pour faciliter le passage de l’air. Plusieurs traitements chirurgicaux sont décrits : latéralisation du cartilage aryténoïde unilatérale ou bilatérale, ventriculocordectomie, aryténoïdectomie partielle, laryngoplastie en créneau et trachéostomie permanente [2, 5, 9, 10]. Parmi ces techniques, la latéralisation unilatérale de l’aryténoïde est la plus communément utilisée [6, 8, 9]. Elle implique la mise en place d’une prothèse entre le cartilage cricoïde et le processus musculaire du cartilage aryténoïde en lieu et place du muscle crico-aryténoïdien dorsal. Cette prothèse a pour effet de mettre l’aryténoïde en abduction permanente. La tension appliquée à la prothèse doit être suffisante pour ouvrir la rima glottidis, mais pas trop marquée afin de conserver une couverture suffisante de cette dernière par le cartilage épiglotte pour limiter les risques de fausse déglutition [4]. En pratique, le chien est intubé avec une sonde de gros calibre et la prothèse est apposée sans qu’elle ne soit encore plus tendue. Certains auteurs décrivent également une prothèse entre les cartilages aryténoïde et thyroïde avec des résultats cliniques similaires [5].
La pneumonie par fausse déglutition est la complication postopératoire la plus fréquente après une latéralisation de l’aryténoïde. Elle est décrite dans environ 5 à 24 % des cas [6, 8, 12]. Cette complication est secondaire à l’ouverture de la rima glottidis, qui a pour conséquence bénéfique une augmentation du passage de l’air, mais qui engendre également un moins bon recouvrement des voies aériennes par l’épiglotte, notamment lors de la déglutition. Les anomalies œsophagiennes semblent également en cause [1, 13]. Les autres complications rapportées sont la rupture de la suture, une fracture du cartilage aryténoïde ou une modification de la voix [9]. Une persistance de la toux et de quelques difficultés respiratoires est fréquente (33 % des chiens) [9]. Les facteurs associés aux complications postopératoires sont principalement une pneumonie en phase préopératoire, infirmée par l’étude de Wilson, un mégaœsophage en phase postopératoire et la trachéostomie temporaire [8]. La présence de signes de polyneuropathie en sus de la PL est associée à un moins bon pronostic à long terme [3].
Le pronostic de la latéralisation de l’aryténoïde reste très bon puisque 90 % des chiens s’améliorent après l’intervention chirurgicale [6, 12]. Toutefois, les complications postopératoires sont fréquentes, y compris la bronchopneumonie par fausse déglutition. Cette complication est secondaire à la technique chirurgicale, mais également à la polyneuropathie généralisée qui affecte la fonction laryngée et œsophagienne.
Aucun.
OBJECTIF
Décrire le taux de pneumonies par fausse déglutition à long terme à la suite d’une latéralisation de l’aryténoïde unilatérale pour le traitement d’une paralysie laryngée chez le chien.
MÉTHODE
Étude rétrospective menée sur 25 ans. Les chiens atteints de paralysie laryngée, dont le diagnostic a été confirmé par laryngoscopie, et qui ont subi une latéralisation de l’aryténoïde unilatérale à gauche ont été inclus dans l’étude. Un profil thyroïdien a été réalisé chez la majorité d’entre eux. Les radiographies thoraciques ont été examinées pour la présence sur les clichés de signes de pneumonie par fausse déglutition ou de mégaœsophage. Toutes les complications postopératoires ont été relevées.
RÉSULTATS
• 46,3 % de labradors.
• 6 chiens ont subi une seconde intervention à droite en raison d’un échec de la première chirurgie.
• 47,5 % des chiens sont hypothyroïdiens.
• 28 % des chiens diagnostiqués avec une polyneuropathie, sans impact sur le pronostic.
• Complications postopératoires (29,4 %) : pneumonie par fausse déglutition (18,4 %), échec de la chirurgie (5,9 %), stridor persistant (13 %), complication de plaie (7,6 %).
• Taux de pneumonie par fausse déglutition à 1, 2, 3 ou 4 ans : 18,6 %, 27,2 %, 31,8 %, 31,8 %.
• Survie respective à 1, 2, 3 ou 4 ans : 93,6 %, 89,1 %, 84,4 %, 75,2 %.
• Survie des chiens atteints de pneumonie à 1, 2, 3 ou 4 ans : 83,1 %, 63,7 %, 51,5 %, 25,8 %.
• La pneumonie par fausse déglutition est négativement associée à la survie.
• Facteurs de risque de la pneumonie par fausse déglutition en phase postopératoire : mégaœsophage postopératoire et administration d’opioïdes.
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