Résultats à long terme associés au traitement chirurgical des tumeurs épithéliales thymiques - Le Point Vétérinaire expert canin n° 358 du 01/09/2015
Le Point Vétérinaire expert canin n° 358 du 01/09/2015

CANCÉROLOGIE

Analyse d’article

Auteur(s) : Quentin Cabon

Fonctions : Service de chirurgie
VetAgro Sup
Campus vétérinaire de Lyon
1, avenue Bourgelat
69280 Marcy-L’Étoile

Le thymome est une tumeur qui prend son origine à partir de l’épithélium thymique. Il a été décrit chez le chien, le chat et le furet [6]. Bien que relativement rare, le thymome fait partie des tumeurs du médiastin cranial les plus fréquentes. Le diagnostic différentiel d’une masse dans le médiastin cranial comprend, entre autres, le lymphome, l’ostéosarcome, les sarcomes des tissus mous, le mésothéliome, le chémodectome, les tumeurs thyroïdiennes ectopiques ou encore les métastases de carcinome, ainsi que les kystes, granulomes et abcès [5, 6].

LES DIFFÉRENTS TYPES DE THYMOME

Malgré l’appellation générale de “thymome”, les tumeurs de l’épithélium thymique (TET) peuvent varier en matière de caractéristiques histologiques, d’invasion et de potentiel d’excision chirurgicale.

Chez l’homme, la classification de Masaoka-Koga fait intervenir le degré d’invasion observée en chirurgie (péricarde, poumons, vaisseaux), ainsi que le degré d’invasion microscopique [3, 5]. Cette classification par stades est significativement corrélée au taux de survie chez l’homme [3]. Cela semble également vrai chez le chien [6].

L’appellation de TET est actuellement préférée chez l’homme. En effet, ce groupe de tumeurs, historiquement appelé “thymome”, comprend à la fois de véritables thymomes, mais également des thymomes atypiques et des carcinomes thymiques. Dans une récente étude chez le chien, 31 cas de thymome ont été réévalués à l’aide de l’immunohistochimie et 18 ont été confirmés en tant que thymomes, tandis que 7 ont été classés comme des thymomes atypiques et 6 comme des carcinomes thymiques [1].

Les thymomes peuvent également être classés selon leur degré d’invasion locale visible au scanner, les thymomes localement invasifs étant considérés comme malins et les thymomes non invasifs comme bénins [6]. Toutefois, cette distinction reste subjective.

LA PRÉSENTATION CLINIQUE ET LES SYNDROMES PARANÉOPLASIQUES

Les signes cliniques sont le plus souvent non spécifiques, tels que la dyspnée, la toux, la faiblesse, la léthargie, la perte d’appétit, l’amaigrissement ou les régurgitations. Ils peuvent également être secondaires au syndrome paranéoplasique associé [5, 6]. Certains chiens peuvent développer un syndrome de la veine cave craniale, se traduisant par un œdème de la tête et de la région cervicale [6]. Chez le chien, le thymome peut être non clinique pendant une longue période et le diagnostic est parfois fortuit [4].

Les syndromes paranéoplasiques les plus fréquemment associés aux TET chez le chien et le chat sont la myasthénie grave (17 à 43 %) et l’hypercalcémie (21 à 34 %). Les autres syndromes paranéoplasiques tels que les polymyosites, les myocardites, les arythmies, les dermatites exfoliantes chez le chat ou les maladies à méditation immune sont moins fréquents [5, 6, 8]. Les syndromes paranéoplasiques peuvent se résoudre avec l’exérèse chirurgicale du thymome [5]. Lors de l’investigation initiale, il est important de différencier une TET d’un lymphome, les modalités de traitement étant radicalement différentes.

LE PRONOSTIC À LONG TERME DU TRAITEMENT CHIRURGICAL

L’exérèse chirurgicale reste le traitement de choix en cas de tumeur thymique. Elle peut être réalisée par sternotomie médiane, thoracotomie intercostale ou par thoracoscopie vidéo-assistée [4]. L’apport des nouveaux systèmes d’hémostase, tels que la fusion tissulaire (Ligasure®) facilite l’exérèse chirurgicale des tumeurs médiastinales. L’invasion des gros vaisseaux semble associée à un risque plus important de mortalité dans certaines études [7].

Dans l’étude de Robat et coll., la survie médiane des chiens opérés est de 635 jours, contre 76 jours pour les chiens non opérés [6]. Dans cette étude, la présence d’une autre tumeur au moment du diagnostic, l’absence de traitement chirurgical et le grade histologique sont associés à une survie plus courte. En revanche, une myasthénie grave, une hypercalcémie ou un mégaœsophage ne le sont pas [6]. Dans une autre étude, la survie médiane chez le chat est de 1 825 jours, avec un taux de survie à 1 an de 89 % et de 74 % à 3 ans, et la survie médiane chez le chien est de 790 jours, avec un taux de survie à 1 an de 64 % et de 42 % à 3 ans [9].

Les récidives sont possibles, mais l’exérèse chirurgicale s’accompagne d’un bon pronostic, tout comme lors de première occurrence de la maladie [5, 6, 9].

LES TRAITEMENTS ADJUVANTS LORS DE THYMOME

La chimiothérapie et la radiothérapie ont été utilisées dans le contrôle local de la tumeur, ainsi que dans la gestion des récidives locales et des métastases (peu fréquentes), mais peu de données sont disponibles [6]. La plus large étude portant sur la radiothérapie, comme modalité de traitement (5 chiens) ou comme agent thérapeutique adjuvant, fait état de 17 chiens et 7 chats [8]. Dans cette étude, le taux de réponse global est de 75 %, avec une réponse complète obtenue chez 4 individus. La médiane de survie est de 248 jours chez le chien et de 720 jours chez le chat [8].

Conclusion

Le traitement des TET comprend une exérèse chirurgicale et les traitements adjuvants ne peuvent pas être recommandés actuellement. Le pronostic associé à l’exérèse chirurgicale est bon, avec une survie de plusieurs années. Selon les études, plusieurs facteurs ont été associés à une survie plus courte.

Références

  • 1. Burgess KE, DeRegis CJ, Brown FS et coll. Histologic and immunohistochemical characterization of thymic epithelial tumours in the dog. Vet. Comp. Oncol. 2013;doi: 10.1111/ vco.12072.
  • 2. Day MJ. Review of thymic pathology in 30 cats and 36 dogs. J. Small Anim. Pract. 1997;38:393-403.
  • 3. Detterbeck FC, Nicholson AG, Kondo K et coll. The Masaoka-Koga stage classification for thymic malignancies: clarification and definition of terms. J. Thorac. Oncol. 2011;6:S1710-S1716.
  • 4. Mayhew PD, Friedberg JS. Video assisted thoracoscopic resection of non invasive thymomas using one lung ventilation in two dogs. Vet. Surg. 2008;37:756-762.
  • 5. Radlinsky MG. Thoracic cavity. In: Tobias KM, Johnson SA eds. Veterinary Surgery Small Animals. Elsevier Saunders, St Louis. 2012;1787-1812.
  • 6. Robat CS, Cesario L, Gaeta R et coll. Clinical features, treatment options, and outcome in dogs with thymoma: 116 cases (1999-2010). J. Am. Vet. Med. Assoc. 2013;243:1448-1454.
  • 7. Scherrer W, Kyles A, Samii V et coll. Computed tomographic assessment of vascular invasion and resectability of mediastinal masses in dogs and a cat. N. Z. Vet. J. 2008;56(6):330-333.
  • 8. Smith AN, Wrigth JC, Brawner WR et coll. Radiation therapy in the treatment of canine and feline thymomas: a retrospective study (1985-1999). J. Am. Anim. Hosp. Assoc. 2001;37 :489-496.
  • 9. Zitz JC, Birchard SJ, Couto GC et coll. Results of excision of thymoma in cats and dogs: 20 cases (1984-2005). J. Am. Vet. Med. Assoc. 2008;232(8):1186-1192.

Conflit d’intérêts

Aucun.

RÉSUMÉ

OBJECTIF

Décrire la mortalité péri-opératoire, la survie à long terme et les facteurs pronostiques après l’exérèse chirurgicale d’une tumeur épithéliale thymique (TET) chez le chien et le chat.

MÉTHODE

Étude rétrospective multi-institutionnelle menée sur 11 ans [6]. Les chiens et les chats ayant subi l’exérèse chirurgicale d’une TET, et pour lesquels un suivi à long terme a pu être mené, ont été inclus. Les facteurs étudiés ont notamment été la présence d’un syndrome paranéoplasique, de métastases, les résultats de l’imagerie préopératoire, le caractère infiltrant de la tumeur, les caractères histologiques de la tumeur et de sa capsule, ainsi que la mortalité péri-opératoire et les récidives.

RÉSULTATS

• 80 chiens et 32 chats inclus.

• 95 thymomes, 7 thymomes atypiques, 10 carcinomes thymiques.

• Âge : 9,9 ans chez le chien, 9,8 ans chez le chat.

• Sternotomie chez 72 chiens et 28 chats, thoracotomie intercostale chez 4 chiens et 4 chats, thoracoscopie chez 4 chiens.

• Lobectomie partielle ou complète chez 21 chiens et 4 chats, péricardectomie partielle chez 6 chiens et 6 chats.

• Mortalité péri-opératoire : 20 % chiez le chien, 22 % chez le chat.

• Médiane de survie : 1,69 an chez le chien, 3,71 ans chez le chat.

• Taux de survie à 1 an et à 4 ans : 55 % et 44 % chez le chien, 70 % et 47 % chez le chat.

• 42 % des chiens et 20 % des chats sortis de l’hôpital sont finalement morts des conséquences de la TET.

• La présence d’un syndrome paranéoplasique ou des marges histologiques incomplètes sont des facteurs pronostiques négatifs pour la survie chez le chien.

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